SECTION 3 RÉGIME DES DÉDUCTIONS FORFAITAIRES SUPPLÉMENTAIRES
SECTION 3
Régime des déductions forfaitaires supplémentaires 1
Après un exposé des dispositions communes à l'ensemble des déductions supplémentaires, il sera procédé à un examen de chacune des professions ouvrant droit à une telle déduction.
SOUS-SECTION 1
Dispositions communes
A. PRINCIPES
1En application de l'article 83-3° du CGI, une déduction supplémentaire peut être accordée aux salariés qui exercent une profession comportant des frais dont le montant est notoirement supérieur à 10 % du montant brut de leur rémunération, diminué des retenues opérées au titre des cotisations à caractère social (cf. 5 F 23 ) et de certains intérêts d'emprunts (cf. 5 F 24 ).
2Les professions concernées ainsi que le taux des déductions supplémentaires sont fixés par arrêté (CGI, art. 5 de l'annexe IV).
3D'une manière générale, les déductions supplémentaires obéissent à des règles identiques à celles applicables à la déduction forfaitaire de 10 % :
- il est interdit de cumuler des déductions forfaitaires (normale et supplémentaire) avec des frais réels, que les revenus du contribuable proviennent de l'exercice d'une même activité professionnelle (CAA LYON, 6 novembre 1991, n° 541) ou de plusieurs activités (CE, arrêts du 30 septembre 1981, n° 16601, et du 29 juillet 1983, n° 22381) ;
- le montant total de la déduction de 10 % et d'une déduction supplémentaire ne peut être inférieur au montant minimal précisé ci-avant 5 F 252, n°s 7 et suivants.
Les déductions supplémentaires font, en outre, l'objet de dispositions particulières :
4- le montant des déductions forfaitaires supplémentaires est plafonné dans les conditions fixées à l'article 83-3° du CGI (cf. ci-dessous n° 21 ).
5- lorsque le salarié bénéficie d'une déduction forfaitaire supplémentaire, les allocations pour frais d'emploi qu'il perçoit sont imposables et doivent donc être intégrées dans le revenu brut imposable conformément aux dispositions de l'article 83 -3° 3ème alinéa, du CGI. Échappent toutefois à cette intégration :
. les remboursements de dépenses engagées par le salarié pour le compte de l'employeur (CE, arrêts du 6 octobre 1982, n° 15042, du 6 juin 1984, n° 15042) ;
. diverses allocations mentionnées ci-avant 5 F 1151, n°s 33 et suiv.
À titre d'exemple, sont notamment imposables :
- les indemnités de déplacement et d'hébergement payées au personnel navigant de l'aviation marchande par une compagnie aérienne (CE, arrêt du 16 juin 1986, n° 71063) ;
- les frais de voiture, de repas (CE, arrêt du 6 juin 1984, n° 15042) et de séjour à l'étranger (CE, arrêt du 28 février 1983, n° 35346) d'un représentant ;
- les frais de déplacement, de visite de la clientèle, de démonstration et d'essais de voitures d'un vendeur de véhicules automobiles (CE, arrêt du 10 juin 1983, n°26964). Dès lors, le fait pour un vendeur de voitures de disposer des véhicules nécessaires à l'exercice de sa profession constitue un avantage équivalent à une allocation spéciale, qui doit être retenu pour le calcul de son salaire imposable (CE, arrêt du 9 novembre 1987, n° 45935) [rappr. cas particulier ci-après].
Cas particulier : avantages en nature.
Les allocations spéciales pour frais résultant de la prise en charge patronale de dépenses professionnelles non courantes peuvent être attribuées en nature.
Ces allocations en nature consistent notamment à concéder gratuitement au salarié un bien dont l'employeur est locataire ou propriétaire ou à lui fournir certaines prestations de services comme l'usage d'un véhicule de fonction ou la réparation d'un véhicule personnel (par exemple, CE, arrêt du 9 novembre 1987, n° 45935 et arrêt du 6 janvier 1993, n° 77525).
Ces allocations en nature doivent être intégrées dans le revenu catégoriel imposable car les frais correspondants sont couverts par la déduction supplémentaire.
À défaut de déclaration par le salarié ou d'éléments de calcul suffisamment précis, l'administration peut évaluer l'allocation en nature par référence notamment :
- aux relevés détaillés de frais généraux souscrits par l'employeur (CE, arrêt du 10 juin 1983, n° 26964) ;
- au barème kilométrique des dépenses automobiles, publié chaque année au BOI, à partir d'un kilométrage annuel indiqué par l'employeur en réponse à une demande précise du service (CE, arrêt du 18 juillet 1990, n° 63500, et CAA LYON, 26 juin 1990, n° 629) ;
- aux charges d'amortissement (mensualités versées pour un véhicule en crédit-bail, par exemple), d'assurance, d'entretien et de carburant du véhicule (CE, arrêt du 13 mai 1991, n° 68969).
Les modalités détaillées d'évaluation des avantages en nature sont exposées ci-avant, 5 F 1137 et 5 F 223 .
6Compte tenu de son objet, l'octroi d'une déduction supplémentaire ne doit pas cependant avoir pour effet de placer les salariés dans une situation moins favorable que celle qui serait la leur s'ils ne pratiquaient que la déduction de 10 %.
Il est donc permis aux intéressés de renoncer au bénéfice de la déduction supplémentaire de manière à ne pas avoir à incorporer dans leur revenu brut les indemnités pour frais d'emploi susceptibles d'être exonérées en application de l'article 81-1° du CGI (voir exemple ci-dessous au n° 23 ).
Cette option est absolument indépendante de celle qui est exercée par l'employeur en matière de taxe sur les salaires (cf. 5 L 141, n°s 9 et suiv. ).
Elle peut être exercée dans la déclaration annuelle (dans ce cas, l'option résulte des indications portées par le contribuable dans sa déclaration) ou par voie de réclamation adressée au service des impôts, dans les délais habituels.
Toutefois, s'il apparaît que le contribuable a opté en méconnaissance de ses intérêts, cette erreur peut être réparée d'office par le service.
B. BÉNÉFICIAIRES DES DÉDUCTIONS FORFAITAIRES SUPPLÉMENTAIRES
Pour pouvoir bénéficier d'une déduction supplémentaire, le contribuable doit exercer effectivement l'une des activités limitativement énumérées et pouvoir en justifier.
Si ces conditions sont remplies, la déduction supplémentaire peut être revendiquée dans la déclaration de revenu global, au cours d'une procédure de redressement ou pendant la procédure contentieuse (CE, arrêt du 28 décembre 1990, n° 70688).
I. Les professions bénéficiaires sont limitativement énumérées
7La liste des professions ouvrant droit à une déduction forfaitaire supplémentaire est donnée par arrêtés ministériels codifiés aux articles 5 et 5 A de l'annexe IV au CGI (cf. annexe I). Elle a été complétée par diverses décisions ministérielles n'ayant pas revêtu la forme d'arrêtés, mais qui peuvent être invoquées dans les conditions prévues à l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales (voir annexe II à la présente sous-section).
8Cette liste est strictement limitative (CE. arrêts du 16 novembre 1983, n°s 32980 et 44738, et du 20 mars 1985, n°44603)
Une déduction supplémentaire ne peut donc être accordée qu'aux salariés dont l'activité effective relève de l'une des professions énumérées par l'article 5 de l'annexe IV au CGI, quelle que soit d'ailleurs la dénomination donnée à cette activité dans les relations entre le contribuable et son employeur (CE, arrêts du 20 février 1985, req. n° 42769 et du 10 avril 1991, req. n° 75696 ; CAA BORDEAUX des 25 juin 1991 et 16 juillet 1991, n°s 81 et 1963 ; CAA PARIS du 18 juin 1991, n° 1345).
Le service n'est pas habilité à accorder une déduction supplémentaire, par voie d'analogie ou d'assimilation, à des personnes exerçant une profession voisine mais différente de celle mentionnée par le texte réglementaire.
Ainsi, aucune déduction supplémentaire ne peut être accordée à un salarié qui exerce une profession étrangère ou même similaire à celles figurant sur la liste complétée par les décisions ministérielles susvisées, même s'il supporte des frais professionnels d'un montant notoirement supérieur à celui de la déduction normale (CE, arrêts du 27 mars 1981, n° 15097, et du 20 mars 1985, n°44603).
Les positions prises par d'autres administrations sur la situation du salarié ne peuvent être retenues (CAA BORDEAUX, 19 novembre 1991, n° 1260).
II. L'activité doit être exercée effectivement et être justifiée
1. Exercice effectif de l'activité.
9Le bénéfice de la déduction supplémentaire est lié à l'exercice effectif de la profession qui y donne droit.
La jurisprudence examine dans chaque cas d'espèce les conditions réelles d'exercice de la profession sans s'arrêter à la qualification initiale ou au titre dont se prévaut le salarié.
Ainsi, ne sont pas déterminants :
- la détention d'une carte d'identité professionnelle (pour la carte de V.R.P. : CE, arrêt du 20 février 1985, n° 42769, et CAA PARIS, 18 juin 1991, n° 1345 ; pour la carte de journaliste : CE, arrêt du 28 mai 1986, n° 49285 et 24 juin 1991, n° 89238, CAA BORDEAUX, 17 octobre 1989, n° 179) ;
- l'adhésion au régime collectif de protection sociale de la profession (Caisse de prévoyance ou de retraite des représentants : CE, arrêts du 25 février 1983, n° 34592, et du 18 décembre 1991, n° 72345 ; régime de congés payés et de retraite des journalistes : CAA BORDEAUX, 17 octobre 1989, n° 179 ; convention collective des inspecteurs des sociétés d'assurance : CAA BORDEAUX, 25 juin 1991, n° 81) ;
- le port d'un titre dans l'entreprise où le salarié exerce ses fonctions (CAA PARIS, 12 février 1991, n° 21) ;
- la dénomination donnée à l'activité dans les relations entre l'employeur et le contribuable (CE, arrêts du 20 février 1985, n° 42769, et du 10 avril 1991, n° 75696 ; CAA PARIS, 18 juin 1991, n° 1345 ; CAA BORDEAUX, 25 juin 1991, n° 81, et 16 juillet 1991, n° 1963) ;
- les stipulations du contrat de travail (CAA PARIS, 26 mars 1991, n° 1207) même s'il se réfère à une rémunération antérieure dans la profession invoquée (CAA BORDEAUX, 17 octobre 1989, n° 179) ;
- le contrat de collaboration liant le salarié à l'employeur (CE, arrêt du 24 juin 1991, n° 68130, et CAA BORDEAUX, 19 novembre 1991, n° 1260) ;
- le jugement du Conseil des Prud'hommes allouant une indemnité de clientèle à un contribuable licencié dont les fonctions au sein de l'entreprise présidée par sa femme n'ont fait l'objet d'aucun contrat (CE, arrêt du 25 février 1983, n° 34592) ;
- les attestations isolées de certains clients (CAA BORDEAUX, 27 décembre 1990, n° 674) ou insuffisamment circonstanciées de l'employeur (CE, arrêt du 28 mai 1986, n° 49259, du 16 décembre 1987, n° 59910 ; du 27 juin 1990, n° 66142 ; du 13 mai 1991, n° 75405 ; CAA PARIS, 12 février 1991, n° 21 et CAA BORDEAUX, 30 décembre 1991, n° 587).
En revanche, le fait que le contribuable ne soit pas titulaire d'une carte professionnelle ne suffit pas pour écarter la déduction supplémentaire s'il démontre, par un ensemble d'éléments, qu'il exerçait réellement l'activité ouvrant droit à la déduction (CE, arrêt du 30 novembre 1990, n° 73273, pour un contribuable dont les fonctions consistaient à visiter des clients importants et à recueillir leurs commandes, qui était rémunéré par un salaire fixe et des primes liées à ses résultats et dont l'activité de V.R.P. avait été reconnue par le Conseil de Prud'hommes ; CAA PARIS, 24 octobre 1991, n° 2716, pour un journaliste).
De même lorsque l'activité réelle est démontrée, le titre porté par le salarié dans l'entreprise n'a pas non plus d'importance (titre d'ingénieur commercial ou de chef du service des ventes mais fonctions effectives de V.R.P., cf. CE arrêts du 6 octobre 1982, n° 15042, et du 15 décembre 1986, n° 51653).
Par ailleurs, aucune déduction supplémentaire ne peut être pratiquée :
- par le chef du service radio navigant au service des essais en vol d'une société de construction aéronautique, dès lors que l'intéressé, bien qu'il soit titulaire des brevets nécessaires à l'accomplissement de missions en vol, n'exerce, en fait, que des fonctions purement administratives (CE, arrêt du 21 juillet 1970, req. n° 77440, RJ n° III, p. 176) ;
- par les salariés privés d'emploi et percevant des allocations d'assurance-chômage, par des salariés en disponibilité et continuant à percevoir une rémunération de leur employeur, ou par des fonctionnaires ou agents des assemblées parlementaires placés en congé spécial ;
- sur les indemnités ou allocations journalières imposables versées en cas de maladie, accident du travail ou maternité, par les organismes de sécurité sociale ou de la mutualité sociale agricole ou pour leur compte, ainsi que par des organismes d'assurance complémentaire en exécution de contrats conclus par l'entreprise.
2. Charge de la preuve et justifications.
10La charge de la preuve des conditions réelles d'exercice de l'activité incombe au contribuable.
Cette preuve résulte de circonstances d'espèce. Elle peut être apportée par divers moyens précis notamment :
- les stipulations du contrat de travail (CE, arrêts du 18 février 1983, n° 33342, et du 25 février 1983, n° 34592) ;
- les attestations circonstanciées et concordantes de plusieurs clients (CE, arrêt du 8 juillet 1987, n° 50340) ou la production des bons de commandes prouvant le démarchage, pour un V.R.P. (CE, arrêt du 10 décembre 1990, n° 59698).
Mais il n'y a pas lieu de s'arrêter aux stipulations des contrats ou aux attestations si elles ne suffisent pas à démontrer l'exercice effectif de l'activité (cf. ci-avant n° 9 ).
1 Le régime des déductions forfaitaires supplémentaires sera totalement supprimé à compter de l'imposition des revenus de l'année 2001, conformément aux dispositions de l'article 87 de la loi de finances pour 1997 (n° 96-1181 du 30.12.1996), modifié par l'article 10 de la loi de finances pour 1998 (n° 97-1269 du 30.12.1997).