Date de début de publication du BOI : 01/10/1999
Identifiant juridique : 7S3314
Références du document :  7S3314

SOUS-SECTION 4 QUATRIÈME CONDITION LES BIENS DOIVENT ÊTRE NÉCESSAIRES À L'EXERCICE DE LA PROFESSION

  C. PROFESSIONS LIBÉRALES

37Quel que soit leur régime d'imposition, les membres des professions non commerciales ne sont pas tenus d'établir un bilan. En effet :

- les contribuables placés sous le régime de l'évaluation administrative ou le régime déclaratif spécial ne sont soumis à aucune obligation- particulière quant à l'inventaire de leurs biens professionnels ;

- les contribuables relevant du régime de la déclaration contrôlée sont seulement astreints à la production d'un registre des immobilisations et des amortissements, appuyé des pièces justificatives correspondantes.

  I. Principes

38Les indications données ci-dessus n°s 2 et suivants en ce qui concerne les entreprises industrielles, commerciales ou artisanales s'appliquent également aux professions libérales sous réserve des observations suivantes :

1. Immobilisations.

a. Contribuables placés sous le régime de l'évaluation administrative ou le régime déclaratif spécial.

39Ces contribuables ne sont pas astreints à la tenue d'un registre d'immobilisations mais, conformément aux dispositions de l'article 93-1 du CGI, leur actif professionnel est constitué par l'ensemble des biens affectés à l'exercice de la profession.

L'appartenance d'un bien à l'actif professionnel est donc déterminée en fonction d'une analyse objective du bien (bien servant objectivement de support à l'activité professionnelle) et de son utilisation dans le cadre de la profession.

b. Contribuables placés sous le régime de la déclaration contrôlée.

40Les immobilisations figurent normalement sur le registre des immobilisations et des amortissements prévu à l'article 99 du CGI.

Les titulaires de bénéfices non commerciaux relevant de ce régime ont la possibilité de ne pas inscrire sur ce registre les éléments qui ne sont pas, par leur nature même, affectés à l'exercice de la profession.

Le fait qu'un élément affecté par nature à l'exercice de la profession n'ait pas été porté sur le registre des immobilisations ne saurait être opposé au redevable pour l'application du régime des biens professionnels au regard de l'impôt de solidarité sur la fortune.

La catégorie des éléments non affectés par nature comprend seulement les éléments utilisés dans le cadre de la profession à l'exclusion de tout élément n'ayant aucun lien direct avec l'exercice de l'activité. Elle comprend notamment les immeubles, qu'ils soient à usage mixte (habitation, profession) ou à usage exclusivement professionnel et que les locaux soient nus ou aménagés.

2. Créances.

41Sont considérées comme biens professionnels, les créances détenues par le redevable au 1er janvier (évaluées selon les règles exposées DB 7 S 352, n°s 2 à 6 ) parmi lesquelles notamment, celles ayant fait l'objet d'une note d'honoraires ou portées sur un document entenant lieu, pour leur part non encore réglée par le client.

3. Stocks

42D'une manière générale, les membres des professions non commerciales ne détiennent pas de stocks. Il en va différemment cependant pour certaines professions particulières, tels les médecins ou vétérinaires propharmaciens, ou les chirurgiens-dentistes.

4. Liquidités et placements financiers assimilés.

43Ils constituent des biens professionnels dans la limite des besoins normaux de trésorerie de l'exploitation et s'ils sont effectivement nécessaires à l'activité (rapp. ci-dessus n° 14 ).

Bien évidemment, seuls les liquidités et placements financiers qui sont la propriété du redevable sont susceptibles d'être pris en compte au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune. De ce fait, les sommes reçues en séquestre par certaines professions, et d'ailleurs comptabilisées de façon distincte, demeurent pour les membres de ces professions en dehors du champ d'application de l'impôt et corrélativement les dettes et charges s'y rapportant.

À titre de règle pratique, ces liquidités ou placements sont présumés constituer des biens professionnels pour leur totalité si le total des valeurs réalisables à court terme ou disponibles (créances professionnelles, bons de caisse, comptes bancaires, CCP...) n'excède pas le total des dettes à court terme (dettes à l'égard des fournisseurs, découvert bancaire, ...). Pour la fraction excédentaire, cf. ci-dessus n° 14 .

5. Dettes et emprunts à court terme. - Emprunts à moyen et à long terme.

44Pour ces deux derniers postes, seule la partie des dettes contractées pour l'acquisition de biens professionnels est prise en considération. Leur déduction est opérée dans les mêmes conditions qu'au n° 24.

  II. Cas particuliers

1. Parts de sociétés civiles professionnelles.

45Cf. DB 7 S 3321, n° 2 .

2. Parts de sociétés civiles de moyens.

46Les parts des sociétés civiles de moyens visées à l'article 239 quater A du CGI constituent des biens professionnels dès lors qu'elles sont nécessaires à l'exercice de la profession.

3. Parts de sociétés civiles immobilières.

47cf. DB 7 S 3312, n°s 7 et suiv. et n° 17.

4. Parts de SARL ou actions de SA constituées pour l'exercice d'une profession libérale.

48Lorsque l'exercice d'une profession libérale revêt la forme d'une société anonyme ou d'une SARL, il est, par similitude avec le cas où une telle activité est exercée sous la forme d'une SCP, admis que les parts ou actions de ces sociétés constituent des biens professionnels, si leur détenteur y exerce sa profession principale, même s'il ne remplit pas les conditions relatives au seuil minimum de participation de 25 % et à la nature des fonctions normalement exigée.

Si le redevable exerce la même activité libérale dans plusieurs sociétés dont il détient des participations, l'ensemble de ses participations peut être considéré comme un bien professionnel unique. Ces participations sont exonérées si les fonctions exercées par le redevable constituent l'essentiel de ses activités économiques ou, à défaut, lui procurent la plus grande partie de ses revenus professionnels.

Il en va ainsi dans le cas où les dispositions réglementaires organisant le régime et les statuts des SCP n'ont pas encore été prises pour telle ou telle profession libérale ou lorsque la possibilité d'exercer collectivement la profession sous forme de société anonyme ou de SARL est également admise. Tel est le cas, par exemple, des experts-comptables.

Les mêmes règles sont applicables dans le cas où la détention de parts ou d'actions d'une société de capitaux est la condition nécessaire à l'exercice d'une profession libérale (exemple : actions ou parts d'une clinique constituée en SA ou en SARL détenues par un chirurgien qui y exerce son activité, si cette détention conditionne l'activité en cause). Toutefois, dans ce dernier cas, seules les parts ou actions correspondant à la quotité exigée par les statuts, ou à défaut celle nécessaire à l'exercice de son activité par l'intéressé, peuvent avoir la qualité de biens professionnels (rapp. DB 7 S 3312, n° 17 ). Au-delà de ce seuil, elles sont considérées comme un simple placement financier pour leur propriétaire, sauf si celui-ci satisfait aux conditions de droit commun de détention d'au moins 25 % du capital et d'exercice des fonctions normalement exigées.

5. Droits de la propriété industrielle.

49Il s'agit des brevets d'invention, marques de fabrique, dessins et modèles, procédés et formules de fabrication.

Ils constituent des biens professionnels au sens de l'article 885 N du CGI, Iorsque l'activité génératrice des produits imposables est assimilable à une véritable activité professionnelle exercée à titre principal.

Toutefois, les droits de la propriété industrielle peuvent bénéficier d'une exonération générale si les conditions prévues à l'article 885-I du CGI sont remplies (cf. DB 7 S 3432, n°s 5 à 7 ).

  D. PROFESSIONS SALARIÉES

50Pour les membres des professions salariées visées DB 7 S 3311, n° 7 les biens professionnels s'entendent des biens suivants (seule, la partie de ces biens exclusivement affectée à l'exercice de la profession est à prendre en compte) :

- les biens constituant des immobilisations (locaux, matériels, mobiliers, véhicules automobiles), lorsqu'ils sont considérés comme professionnels (cf. DB 7 S 3311, n° 7 ) ;

- la part détenue par les pilotes maritimes dans la " Caisse du matériel " constituée par le matériel de la station de pilotage ;

- les stocks : les professions visées ne possèdent généralement pas de stocks à l'exception de quelques cas particuliers ;

- les créances professionnelles détenues par le redevable ;

- les liquidités et placements financiers déterminés comme il est précisé ci-dessus n° 14  ;

- les dettes et emprunts à court terme ;

- les emprunts à moyen et à long terme.

Seule la partie des dettes contractées pour l'acquisition de biens professionnels peut être retenue.

Cas particuliers :

- Parts ou actions des sociétés de presse détenues par les salariés de celles-ci (cf. DB 7 S 3432, n° 4 ) ;

- Parts ou actions acquises à la suite d'un rachat d'entreprise par les salariés (RES) [cf. DB 7 S 3322, n°s 59 à 61 ].

  E. DATE À CONSIDÉRER POUR DÉTERMINER LA COMPOSITION DU PATRIMOINE PROFESSIONNEL

51Les biens professionnels s'entendent de ceux qui, faisant partie du patrimoine du contribuable, sont utilisés pour les besoins professionnels au 1er janvier de l'année d'imposition.

Toutefois, pour les entreprises arrêtant leur exercice en cours d'année, il est admis que les biens et dettes professionnels soient déterminés à partir de l'inventaire dressé à la clôture du dernier exercice arrêté au cours de l'année civile précédant l'année d'imposition.

Les entreprises qui optent pour l'application de cette méthode doivent en principe l'utiliser chaque année. Si elles décident de revenir à la règle de droit commun, elle ne sont plus admises à bénéficier ultérieurement de la solution visée à l'alinéa précédent.

ANNEXE I

 Arrêt Cour de Cassation
Chambre Commerciale, financière et économique
du 15 juin 1993, n° 249, p 177 :

« .. Vu l'article 885 N du code général des impôts ;

Attendu qu'il résulte de ce texte, dans son interprétation résultant de l'instruction administrative du 19 mai 1982, que constituent des biens professionnels, au regard de l'impôt sur les grandes fortunes, les biens, droits ou valeurs nécessaires à l'exercice de la profession ; que si, en ce qui concerne les entreprises individuelles, l'inscription de ces biens au bilan, ou leur mention sur le document en tenant lieu, en font présumer le caractère professionnel, l'Administration a la faculté de rapporter la preuve qu'ils ne sont pas nécessairement et effectivement affectés à l'exercice de la profession ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que M. X... , dirigeant d'une entreprise individuelle à caractère industriel, a exclu de ses biens soumis à l'impôt sur les grandes fortunes, au titre des années 1983 à 1985, le montant des liquidités portées au bilan de l'entreprise ; que l'administration des Impôts a rejeté le caractère professionnel de ces liquidités qu'elle a réintégrées dans l'assiette de l'impôt ; que le jugement a accueilli la réclamation de M. X... en relevant qu'avait la qualité de bien professionnel la totalité des liquidités inscrites au bilan de l'entreprise, à la seule exception de ce qui en avait été prélevé pour le paiement des dépenses personnelles de l'intéressé ;

Attendu qu'en statuant ainsi ; sans rechercher si les valeurs litigieuses, inscrites au bilan, étaient nécessaires à l'activité de l'entreprise, ce que contestait l'administration des Impôts, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner la seconde branche du moyen :

CASSE ET ANNULE ... »

ANNEXE II

 Arrêt Cour de Cassation
Chambre Commerciale, financière et économique
du 3 juin 1998, Bull. IV, n° 176, p 144 :

« Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Valence, 27 février 1996), que M. X... , qui exploitait un commerce en son nom personnel, a placé sur son compte bancaire personnel en 1990, 1991 et 1992 des sommes provenant de la trésorerie de son exploitation ; que de 1991 à 1993, il a compris ces placements dans l'assiette de son patrimoine soumis à l'impôt de solidarité sur la fortune, mais les a placées au passif au titre de dettes envers le fonds de commerce ; que l'administration des Impôts n'a pas admis cette déduction et a procédé à un redressement contradictoire ; que M. X... a demandé l'annulation de la décision de rejet de sa réclamation ;

 .....

Sur le second moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. X... reproche encore au jugement de l'avoir débouté de sa demande alors, selon le pourvoi, d'une part, que les liquidités provenant de l'exploitation d'un commerce à titre personnel ne perdent pas le caractère de biens professionnels, au sens de l'article 885 N du Code général des impôts relatif à l'impôt sur les grandes fortunes, lorsqu'elles sont placées en cours d'exercice, dès lors qu'elles doivent être regardées comme restant nécessaires aux besoins de l'exploitation, ce qu'il appartient au Tribunal de rechercher ; qu'en se bornant à déduire le caractère privé des sommes en cause de la seule constatation qu'elles avaient été appréhendées par lui en cours d'exercice et placées sur un compte personnel, sans rechercher, comme il y était invité, si ces liquidités destinées au paiement des fournisseurs n'étaient pas indispensables à son exploitation, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ; alors, d'autre part, que les liquidités provenant de l'exploitation d'un commerce à titre personnel et qui demeurent nécessaires ou utiles à cette exploitation ne perdent leur caractère de biens professionnels que lorsque ces liquidités ont été appréhendées par le contribuable et considérées par lui comme constituant un bien à caractère privé ; que le placement de ces liquidités sur un compte ouvert au nom de ce commerçant ne permet pas, à lui seul, de déduire que ces sommes ont perdu leur caractère professionnel ; qu'en ne relevant aucun élément ou indice objectif propre à démontrer que les sommes qu'il avait placées étaient désormais regardées par lui comme constituant un bien à caractère privé et ne pouvaient plus, dans ces conditions, être réputées utilisées pour les besoins de son exploitation, le Tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article 855 N du Code général des impôts ; et alors, enfin, que le principe civiliste de l'unité du patrimoine n'interdit pas à un contribuable, exploitant une entreprise en son nom personnel, d'opérer, à des fins exclusivement fiscales, une distinction entre son patrimoine « privé » et son patrimoine « professionnel » en faisant apparaître au passif de l'un les dettes dont ce patrimoine est débiteur à l'égard de l'autre, dès lors que celles-ci correspondent à des flux financiers justifiés par les besoins de son entreprise et compatibles avec les règles de la fiscalité et de la comptabilité d'entreprise ; qu'en jugeant que le principe de l'unité du patrimoine excluait que M. X... fit apparaître au passif de son patrimoine personnel, seul soumis à l'impôt de solidarité sur la fortune, des dettes correspondant à des avances qu'il devait restituer à son entreprise, le Tribunal a violé l'article 885 G du Code général des impôts, ensemble le principe d'indépendance des patrimoines civil et fiscal ;

Mais attendu, d'une part, que les juges, après avoir énoncé justement que les liquidités provenant de l'exploitation d'un commerce à titre personnel ne perdent pas leur caractère de biens professionnels par le simple fait qu'elles sont placées en cours d'exercice, dès lors qu'elles restent utilisées pour les besoins de l'exploitation, ont constaté qu'il n'en était pas ainsi en l'espèce, les fonds ayant été appréhendés par le contribuable en vue de placements à caractère privé ;

Attendu, d'autre part, que le jugement énonce, à bon droit, que le régime des biens professionnels en matière d'impôt de solidarité sur la fortune ne prévoit pas une dérogation aux règles du droit civil sur l'unicité du patrimoine ; que le grief n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ... ».