B.O.I. N° 114 du 2 juillet 1982
2. Nature des majorations et pénalités bénéficiaires de l'extension du privilège
16.Les majorations et pénalités ne sont désormais privilégiées que dans la mesure où elles sont « d'assiette et de recouvrement » et où elles sont « appliquées » aux droits énumérés aux paragraphes précédents.
Ces diverses notions doivent donc être définies.
a. Majorations et pénalités.
17.Les « majorations et pénalités » sont définies par la documentation de base de la série 13 N. En cas d'hésitation ou de difficulté on se reportera donc à cette documentation 1 .
18.Quant aux « pénalités », il y a lieu de considérer, à titre de règle pratique, que sont concernées les sanctions pécuniaires autres que purement pénales 2 qui sont énumérées au chapitre II, « Pénalités », du Livre II, « Recouvrement de l'impôt » du Code général des Impôts 3 .
19.Sont donc exclues du bénéfice de tout privilège fiscal les sommes recouvrées par les comptables de la Direction générale des Impôts qui ne participent pas de l'impôt en principal et dont le principe d'application est prévu par un autre texte que le chapitre précité du C.G.I.
On citera à titre d'exemple :
- l'intérêt légal qui n'a pas le caractère d'une sanction et dont le champ d'application est rappelé dans l'instruction du 12 février 1982 ( cf. B.O.D.G.I. 12 A-2-82 ) ;
- les dommages et intérêts prononcés par les juridictions de l'ordre judiciaire au profit de la Direction générale des Impôts. Il en est ainsi des réparations civiles obtenues en cas de détournement d'objets saisis ( cf Doc. de base, série 12 C-2245 , n° 12 ) ;
- l'amende de 3.000 F au moins et de 2.500.000 F au plus en matière de délit d'escroquerie en droit pénal prévue à l'article 405 du Code pénal ( cf. Doc . de base, série 13 N-441 ).
b. Pénalités d'assiette et de recouvrement.
20.Les pénalités d'assiette et de recouvrement doivent nécessairement s'entendre de celles qui sanctionnent des contraventions aux dispositions qui régissent l'assiette et le recouvrement des droits.
21.Ne bénéficient donc pas de l'extension les pénalités qui sont destinées à faire assurer le respect d'obligations particulières. Il en est ainsi de l'amende fiscale égale à vingt fois le montant des intérêts payés, avec un minimum de 500 F, dont sont passibles les entreprises, établissements ou organismes qui reçoivent du public des fonds remboursables à vue ou à moins de trois ans et qui versent sur ces sommes des intérêts à des taux supérieurs aux taux officiels ( art. 1756 bis C.G.I. ).
22.A cet égard, le fait que la responsabilité de la liquidation des pénalités soit assumée par un service plutôt que par un autre ne constitue pas un critère suffisant pour distinguer les pénalités d'assiette des pénalités de recouvrement.
Ainsi, s'agissant des pénalités afférentes aux insuffisances de déclaration commises de bonne foi, il convient d'observer que l'indemnité de retard - qui a, dans ce cas, le caractère d'une pénalité d'assiette - court, en vertu des dispositions de l'article 1728 C.G.I., jusqu'au paiement intégral des droits. La circonstance que cette pénalité soit constituée, d'une part, par l'indemnité de retard arrêtée par le vérificateur à la date de la notification de redressement et, d'autre part, par l'indemnité de retard complémentaire liquidée par le service du recouvrement à défaut de paiement des droits rappelés dans le délai d'un mois à compter de l'émission de l'avis de mise en recouvrement n'a pas pour effet de changer la nature de cette pénalité qui demeure, dans son ensemble, une pénalité d'assiette.
c. Pénalités « appliquées ».
23.Les privilèges du Trésor dont bénéficient les impositions sont étendus aux pénalités d'assiette et de recouvrement appliquées aux droits en principal. Il en résulte que ces pénalités ne peuvent profiter des privilèges que dans la mesure où elles constituent l'accessoire de droits en principal qui ont été éludés ou impayés comme, par exemple :
* l'indemnité de retard aux taux de 3 % pour le premier mois et 1 % pour chacun des mois suivants, pour défaut de versement ou versement tardif des impôts qui doivent être acquittés sans émission préalable d'un titre exécutoire ( art. 1727 C.G.I. ) ;
* l'indemnité de retard aux taux de 3 % pour le premier mois et 1 % pour chacun des mois suivants, pour insuffisances, inexactitudes ou omissions ne mettant pas en causé la bonne foi du contribuable ( art. 1728 C.G.I. ) ;
* les amendes fiscales de 60 %, 100 % et 300 % pour insuffisances, inexactitudes ou omissions applicables lorsque la bonne foi du contribuable ne peut être admise ( art. 1731 C.G.I. ) ;
* l'amende égale au double des droits en cas de dissimulation définie à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ( art. 1732 C . G . I .) ;
* les majorations de l'intérêt de retard prévu à l'article 1728 C.G.I., de 25 % et de 100 % en cas de taxation d'office ( art. 1733-1 et 1 bis C . G . I ) ;
* l'amende de 300 % en cas d'évaluation d'office ( art. 1733 C.G.I. ).
24.Par contre, les pénalités ne sont pas privilégiées lorsqu'il n'y a pas de droits en jeu. Il en est ainsi notamment pour :
- l'amende fiscale de 25 F et 200 F pour défaut de production ou production tardive d'un document, visée à l'article 1725 C.G.I. ;
- l'amende de 25 F avec un minimum de 200 F pour omissions et inexactitudes relevées dans les documents produits, prévue par l'article 1726 du même code ;
- l'amende prévue en matière de retenue à la source par l'article 1765 bis C.G.I. ( cf. Doc . de base 13 N-2142 ).
25.De même, il n'y a pas lieu à privilège lorsque la pénalité ou la sanction est infligée de manière indépendante comme c'est le cas, en particulier, pour les sanctions pénales prévues aux articles 1741 et suivants du C.G.I. Dans ce cas, en effet, la « pénalité » ne peut être réputée avoir été « appliquée aux droits ». Ce principe vaut pour la plupart des sanctions pénales.
26.D'une manière générale, il suffira de se reporter au document de prise en charge pour déterminer si les pénalités qui ont été liquidées par le service d'assiette se rattachent à des droits en principal éludés. Quant à celles qui sont liquidées par le service du recouvrement, elles doivent nécessairement se rattacher à des droits en principal éludés ou impayés.
3. Frais accessoires.
27.Bien que tous les textes institutifs de privilège soient d'interprétation stricte, il a toujours été admis que les différents privilèges généraux du Trésor bénéficient aux frais de poursuite dans la mesure où ils sont liés de façon nécessaire et indissoluble au recouvrement de la créance et en forme un accessoire indivisible ( cf. Doc. de base, série 12 C-511 n° 5 , 5121 n ° 2 , 5131 n° 2 et 5141 n° 5 ).
La loi nouvelle n'a entraîné aucune modification à cet égard.
B. Incidence de l'extension aux pénalités des différents privilèges du Trésor
28.En énonçant que certains privilèges généraux du Trésor sont étendus aux pénalités dans les mêmes conditions et au même rang que les droits en principal, l'article 8-I de la troisième loi de finances rectificative pour 1981 s'inscrit parmi les lois particulières dont l'article 2098 du Code civil prévoit l'intervention et auxquelles il réserve le soin de déterminer, pour chaque cas d'imposition, le rang et l'étendue du privilège du Trésor ( cf . notamment Doc . de base, série 12 C-51 , n° 1 ).
29.Il s'ensuit que les règles d'assiette, d'application dans le temps, d'exercice et de conservation ainsi que celles relatives au rang des privilèges du Trésor sont applicables lorsque les créances garanties sont des pénalités.
Sur tous ces points il suffira donc, la plupart du temps, de se reporter aux paragraphes correspondants de la Documentation de base ( cf ., par exemple, pour l'assiette du privilège : Doc . de base , série 12 C-5112 n ° 6 à 17 , C–5121 n os6 à 10 , C-5131 n° 7 et C-5141 n° 6 ; pour l'application dans le temps : DB 12 C-5112 n os18 et 19 , C–5122 n os1 à 9 , C-5132 et C-5142 ).
30.Néanmoins, certaines précisions doivent être apportées en ce qui concerne spécialement les taxes sur le chiffre d'affaires et les taxes assimilées.
Elles se rapportent à l'application dans le temps du privilège, ainsi qu'à sa conservation par la publicité et son rang. En outre, les situations de règlement judiciaire et de liquidation des biens appellent un commentaire particulier.
1. Application dans le temps du privilège (cf. Doc. de base 12 C-5122, n os1 à 9 )
31.Il y a lieu de considérer que les dispositions du premier alinéa de l'article 1926 C.G.I. relatives au délai de péremption des taxes sur le chiffre d'affaires et des taxes assimilées et à son point de départ concernant l'impôt en principal sont également applicables aux pénalités.
32.Par conséquent, le privilège attaché aux pénalités de taxes sur le chiffre d'affaires et de taxes assimilées se périme également par deux ans avec un point de départ du délai de péremption qui est. en principe, le même que celui prévu pour les droits éludés ou impayés auxquels ces pénalités se rattachent ( cf. Doc. de base 12 C-5122 , n os1 à 9 ).
33.Les pénalités privilégiées, dont la quotité varie avec le temps (indemnité et intérêt de retard), constituent cependant une exception importante à cette règle.
34.Le point de départ du délai de péremption du privilège attaché à ces pénalités, liquidées par le comptable jusqu'au paiement effectif par le redevable, est normalement le premier jour de la période au titre de laquelle elles sont applicables en vertu des dispositions du Code général des Impôts.
En effet, ces pénalités ne sont pas toujours établies dans leur principe et leur montant au jour du point de départ du délai de péremption attaché à l'impôt en principal.
35.Cette exception concerne l'indemnité de retard et l'intérêt de retard qui sont les deux seules pénalités privilégiées dont la quotité varie avec le temps et qui sont décomptées, le cas échéant, en partie par les comptables.
a. Indemnité de retard prévue à l'article 1727 C.G.I.
• Application dans le cas d'une déclaration déposée sans paiement.
36.Pour une déclaration principale de taxes sur le chiffre d'affaires déposée à la recette dans les délais, mais sans paiement, le point de départ du délai de péremption du privilège est, dans tous les cas, le dépôt de la déclaration lorsqu'il s'agit des droits en principal ( art . 1926 C . C . I .).
37.Cette règle ne peut pas être transposée au privilège désormais attaché à l'indemnité de retard, dès lors qu'une somme devient exigible à ce titre chaque fois que se produit ou est réputé se produire 4 un nouveau retard d'un mois dans le paiement.
Force est, par conséquent, d'admettre qu'il y a autant de délais de péremption que de mois 5 de retard, chacun ayant pour point de départ le premier jour du mois considéré.
38.Cette situation confère, dès lors, une particulière importance à l'accomplissement régulier des formalités de publicité visées ci-après (cf . n° 44 et suiv .).
• Application à l'impôt concernant des opérations non déclarées.
39.Dans ce cas, le point de départ du délai de péremption du privilège se rapportant aux droits en principal et à l'indemnité de retard provisoirement arrêtée par le service d'assiette à la date de la notification de redressement est la notification de l'avis de mise en recouvrement (art . 1926 C.G.I .).
40.Par contre, pour l'indemnité de retard complémentaire liquidée par le service du Recouvrement à défaut de paiement des droits rappelés dans le délai d'un mois à compter de l'avis de mise en recouvrement 6 , le point de départ du délai de péremption est déterminé de la même manière que pour les déclarations déposées sans paiement.
41.Il est seulement précisé que la période séparant la date de la notification de redressement de celle de l'avis de mise en recouvrement doit, en pratique, être neutralisée, comme elle l'est déjà en ce qui concerne la liquidation de l'indemnité de retard ( cf. Doc. de base 13 N-1422, n° 6).
De ce fait, le point de départ du délai de péremption du privilège est reporté, pour les indemnités de retard en cause, au jour de la notification de l'avis de mise en recouvrement relatif aux droits en principal et à l'indemnité de retard provisoirement arrêtée par le service d'assiette.
b. Intérêt de retard prévu à l'article 1733 C.G.I. en cas de taxation d'office.
42.En cas de taxation d'office, le point de départ du délai de péremption du privilège se rapportant aux droits en principal et à l'intérêt de retard provisoirement arrêté par le service d'assiette (tenant compte, le cas échéant, du minimum de 10 %) est le jour de la notification de l'avis de mise en recouvrement ( art. 1926 C.G.I .).
43.Par contre, pour l'intérêt de retard qui doit être éventuellement liquidé ensuite 7 , le point de départ du délai de péremption du privilège est, comme pour l'indemnité de retard, le premier jour de chaque mois 8 qui suit la date d'exigibilité.