TITRE PREMIER CHAMP D'APPLICATION
TITRE PREMIER
CHAMP D'APPLICATION
Le champ d'application de l'article 62 du CGI est défini à la fois en fonction de la qualité des dirigeants ou associés concernés par ces dispositions et par la nature des rémunérations perçues par les intéressés.
De ce fait, les dispositions de l'article 62 précité présentent un caractère limitatif et ne sont, dès lors, pas susceptibles d'être appliquées aux rémunérations de dirigeants ou associés autres que ceux visés par ce texte.
Le présent titre comporte donc trois chapitres qui traitent respectivement :
- des personnes concernées ;
- des rémunérations imposables ;
- du caractère limitatif des dispositions de l'article 62 du CGI.
CHAPITRE PREMIER
PERSONNES CONCERNÉES
En vertu des dispositions du premier alinéa de l'article 62 du CGI, sont imposables dans les conditions prévues à l'alinéa 2 du même article :
1- les gérants majoritaires des sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes dans les conditions prévues à l'article 3-IV du décret n° 55-594 du 20 mai 1955 modifié ou dans celles prévues à l'article 239 bis AA du CGI (cf. 4 FE, H 1221) ;
2- les gérants majoritaires des exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) pluripersonnelles non familiales ;
3- les gérants associés commandités 1 des sociétés en commandite par actions ;
4- les associés des sociétés en nom collectif, des entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée (EURL), des EARL à associé unique et des EARL pluripersonnelles de famille, les associés commandités des sociétés en commandite simple, les membres des sociétés en participation (y compris les syndicats financiers) et des sociétés de fait, lorsque ces sociétés ou entreprises ont opté pour l'impôt sur les sociétés (cf. 4 FE, H 117).
5- les associés (gérants ou non) des sociétés civiles de personnes qui n'ayant pas une forme ou un objet commercial ont néanmoins opté pour leur assujettissement à l'impôt sur les sociétés (cf. H 113 ). Il est rappelé qu'une telle option n'est offerte ni aux sociétés civiles de construction-vente (CGI, art. 239 ter ), ni aux sociétés civiles de moyens (CGI, art. 239 quater A ), ni aux sociétés civiles de placement immobilier (CGI, art. 239 septies ), ni aux sociétés civiles immobilières de copropriété dotées de la transparence fiscale (CGI, art. 1655 ter), ni aux groupements forestiers qui remplissent les conditions prévues par les articles L. 241-1 à L. 246-2 du code forestier (CGI, art. 238 ter).
En revanche, les sociétés civiles professionnelles visées à l'article 8 ter du CGI peuvent, à compter du 1er janvier 1996, exercer l'option pour l'application dudit impôt, conformément aux dispositions de l'article 206-3 du CGI.
6- les associés d'une EARL créée à compter du 1er janvier 1989 à l'occasion de l'apport de tout ou partie d'une exploitation individuelle ayant opté pour l'impôt sur les sociétés ; étant précisé, que ces EARL doivent être constituées uniquement entre l'apporteur et un exploitant qui s'installe ainsi que, le cas échéant, entre les membres de leurs familles qui leur sont apparentés dans les conditions fixées au b de l'article 8-5° du CGI, sous réserve que l'exploitation agricole à responsabilité limitée réponde aux conditions fixées au 1° de l'article R* 343-10 du code rural.
Remarque. - Concernant les gérants majoritaires des sociétés à responsabilité limitée et les gérants associés commandités 1 des sociétés en commandite par actions, les dispositions de l'article 62 du CGI trouvent à s'appliquer en ce qui concerne les intéressés, quel que soit l'objet de la société au sein de laquelle ils exercent leurs fonctions, même si cet objet est purement civil.
SECTION 1
Gérants majoritaires de sociétés à responsabilité limitée
1La société à responsabilité limitée est instituée par une ou plusieurs personnes qui ne supportent les pertes qu'à concurrence de leurs apports.
Lorsque la société ne comporte qu'une seule personne, celle-ci est dénommée « associé unique ». L'associé unique exerce les pouvoirs dévolus à l'assemblée des associés.
2Les sociétés à responsabilité limitée sont dirigées par un ou plusieurs gérants, obligatoirement personnes physiques, choisis parmi les associés ou en dehors d'eux. Ceux-ci sont nommés dans les statuts ou dans un acte postérieur. En l'absence de clauses statutaires réglant cette question, les gérants sont nommés pour la durée de la société. Ils sont révocables par décision des associés représentant plus de la moitié des parts sociales.
3Le contrôle de la gestion est effectué par les associés au cours de l'assemblée annuelle obligatoire réunie pour l'approbation des comptes. Il se manifeste également par l'exercice du droit de communication des associés et l'intervention obligatoire d'un commissaire aux comptes dans les sociétés qui dépassent, à la clôture d'un exercice social, les chiffres fixés ci-dessous pour deux des trois critères suivants :
- 50 pour le nombre moyen de salariés ;
- 20 000 000 F pour le montant hors taxes du chiffre d'affaires ;
- 10 000 000 F pour le total du bilan.
Même si ces seuils ne sont pas atteints, la nomination d'un commissaire aux comptes peut être demandée en justice par un ou plusieurs associés représentant au moins un dixième du capital. La désignation d'un conseil de surveillance est facultative.
4L'exercice des fonctions de gérant est généralement rémunéré. Cette rémunération peut être fixée par les statuts ou par une décision collective des associés. Elle peut être soit fixe, soit proportionnelle aux bénéfices ou au chiffre d'affaires, soit à la fois fixe et proportionnelle.
En outre, les gérants peuvent recevoir des avantages en nature ainsi que des indemnités et gratifications. Ils peuvent enfin, bénéficier de remboursements de frais effectués soit sur justifications, soit forfaitairement.
5Il résulte de l'article 62 du CGI que dans les sociétés à responsabilité limitée, seules les rémunérations allouées aux gérants majoritaires sont imposables à l'impôt sur le revenu dans la catégorie visée audit article.
Pour l'application de ce texte, il y a lieu de considérer comme gérant majoritaire :
- l'associé gérant qui détient plus de la moitié des parts sociales ;
- les associés gérants qui appartiennent à un collège de gérants possédant ou détenant plus de la moitié des parts sociales ou le droit de vote attaché à plus de la moitié des parts sociales, alors même que chacun d'eux pris isolément ne possède pas cette majorité.
Par suite, dans le cas où l'associé gérant ou le collège d'associés gérants possède exactement la moitié des parts sociales, la gérance doit être regardée comme n'étant pas majoritaire.
6D'autre part, l'article 62 du CGI soumet à l'impôt les rémunérations allouées aux gérants majoritaires si elles sont admises en déduction des bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés en application de l'article 211 du même code.
7Il résulte donc de la combinaison de ces dispositions que pour être considéré comme gérant majoritaire l'intéressé doit remplir à la fois deux conditions :
- d'une part, avoir la qualité d'associé, étant toutefois précisé :
* qu'il est considéré que les rémunérations allouées aux gérants non associés appartenant à un collège de gérance majoritaire sont également passibles de l'impôt dans les conditions prévues à l'article 62 du CGI (cf. H 133, n° 2 ) ;
* que la qualité d'associé peut être étendue à des personnes ne possédant pas personnellement des parts sociales (cf. H 1111, n°s 11 et suiv. ) ;
- d'autre part, avoir la qualité de gérant, qu'il s'agisse soit d'un gérant de droit, c'est-à-dire d'un gérant désigné dans les statuts ou dans un acte postérieur, soit d'un gérant de fait (cf. H 1112 ).
SOUS-SECTION 1
Qualité d'associé
1D'une manière générale, la qualité d'associé découle de la propriété personnelle de parts sociales.
2Cependant, l'article 211 -I, 3e alinéa, du CGI dispose que cette qualité doit être conférée au gérant qui n'est pas personnellement associé, si son conjoint ou ses enfants non émancipés ont la qualité d'associé.
3Le même texte prévoit dans son 4e alinéa que dans le cas exposé ci-dessus comme dans le cas où le gérant est associé, les parts appartenant en toute propriété ou en usufruit au conjoint et aux enfants mineurs non émancipés du gérant sont considérées comme possédées par ce dernier.
4Au surplus, pour apprécier la qualité d'associé, il convient de tenir compte des parts sur lesquelles le gérant dispose d'un pouvoir d'administration, ainsi que des parts dont il dispose en fait.
En effet, bien que l'article 211-I du CGI ne vise comme devant être ajoutées à celles du gérant que les parts sociales appartenant au conjoint et aux enfants de l'intéressé, ces dispositions ne font pas obstacle à ce qu'il soit tenu compte de toutes les parts sociales dont il dispose effectivement.
5Par ailleurs, il y a lieu de préciser la date à retenir pour apprécier le caractère majoritaire d'une gérance.
A. PARTS POSSÉDÉES PERSONNELLEMENT PAR LE GÉRANT
I. Parts possédées en pleine propriété
6Cette possession résulte en règle générale de l'examen des statuts, des actes modificatifs auxdits statuts ou de tout acte constatant la dévolution de parts sociales.
II. Parts possédées en usufruit ou en nue-propriété
7Dans le cas de démembrement de la propriété de parts de sociétés à responsabilité limitée, les pouvoirs d'administration attachés à ces parts sont exercés non par les nus-propriétaires, mais par les usufruitiers et ceux-ci doivent être regardés comme étant les possesseurs desdites parts.
Il en résulte que pour déterminer si les gérants d'une société à responsabilité limitée possèdent la majorité des parts sociales, il y a lieu de tenir compte de celles dont ils ont l'usufruit (CE, arrêt du 19 mai 1933, req. n° 26083, RO, 1933-6006).
8En revanche, il n'y a pas lieu, en principe, de tenir compte des parts sociales appartenant au gérant en nue-propriété (CE, arrêt du 10 décembre 1943, req. n° 71231 et 74412, RO, p. 393).
III. Parts possédées en indivision
9Les gérants d'une société à responsabilité limitée doivent pour l'appréciation du caractère majoritaire ou non de la gérance, être regardés comme ayant disposé, dans les assemblées sociales, du droit de vote attaché tant à leurs parts personnelles qu'aux parts dont ils sont propriétaires indivis, dès lors qu'ils ne justifient pas de l'existence d'un désaccord sur l'exercice des droits qu'ils tiennent de parts indivises, notamment quant à la gestion même de l'entreprise (CE, arrêt du 10 février 1967, req. n° 69528, RO, p. 50).
Il est précisé, à cet égard, que lorsqu'il existe un accord entre les copropriétaires indivis sur l'exercice des droits relatifs aux parts indivises, cet accord influe sur le décompte des parts retenues pour l'appréciation du caractère de la gérance, et qu'au contraire, en cas de désaccord, les parts sont neutralisées et ne doivent pas être retenues pour apprécier le nombre de parts détenues par la gérance.
En dehors de ces deux hypothèses, c'est-à-dire en l'absence de convention explicite entre les copropriétaires, il y a lieu de rechercher si le gérant a pu exercer, en fait, les droits attachés aux parts sur lesquelles il a un droit indivis (CE, arrêt du 12 février 1965, req. n° 63248, RO, p. 282).
10Lorsqu'un associé-gérant peut être ainsi considéré comme majoritaire compte tenu des parts qu'il possède en indivision, cette qualité lui est reconnue de la date du décès de son auteur (au cas d'espèce, il s'agissait d'une indivision d'origine successorale), jusqu'au jour du partage, alors même que celui-ci aurait pour effet de rendre la gérance minoritaire (CE, arrêt du 16 mai 1949, req. n° 76010, RO, p. 170).
Il est à noter que l'effet déclaratif du partage qui permet de considérer les co-héritiers comme propriétaires, depuis la date du décès, des biens qui leur sont dévolus, n'est pas opposable à l'Administration (CE, arrêt du 23 décembre 1949, req. n° 90276, RO, p. 234 et arrêt précité du 16 mai 1949, req. n° 76010, RO, p. 170).
B. PARTS APPARTENANT AU CONJOINT OU AUX ENFANTS NON ÉMANCIPÉS DU GÉRANT
11Aux termes de l'article 211 -I, 3e alinéa du CGI, les gérants qui n'ont pas personnellement la propriété des parts sociales sont considérés comme associés si leur conjoint ou leurs enfants non émancipés ont la qualité d'associé.
Dans ce cas, comme dans celui où le gérant est associé, les parts appartenant en toute propriété ou en usufruit au conjoint et aux enfants non émancipés du gérant sont considérées comme possédées par ce dernier (CGI, art. 211 -I, 4e alinéa).
I. Parts possédées par le conjoint
12Le gérant, qu'il soit de droit ou de fait (cf. infra H 1112 ) associé ou non, est réputé posséder personnellement les parts sociales appartenant en propriété ou en usufruit à son conjoint.
Ce principe a une portée générale, l'article 211 du CGI ne faisant aucune distinction entre les divers régimes matrimoniaux susceptibles d'exister entre les époux (CE, arrêt du 1er juillet 1946, req. n° 81911 à 81913, RO, p. 57).
C'est ainsi qu'un contribuable non associé personnellement et considéré comme gérant de fait, doit être regardé comme gérant majoritaire dès lors que son épouse associée et le gérant statutaire possèdent la majorité des parts sociales, sans que la circonstance que les époux soient mariés sous le régime de la séparation de biens puisse faire obstacle à l'application de l'article 211-I du CGI (CE, arrêt du 7 février 1958, req. n° 35819, RO, p. 47).
13Ces dispositions sont également applicables en cas de séparation de corps prononcée par un jugement antérieur à la constitution d'une société à responsabilité limitée. Dans cette hypothèse, dès lors qu'il résulte de l'article 299 du Code civil que la séparation de corps ne dissout pas le mariage, les parts appartenant au conjoint du gérant séparé de corps sont considérées comme possédées par ce dernier.
Toutefois, le service pourrait éventuellement ne pas se prévaloir de ces dispositions si les circonstances de fait permettaient d'écarter l'hypothèse d'une combinaison frauduleuse entre les époux et si ces derniers, vivant effectivement séparés, faisaient l'objet d'impositions distinctes conformément aux dispositions de l'article 6-4 du CGI.
14D'autre part, l'article 211-I précité trouve à s'appliquer au gérant en instance de divorce alors même que les époux auraient été autorisés à résider séparément et ce jusqu'à la date à laquelle le divorce est définitivement prononcé ; la circonstance que la femme mariée en instance de divorce ou de séparation de corps fasse l'objet d'une imposition distincte en vertu de l'article 6-3 (art. 6-4 actuel) du CGI est sans incidence à cet égard (CE, arrêt du 22 octobre 1962, req. n° 49861, RO, p. 181).
15Par ailleurs, le gérant d'une société à responsabilité limitée est réputé détenir les parts de son conjoint, bien que celui-ci soit frappé d'interdiction légale et ne puisse exercer ses droits d'associé que par l'entremise d'un tuteur agissant en ses lieu et place dans la société. En effet, cette situation, qui, en ce qui concerne l'exercice de droits d'associés, n'est pas différente de celle des enfants mineurs non émancipés (cf. ci-dessous n° 16 ), visés à l'alinéa 3 de l'article 211 du CGI, n'a pas pour effet de priver l'intéressé de la qualité d'associé pour l'application dudit alinéa 3 (CE, arrêt du 13 juillet 1963, req. n° 53939, RO, 1963, p. 410).
1 Les rémunérations des gérants non associés des sociétés en commandite par actions relèvent de la catégorie des traitements et salaires.