Date de début de publication du BOI : 10/08/1998
Identifiant juridique : 13O3311
Références du document :  13O33
13O331
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CHAPITRE 3 INSTRUCTION DES DEMANDES MESURES SPÉCIALES D'INSTRUCTION

CHAPITRE 3

INSTRUCTION DES DEMANDES
MESURES SPÉCIALES D'INSTRUCTION

SECTION 1

Instruction des demandes

Il résulte notamment des dispositions de l'article R* 200-1 du LPF que l'instruction des demandes au tribunal administratif doit, d'une manière générale, être conduite conformément aux règles de la procédure de droit commun fixées par le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel 1 .

Ces règles sont exposées ci-après 2 en tenant compte, d'une part, des modalités particulières prévues par le Livre des procédures fiscales 3 et, d'autre part, des mesures à prendre pour procéder à l'examen des affaires et permettre au service de formuler en toute connaissance de cause ses observations et conclusions.

SOUS-SECTION 1

Procédure générale d'instruction

1En matière fiscale comme dans le droit commun, l'instruction des instances devant le tribunal administratif présente les trois caractères suivants :

- elle est conduite par le tribunal lui-même  : la requête du contribuable et la réponse de l'Administration sont adressées au tribunal. C'est le président de la formation de jugement qui règle leur communication à la partie adverse ; c'est lui qui fixe le délai dans lequel il devra y être répondu, adresse, le cas échéant, une mise en demeure à la partie défaillante et fixe la date à partir de laquelle l'instruction sera close ;

- elle est écrite : les prétentions et l'argumentation des parties sont formulées dans des mémoires écrits. Les plaidoiries ne sont pas obligatoires. Il ne peut y être fait état que des moyens et conclusions contenus dans des mémoires écrits. Tout moyen nouveau développé à l'audience doit être confirmé par écrit ;

- elle est contradictoire : les parties doivent être mises à même de discuter l'argumentation et les prétentions de leurs adversaires. Leurs requêtes et mémoires leur sont donc, sauf exception, respectivement notifiés en copie par les soins du tribunal avec fixation d'un délai de réponse. Les productions des parties sont également mises à leur disposition respective.

  A. OUVERTURE DE L'INSTRUCTION

2Les demandes sont inscrites, à leur arrivée au greffe du tribunal administratif, sur le registre d'ordre qui est tenu par le greffier en chef (C. TA-CAA, art. R 100).

Le président du tribunal administratif ou, à Paris, le président de la section à laquelle la requête a été transmise, désigne un rapporteur. Sous l'autorité du président de la formation de jugement à laquelle il appartient, le rapporteur fixe, eu égard aux circonstances de l'affaire, le délai accordé, s'il y a lieu, aux parties pour produire mémoire complémentaire, observations, défense ou réplique. Il peut demander aux parties, pour être jointes à la procédure contradictoire, toutes pièces ou tous documents utiles à la solution du litige (C. TA-CAA, art. R 142).

Toutefois lorsqu'il apparaît au vu de la demande introductive d'instance que la solution de l'affaire est d'ores et déjà certaine, le président peut décider qu'il n'y aura pas lieu à instruction et transmettre le dossier au commissaire du Gouvernement (C. TA-CAA, art. R 149).

Bien entendu, la dispense d'instruction revêt un caractère exceptionnel. En effet, lors d'une affaire, le tribunal administratif avait estimé que le rejet de la demande en restitution dont il était saisi par un contribuable pouvait intervenir sans qu'il y ait lieu à instruction préalable, par le motif que cette demande présentait à juger les mêmes questions que celles qu'il avait jugées, entre les mêmes parties, par un jugement antérieur. Le Conseil d'État a considéré que la solution à donner au litige soulevé par cette demande ne pouvait, de ce seul fait, apparaître d'ores et déjà certaine, et qu'il convenait d'instruire normalement l'affaire. Il a annulé en conséquence le jugement comme ayant été rendu à la suite d'une procédure irrégulière (CE, arrêt du 3 avril 1968, req. n°s 65926, 66467 et 66468, Société générale de Surveillance, SA, RJ, 2e partie, p. 97).

  B. NOTIFICATION AU DIRECTEUR DE LA DEMANDE ET DES MÉMOIRES ULTÉRIEURS

3Après enregistrement de la demande au greffe -et à moins qu'elle ne soit déclarée non avenue ou qu'il n'y ait pas lieu à instruction (cf. ci-dessus n° 2 )- le greffier notifie au directeur copie de cette demande ainsi que, le cas échéant, une copie des mémoires ampliatifs du contribuable (C. TA-CAA, art. R 138).

Cette notification, à laquelle il pourrait être procédé par la voie administrative (C. TA-CAA, art. R 140) est, en règle générale, effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (C. TA-CAA, art. R 139).

Il est précisé que l'original de chaque demande ou mémoire produit demeure annexé au dossier du tribunal et que les copies notifiées à l'Administration ne devront en aucun cas être renvoyées au greffe.

En raison du caractère contradictoire de la procédure, le défaut de communication au directeur tant de la demande que des mémoires ultérieurs, a pour effet de vicier la procédure (cf. toutefois n°s 7 et 14 ).

Ainsi, le Conseil d'État a annulé :

- le jugement qui se fonde sur des moyens développés par l'une des parties dans un mémoire non communiqué à l'autre partie (CE, arrêt du 13 mai 1935, n° 88863, société « Le foyer des Jeunes », Bull., n° 19, 1935, p. 281, TJCA, n° 17010, Leb. chron., p. 547, 1re esp.) ;

- le jugement rendu par un tribunal qui s'est abstenu de communiquer à l'Administration un mémoire produit par le contribuable au cours de l'instance et contenant des éléments nouveaux d'information (CE, arrêt du 12 janvier 1953 n° 20761, X... , RO, p. 198, Leb. chron., p. 649).

  C. COMMUNICATION DE LA DEMANDE À L'AGENT CHARGÉ DE L'INSTRUCTION

4Dès son arrivée à la direction et à moins qu'elle ne soit entachée d'un vice de forme évident la rendant définitivement irrecevable, la demande est communiquée à l'agent chargé de l'instruction. Il en est de même des mémoires notifiés postérieurement à la demande.

L'agent instructeur procède à un examen approfondi de la demande ou du mémoire tant en la forme qu'au fond. Après. avoir effectué les recherches ou enquêtes nécessaires et recueilli, le cas échéant, les avis utiles 4 , il renvoie les pièces communiquées au directeur, accompagnées d'un rapport 5 circonstancié et motivé contenant son avis et ses conclusions sur le mérite de la demande. À cet égard, il propose, s'il y a lieu, les dégrèvements qui lui paraissent justifiés ainsi que le remboursement des frais exposés par le contribuable (LPF, art. R* 207-1 ).

  D. MÉMOIRE EN DÉFENSE DU DIRECTEUR

5Dès réception du dossier renvoyé par l'agent instructeur, la direction examine l'affaire, fait procéder, s'il y a lieu, aux suppléments d'enquête qui lui paraissent utiles et établit un mémoire en défense.

Il est précisé que dans la mesure où le contribuable a présenté plusieurs requêtes distinctes mais fondées sur la même argumentation et se rapportant à des impositions de même nature établies au titre d'années successives, le directeur peut présenter ses observations en défense sous la forme d'un mémoire commun (CE, arrêt du 10 janvier 1973, n° 79312, RJ, n° IV, p. 3).

Le mémoire en défense doit relever les vices de forme constatés et contenir notamment l'exposé des conditions d'établissement de l'imposition contestée, l'indication des textes légaux ou réglementaires et de la jurisprudence applicables, la discussion des arguments invoqués par le contribuable ainsi que ses propres conclusions en ce qui concerne tant la suite susceptible, à son avis, d'être donnée à la demande que le remboursement des frais-exposés.

C'est ainsi que, en ce qui touche les conditions et la procédure d'établissement de l'imposition contestée, lorsque l'Administration a procédé, à bon droit, en raison des irrégularités relevées dans la comptabilité d'un contribuable, à la rectification d'office 6 des résultats déclarés, elle doit, néanmoins, en cas de litige, faire connaître au tribunal administratif les bases de ses rectifications avec une précision suffisante pour que l'intéressé puisse utilement les discuter, faute de quoi le tribunal ne peut valablement rejeter la demande (CE, arrêt du 27 octobre 1965, n° 61635, RO, p. 413).

Dans le cas où la réclamation est reconnue entièrement fondée, le directeur prononce les dégrèvements ou restitutions demandés, notifie sa décision au contribuable et établit un mémoire sommaire indiquant que la demande est devenue sans objet et qu'il y a lieu de prononcer le remboursement, le cas échéant, des frais d'enregistrement du mandat.

Si la réclamation n'est reconnue fondée qu'en partie, il prononce d'office immédiatement les dégrèvements ou restitutions justifiés, notifie sa décision au réclamant et établit ensuite son mémoire.

Toutefois, en matière d'impôts directs locaux et de taxes assimilées, lorsque le directeur conclut à l'admission pure et simple d'une demande en décharge ou réduction, il laisse au tribunal administratif le soin de prendre la décision, si ces conclusions sont contraires à l'avis que le maire, la commission communale ou la chambre des métiers ont été appelés à formuler soit sur la réclamation préliminaire, soit au cours de la procédure devant le tribunal administratif.

Le cas échéant, le redressement ou la liquidation judiciaires du requérant, même survenant en cours d'instance, sont immédiatement portés à la connaissance du tribunal.

L'original du mémoire en défense est daté et signé par le directeur 7 . Toutefois, dans une affaire où le mémoire produit par l'Administration devant le tribunal n'avait pas été signé par le directeur lui-même, le Conseil d'État a estimé que cette circonstance était sans influence sur la régularité du jugement dès lors que ce mémoire ne contenait que des conclusions en défense (CE, arrêt du 9 décembre 1970, dame veuve X... , n° 79282, RJ, n° IV, p. 171).

Enfin, le mémoire en défense de l'Administration, accompagné du nombre de copies nécessaires (cf. ci-dessus 13 O 3232, n° 25 ) est transmis au bureau central du greffe sous pli recommandé avec avis de réception, chaque pli ne devant contenir que des pièces relatives à une même affaire.

  E. NOTIFICATION AU CONTRIBUABLE DU MÉMOIRE EN DÉFENSE DE L'ADMINISTRATION

  I. Principe

6Le mémoire de l'Administration est notifié, en copie, au contribuable ou à son mandataire par les soins du greffier qui, à cette occasion, signale éventuellement à l'intéressé les vices de forme qu'il peut régulariser (cf. ci-dessus 13 O 3233, n°s 8 et suiv. ).

Agissant sur ordre du président ou du rapporteur, le greffier fixe au contribuable le délai qui lui est imparti pour produire un mémoire en réplique (C. TA-CAA, art. R 138 et R 142 et LPF, art. R* 200-5 ).

  II. Défaut de communication au contribuable

1. Défaut de communication non imputable au contribuable.

En raison du caractère contradictoire de la procédure, la non-communication au contribuable des pièces ou documents produits par l'Administration a pour effet de vicier la procédure devant le tribunal administratif.

Ainsi a été annulé le jugement rendu par un tribunal qui s'était abstenu de communiquer au contribuable un mémoire en réponse de l'Administration contenant des éléments nouveaux, concernant notamment la valeur des justifications invoquées par le contribuable à l'appui de sa réclamation (CE, arrêt du 10 février 1964, n° 55581, RO, P. 27)

Toutefois, la haute juridiction a jugé régulier le jugement faisant état, dans ses motifs, d'une lettre non portée à la connaissance du contribuable mais ne contenant pas d'autres éléments que ceux figurant dans les pièces dont le contribuable avait eu communication (CE, arrêt du 27 avril 1936, n° 21843, X... , Bull., n° 14, 1936, p. 238, TJCA, n° 17013).

2. Défaut de communication imputable au redevable.

Dans la mesure où la non-communication des mémoires résulte d'un changement d'adresse non signalé par le contribuable au tribunal, ce dernier n'est pas fondé à soutenir l'irrégularité de la procédure (CE, arrêt du 14 juin 1967, n° 66376, X... , RJ, 2e partie, p. 145 et arrêt du 16 juin 1967, n° 70556, dame X... Fernande, RJ, 2e partie, p. 156). Et il en est ainsi alors même que le changement d'adresse aurait été signalé à l'Administration (CE, arrêt du 23 janvier 1970, n° 66634, Société Ventimex, SARL, RJ, n° IV, p. 5).

  F. MÉMOIRE EN RÉPLIQUE DU REQUÉRANT OU DE L'ADMINISTRATION

7En réponse à la notification par le greffier du mémoire en défense de l'Administration, le contribuable peut transmettre au greffe un ou plusieurs mémoires en réplique.

Toutefois, aux termes de l'article R 138 du C. TA-CAA modifié par le décret 97-563 du 29 mai 1997, les mémoires en réplique ne sont communiqués que s'ils contiennent des éléments nouveaux. Cette disposition est applicable à compter du 1er septembre 1997 (cf. également n° 14 ).

Lorsqu'ils sont notifiés par le greffe au directeur, ils donnent lieu de la part de ce dernier à l'établissement d'un nouveau mémoire contenant les éléments de réponse convenables et confirmant ou modifiant, s'il y a lieu, les conclusions du premier mémoire en défense 8 .

Ainsi, la procédure se poursuit par échange de mémoires entre le contribuable et le directeur jusqu'à ce que l'affaire soit en état d'être jugée.

Tous les mémoires -ceux du directeur, comme ceux du contribuable- doivent être accompagnés de copies certifiées conformes et en nombre suffisant (cf. ci-dessus 13 O 3232, n°s 25 et suiv. ).

1   Reproduit en annexe.

2   Bien qu'elles soient plus spécialement décrites sous l'angle des demandes présentées par les contribuables, les règles dont il s'agit sont bien entendu applicables " mutatis mutandis " aux instances introduites par l'Administration.

3   Cf. articles L 11 et R 233 du C. TA - CAA.

4   Depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 59-1472 du 28 décembre 1959, l'avis du maire, de la commission communale des impôts directs ou de la chambre des métiers ne doivent plus être obligatoirement recueillis au cours de l'instruction des instances visant les impôts directs. Mais, pour des raisons d'opportunité, l'avis du maire et de la commission communale doit être demandé lorsque l'instance porte sur la taxe d'habitation.

En outre, s'il l'estime utile pour la solution de l'affaire, l'agent instructeur a toujours la faculté de consulter le maire, de lui adresser des demandes de renseignements, ou même de solliciter son avis et, le cas échéant, celui de la commission communale des impôts directs.

5   Dès lors qu'ils entraînent l'assistance ou le dessaisissement du débiteur, le redressement ou la liquidation judiciaire du contribuable, même survenant en cours d'instance, doivent être signalés à la direction de manière à être portés immédiatement à la connaissance du tribunal.

6   La procédure de rectification d'office a été supprimée par l'article 81-I de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986).

7   Les directeurs régionaux et les directeurs de services spécialisés sont compétents pour établir et signer les mémoires relatifs aux impositions assises par les agents placés sous leur autorité.

8   En règle générale, les mémoires du contribuable sont communiqués à l'agent instructeur pour enquête et avis, dans les mêmes conditions que la demande (cf. ci-dessus n° 4 ), avant l'établissement de la réponse de l'Administration.