Date de début de publication du BOI : 01/10/1996
Identifiant juridique : 13E3383
Références du document :  13E3383

SOUS-SECTION 3 DÉCISIONS SUSCEPTIBLES D'APPEL CONDITIONS


SOUS-SECTION 3

Décisions susceptibles d'appel
Conditions



  A. QUANT AUX JUGEMENTS



  I. Caractère général du droit d'appel


1Conformément aux dispositions de l'article 496 du Code de Procédure pénale, les jugements rendus en matière correctionnelle peuvent être attaqués par la voie de l'appel.

Ce droit d'appel qui est général ne peut être refusé qu'en vertu d'une disposition expresse dont l'interprétation stricte s'impose (Cass. crim., 27 décembre 1946, D. 1947, 94 ; Cass. crim., 14 octobre 1954, D. 1954, 694 ; Cass. crim., 9 février 1960, Rev. sc. crim. 1960, p. 685 ; Cass. crim. 17 mars 1977, D. 1978, IR 113).

En principe, les décisions suivantes des tribunaux correctionnels peuvent donc être « portées » devant la cour d'appel :

- jugements de condamnation ou de relaxe ;

- décisions sur le fond ou sur un incident ;

- jugements contradictoires ou par défaut.

Les jugements d'avant-dire droit peuvent faire l'objet d'un appel distinct de l'appel sur le fond dans des conditions particulières, suivant que ces décisions ont mis fin ou non à la procédure (Code de Proc. pén., art. 507 et 508).


  II. Jugements par défaut


2Une partie jugée par défaut a le choix entre l'opposition, voie de rétractation, et l'appel, voie de réformation (Cass. crim., 9 août 1872, S. 73, 1, 181 ; Cass. crim., 13 juillet 1893, D. 96, 1, 436).

L'opposition régulière anéantit le jugement par défaut et l'appel devient sans objet (Cass. crim., 4 mars 1959, Bull. crim. 151 ; Cass. crim., 27 juin 1961, JCP 61, II, 12389 avec note ; Cass. crim. 22 janvier 1963, Bull. crim. 32).

La partie condamnée par défaut peut opter pour l'appel, mais se ferme par son propre fait et sans retour la voie de l'opposition (Cass. crim., 4 mars 1959, Bull. crim. 151 ; Cass. crim., 11 juin 1963, Gaz Pal. 1963, 2, 318, Bull. crim. 207).

La cour saisie de l'appel d'un jugement pouvant donner lieu à opposition, par une autre partie, doit surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai d'opposition (Cass. crim., 17 juin 1873, DP 73, 1, 222 ; Cass. crim., 19 décembre 1912, S. 1913, 1, 436 ; Cass. crim., 24 décembre 1936, S. 1937, 1, 75).

Rapprocher ci-avant E 337 , opposition.


  III. Itératif défaut


3Lorsque l'opposant ne comparaît pas à la date fixée, il fait à nouveau défaut ou « itératif défaut ».

En ce cas, son opposition est non avenue (Code de Proc, pén., art. 494) et la juridiction prononce la déchéance du recours sans examen au fond de l'affaire.

Le jugement par défaut devient définitif en premier ressort et ne peut être attaqué que par la voie de l'appel (cf. exception E 3375 n° 8).

Toutefois, le jugement déclarant l'opposition non avenue, étant lui-même un jugement par défaut, le délai d'appel ne court que du jour de signification dudit jugement (Cass. crim., 4 janvier 1906, Gaz. Pal. 1906, 1, 249 ; Cass. crim., 29 janvier 1964, Bull. crim. 19 ; Cass. crim., 7 octobre 1969, Bull. crim. 241).

Rapprocher ci-avant E 3361, n°s 10 et suivants , et 3375, n° 6 .


  B. QUANT AUX PERSONNES


4Conformément aux dispositions de l'article 497 du Code de Procédure pénale, la faculté d'appeler appartient :

1° Au prévenu ;

2° A la personne civilement responsable, quant aux intérêts civils seulement ;

3° A la partie civile, quant à ses intérêts civils seulement ;

4° Au procureur de la République ;

5° Aux administrations publiques, dans les cas où celles-ci exercent l'action publique ;

6° Au procureur général près la cour d'appel.

5Les principes généraux suivants sont applicables :

- il faut en général avoir été partie devant les premiers juges, en application de la règle du double degré de juridiction ;

- toute partie a le droit de faire appel, à condition qu'elle ait un intérêt pécuniaire ou moral ;

- le droit d'appel est personnel et chaque partie agit pour son propre compte, dans la mesure de ses droits. Il n'y a pas notamment de représentation entre coobligés solidaires.

La situation particulière des divers appelants est examinée ci-après.


  I. Prévenu


6Le prévenu, du moment qu'il y a intérêt, peut interjeter appel ; cette prérogative est notamment accordée au prévenu acquitté mais condamné aux dépens.

Lorsque l'action publique est éteinte par l'amnistie, le prévenu peut cependant interjeter appel des condamnations civiles et discuter de sa culpabilité (Cass. crim., 9 février 1960, Rev. sc. crim, 1960, 658).

En matière correctionnelle et criminelle, l'exécution volontaire ou forcée du jugement n'entraîne pas la déchéance de l'appel ; lequel est recevable s'il est formé dans les délais fixés par la loi (TGI, Appel, n° 15 ; Cass. crim., 10 juin 1836, Mém, 14, p. 386, Bull. crim. 183).

En matière pénale, le prévenu peut, en principe, revenir sur un acquiescement donné à une décision sur le fond en premier ressort et former appel si les délais sont respectés.

En effet, la loi répressive ne prévoit pas de déchéance ni de forclusion à cet égard. Les règles de la procédure civile sur les effets de l'acquiescement ne sont pas applicables en matière de poursuites correctionnelles.

L'acquiescement peut seulement intervenir sous la forme d'une transaction, en matière pénale, lorsqu'elle est prévue par un texte (voir 13 RC, div. S ; Code de Proc. pén., art. 6, 3e al.).


  II. Personne civilement responsable


7La personne civilement responsable peut interjeter appel à la condition d'avoir été effectivement partie devant les premiers juges (Cass. crim., 7 novembre 1956, Bull. crim. 717).


  III. Administration


1. Règles générales

8La faculté d'appeler appartient à la partie civile, quant à ses intérêts civils seulement, ainsi qu'aux administrations publiques, dans les cas où celles-ci exercent l'action publique (Code de Proc. pén., art. 497, 3° et 5°).

En conséquence, l'Administration peut, s'il y a intérêt, interjeter appel d'un jugement en premier ressort, lorsqu'elle a été partie à l'instance, en vue d'exercer l'action fiscale devant la cour, soit seule, soit comme partie jointe au ministère public, soit comme partie civile « au sens strict » (cf, ci-dessus E 3312 ).

2. Jurisprudence

9• Les amendes en matière de contributions indirectes étant moins une peine qu'une indemnité au profit du Trésor, sont comprises dans les intérêts civils visés par l'article 202 du code d'Instruction criminelle 1 et pour la défense desquels la faculté d'appeler est accordée à la partie civile.

Il s'ensuit que « l'Administration » partie civile, appelante, est fondée à poursuivre devant la cour d'appel, la réparation intégrale du préjudice causé à l'Etat par la fraude.

Dès lors, est légalement justifié l'arrêt qui, sur l'appel du « service des Impôts », réforme le jugement accordant à tort les circonstances atténuantes aux prévenus et augmente ainsi les pénalités prononcées contre eux (TGI, Appel n° 97 ; Cass, crim., 10 janvier 1947, RJCI 6. Cf. également Cass. crim., 10 décembre 1920, Bull. crim. 478, BCI 1921,6 ; Cass. crim., 10 décembre 1936, BCI 1937, 5).

• Au cas où le ministère public aurait interjeté appel d'un jugement intéressant l'Administration seule et sur lequel la cour aurait statué, le service des Impôts pourrait former opposition à l'arrêt, comme étant par défaut (Cass. crim., 22 juillet 1808, Mém. 4, 144).

• L'Administration..., partie civile en première instance dans une poursuite correctionnelle est recevable à interjeter appel seule et en l'absence de tout appel du ministère public, du jugement qui a relaxé le prévenu (TGJ, Appel n° 27 ; Cass. crim., 16 décembre 1898, BCI 1899, 19).

• L'article 202 1 du Code d'Instruction criminelle accorde à la partie civile le droit d'appeler même en cas d'acquittement et en l'absence d'appel du ministère public sous la seule condition que son appel n'aura d'effet que relativement aux intérêts civils. Par suite, la juridiction d'appel saisie par le recours de la partie civile doit rechercher si le fait relevé par la prévention réunit les caractères d'une infraction et statuer sur sa demande bien qu'elle soit séparée de l'action publique irrévocablement éteinte par le silence du ministère public, l'autorité de la chose jugée n'existant dans ce cas qu'à l'égard du procureur de la République, dont le défaut d'appel n'a pu ôter à la cause son caractère correctionnel (TGI, Appel n° 72 ; Cass. crim., 21 décembre 1939, BCI 1940, 7).

La signification sans réserve d'un jugement correctionnel n'emporte pas acquiescement de l'Administration d l'appel demeure recevable.

Les déchéances et les forclusions sont de droit étroit et les règles de la procédure civile sur les effets l'acquiescement ne sont pas applicables en matière de poursuites correctionnelles, exercées en matière de contributions indirectes. Par suite, n'implique pas acquiescement au jugement rendu par le tribunal correctionnel, la signification faite sans réserve à la requête de l'Administration... avec commandement de payer le montant des condamnations prononcées à son profit (TGI, Appel n° 25 ; Cass. crim., 17 juin 1897, Journal des Cl 1897, p. 503, BCI 1898, p. 2 Bull. crim. 200).

Actuellement, le délai d'appel court en général à compter du prononcé du jugement et non plus du jour de signification (Code de Proc. pén., art. 498).


  IV. Partie civile


10Toute partie civile - notamment l'Administration - a la faculté d'appeler, quant à ses intérêts civils seulement (Code de Proc, pén., art, 497 précité).

Ce droit est personnel, général et absolu (Cass, crim., 7 février 1956, Bull. crim. 132).

Le recours ne peut concemer que les jugements sur le fond de la poursuite (en ce sens notamment : Cass. crim 19 avril 1902, Bull. crim. 157 ; Cass. crim., 10 juillet 1963, Bull. crim. 248).


  V. Procureur de la République


11Quelle que soit la personne qui est à l'origine des poursuites, le procureur de la République, chargé d'exercer l'action publique, peut appeler de tout jugement, ou de toute disposition d'un jugement, à l'exclusion des décisions concement exclusivement des intérêts civils.

Il a été jugé que les amendes prononcées en matière de contributions indirectes, tendant à réparer le préjudice causé au Trésor par la fraude, ont un caractère mixte de réparation civile et de peine.

Par suite, l'action de l'Administration, qu'elle soit exercée par voie de citation directe ou accessoirement à l'action publique, est indépendante de cette dernière. Spécialement, la poursuite de l'action publique ne peut faire revivre l'action fiscale, lorsqu'elle a cessé d'exister par un acquiescement forme ! ou tacite résultant du défaut d'appel dans les délais légaux.

Encourt, dès lors, la cassation, l'arrêt qui, sur le seul appel du ministère public, essentiellement étranger aux intérêts civils, relaxe un prévenu que le tribunal correctionnel avait condamné à diverses pénalités fiscales, sous prétexte que les faits reprochés étaient passibles d'une peine de prison que le ministère public avait seul qualité pour requérir (Cass. crim., 10 juillet 1963, RJCI 18, p. 63, Bull. crim. 250, p. 526).

Voir également ci-dessus E 3312 , mise en mouvement et exercice de l'action.


  VI. Procureur général près de la cour d'appel


12Son droit d'appel est personnel, distinct de celui du procureur de la République près le tribunal de grande instance, auquel il permet de suppléer (Code de Proc. pén., art. 497, 6°).

C'est un appel principal dont l'exercice n'est pas subordonné à la recevabilité des autres appels (Cass. crim 20 décembre 1920, D. 1921, 1, 1897).

C'est un droit recevable sans restriction et qui peut être exercé même s'il y a commencement d'exécution de peine et tant qu'il n'a pas été donné acte du désistement de son propre appel au prévenu. (En ce sens : Cass. crim 31 janvier 1861, DP 61, 1, 237 ; Cass, crim., 22 mai 1957, Bull. crim. 441 ; Cass. crim., 2 juillet 1959, Bull. crim. 34).

 

1   Actuellement article 497 du Code de Procédure pénale.