B.O.I. N° 76 DU 12 AOÛT 2010
TITRE 2 :
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DONATIONS
CHAPITRE 1 :
RELEVEMENT SOUS CONDITION DE LA LIMITE D'AGE DU DONATEUR DANS LE CADRE DU DISPOSITIF D'EXONERATION DES DONS FAMILIAUX DE SOMMES D'ARGENT
Section 1 :
Dispositif antérieur
19.L'article 790 G exonère, sous certaines conditions, de droits de mutation à titre gratuit les dons de sommes d'argent consentis en pleine propriété au profit d'un enfant, d'un petit-enfant, d'un arrière-petit-enfant ou, à défaut d'une telle descendance, d'un neveu ou d'une nièce ou, par représentation, d'un petit-neveu ou d'une petite-nièce, dans la limite d'un montant qui, actualisé chaque année, s'établit à 31 395 € pour l'année 2010.
20.L'article 790 G précité prévoit notamment que le bénéfice de l'application du dispositif d'exonération est réservé aux dons consentis par un donateur âgé de moins de soixante-cinq ans au jour de la transmission.
Section 2 :
Aménagement du dispositif
21.L'article 35 de la loi de finances pour 2010, modifiant à cet effet l'article 790 G, porte la limite d'âge du donateur à quatre-vingts ans lorsque les dons sont consentis avec un « saut de génération », c'est-à-dire à un petit-enfant, à un arrière-petit-enfant ou, à défaut d'une telle descendance, à un petit-neveu ou une petite-nièce venant en représentation.
22.En revanche, la limite d'âge du donateur est maintenue à soixante-cinq ans pour les dons consentis à des enfants ou à des neveux ou des nièces.
CHAPITRE 2 :
DROIT A RESTITUTION DES DROITS EN CAS DE RETOUR DES BIENS DANS LE PATRIMOINE DU DONATEUR EN EXECUTION D'UN DROIT DE RETOUR LEGAL OU CONVENTIONNEL
Section 1 :
Dispositif antérieur
23.Sur le plan du droit civil, le droit de retour conventionnel (articles 951 et 952 du code civil), qui résulte des stipulations du donateur, n'est pas un droit héréditaire et les biens qui en sont l'objet ne donnent pas ouverture aux droits de mutation par décès. La donation avec droit de retour conventionnel s'analyse en une donation faite sous condition résolutoire. La condition résolutoire étant réalisée, la donation est rétroactivement anéantie. Le retour conventionnel ne peut être stipulé qu'au profit du donateur.
24.La loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités a instauré un droit de retour légal au profit des père et mère du défunt, à condition qu'il n'existe aucune postérité. Ce droit de retour légal s'applique sur les biens que le défunt avait lui-même reçus de ses père et mère par donation (article 738-2 du code civil). Ce droit de retour légal est limité à leur quote-part dans la succession.
25.Sur le plan fiscal, l'article 763 bis prévoit que ce droit de retour légal institué en faveur des père et mère ne donne pas lieu à la perception des droits de mutation à titre gratuit, que le retour s'exerce en nature ou en valeur.
26.L'article 791 ter , issu de l'article 32 de la loi de finances rectificative pour 2007, prévoit qu'en cas de donation en ligne directe de biens antérieurement transmis à un premier donataire en ligne directe et ayant fait retour au donateur en application des articles 738-2, 951 et 952 précités du code civil, les droits acquittés lors de la première donation sont imputés sur les droits dus lors de la seconde donation des mêmes biens.
27.La nouvelle donation doit intervenir dans les cinq ans du retour des biens dans le patrimoine du donateur.
28.Dans un arrêt du 4 décembre 2007, la Cour de cassation (Cass. com. n° 06.12.024 (n°1315 F-PB), DGI c/consorts Breton des Loys ; RJF 04/08, n° 523) a considéré que la restitution des droits acquittés lors d'une donation ne saurait être refusée en cas d'exercice du droit de retour conventionnel prévu par les articles 951 et 952 du code civil.
Section 2 :
Aménagement du dispositif
29.Reprenant dans la loi la jurisprudence de la Cour de cassation, l'article 36 de la loi de finances pour 2010, complétant à cet effet l'article 791 ter précité d'un second alinéa, permet, en cas de retour des biens au donateur en application des articles 738-2, 951 et 952 du code civil, de demander la restitution des droits de mutation à titre gratuit acquittés lors de la donation.
30.La demande de restitution doit être effectuée dans le délai légal de réclamation à compter du décès du donataire.
Ainsi, la demande en restitution devra être faite avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit le décès du donataire au service des finances publiques compétent.
Lorsque les droits de mutation à titre gratuit sur lesquels porte la restitution ont été acquittés par le donataire, cette demande en restitution pourra être faite par les héritiers ou légataires et ceux-ci doivent faire figurer à l'actif brut de la succession du donataire une créance égale au montant de la demande en restitution.
Lorsque les droits de mutation à titre gratuit sur lesquels porte la restitution ont été acquittés par le donateur, seul celui-ci pourra en demander la restitution.
31.Enfin, ce droit à restitution s'applique aux donations résolues avant le 1 er janvier 2010, dès lors que le délai de réclamation n'est pas expiré.
32. Exemple : M. X a fait le 23 décembre 2008 donation d'un appartement à son fils Z, en stipulant que l'appartement fera retour dans son patrimoine en cas de prédécès de son fils et de ses descendants. Les droits de donation sont acquittés par M. X.
M. Z décède sans postérité le 15 janvier 2010. Dès lors, la clause de retour conventionnel est appliquée.
M. X a donc jusqu'au 31 décembre 2012 pour demander la restitution des droits de mutation à titre gratuit acquittés au titre de la donation du 23 décembre 2008.
33. Remarque : le donateur peut avoir recours aux mécanismes d'imputation (premier alinéa de l'article 791 ter ) et de restitution (second alinéa du même article) de manière combinée lorsque les biens ayant fait retour dans son patrimoine font l'objet d'une nouvelle donation avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit le décès du donataire (cf. paragraphe n° 30 ).
TITRE 3 :
PRECISIONS DOCTRINALES RELATIVES A LA REPRESENTATION EN LIGNE COLLATERALE
34.Sur le plan civil, l'article 751 du code civil dispose que la représentation est une fiction juridique qui a pour effet d'appeler à la succession les représentants aux droits du représenté, afin d'assurer l'égalité entre les souches 3 . La représentation a lieu en ligne directe descendante et, en ligne collatérale, en faveur des descendants de frères ou sœurs du défunt.
Dès lors, ce mécanisme ne peut être invoqué en présence d'une seule souche (frère unique du défunt prédécédé) 4 .
35.La loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités déjà citée a introduit en droit successoral la possibilité pour un héritier en ligne directe ou collatérale de renoncer à une succession et de se faire représenter par ses descendants. Cette loi a ainsi modifié l'article 754 du code civil afin de permettre la représentation des renonçants dans les successions dévolues en ligne collatérale, alors qu'auparavant seule la représentation du prédécédé ou de l'indigne était autorisée.
En conséquence, depuis le 1 er janvier 2007, la représentation de l'héritier renonçant en ligne collatérale est possible. Il en résulte que les neveux ou nièces du défunt peuvent représenter leur père ou leur mère renonçant dans la succession de leur oncle ou tante.
36.Sur le plan fiscal, l'article 51 de la loi de finances rectificative pour 2006 a modifié l'article 779 afin que les représentants d'un renonçant ou d'un prédécédé en ligne collatérale puissent bénéficier de l'abattement personnel de ce dernier.
En conséquence, depuis le 1 er janvier 2007, les représentants d'un renonçant ou d'un prédécédé en ligne collatérale se partagent l'abattement personnel dont ce dernier aurait bénéficié.
Il en résulte que les neveux ou nièces, ou les petits-neveux ou petites-nièces, voire arrière-petits-neveux ou arrière-petites-nièces, venant à la succession de leur oncle ou de leur tante par représentation de leur auteur bénéficient désormais de l'abattement de 15 697 € (montant actualisé au 1 er janvier 2010) prévu au IV de l'article 779, qu'ils se partagent.
37.Par ailleurs, l'article 82 de la loi de finances pour 2009 a modifié l'article 777, et plus précisément le tableau III de cet article, afin d'appliquer aux neveux et nièces venant à la succession en représentation de leur auteur prédécédé ou renonçant (frère ou sœur du défunt) le tarif applicable à leur auteur.
Il en résulte que les intéressés bénéficient désormais sur la part nette taxable qui leur échoit par représentation du tarif applicable entre frères et sœurs, soit, sur la base du tarif actualisé au 1 er janvier 2010, 35 % jusqu'à 24 069 € et 45 % au-delà (au lieu du tarif applicable aux parents jusqu'au 4 ème degré inclus, soit 55 % sur l'ensemble de la part taxable).
Cette nouvelle disposition s'inscrivant en cohérence avec l'application aux neveux ou nièces venant à la succession de leur oncle ou de leur tante par représentation de leur auteur de l'abattement prévu au IV de l'article 779, il a été admis qu'elle s'applique pour les successions ouvertes depuis le 1 er janvier 2007 5 .
CHAPITRE 1 :
NON-CUMUL DE L'ABATTEMENT DU REPRESENTE AVEC L'ABATTEMENT PERSONNEL DU REPRESENTANT
38.L'article 8 de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, dite « loi TEPA », a instauré un abattement personnel de 7 849 € (montant actualisé au 1 er janvier 2010) en faveur des successions recueillies par les neveux et nièces.
39.Cet abattement personnel s'applique uniquement lorsque l'héritier est appelé à la succession de son propre chef.
40.Par suite, il n'y a pas lieu de cumuler l'abattement ou la fraction de l'abattement du représenté profitant au représentant, avec l'abattement personnel du représentant. En effet, le mécanisme de la représentation est une fiction juridique qui permet d'appeler à la succession des personnes qui ne pourraient y venir de leur propre chef (réponse ministérielle à la question écrite de M. Jacques Le Nay, député du Morbihan, Journal officiel Assemblée nationale du 2 septembre 2008, n° 19400, page 7599).
41.A cet égard, il est précisé que l'abattement personnel du représentant ne peut être substitué à la fraction de l'abattement du représenté.
42.En revanche, dans l'hypothèse ou le partage de l'abattement du renonçant entre ses représentants aboutit à ce que chacun d'eux dispose d'un abattement inférieur à 1 570 euros, il y a lieu d'appliquer sur la part de chacun l'abattement de 1 570 euros prévu au IV de l'article 788 (cf. BOI 7 G-6-07 du 22 novembre 2007, n° 30).
CHAPITRE 2 :
REPRESENTANT BENEFICIAIRE D'UN LEGS OU D'UNE ASSURANCE-VIE
43.Lorsque les neveux ou nièces venant par représentation à la succession de leur oncle ou de leur tante sont également bénéficiaires d'un contrat d'assurance-vie souscrit par le défunt ou sont légataires, à titre universel ou particulier, du défunt, il convient de procéder à une double liquidation des droits de mutation à titre gratuit, les neveux et nièces étant, d'une part, appelés en leur qualité de successibles par représentation de leur auteur, frère ou sœur du défunt, prédécédé ou renonçant et, d'autre part, pris en leur qualité de bénéficiaires directs et personnels du contrat d'assurance vie ou du legs.
Ils bénéficient donc, d'une part, de l'abattement du représenté prévu au IV de l'article 779 et de la taxation de 35 % et 45 % sur leur part dans l'actif successoral et, d'autre part, de l'abattement personnel prévu au V de l'article 779 et du taux de 55 % sur les sommes perçues au titre de l'assurance-vie souscrite par le défunt à leur profit ou sur les biens reçus en vertu des legs (réponses ministérielles aux questions écrites de M. Jacques Le Nay, député du Morbihan, Journal officiel Assemblée nationale du 23 février 2010, n° 58271, page 2047, et n° 59852, page 2052).
44.Enfin, en présence d'un représentant bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie ou d'un legs, la fraction d'abattement du représenté non utilisée sur la part successorale ne peut être imputée sur les sommes reçues en vertu du contrat d'assurance-vie ou des biens reçus en vertu du legs.
CHAPITRE 3 :
REPRESENTATION ET TRANSMISSION A TITRE GRATUIT ENTRE VIFS
45.En droit civil, le mécanisme de la représentation en ligne collatérale ne peut pas être invoqué lorsque l'acte de mutation est une donation simple ou une donation-partage. En effet, dans cette situation, les donataires viennent à la mutation de leur propre chef.
Il est cependant rappelé qu'en ligne directe, le droit fiscal prévoit une représentation en cas de donation aux descendants d'enfants décédés du donateur (cf. I de l'article 779). Une disposition similaire est prévue pour les descendants des petits-enfants décédés du donateur (cf. article 790 B). Il est en outre admis que ces dispositions s'appliquent même en présence d'une souche unique.
46.En ligne collatérale, les dispositions de l'article 790 G, également autonomes par rapport au droit civil, prévoient qu'à défaut de descendance en ligne directe, un petit-neveu ou une petite-nièce peut bénéficier du don lorsque son père ou sa mère, neveu ou nièce du donateur, est décédé. Ces dispositions s'appliquent uniquement en présence de plusieurs souches.
titre 4 :
ENTREE EN VIGUEUR
47.Sauf précisions contraires dans le corps de la présente instruction (cf. notamment n° 12 ), l'ensemble de ces dispositions s'appliquent aux successions ouvertes ou aux donations consenties, selon le cas, à compter du 1 er janvier 2010.
BOI liés : 7 G-5-07 , 7 G-6-07 , 7 G-7-07 et 7 G-7-09 .
La Directrice de la législation fiscale
Marie-Christine LEPETIT
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Annexe
Articles 28, 33, 35 et 36 de la loi de finances pour 2010 (n° 2009-1673 du 30 décembre 2009)
Article 28
I. - L'article 796 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le 2° du I, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis Des militaires décédés lors de leur participation à une opération extérieure ou, dans les trois années suivant la fin de celle-ci, des blessures reçues ou des maladies contractées pendant cette opération ; »
2° Le I est complété par un 9° et un 10° ainsi rédigés :
« 9° Des policiers et des gendarmes décédés dans l'accomplissement de leur mission, cités à l'ordre de la Nation ;
« 10° Des agents des douanes décédés dans l'accomplissement de leur mission, cités à l'ordre de la Nation. » ;
3° Au 1° du III, la référence : « et 2° » est remplacée par les références : « , 2° et 2° bis » et les mots : « la guerre » sont remplacés par les mots : « , selon le cas, la guerre ou l'opération extérieure ».
II. - Les 1° et 3° du I s'appliquent aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 2008.
Article 33
Le second alinéa de l'article 754 A du code général des impôts est complété par les mots : « , sauf si le bénéficiaire opte pour l'application des droits de mutation par décès ».
Article 35
Au 1° du I de l'article 790 G du code général des impôts, les mots : « soixante-cinq ans » sont remplacés par les mots : « quatre-vingts ans, ou de moins de soixante-cinq ans lorsqu'il consent le don à un enfant ou à un neveu ou une nièce, ».
Article 36
L'article 791 ter du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Nonobstant les dispositions prévues au premier alinéa, en cas de retour des biens au donateur en application des articles 738-2, 951 et 952 du code civil, ce retour ouvre droit, dans le délai légal de réclamation à compter du décès du donataire, à restitution des droits de mutation à titre gratuit acquittés lors de la donation résolue. ».
1 Ces articles sont reproduits en annexe à la présente instruction.
2 Réponse ministérielle à la question écrite de M. Bruno Bourg-Broc, député de la Marne, Journal officiel Assemblée nationale du 26 janvier 2010, n° 69355, page 3968.
3 Souche : auteur commun à plusieurs personnes dans le droit des successions ; en cas de représentation, les représentants d'un même héritier prédécédé ou renonçant qui constituent la souche recueillent collectivement sa part.
4 Cf. réponse ministérielle du 26 janvier 2010 à la question écrite n° 54899 de M. Candelier, député du Nord. Il est rappelé toutefois qu'en ligne directe, la doctrine admet d'appliquer l'abattement relatif aux enfants à un petit-enfant appelé à la succession de son grand-père du fait du prédécès de son père, enfant unique (cf. documentation administrative 7 G 2421, n° 3 ).
5 Cf. BOI 7 G-1-09 du 10 juillet 2009, n°57.