Date de début de publication du BOI : 10/08/1998
Identifiant juridique : 13O4311
Références du document :  13O43
13O431
13O4311

CHAPITRE 3 INSTRUCTION DES INSTANCES DEVANT LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE MESURES D'INSTRUCTION

CHAPITRE 3

INSTRUCTION DES INSTANCES DEVANT LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE
MESURES D'INSTRUCTION

SECTION 1

Instruction des instances

En matière de droits d'enregistrement et de timbre, de taxe de publicité foncière, d'impôt de solidarité sur la fortune et de taxes assimilées à des droits ou taxes, les instances auxquelles la procédure spéciale est applicable sont instruites suivant les formes instituées par les articles R* 202-1 et suiv. du LPF. Cependant, les instances auxquelles la procédure spéciale n'est pas applicable et dont le tribunal de grande instance a, le cas échéant, à connaître doivent, en l'absence de dispositions particulières, être instruites conformément aux règles de la procédure de droit commun fixées par le Nouveau Code de Procédure civile (cf. également 13 O 4 ).

La procédure spéciale d'instruction présente les caractéristiques suivantes :

- elle est écrite  : les prétentions et l'argumentation des parties sont formulées dans des mémoires écrits. Les redevables ne sont admis à présenter des explications orales que pour préciser les arguments exposés dans leurs mémoires écrits (cf. 13 O 4314 ). Cette caractéristique de la procédure entraîne d'ailleurs l'exclusion de certains modes de preuve, telle que notamment la preuve testimoniale 1 [cf. 13 O 1224 et 432 ] ;

- elle est contradictoire : les parties doivent être à même de discuter de l'argumentation et des prétentions de leur adversaire. Les mémoires leur sont donc respectivement signifiés (cf. 13 O 4311 ). Les productions des parties sont également mises à leur disposition respective (cf. 13 O 4313 ) ;

- elle est conduite par le tribunal : le tribunal fixe le délai dans lequel les parties devront produire leurs mémoires respectifs (cf. 13 O 4312 ) ;

- enfin, le ministère d'avocat est facultatif : les parties ne sont pas obligées de constituer avocat. Néanmoins, il ne leur est pas interdit d'y recourir pour la rédaction de leur mémoire et l'exposé verbal, à l'audience, de leurs prétentions et arguments (cf. 13 O 4315 ).

SOUS-SECTION 1

Déroulement de la procédure

1Aux termes de l'article R* 202-2 du LPF « l'instruction se fait par simples mémoires respectivement signifiés ».

À cet égard, ne saurait être considéré comme le mémoire prévu par la loi fiscale un document dépourvu de titre, de dispositif, de date, de signature, de mention de signification [Cass. civ., 3 décembre 1951, BOED, I-6256 2 ].

  A. ÉTABLISSEMENT DES MÉMOIRES

  I. Examen de l'assignation Moyens nouveaux

2Selon l'article L 199 C du LPF, l'Administration ainsi que le contribuable, dans la limite du dégrèvement ou de la restitution sollicités, peuvent faire valoir tout moyen nouveau, tant devant le tribunal administratif que devant la cour administrative d'appel, jusqu'à la clôture de l'instruction. Il en est de même devant le tribunal de grande instance et, pour les jugements rendus à compter du 1er mars 1998, devant la cour d'appel.

Un moyen est « l'énonciation par une partie d'un fait, d'un acte ou d'un texte d'où, par un raisonnement juridique, elle prétend déduire le bien-fondé d'une demande ou d'une défense » (JCP, 1965, I, 1912).

Pour les litiges pendants devant le tribunal de grande instance, il faut entendre par moyen nouveau tout moyen qui, sans constituer une demande nouvelle, modifie la cause juridique de l'argumentation des parties ou qui est fondé sur de nouveaux faits, de nouvelles pièces ou sur une autre interprétation de celles-ci (arguments ou modes de preuve nouveaux). Est également considéré comme un moyen nouveau celui qui résulte de l'appropriation d'un moyen invoqué par une autre partie.

3Dans plusieurs arrêts fixant la jurisprudence (Cass. com., 6 décembre 1978, aff. X...  ; 13 février 1985, aff. SA OTALU ; 15 décembre 1987, aff. Sté Résidence du Petit Lièvre, Bull. IV, n° 276, p. 206), la Cour de cassation avait admis : :

- qu'il résultait des dispositions de l'article L 199 du LPF que le litige porté devant le tribunal est déterminé par le contenu de la réclamation contentieuse adressée au directeur ;

- d'où il suivait que la juridiction appelée à statuer sur la validité de la décision intervenue sur cette demande ne peut dès lors accueillir un moyen de droit nouveau qui n'a pas été soumis à l'Administration.

Désormais, aux termes de l'article L 199 C du LPF, le redevable est admis à se prévaloir devant le juge de tout moyen nouveau (de droit ou de fait).

Ainsi, après avoir contesté le bien-fondé des droits réclamés, le contribuable peut étendre le litige à l'examen de la régularité de la procédure d'imposition ou encore invoquer la prescription de l'action du Service.

En revanche, demeure le principe selon lequel les exceptions de procédure (NCPC, art. 73), bien que constituant des moyens, « doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir » (NCPC, art. 74). Cette règle affecte en particulier l'exception d'incompétence (cf. 13 O 441, n° 2 ) ; quant à l'exception de nullité, pour vice de forme, des actes de procédure civile, elle doit être invoquée au fur et à mesure de leur accomplissement (NCPC, art. 112 ; cf. 13 O 441, n° 6 ).

La jurisprudence précitée est par conséquent périmée en ce qu'elle touche à la recevabilité des moyens nouveaux (cf. n° 3 , 2 ème tiret) ; elle conserve toutefois toute sa portée pour ce qui concerne les conclusions du réclamant au sens de l'article R* 197-3 du LPF, c'est-à-dire l'objet réel et la portée exacte de la demande.

4 La faculté offerte au contribuable ne vaut que « dans la limite du dégrèvement ou de la restitution sollicités  », c'est-à-dire que les conclusions du réclamant demeurent intangibles.

Ainsi, après une réclamation préalable contestant uniquement le principe de l'application de pénalités, un contribuable n'est pas autorisé à demander, en cours d'instance, le dégrèvement des droits en principal.

5En revanche, pour établir que les pénalités ne sont pas exigibles (par exemple en se fondant sur l'existence d'une mention exonératoire, telle que prévue à l'article 1732 du CGI) il est permis au redevable de plaider pour la première fois devant le tribunal que les droits en principal -bien que définitivement acquis 3 au Trésor, en l'absence de réclamation formulée de ce chef dans le délai légal- n'étaient en réalité pas dus et que par voie de conséquence, il ne saurait lui être réclamé une pénalité.

De même, le contribuable n'est pas fondé à demander en cours d'instance la décharge de la totalité des droits, s'il n'en a contesté qu'une partie dans le cadre de sa réclamation.

6Ces mesures ne concernent que les instances suivies devant les tribunaux de grande instance 4 et non celles introduites devant la Cour de cassation.

En cas de renvoi après arrêt de cassation, c'est la même instance qui se poursuit devant la juridiction de renvoi (rapproch. NCPC, art. 625 et 631 ; Cass. com., 31 janvier 1989, X... ). En sorte que les moyens nouveaux sont également recevables à ce stade de la procédure, remarque étant faite que la circonstance qu'un moyen a été repoussé pour cause de nouveauté par la Cour de cassation est sans influence sur son admission en renvoi dès lors que les principes qui gouvernent l'instance devant la Cour Suprême sont, à cet égard, fondamentalement différents. Ainsi, les parties sont, notamment, autorisées à faire état de nouveaux faits ou encore de nouvelles preuves de faits antérieurement débattus

7Un moyen nouveau peut être soulevé par une partie jusqu'à la clôture de l'instruction (cf. ci-après n° 21 ).

En matière fiscale, l'ordonnance de clôture prévue à l'article 782 du NCPC n'interdit pas aux parties de solliciter du tribunal, seul compétent pour les accorder, les délais nécessaires pour présenter leur défense (Cass. com., 13 juin 1984, aff. SCI du lieu Gaugain). Sous réserve que les juges aient donné leur accord, un moyen nouveau est donc recevable, quand bien même il serait invoqué après l'ordonnance de clôture (cf. également ci-après n° 21 ).

  II. Mémoire en défense du directeur

1. Rédaction du mémoire.

8Les mémoires en défense de l'Administration -ainsi d'ailleurs que, le cas échéant, les mémoires en réplique (cf. ci-après n° 11 )- sont établis par l'administration des Impôts, représentée par le directeur compétent -territorial ou spécialisé- qui élit domicile en ses bureaux.

La loi fiscale ne précise pas dans quelle forme les mémoires doivent être rédigés.

Néanmoins, on indiquera que, d'une manière générale, les mémoires à produire dans les affaires suivies selon la procédure spéciale doivent, indépendamment de l'en-tête et du sommaire, comporter pour l'essentiel l'analyse des faits, l'argumentation de la partie adverse, l'énoncé de la législation et des principes applicables, la citation de la jurisprudence rendue sur le sujet, l'application des règles et des principes à l'espèce, la réfutation des moyens invoqués, enfin les conclusions.

Dans les affaires où une ou plusieurs exceptions sont à faire valoir en premier lieu (cf. 13 O 441 ) il convient, en règle générale, de discuter le fond à titre subsidiaire.

En revanche, lorsque la demande en justice est irrecevable du fait, par exemple, de l'incompétence totale du tribunal saisi, de la forclusion, du défaut de réclamation préalable, ou encore, lorsqu'elle échappe à la compétence de la Direction générale des Impôts, le directeur doit se borner à établir un mémoire sommaire constatant l'irrecevabilité de l'assignation ou l'incompétence des Services fiscaux.

Il en est de même lorsque la réclamation préalable a été présentée hors délai ou était entachée d'un vice de forme non susceptible d'être couvert devant le tribunal (cf. 13 O 4233, n°s 2 et 4 ).

Les pièces produites au tribunal (cf. 13 O 4313 ) doivent être énumérées de façon très complète en fin de mémoire.

2. Approbation éventuelle de la Direction générale.

9Les mémoires produits devant le tribunal de grande instance sont, en principe, dispensés de l'approbation de la Direction générale. Toutefois, il est toujours possible aux directeurs de saisir la Direction générale, par voie de demandes d'instruction, des difficultés qu'ils pourraient rencontrer tant sur le fond du droit que sur la procédure.

S'agissant des projets de mémoires relatifs à des affaires de recouvrement, cf. série 12 R division C .

3. Présentation matérielle du mémoire.

10Après renvoi, le cas échéant, par la Direction générale (cf. ci-dessus n° 9 ), le mémoire en défense est rédigé sur papier non timbré.

Il doit être daté et signé, soit par le directeur des Services fiscaux territorial, soit par le directeur d'un service spécialisé 5 et revêtu du cachet d'authenticité.

Le mémoire en défense est ensuite signifié à la partie adverse par ministère d'huissier (cf. ci-dessous n° 13 ).

  III. Mémoire en réplique du réclamant et de l'Administration

11Le contribuable peut s'abstenir de répondre au mémoire en défense du directeur. En effet, une assignation contenant des motifs auxquels l'Administration a régulièrement répondu, vaut mémoire, et il importe peu que le redevable use ou non de la faculté de donner dans un mémoire ultérieur plus de développements aux moyens qu'énonce son assignation (Cass. com., 21 janvier 1969, RJ, 2e partie, p. 16).

S'il l'estime au contraire nécessaire, le contribuable produit un mémoire en réplique 6 .

De son côté, le directeur peut ne pas répondre lorsque le mémoire en réplique produit par le contribuable ne présente aucun argument nouveau. Dans le cas contraire, il établit à son tour un mémoire en réplique contenant des éléments de réponse et confirmant ou modifiant, s'il y a lieu, les conclusions du premier mémoire en défense 6 .

Les mémoires en réplique de l'Administration doivent simplement relater les faits survenus depuis la signification du précédent mémoire, sans revenir sur les faits antérieurs et la discussion est limitée en principe aux arguments qui n'ont pas encore été examinés.

12Le nombre de mémoires en réplique que l'Administration ou la partie adverse peuvent produire n'est, bien entendu, pas limité, à condition toutefois d'être utiles au soutien de la cause.

Chacune des parties peut former des demandes additionnelles, dans la mesure où ces dernières sont intimement liées à la demande originaire et n'en constituent que le développement (cf. 13 O 444 ).

Elles peuvent également former des demandes reconventionnelles à la condition que la demande concerne le même objet que la demande originaire (cf. 13 O 444 ).

À l'inverse, l'Administration et le redevable peuvent, dans leurs mémoires, renoncer à une partie des prétentions qu'ils avaient exprimées dans la réclamation ou l'assignation.

Les parties sont seules juges des développements qu'elles entendent donner à leur défense pourvu que les explications soient nécessaires à la solution du litige. Elles doivent simplement énumérer en fin de mémoire les pièces produites au tribunal (cf. 13 O 4313 ).

Les mémoires sont rédigés sur papier non timbré, datés et signés (cf. ci-dessus n° 10 ).

En ce qui concerne plus particulièrement les mémoires de l'Administration, ils sont, le cas échéant, soumis à l'approbation de la Direction générale (cf. ci-dessus n° 9 ) et dans tous les cas présentés suivant les formes prévues pour l'établissement du mémoire en défense du directeur (cf. ci-dessus n° 10 ).

Les mémoires en réplique sont, ensuite, respectivement signifiés à la partie adverse par ministère d'huissier (cf. ci-dessous n° 13 ).

1   Cependant, dans les instances en matière de droits d'enregistrement, cette exclusion n'interdit pas aux juges du fond de constater les faits selon des présomptions graves, précises et concordantes invoquées dans les mémoires produits ou selon des attestations annexées à ces mémoires.

2   Au surplus, certaines énonciations de ce document faisaient ressortir que sa rédaction était postérieure à la clôture des débats de l'instance.

3   Sous réserve de la mise en oeuvre de l'article R* 211-1 du LPF (dégrèvement d'office).

4   Et la cour d'appel, pour les jugements rendus à compter du 1er mars 1998.

5   Sauf à déléguer leur signature à un directeur assistant.

6   En pareil cas, des délais supplémentaires doivent être sollicités du tribunal, faute de quoi l'affaire est en état d'être jugée (cf. ci-dessous n°s 19 et suiv. et 13 O 4312).