SOUS-SECTION 3 ÉVALUATION DES TITRES DE PARTICIPATION
SOUS-SECTION 3
Évaluation des titres de participation
11° L'article 2 de la loi n° 73-1128 du 21 décembre 1973 -codifié sous l'article 39-1-5°- dispose que, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1974, les titres de participation ne peuvent faire l'objet d'une provision que s'il est justifié d'une dépréciation réelle par rapport au prix de revient. Pour l'application de cette disposition, sont présumés titres de participation les actions acquises en exécution d'une offre publique d'achat ou d'échange ainsi que les titres ouvrant droit au régime fiscal des sociétés mères (cf. ci-avant B 3111, n° 3 ).
2Cette disposition a eu essentiellement pour objet de priver les entreprises de l'avantage qui consiste à déprécier, en fonction des cours de bourse, les titres acquis au cours de l'exercice moyennant un prix plus élevé que seule justifiait la volonté d'une prise de contrôle.
3Cette mesure s'étant inscrite dans la ligne d'une normalisation des règles fiscales et comptables, le paragraphe 2 de l'article précité a prévu qu'un décret en Conseil d'État devait adapter en conséquence :
- le décret n° 65-968 du 28 octobre 1965 (décret dit « de normalisation comptable ») ;
- le décret n° 67-236 du 23 mars 1967 (décret d'application de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales).
4S'agissant des dispositions du décret du 28 octobre 1965 relatives à l'évaluation des titres de participation, le décret de codification n° 75-47 du 22 janvier 1975 a aménagé, en conséquence, les articles 38 sexies et 38 septies de l'annexe III au CGI sous lesquels ces dispositions étaient codifiées.
Les dispositions actuellement en vigueur de l'article 38 sexies de l'annexe III au CGI résultent des termes du décret n° 84-184 du 14 mars 1984 pris en application de l'article 74 de la loi de finances pour 1984 (n° 83-1179 du 29 décembre 1983) relatif aux déclarations et documents à souscrire par les entreprises.
Les dispositions de l'article 38 septies de l'annexe III au CGI ont été complétées par l'article 1er du décret n° 80-1088 du 29 décembre 1980 et l'article 47 de la loi n° 83-1 du 3 janvier 1983 (cf. ci-avant B 3112, n° 16 ).
52° Par ailleurs, il résulte de l'article 2 précité de la loi n° 73-1128 du 21 décembre 1973 - codifié sous l'article 39-1-5°- que les provisions pour dépréciation précédemment comptabilisées et afférentes aux titres et actions susvisés sont rapportées aux résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 1974 à concurrence du montant des provisions de même nature constituées à la clôture de chacun de ces exercices ou, le cas échéant, aux résultats de l'exercice de cession.
6On examinera successivement :
- les modalités d'évaluation des titres de participation ;
- les règles de constatation des provisions ;
- le mode de régularisation de la provision pour dépréciation constituée avant l'entrée en vigueur des nouvelles modalités d'évaluation des titres de participation ;
- la date d'entrée en vigueur du dispositif.
A. MODALITÉS D'ÉVALUATION DES TITRES DE PARTICIPATION
I. Évaluation des titres de participation lors de leur entrée dans le patrimoine
7L'ensemble des titres qui constituent le portefeuille doivent continuer d'être enregistrés pour leur valeur d'origine à la date d'entrée dans l'actif.
S'agissant de titres de participation qui revêtent le caractère d'immobilisation, cette valeur s'entend de celle définie à l'article 38 quinquies de l'annexe III au CGI, c'est-à-dire :
- du prix d'achat majoré des frais accessoires d'achat ;
- de la valeur d'apport telle qu'elle résulte de l'acte d'apport pour les valeurs apportées.
Sur l'évaluation de la valeur réelle des actions d'apports (cf. ci-avant B 131, n°s 11 et 30 ).
8La valeur d'origine ainsi définie peut, dans certaines situations, excéder la valeur réelle de la participation.
Il en est ainsi dans tous les cas où le prix d'acquisition de cette participation (ou la valeur d'apport) a été fixé en tenant compte de l'augmentation de valeur que cette acquisition est susceptible d'apporter à un élément patrimonial préexistant. Le prix d'acquisition peut, par exemple, tenir compte de l'augmentation de valeur apportée au fonds de commerce par une prise de participation assurant à la société dominante une stabilité des contrats de vente ou d'achat conclus avec la société dominée. À la limite, une participation peut être acquise en vue d'une dépréciation immédiate (mise en sommeil de l'exploitation correspondante) qui implique un simple transfert de valeurs entre certains éléments de l'actif immobilisé (fonds de commerce et participation).
Dans de telles situations, le supplément de valeur enregistré à l'occasion de l'acquisition de la participation doit, pour la détermination de l'actif net au sens de l'article 38 du code précité, constituer un élément du prix de revient des immobilisations que cette opération a contribué à valoriser.
II. Estimation des titres en fin d'exercice
9En écartant une évaluation des titres de participation exclusivement déterminée d'après le cours de Bourse, les nouvelles règles ont aligné la méthode d'estimation des parts et actions faisant l'objet d'une cotation au marché officiel sur celle applicable aux titres non cotés et, d'une manière plus générale, aux immobilisations qui ne se déprécient pas avec le temps au sens de l'article 38 sexies de l'annexe III du CGI.
10Tenant compte du caractère composite des éléments qui déterminent la valeur réelle des titres de participation à la clôture de chaque exercice, le nouveau dispositif fiscal n'a substitué, en effet, aucune méthode particulière à celle qui a été abandonnée pour l'évaluation de ces titres à la date du bilan.
11Il en résulte, notamment, que la déduction fiscale de la provision éventuellement constituée en vue de faire face à une dépréciation des titres de participation demeure soumise aux règles de fond et de forme édictées, au plan général, par l'article 39-1-5° du même code (cf. 4 E 11 et 12 ).
12Cela étant, le prix payé par une entreprise pour acquérir le contrôle d'une société par l'intermédiaire d'une prise de participation est fonction des avantages qu'elle espère tirer de cette opération. C'est donc en fonction de cette finalité propre que l'entreprise doit déterminer, en principe, la nouvelle valeur de sa participation à la date de clôture de chaque exercice. Pratiquement, cette valeur correspond à la valeur économique que l'entreprise attribue à l'un de ses éléments permanents d'exploitation en fonction de son utilité propre.
13Dans son avis du 23 octobre 1973, le Conseil national de la comptabilité a défini cette valeur comme étant celle qu'un chef d'entreprise prudent et avisé accepterait de décaisser pour obtenir l'immobilisation correspondant à sa participation s'il avait à l'acquérir.
14Pour établir et justifier cette valeur, l'entreprise participante dispose d'un ensemble de données, composé notamment :
- d'éléments historiques ayant servi à apprécier la valeur d'origine des titres ;
- d'éléments actuels tels que le cours de bourse à la date du bilan et la rentabilité de l'entreprise ;
- d'éléments futurs correspondant aux perspectives de rentabilité ou de réalisation et aux tendances de la conjoncture économique.
15Toutefois, pour respecter le principe de l'égalité de traitement des entreprises en ce qui concerne leur contribution à la charge fiscale, il y a lieu de conserver un certain degré d'objectivité dans le choix des éléments à retenir pour l'estimation de cette fraction de l'actif immobilisé et, corrélativement, pour la détermination du montant d'une éventuelle dépréciation en résultant.
16Aussi bien, pour la détermination de l'actif net au sens de l'article 38 du CGI et pour apprécier si la provision constituée en vue de faire face à une dépréciation des titres de participation est nettement précisée au sens de l'article 39-1-5° , du même code, il convient, d'une manière générale, de rechercher si les justifications mises à la charge de l'entreprise permettent de considérer que la valeur réelle de l'actif net représenté par la participation est inférieure à la valeur comptable des titres correspondants à la date du bilan.
Titres de sociétés étrangères détenus en totalité par des sociétés françaises.
17Jusqu'à l'intervention de la loi du 11 juillet 1985 (n° 85-697) qui a permis à une seule personne de créer une société à responsabilité limitée, la notion de société d'une seule personne n'était généralement pas admise en droit français 1 , au contraire de certaines législations étrangères reconnaissant l'existence juridique des sociétés unipersonnelles. Au plan fiscal, la question s'est posée de savoir s'il y a lieu de considérer qu'une société étrangère dont la totalité du capital est détenue par une société française a une existence propre ou bien n'est qu'une simple succursale.
Il a été admis qu'en principe une société étrangère, dont tous les titres sont entre les mains d'une société française, présente une personnalité fiscale distincte de la société française lorsque l'existence de la société étrangère est juridiquement reconnue dans le pays de son siège, et que, dans ce cas, la société française est fondée à constituer, s'il y a lieu, une provision pour dépréciation des titres de la filiale étrangère.
Titres de filiales fiscalement intégrées.
18Conformément aux dispositions de l'article 209 sexies-I du CGI, les sociétés françaises dont
95 % au moins du capital est détenu directement ou indirectement par une autre société française peuvent sur agrément du ministre de l'économie et des finances, être assimilées à des établissements de la société mère pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés.
Dès lors que la société mère ajoute à ses propres résultats ceux de ses filiales ou sous-filiales agréées et que ces derniers reflètent déjà la situation bénéficiaire ou déficitaire desdites filiales ou sous-filiales, la constitution éventuelle par la société mère d'une provision pour dépréciation des titres de ses filiales ferait double emploi. Il convient donc, dans cette situation, de réintégrer cette provision dans la masse des résultats.
De même, la société mère est tenue de réintégrer la provision constituée par une filiale à raison des titres que cette filiale possède dans une sous-filiale lorsque ces filiales et sous-filiales sont l'une et l'autre considérées comme des établissements de la société mère par application de l'article 209 sexies précité.
19Ces dispositions sont abrogées pour l'imposition des résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 1988 ; toutefois les agréments délivrés pour l'application des dispositions de l'article 209 sexies-I demeurent valables jusqu'à leur terme (CGI, art 209 sexies-II ).
B. CONSTATATION DES DÉPRÉCIATIONS 2
I. Constatation d'une dépréciation sous forme de provision
20Il est procédé à une estimation des titres de participation à la fin de chaque exercice et les moins-values constatées, le cas échéant, par rapport à la valeur d'origine de ces titres sont inscrites à un compte de provision.
Cependant d'après l'article 2-I de la loi de finances rectificative pour 1973, n° 73-1128 du 21 décembre 1973 codifié à l'article 39-1-5° du CGI, les titres de participation ne peuvent faire l'objet d'une provision que s'il est justifié d'une dépréciation réelle par rapport au prix de revient. Par suite, la constatation d'une décote boursière par rapport au prix de revient d'une participation ne suffit pas à permettre la constitution d'une provision pour dépréciation. L'entreprise doit établir que la valeur comptable est supérieure à la valeur réelle. Celle-ci est susceptible d'excéder tant le cours de bourse que la valeur mathématique. Elle s'entend, en effet, de celle qu'un chef d'entreprise prudent et avisé accepterait de décaisser pour obtenir l'immobilisation correspondant à sa participation s'il avait à l'acquérir.
Pour apprécier le montant de cette provision constituée suivant les modalités prévues à l'article 39-1-5° du CGI, le même texte précise, contrairement aux règles applicables en matière commerciale, que l'évaluation des titres correspondants doit être opérée par catégorie de même nature et non titre par titre. Chaque catégorie est composée de titres émis par une même collectivité et conférant à leur détenteur les mêmes droits au sein de la collectivité émettrice (cf. ci-avant B 3112, n°s 22 à 24 ).
21Pour le calcul de la provision, les dispositions commerciales et fiscales s'accordent, en revanche, pour donner aux entreprises la faculté d'exclure, en cas de baisse anormale de certains titres cotés apparaissant comme momentanée, tout ou partie de la moins-value constatée sur ces titres dans la mesure où une compensation peut être établie avec les plus-values normales constatées sur d'autres titres, qu'ils soient ou non cotés (cf. ci-avant B 3112, n°s 37 à 42 ).
Conformément à la règle de la spécificité des exercices, la provision (ou le complément de provision) résultant, le cas échéant, de l'estimation des titres à la date du bilan n'est admise en déduction du bénéfice imposable qu'au titre de l'exercice au cours duquel l'événement rendant la perte probable est intervenu, c'est-à-dire de l'exercice à la clôture duquel l'estimation dégage une moins-value au sens de l'article 38 septies de l'annexe précité.
Par suite, lorsque l'entreprise s'abstient de constater cette dépréciation en raison de l'existence de plus-values latentes sur d'autres titres, elle se prive normalement à due concurrence de la faculté de constater ultérieurement une provision susceptible de faire face à la dépréciation ainsi compensée.
1 Sauf application des dispositions de l'ancien article 9 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966, article abrogé par la loi n° 81-1162 du 30 décembre 1981 qui prévoit que la réunion de toutes les parts sociales en une seule main n'entraîne pas la dissolution de plein droit de la société (cf. Code civil, art. 1844-5).
2 Le régime fiscal résultant de l'estimation des titres de portefeuille est étudié ci-avant B 3112 n°s 25 et suiv. .