Date de début de publication du BOI : 01/07/2002
Identifiant juridique : 13L1326
Références du document :  13L1326

SOUS-SECTION 6 DÉDUCTION EN CASCADE

SOUS-SECTION 6

Déduction en cascade

  A. PRINCIPES GÉNÉRAUX

1L'article L. 77 du LPF permet aux contribuables d'obtenir, sous certaines conditions (cf. n os23 et suivants ci-après), que les suppléments de droits simples résultant d'une vérification soient admis en déduction des rehaussements apportés aux bases d'autres impôts également vérifiés, l'imputation s'effectuant dans l'ordre où les droits rappelés auraient dû normalement influencer ces bases si les déclarations fiscales avaient été correctement souscrites.

Toutefois, l'article 12 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant DDOEF exclut l'application du mécanisme de déduction en cascade (article L. 77 du LPF) et de la déduction prévue par les dispositions de l'article 39-1-4° du CGI, pour les rappels de taxe sur la valeur ajoutée se rapportant à des opérations d'autoliquidation (cf. n os17 et suivants ci-après).

2Ce système dit de la « déduction en cascade » permet ainsi de placer les contribuables vérifiés dans la situation où ils se seraient trouvés s'ils n'avaient commis aucune infraction. Il comporte deux mesures :

  I. La cascade simple

3La première est relative à la déduction, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, de la charge constituée par les suppléments de taxes sur le chiffre d'affaires. De tels suppléments sont normalement une charge déductible de l'exercice au cours duquel ils sont mis en recouvrement. Le système de la cascade autorise leur imputation immédiate sur les résultats de chacun des exercices vérifiés au cours duquel ont été réalisées les opérations passibles desdites taxes sur le chiffre d'affaires.

Le contribuable se trouve dès lors dans la même situation que si les taxes rappelées avaient été, à l'origine, régulièrement acquittées.

  II. La cascade complète

4La seconde mesure vise le cas où, dans les sociétés de capitaux, les bénéfices compris dans les rehaussements effectués sont considérés comme distribués, dès lors qu'ils ne sont pas demeurés investis dans l'actif social.

C'est normalement sur le montant intégral de ces bénéfices, c'est-à-dire sur le total des sommes désinvesties, que sont assis les impôts éventuellement dus à raison de la distribution :

- qu'il s'agisse de la retenue à la source, applicable aux produits distribués à des personnes dont le domicile fiscal ou le siège est situé hors de France ;

- ou de l'impôt sur le revenu à la charge des bénéficiaires connus ou désignés.

Le procédé de la cascade permet, pour l'assiette de ces impôts, d'imputer sur les bénéfices réputés distribués - déjà diminués le cas échéant, du supplément de taxes sur le chiffre d'affaires y afférent- le rappel d'impôt sur les sociétés correspondant au redressement effectué, sous la condition expresse que les bénéficiaires de la distribution reversent dans la caisse sociale le montant des taxes sur le chiffre d'affaires et de l'impôt sur les sociétés rappelé et, le cas échéant, la retenue à la source se rapportant aux sommes qu'ils ont appréhendées.

La retenue à la source et l'impôt sur le revenu exigibles du fait de la distribution peuvent alors être établis comme si cette dernière avait été effectuée dans des conditions régulières excluant tout redressement.

L'institution du système de la déduction en cascade présente, généralement, des avantages pour les contribuables vérifiés.

5Supprimant la superposition des impôts, ce système aboutit, en effet, à un allégement immédiat de la charge que constituent pour la trésorerie des entreprises les rappels de droits simples résultant de la vérification.

6II entraîne, par ailleurs, une réduction définitive des pénalités proportionnelles encourues, dont les bases de calcul et parfois les taux subissent une diminution corrélative à celle des droits simples.

  B. CHAMP D'APPLICATION DE LA CASCADE

  I. Impôts dont la déduction en cascade est autorisée

7Il résulte des dispositions de l'article L. 77 du LPF que les seuls impôts dont la déduction en cascade est autorisée sont :

- les taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées ;

- l'impôt sur les sociétés.

D'une part, la retenue à la source sur le revenu des capitaux mobiliers - éventuellement exigible en vertu des dispositions de l'article 119 bis-2 du CGI - n'est l'objet d'aucune imputation et ouvre seulement droit à un crédit d'impôt utilisable par les bénéficiaires dans les conditions habituelles.

D'autre part, seuls les suppléments de droits simples sont imputables, à l'exclusion des pénalités encourues.

  II. Vérifications pouvant donner lieu à l'application de la cascade

1. Vérification générale ou vérification simultanée.

8Le système de la déduction en cascade est applicable en cas de vérification générale ou de vérification simultanée des taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées et de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés.

2. Vérifications séparées.

9Dans cette hypothèse, la déduction prévue des suppléments de taxes sur le chiffre d'affaires n'est autorisée que si la vérification de ces taxes a été achevée avant celle des impôts sur le revenu (sur la notion de vérification achevée, cf. DB 13 L 1315, n° 1 ).

Cette disposition restrictive, motivée par le souci d'éviter la remise en cause d'impositions supplémentaires déjà arrêtées, ne devra pas être systématiquement opposée aux contribuables. Par contre, le service devra s'en prévaloir lorsqu'en raison, notamment, des risques de prescription, il ne lui sera pas possible de tirer en temps utile, pour l'assiette des impôts sur les revenus, les conséquences des redressements opérés à l'occasion de la vérification des taxes sur le chiffre d'affaires.

10II est rappelé que tout contribuable faisant l'objet d'une vérification portant seulement, soit sur les taxes sur le chiffre d'affaires, soit sur les impôts sur les revenus, a toujours la faculté de demander que cette vérification soit étendue à l'ensemble de ces taxes et impôts, afin de pouvoir bénéficier éventuellement de l'intégralité des déductions prévues dans le système de la cascade (cf. DB 13 L 1316 ).

3. Nature des vérifications visées par l'article L. 77 du LPF.

11L'article L. 77 ne donne aucune indication sur la nature de la vérification simultanée et des vérifications séparées visées à l'article L. 79 du LPF.

Par ces expressions, il faut entendre essentiellement les contrôles comptables généraux ou simples et les vérifications de comptabilité proprement dites, qu'il s'agisse de vérifications générales ou de vérifications simples.

À défaut de précision contraire dans le texte, on admettra également l'application du procédé de la cascade dans le cas de redressements résultant de l'examen sur place des documents dont la tenue et la communication sont prescrites aux contribuables dispensés, en raison de leur régime fiscal, de présenter une comptabilité complète.

12La cascade peut également être appliquée lorsque la rectification des déclarations de l'entreprise résulte de travaux de bureau, c'est-à-dire d'un contrôle sur pièces. Tel est le cas, par exemple, lorsque l'examen de la déclaration et des documents annexes, complété au besoin par les renseignements obtenus du contribuable, aboutit à réintégrer dans les résultats passibles de l'impôt sur les sociétés des dépenses considérées comme des revenus distribués, sous la double condition prévue par l'article L. 77 du LPF du reversement et d'une demande du contribuable visant à obtenir l'imputation du supplément d'impôt sur les sociétés pour l'assiette des impôts dus à raison de la distribution (retenue à la source éventuellement due par la société et impôt sur le revenu dû par les bénéficiaires désignés).

4. Procédures de reprise ou de redressement compatibles avec la déduction en cascade.

13Compte tenu des termes généraux du texte légal, la procédure de la cascade doit pouvoir s'appliquer aussi bien en cas d'évaluation d'office que de taxation d'office, sous réserve que les impositions supplémentaires aient été arrêtées à la suite d'une vérification effective de comptabilité permettant, notamment, au service de connaître le montant des taxes sur le chiffre d'affaires pris en charge par l'entreprise afin d'éviter tout double emploi avec la déduction en cascade des taxes rappelées.

5. Application de la cascade en l'absence de tout rehaussement des bénéfices.

14Le service ne refusera pas d'effectuer l'imputation d'un rappel de taxes sur le chiffre d'affaires, même lorsque la vérification n'aura pas conduit à un rehaussement en matière d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés.

  III. Contribuables pouvant prétendre à la déduction en cascade

15Les dispositions de l'article L. 77 du LPF trouvent essentiellement leur application à l'égard des sociétés et personnes morales de toute nature passibles de l'impôt sur les sociétés ainsi que des entreprises industrielles et commerciales (sociétés de personnes ou exploitants individuels) soumises au régime du bénéfice réel, normal ou simplifié, pour l'assiette des impôts sur les revenus. Elles s'appliquent en outre aux contribuables exerçant une profession non commerciale imposée selon le régime de la déclaration contrôlée, qui sont assujettis à la TVA ou qui ont opté pour le paiement de cette taxe, et également aux exploitants agricoles imposés selon le régime du bénéfice réel normal ou simplifié et assujettis obligatoirement ou par option-à la TVA selon le régime simplifié de l'agriculture.

16Par contre, ne sauraient prétendre à la déduction en cascade les exploitants agricoles imposés forfaitairement à l'impôt sur le revenu dès lors que le forfait collectif tient compte implicitement des taxes sur le chiffre d'affaires normalement dues.

  IV. Exclusion du mécanisme de déduction en cascade dans le cas d'opérations auto-liquidées

17L'article 12 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant DDOEF, codifié au 2ème alinéa de l'article L. 77 du LPF, exclut l'application du mécanisme de déduction en cascade pour les rappels de taxe sur la valeur ajoutée se rapportant à des opérations d'autoliquidation dès lors que la taxe ne constitue pas, dans ces hypothèses, une charge pour l'entreprise.

1. Portée de la mesure.

181° La mesure concerne tous les rappels portant sur des opérations d'autoliquidation, c'est-à-dire les opérations pour lesquelles la taxe déductible est celle acquittée par les redevables eux-mêmes.

Il s'agit notamment des opérations suivantes :

- acquisitions intracommunautaires (CGI, art. 256 bis) ;

- prestations immatérielles visées à l'article 259 B du CGI ;

- achats à des non-assujettis (CGI, art. 257-10°) ;

- transports intracommunautaires de biens meubles (CGI, article 259-A-3°) ;

- prestations accessoires aux transports intracommunautaires (CGI, article 259 A-5°) ;

- travaux et expertises sur biens meubles corporels (CGI, article 259 A-4° bis) ;

- prestations des intermédiaires sur des opérations portant sur des biens meubles autres que celles visées à l'article 259 A-3° et 5° du CGI ;

- livraisons à soi-même de biens taxables en application des dispositions des articles 257-7° et 257-8° du CGI.

192° La mesure ne concerne que les rappels de taxe effectivement déductible. Ainsi :

- lorsque l'opération non déclarée n'ouvre pas droit à déduction, le rappel de TVA correspondant demeure dans le champ d'application du 1er alinéa de l'article L. 77 du LPF ;

- lorsque l'opération ouvre intégralement droit à déduction, le rappel de TVA correspondant est totalement exclu du mécanisme de la cascade prévu par les dispositions de l'article L. 77 du LPF ;

- lorsque l'opération non déclarée ouvre partiellement droit à déduction, seule la partie du rappel qui correspond à la fraction de TVA effectivement déductible est exclue des dispositions du 1er alinéa de l'article L. 77 du LPF.

203° Par ailleurs, il est rappelé que, dans une décision du 6 octobre 1997 (SCI HURKS Réalisations immobilières, n° 147611), le Conseil d'État a jugé dans le cas de prestations rendues en France par des entreprises étrangères et relevant de l'article 259 B du CGI que le profit sur le Trésor ne pouvait être constaté tant que le droit à déduction n'était pas ouvert à l'entreprise.

Cette décision jurisprudentielle est transposable à tous les cas d'autoliquidation de la TVA, la doctrine antérieure étant désormais rapportée.

En conséquence, les rappels portant sur des opérations d'autoliquidation pour lesquelles le droit à déduction est total, ne donnent lieu ni à notification du profit sur le Trésor, ni à déduction en cascade des droits rappelés.

2. Mesures de simplification pour la déduction de la taxe afférente aux rappels effectués au titre d'opérations non déclarées par le redevable et ouvrant droit à déduction.

21Pour les opérations d'autoliquidation, la doctrine administrative prévoit, à compter du 1er juillet 1998, l'imputation de la taxe déductible rappelée dans le cadre de la procédure de redressement, en cas de défaut de déclaration par un redevable de bonne foi.

Le contenu de cette mesure de simplification qui a pour effet de neutraliser le montant du rappel restreint la portée du dispositif présenté aux n os17 à 20 . Les dispositions codifiées sous le 2ème alinéa de l'article L. 77 du LPF ne trouvent plus, de ce fait, à s'appliquer qu'aux seuls rappels pour lesquels la mauvaise foi est établie. Dans cette hypothèse, le bénéfice de la tolérance administrative est, en effet, écarté.