TITRE PREMIER GÉNÉRALITÉS
TITRE PREMIER
GÉNÉRALITÉS
1Les agréments fiscaux sont des procédures administratives dont l'objet est de subordonner l'application d'allégements prévus et autorisés par la loi à des décisions individuelles.
Les procédures d'agrément fiscal sont l'un des moyens de concilier le caractère nécessairement général des dispositions législatives en matière fiscale et le souci d'en faire une application tenant compte de la diversité et de la complexité des situations particulières.
Ces procédures ont été introduites dans la législation française avec la mise en oeuvre des premiers plans de modernisation et d'équipement. Dès 1948, des procédures tendant à encourager l'expansion inteme et externe des entreprises furent mises en place mais c'est surtout à partir de 1954 que la technique de l'agrément connut un très rapide développement avec l'institution des aides fiscales en faveur de l'aménagement du territoire. On dénombrait, au 31 décembre 1992, trente quatre procédures d'agrément.
La procédure d'agrément n'a jamais pour but de dispenser un contribuable des impôts dont il est légalement redevable. Elle ne peut également restreindre le champ d'application légal d'un avantage fiscal, mais elle peut en réserver le bénéfice aux seules opérations que le législateur a entendu encourager. Le Conseil Constitutionnel a jugé que : « l'exigence d'un agrément n'a pas pour conséquence de conférer à l'autorité ministérielle le pouvoir, qui n'appartient qu'à la loi en vertu de l'article 34 de la Constitution, de déterminer le champ d'application d'un avantage fiscal (...) l'exigence d'un agrément confère seulement au ministre le pouvoir de s'assurer, conformément à l'objectif poursuivi par le législateur, que l'opération satisfait aux conditions posées par la loi (...) » (Décision n° 87-237 DC du 30 décembre 1987).
A. LE DOMAINE DES AGRÉMENTS FISCAUX
2Actuellement, les agréments fiscaux constituent un ensemble de dispositions à l'origine souvent disparates que l'on peut toutefois classer en fonction du but poursuivi par les pouvoirs publics.
De ce point de vue les agréments fiscaux peuvent être répartis en quatre catégories :
- les agréments financiers ;
- les agréments géographiques ;
- les agréments en faveur de la conservation du patrimoine artistique national ;
- les agréments en faveur de la création, la transmission ou la reprise d'entreprises.
Certains agréments spécifiques ne peuvent, toutefois, être rattachés à aucune catégorie.
I. Les agréments financiers
1. Régimes fiscaux des groupes de sociétés.
a. Bénéfice mondial ou consolidé (CGI, art. 209 quinquies ; annexe II, articles 113 à 134 A ; cf. D 211 ).
3Le régime du bénéfice mondial, qui constitue la règle de droit commun de la plupart des pays industrialisés, consiste à soumettre à l'impôt sur les sociétés l'ensemble des résultats des exploitations directes, qu'elles soient situées en France ou à l'étranger, sous déduction des prélèvements étrangers tenant lieu d'impôt sur les bénéfices.
Le régime français de droit commun ne tient compte que des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions.
Par dérogation, les sociétés françaises agréées à cet effet par le ministre de l'économie et des finances peuvent retenir l'ensemble de leurs exploitations directes (bénéfice mondial) ou indirectes (bénéfice consolidé), qu'elles soient situées en France ou à l'étranger, pour l'assiette des impôts établis sur la réalisation et la distribution de leurs bénéfices.
Toutefois, les crédits d'impôt correspondant aux prélèvements étrangers étant plafonnés en fonction du taux de l'impôt français, l'allégement fiscal réel que peut engendrer l'application, sur agrément, du régime du bénéfice mondial ou consolidé, est limité à l'économie d'impôt résultant de l'imputation éventuelle des pertes d'exploitation étrangères. Mais cet avantage peut lui-même être compensé par la reprise d'un supplément d'impôt sur les profits réalisés dans les pays à bas niveau d'imposition.
Accessoirement, l'intérêt du régime du bénéfice mondial peut être accentué par l'atténuation du précompte mobilier qui résulte de l'élargissement de l'assiette fiscale soumise à l'impôt français sur les sociétés.
Les modalités d'application sont définies par le décret n° 91-1265 du 16 décembre 1991, complété par un arrêté du 7 février 1992.
b. Intégration fiscale des filiales détenues à plus de 95 % (CGI, art. 209 sexies ; cf. D 212 ).
4Cette mesure qui était destinée à faciliter les concentrations d'entreprises ou la restructuration de groupes préexistants permettait de compenser en matière d'impôt sur les sociétés les profits et pertes accusés par les filiales à 95 % d'un même groupe. Ces dispositions ont été abrogées pour l'imposition des résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 1988 ; toutefois, les agréments antérieurement délivrés demeurent valables jusqu'à leur terme.
Un régime de droit commun a été créé par la loi n° 87-1060 du 30 décembre 1987, il s'applique à l'imposition des résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 1988 (CGI, art. 223 A à 223 S).
2. Rénovation de la structure des sociétés.
a. Les opérations d'apport partiel d'actif et de scission (CGI, art. 210 B ; cf. D 221 ).
5L'agrément consiste à permettre l'application à ces opérations du régime fiscal des fusions, défini à l'article 210 A du CGI. Ce régime étant fiscalement neutre, l'agrément a pour objet d'éviter que des opérations de vente ou de partage soient abusivement présentées sous la forme de fusion partielle.
b. Les reports de déficits en cas de fusions ou opérations assimilées (CGI, art. 209-II ; cf. D 222 ).
6Cette mesure consiste principalement à autoriser la société absorbante ou la société bénéficiaire des apports à imputer sur ses propres résultats imposables les déficits encore reportables de la société absorbée ou apporteuse. Elle a un caractère incitatif marqué en faveur de la restructuration des entreprises en évitant la perte d'un droit que seule l'entreprise absorbée ou apporteuse pouvait exercer.
c. Report indéfini des amortissements réputés différés (CGI, art. 209-III).
7Une entreprise perd la faculté de report indéfini des amortissements régulièrement comptabilisés mais réputés différés en période déficitaire, lorsqu'il y a cession ou reprise d'activités à ou en provenance d'une autre entreprise. Ces dispositions sont applicables lorsque les activités transférées représentent plus 5 %, soit du montant brut des éléments de l'actif immobilisé, soit du chiffre d'affaires, soit de l'effectif des salariés (article 209-I, dernier alinéa du CGI). Elles s'appliquent séparément à l'entreprise qui transfère tout ou partie de ses activités et à l'entreprise qui les reprend sans que la situation de l'une au regard de l'appréciation de chacun des critères influence celle de l'autre.
Il peut y être dérogé, sur agrément préalable du ministre de l'économie et des finances, si compte tenu de l'origine des déficits, l'avantage fiscal est justifié du point de vue économique et social.
d. Les liquidations de sociétés inactives (CGI, art. 239 bis B ; cf. D 224 ).
8Ce régime fiscal est destiné à faciliter la mobilité des biens détenus par des sociétés inactives. L'incitation fiscale mise en oeuvre pour réaliser cet objet consiste à appliquer le régime du long terme à toutes les plus-values dégagées à l'occasion de la liquidation des actifs sociaux et à percevoir une taxe forfaitaire de 15 % sur le boni de liquidation au lieu et place de l'impôt progressif sur le revenu.
e. Les transferts de créances sur le Trésor (CGI, art. 220 quinquies II).
9Les créances nées du report en arrière des déficits défini à l'article 220 quinquies du CGI peuvent être transférées, sur agrément, en cas de fusion ou d'opération assimilée, de la société absorbée ou apporteuse, à la société absorbante ou bénéficiaire de l'apport.
f. Le report d'imposition des plus-values. (CGI, art. 160-I-ter).
10L'imposition des plus-values résultant de l'échange de droits sociaux effectué lors de certaines opérations pouvait être reportée au moment de la cession ou du rachat des droits sociaux reçus à cette occasion. Cette faculté était subordonnée à un agrément du ministre chargé du budget.
Ces dispositions ont cessé de s'appliquer aux plus-values réalisées à compter du 1er janvier 1991.
g. Transformations de SICA en sociétés coopératives agricoles. (CGI, art. 239 bis C).
11Certaines sociétés d'intérêt collectif agricole ont pu, sur agrément, du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1992, se transformer en coopératives agricoles sans imposition des plus-values latentes.
II. Les agréments géographiques
Les entreprises qui réalisent des opérations entrant dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire peuvent bénéficier de quatre types d'avantages fiscaux. En outre, lorsque ces opérations sont réalisées dans les départements d'outre-mer ou de la Corse, des mesures complémentaires peuvent être appliquées.
1. Les mesures fiscales en faveur de l'aménagement du territoire.
Ces aides sont cumulables et revêtent les formes suivantes :
a - L'exonération temporaire de taxe professionnelle prévue à l'article 1465 du CGI.
12Elle est appliquée aux opérations de création, d'extension, de décentralisation de services d'études, de direction, d'ingénierie ou d'informatique ; aux reconversions d'établissements industriels ou aux reprises d'activités industrielles en difficulté, qui répondent à des conditions de localisation et d'emploi définies par l'arrêté du 8 août 1990. L'application de cette mesure requiert une délibération de portée générale des collectivités locales intéressées et un agrément préalable.
b - La réduction du droit de mutation (CGI, art. 697 et 721 ; cf. D 33 ).
13Elle permet de ramener de 15,40 % à 3,60 % le droit départemental d'enregistrement sur les acquisitions d'immeubles et de 11,80 % à 2 % le droit de mutation au profit de rÉtat sur les acquisitions de fonds de commerce. Les acquisitions doivent être effectuées par les entreprises exploitantes dans le cadre d'opérations ouvrant droit à l'exonération temporaire de taxe professionnelle.
2. Les mesures spécifiques en faveur du développement des départements d'outre-mer.
Trois mesures sont prévues à ce titre :
a. La défiscalisation des investissements réalisés dans les DOM-TOM (CGI, art. 238 bis HA ; cf. D 46 ).
14Les entreprises peuvent déduire de leurs résultats, sous certaines conditions, les investissements productifs qu'elles réalisent dans les territoires et les départements d'outre-mer. Les investissements effectués dans certains secteurs doivent avoir reçu l'agrément préalable du ministre de l'économie, des finances et du budget.
Les particuliers qui effectuent ces investissements peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt (CGI, art. 199 undecies).
b. L'exonération d'impôt sur les sociétés pour les créations d'activités nouvelles (CGI, art. 208 quater ; cf. D 44 ).
15L'exonération est accordée sur agrément après avis de commissions locale et centrale. Sa durée est de dix ans.
c. Le régime fiscal de longue durée.
16Il permet de stabiliser, pendant vingt ans, le régime fiscal applicable aux entreprises minières créant des activités dans les DOM ou aux entreprises industrielles de certains de ces départements qui y réalisent des investissements d'un montant au moins égal à 20 millions de francs (CGI, art. 1655 bis ; cf. D 45 ).
2. Les mesures spécifiques en faveur du développement des départements de la Corse.
17Les sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés qui se créent ou qui créent une activité nouvelle en Corse peuvent être exonérées d'impôt sur les bénéfices pendant une durée de huit ans. L'exonération est accordée sur agrément du ministre de l'économie, des finances et du budget après avis d'une commission locale. L'activité doit être créée dans des secteurs déterminés : industrie, bâtiment, agriculture et artisanat. (CGI, art. 208 quater A ; cf. D 7).