Date de début de publication du BOI : 30/10/1999
Identifiant juridique : 12C2212
Références du document :  12C2212

SOUS-SECTION 2 LA SAISIE-VENTE

SOUS-SECTION 2

La saisie-vente

GENERALITES

1.La loi n° 91.650 du 9 juillet 1991 (art. 50 à 55) et le décret n° 92.755 du 31 juillet 1992 (art. 81 à 133) pris pour son application ont créé une nouvelle forme de saisie-mobilière, la saisie-vente, qui succède à l'ancienne saisie-exécution (art. 589 à 625 de l'ancien code de procédure civile).

Elle peut être définie comme une procédure permettant à un créancier, muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, de faire vendre, à l'amiable ou aux enchères publiques, les biens mobiliers corporels appartenant à son débiteur, afin de se faire payer sur le produit de la vente.

2.Largement inspirée de l'ancienne procédure de saisie-exécution, elle s'en distingue cependant sur plusieurs points importants :

- la saisie peut être pratiquée sur des biens appartenant au débiteur mais détenus par un tiers (cf. infra n° 33 ) ;

- la faculté est laissée au débiteur de procéder lui-même à la vente des biens saisis afin d'éviter les inconvénients d'une vente publique (vente amiable ; cf. infra n°s 13 et s. ) ;

- la saisie effectuée dans un local d'habitation a un caractère subsidiaire pour les créances inférieures à 3 500 F et nécessite l'autorisation préalable du juge de l'exécution (cf. infra n° 38 et s. ) ;

- la vérification des biens saisis (ancien procès-verbal de récolement) n'est effectuée par l'huissier que si ce dernier procède ensuite à la vente (cf. art. D 113, infra n°s 16 et s. ).

D'une manière générale, la nouvelle procédure de saisie-vente s'inscrit dans le cadre plus large de la réforme des procédures civiles d'exécution laquelle vise à élargir les possibilités d'action du créancier pour obtenir le recouvrement de ses créances, en améliorant l'efficacité des procédures, mais en ouvrant aussi la protection des intérêts du débiteur par une meilleure information à tous les stades de la procédure.

3.Il sera traité, dans la présente sous-section des conditions et du déroulement de la procédure de saisie-vente puis des incidents de saisie et enfin des procédures applicables à certains meubles en raison de leur nature particulière : la saisie des récoltes sur pieds et la saisie des biens placés dans un coffre-fort.

Par souci de simplification, les références aux articles de la loi et de son décret d'application seront précédées de la mention « L » et « D ».

  A. SAISIE-VENTE - DROIT COMMUN

  I. Conditions préalables au recours à la saisie-vente

1. Un titre exécutoire.

4.Aux termes de l'article L. 50, alinéa 1 er , seul un créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur, qu'ils soient ou non détenus par lui.

Ce titre exécutoire doit être conforme aux dispositions des articles L 2 et L 3.

5.Les titres exécutoires émis par les comptables des impôts sont limitativement énumérés par l'article L 252 A du Livre des procédures fiscales. Il s'agit essentiellement des avis de mise en recouvrement et des décisions de justice ayant force exécutoire.

6.La créance est considérée comme liquide lorsqu'elle est évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation, et exigible si elle n'est pas affectée d'un terme ou d'une condition suspensive.

2. Un commandement de payer ou une mise en demeure.

7.A peine de nullité, toute saisie-vente doit être précédée de la signification d'un commandement de payer (art. L 50). Cette formalité est requise même lorsque la saisie doit être pratiquée entre les mains d'un tiers (art. D 99).

8.Même s'il ne constitue pas un acte d'exécution (cf. Cass. com. 14 mars 1995, Gaz. Pal. 24 au 28 décembre 1995 pan. 14), le commandement est considéré comme un acte préparatoire essentiel à la saisie (Cass. civ. 14 novembre 1984, Bull. civ. I, n° 304).

Aux termes de l'article 2244 du Code civil, il interrompt la prescription qui court contre la créance et peut faire l'objet d'une opposition dans les formes et délais prévus par le Livre des procédures fiscales (art. L 281 et R* 281-1 et suivants du L.P.F. ; cf. DB 12 C 2311 n° 7 ).

En se prononçant sur l'application dans le temps de la loi du 9 juillet 1991 s'agissant de la saisie-vente, la Cour de cassation a rappelé que le commandement de payer qui la précède devait répondre aux conditions de forme prescrites par les nouvelles dispositions (Cass. avis 14 juin 1993 D 1993, jurisprudence p. 394 ; art. 81 et 83 du décret du 31 juillet 1992).

Il en a résulté l'obligation de renouveler le commandement de payer si ce dernier a été signifié avant le 1 er janvier 1993.

En revanche, la mise en demeure qui est un acte purement administratif tenant lieu de commandement de payer en matière de saisie mobilière (cf. art. L 261 du LPF), échappe aux conditions de forme de celui-ci. Par conséquent, une saisie-vente peut régulièrement être engagée même à la suite d'une mise en demeure antérieure à l'entrée en vigueur de la loi.

a. Le commandement de payer délivré par voie extra-judiciaire.

9.Le commandement de payer est délivré par voie extra-judiciaire.

1° Contenu du commandement.

10.A peine de nullité, le commandement doit contenir diverses mentions (art. D 81).

* Le titre exécutoire.

11.Est exigée, la mention du titre exécutoire en vertu duquel les poursuites sont exercées avec le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts ; la Cour de cassation a récemment rappelé le caractère impératif de ces mentions en constatant la nullité d'une procédure de saisie mobilière (Cass. com. 4 février 1997 arrêt n° 278 D).

12. Remarque : Par principe, l'huissier qui procède à la signification du commandement de payer, doit être porteur du titre exécutoire (art. D 81). Il convient donc de lui remettre les originaux des avis de mise en recouvrement et de mise en demeure notifiés au redevable ou, éventuellement, de la décision de justice revêtue de la formule exécutoire en vertu de laquelle les poursuites sont exercées. Toutefois celui-ci accepte, en règle générale, des copies certifiées conformes par le comptable.

13. Important : La remise du titre à l'huissier en vue de son exécution emporte, de plein droit, élection de domicile en son étude pour toutes notifications relatives à cette exécution (art. D 2). Cette règle est applicable à la saisie-vente, quelle que soit la nature de l'impôt dont le recouvrement est poursuivi.

* L'injonction de payer.

14.Il s'agit à proprement parler du commandement d'avoir à payer cette dette dans le délai de huit jours, faute de quoi, le débiteur pourra y être contraint par la vente forcée de ses biens meubles (art. D 88).

* Cas particuliers : créance en principal inférieure à 3 500 F et saisie dans le local d'habitation du débiteur (art. D 82 et D 83)

15.Lorsque la créance autre qu'alimentaire est inférieure à 3 500 F, et que la saisie-vente est destinée à être effectuée dans le local d'habitation du débiteur, le commandement de payer doit contenir à peine de nullité, outre les mentions habituelles :

→ avertissement qu'à défaut de paiement et si aucune saisie sur un compte de dépôt ou sur les rémunérations n'est possible, il pourra y être contraint par la vente forcée de ses biens meubles ;

→ injonction de communiquer à l'huissier de justice, dans un délai de huit jours, les noms et adresse de son employeur et les références de ses comptes bancaires ;

→ l'indication que si le débiteur ne défère pas à cette injonction, le procureur de la République pourra être saisi en vue de la recherche des informations nécessaires.

2° Signification du commandement.

16.La signification doit être faite au domicile réel du débiteur.

L'article D 84 interdit en effet la signification à domicile élu.

Hormis cette exclusion, la signification obéit aux règles générales résultant des articles 653 et suivants du nouveau code de procédure civile.

3° Effet et durée de validité du commandement.

17.Le commandement signifié produit des conséquences importantes : il vaut injonction de payer, tout en informant le débiteur qu'il s'expose, le cas échéant, à une vente forcée de ses meubles ; il rend la saisie-vente possible, puisqu'il en constitue le préalable nécessaire ; il interrompt la prescription de la créance.

18.L'article L 85 impose au créancier qui n'a accompli aucun acte d'exécution 1 dans un délai de deux ans à compter de la signification du commandement, l'obligation de procéder au renouvellement de celui-ci avant de pratiquer la saisie-vente mais précise que son effet interruptif de prescription demeure (art. D. 85).

19. Par dérogation à ce texte, l'article D 297 n'impose le renouvellement du commandement, pour le recouvrement des créances publiques, qu'en l'absence d'un acte de poursuite quel qu'il soit ou d'un règlement partiel dans le même délai.

20.Le créancier qui veut poursuivre le recouvrement d'une nouvelle créance constatée par un autre titre exécutoire que celui visé dans le commandement, doit faire délivrer un nouveau commandement conformément aux dispositions de l'article D 119, si la saisie-vente est encore en cours. Il a également la possibilité de poursuivre après ce nouveau commandement une nouvelle procédure de saisie-vente.

b. La mise en demeure.

1° Nature de la mise en demeure.

21.En matière fiscale, la notification par le comptable des impôts d'une mise en demeure prévue à l'article L 257 du Livre des procédures fiscales procédant d'un avis de mise en recouvrement, tient lieu du commandement de payer en matière de saisie mobilière, prescrit par le code de procédure civile (cf. art. L 261 du LPF et DB 12 C 13 n°s 4 et s. ).

L'envoi d'une mise en demeure préalable à toute poursuite constitue une obligation pour les comptables des impôts qui ne peuvent s'en dispenser en choisissant notamment, de délivrer un commandement de payer au lieu et place de cette mise en demeure (Cass. com. 9 février 1999, n° 394D).

22. L'article L 257 précité précise que les comptables de la Direction générale des impôts notifient la mise en demeure par pli recommandé avec avis de réception, avant de procéder vingt jours après, aux mesures d'exécution forcée.

23. Remarque : En cas de péril pour la créance avant l'expiration de ce délai, une saisie conservatoire pourra être effectuée, sans autorisation du juge (art. L 68).

24.La mise en demeuré vaut commandement non seulement à l'égard des redevables qui sont inscrits sur les avis de mise en recouvrement, mais encore à l'encontre de tous les tiers auxquels elle peut valablement être notifiée en application des dispositions de l'article R* 257-1 du Livre des procédures fiscales.

25.Sa contestation s'effectue dans les conditions prévues par les articles L 281 et R *281-1 et suivants du LPF (cf. DB 12 C 2311 n° 8 ).

2° Contenu de la mise en demeure.

26.Ni la loi du 9 juillet 1991, ni le décret du 31 juillet 1992 n'ont modifié la mise en demeure qui reste régie par les dispositions du Livre des procédures fiscales, et ne répond à aucune des conditions de formes particulières du droit commun.

Par conséquent, dans tous les cas (y compris pour les créances inférieures à 3 500 F) elle échappe aux conditions de validité du commandement de payer, de même qu'aux formalités de diligences auxquelles donne lieu la signification de cet acte.

Elle doit comporter les éléments nécessaires à l'identification du ou des avis de mise en recouvrement dont elle procède, ainsi que l'indication du montant total des sommes restant dues (art. R* 257-1 du LPF).

3° Notification de la mise en demeure.

27.La notification est faite par voie postale, par pli recommandé avec accusé de réception. Le délai de vingt jours préalable à tout acte d'exécution forcée court à compter de la date de notification.

Pour la computation de ce délai, le jour de la notification de la mise en demeure n'est pas compris. Par contre, le dernier jour du délai est compté ; toutefois, si ce dernier est un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, le délai est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.

Il est rappelé que le jour de la remise de la notification de la mise en demeure est celui de la remise au redevable du pli recommandé lorsque cette remise a été effective.

28.Dans le cas où le pli n'a pas été retiré, parce que le redevable n'a pas pris les dispositions pour faire suivre son courrier ou parce qu'il a délibérément refusé de recevoir ce courrier, la date à retenir est, comme en matière d'assiette, celle de la présentation au domicile du contribuable absent (C.A.A. PARIS 21 avril 1992, D.F. 1993 c. 1109).

4° Effet et durée de validité de la mise en demeure.

29.Les dispositions relatives aux effets et à la durée de validité du commandement s'appliquent également à la mise en demeure.

30.La saisie-vente pourra donc être effectuée au-delà du délai de deux ans sans qu'il soit nécessaire de renouveler la mise en demeure, lorsque celle-ci a été suivie, dans ce même délai, d'un acte de poursuite quel qu'il soit (avis à tiers détenteur notamment) ou d'un règlement partiel (art. D 297).

Dans le cas contraire, il conviendra de renouveler la mise en demeure avant de procéder à une saisie-vente.

31. Exemple :

Dans la situation caractérisée par les éléments suivants :

- créance authentifiée le 1er janvier 199(n) ;

- mise en demeure notifiée le 10 janvier 199(n) ;

- décision d'engager la saisie-vente le 3 février 199(n + 2)

La mise en demeure n'aura pas à être renouvelée :

- si un acte de poursuite est intervenu entre le 31 janvier 199(n) et le 10 janvier 199(n + 2) ;

- ou si un paiement est intervenu entre le 11 janvier 199(n) et le 10 janvier 199(n + 2).

32.Toutefois, s'agissant de l'effet interruptif qui s'attache à la mise en demeure, ce dernier n'est acquis que lorsque la mise en demeure est suivie, dans les quatre ans, d'une saisie mobilière.

Ainsi, en reprenant l'exemple suivant :

- créance authentifiée le 1 er janvier 199 (n)

- mise en demeure notifiée le 10 janvier 199 (n)

- mise en demeure renouvelée le 12 janvier 199 (n + 2)

- saisie-vente le 3 février (n + 3)

La première mise en demeure conserve son caractère interruptif de prescription dès lors que la saisie est intervenue dans les quatre ans.

1   Ces termes désignent, dans l'article 85, tous les actes accomplis dans le cadre de la procédure de saisie-vente.