Date de début de publication du BOI : 01/09/1999
Identifiant juridique : 5B2421
Références du document :  5B2421

SOUS-SECTION 1 PENSIONS ALIMENTAIRES

PREMIÈRE PARTIE

 PENSIONS ALIMENTAIRES VERSÉES AUX ASCENDANTS

8Il est admis que l'obligation alimentaire peut indifféremment être exécutée en nature (contribuable ayant recueilli sous son toit un ascendant dans le besoin, par exemple) ou être servie en espèces (au sujet des justifications, cf. ci-après n°s 11 , 20 et suiv. ).

De même le règlement, en l'acquit de l'ascendant, de dépenses incombant à ce dernier peut être considéré comme un mode d'exécution de l'obligation alimentaire.

Ainsi, sont déductibles, dans la mesure où leur versement procède de l'obligation alimentaire :

- la pension qu'un contribuable a payée à une maison de retraite en l'acquit de son père dépourvu de ressources personnelles (CE, arrêt du 16 janvier 1931, n° 1725, RO, 5546) ;

- les frais d'hospitalisation d'un ascendant (en ce sens, RM Mathus, n° 20 526, JO AN du 20 février 1995, p. 965) ou ceux de ces frais non couverts par la Sécurité sociale.

9En définitive, la déduction des versements ou des dépenses invoqués par le contribuable doit être accordée sous la seule réserve que celui-ci apporte les justifications ou, tout au moins, les explications propres à établir :

- d'une part, que ces versements ou dépenses ont bien été effectués ;

- d'autre part, qu'ils satisfont effectivement aux conditions de ressources prévues. à l'article 208 du Code civil.

Ainsi conformément aux dispositions de l'article 208 du Code civil, le montant de la pension déductible du revenu imposable doit être déterminé en fonction des besoins de son bénéficiaire et des ressources de celui qui la verse. Ce texte implique que le créancier de la pension soit dans un état de besoin, c'est-à-dire démuni de ressources lui assurant des moyens suffisants d'existence et que le débiteur de la pension soit en état de fournir les aliments, c'est-à-dire ait des ressources personnelles supérieures à ce qui est nécessaire à la satisfaction de ses besoins essentiels. Le point de savoir s'il y a obligation alimentaire et la détermination du montant de la pension déductible dépendent donc nécessairement des circonstances propres à chaque cas particulier, qu'il appartient au service local des impôts d'apprécier sous le contrôle du juge de l'impôt. À cet égard, il n'est pas possible, compte tenu de la diversité des situations susceptibles d'être rencontrées, de fixer un niveau précis de ressources justifiant le versement d'une pension alimentaire et un montant d'aliments déductible du revenu imposable. Quoi qu'il en soit, comme pour tous les'éléments concourant à la détermination de la base imposable, un contribuable peut contester, par voie de réclamation, le montant de. la pension alimentaire retenu par le service local pour l'établissement de son imposition (RM à M. Maisonnat, déb, AN du 28 mars 1983, p. 1485).

10Par ailleurs, il n'est pas nécessaire que l'obligation ait fait l'objet d'un engagement écrit ou d'une décision de justice (CE, arrêt du 18 décembre 1944, n° 70751, RO, p. 206). Le caractère obligatoire de ces pensions résulte, en effet, des dispositions mêmes du Code civil.

Peu importe que l'obligation ait pris naissance avant ou après le 2 novembre 1959.

Il est rappelé en revanche que les autres rentes, visées à l'article 156-II-2° du CGI, servies à titre obligatoire et gratuit doivent avoir été constituées avant le 2 novembre 1959 pour donner lieu à déduction (cf. DB 5 B 2426 ).

11Les obligés alimentaires dont les ascendants remplissent les conditions pour bénéficier de la prestation spécifique dépendance (PSD) et qui financent pour le compte de ceux-ci les frais d'emploi d'un salarié à domicile doivent choisir entre :

- la déduction des sommes versées.à titre de pension alimentaire à l'ascendant concerné ;

- la réduction d'impôt pour les dépenses relatives à l'emploi d'un salarié au domicile de l'ascendant prévue à l'article 199 sexdecies du CGI.

Cette option est globale. Le choix effectué en faveur de la réduction d'impôt entraîne renonciation à la déduction de l'ensemble des sommes versées à titre de pension alimentaire pour un même ascendant et non pas seulement à la fraction relative aux frais d'emploi du salarié à domicile (cf. BOI 5 B-10-98)

  A. PENSIONS VERSÉES EN ESPÈCES

  I. Règle générale

12Lorsque les conditions générales énoncées ci-dessus (cf. n°s 3 et 4 ) sont remplies, les enfants qui viennent en aide à leurs parents privés de ressources peuvent déduire de l'ensemble de leurs revenus le montant des versements ou dépenses qu'ils font à ce titre. Mais, il leur appartient, en cas de litige, de faire devant la juridiction contentieuse la preuve de l'obligation alimentaire à laquelle ils sont tenus.

Ils doivent donc établir, notamment :

- le défaut de ressources de leurs parents ;

- l'importance de l'aide qu'il leur incombe d'apporter à ces derniers (CE, arrêts du 23 décembre 1949, n° 97945, RO, p. 236 et du 26 novembre 1958, n° 40462, RO, p. 251).

Par ailleurs, l'article 156-II-2° du CGI, qui autorise la déduction des pensions alimentaires s'applique également à tous les contribuables fiscalement domiciliés en France, quelle que soit leur nationalité. Les contribuables doivent pouvoir justifier que les pensions servies (notamment à l'étranger) répondent aux conditions fixées par les articles 205 à 211 du Code civil et que les versements correspondants ont bien été effectués. À cette fin, ils peuvent recourir à tous les modes de preuve de droit commun (RM, Golinisch, JO AN du 1er décembre 1986, p. 4561).

  II. Jurisprudence

13Le service trouvera ci-après diverses décisions du Conseil d'État. Il pourra s'en inspirer pour apprécier, dans chaque cas, le caractère alimentaire d'une pension.

1. Caractère alimentaire non reconnu.

14Les parents de la requérante, qui vivaient avec elle, disposaient de revenus légèrement inférieurs à ceux de leur fille ; ils étaient propriétaires de neuf immeubles et d'un important portefeuille de valeurs mobilières (CE, arrêt du 23 décembre 1949, n° 97945, RO, p. 236).

Le requérant prétendait avoir dépensé en 1947 pour son père une somme journalière de 300 AF (soit 200 AF pour la nourriture et le logement et 100 AF pour les menus frais). Le service avait admis en déduction, pour l'année, une somme de 36 000 AF. Le Conseil d'État a rejeté les prétentions du contribuable qui ne fournissait, comme preuve de la réalité de ses versements, qu'une attestation signée de son père. Par ailleurs, il n'était nullement établi que ce dernier fût réellement dépourvu de ressources (CE, arrêt du 24 novembre 1952, n° 12177, RO, p. 126).

Le requérant soutenait avoir versé une somme de 60 000 AF à ses parents. La déduction opérée à ce titre n'avait été admise par l'Administration qu'à concurrence de 24 000 AF. Le contribuable avait disposé, au cours de l'année en cause (1946), d'un traitement de l'ordre de 156 000 AF. Les ressources des parents, non compris la pension versée par leur fils avec qui ils vivaient en commun, s'élevaient à 116 000 AF. Le Conseil d'État a jugé que la déduction retenue par l'Administration était suffisante (CE, arrêt du 9 juin 1954, n° 23237, RO, p. 85).

Le contribuable dont le traitement annuel était de l'ordre de 1 000 000 AF prétendait déduire de son revenu global une somme de 77 400 AF qu'il avait versée à sa mère, alors que cette dernière avait perçu, au cours de l'année considérée, des fermages d'un montant brut de 700 000 AF ainsi qu'une pension de retraite de 109 000 AF (CE, arrêt du 26 novembre 1958, n° 40462, RO, p. 251).

Le fait que les sommes versées par un fils à sa mère ne sont pas disproportionnées aux ressources de l'intéressé ne suffit pas à leur conférer le caractère d'une pension alimentaire car il est nécessaire, d'autre part, que celui-ci établisse que ces sommes étaient nécessaires à la satisfaction des besoins de son ascendant. Jugé que le contribuable n'apporte pas, en l'espèce, cette justification dès lors que sa mère possède une exploitation agricole d'environ 15 ha, d'une valeur estimée par elle-même à 400 000 F, qui lui procurait, avant qu'elle n'ait opté pour le bénéfice réel, un bénéfice forfaitaire de plus de 13 000 F. La circonstance que, pour les années en cause, celle-ci a déclaré des déficits, du fait de l'engagement d'importantes dépenses pour la réorganisation de son exploitation, ne permet pas de la considérer comme ayant été en droit d'exiger des aliments de son fils (CE, arrêt du 13 février 1974, n° 86976, RJCD, p. 51).

Les sommes versées par un contribuable à ses beaux-parents ne sont pas déductibles de son revenu imposable dès lors que le requérant n'établit pas que ses beaux-parents titulaires de ressources suffisantes procurées par des pensions de retraite aient été « dans le besoin » au sens de l'article 208 du Code civil (CE, arrêt du 21 janvier1981, n° 19842).

Même si ses facultés contributives le lui permettaient, la somme de 24 000 F qu'un contribuable avait allouée volontairement à ses parents pour chacune des années 1972 et 1973 a été regardée comme une libéralité non déductible de ses revenus, dès lors que ses ascendants avaient disposé au cours desdites années, de revenus professionnels s'élevant respectivement à 39 456 F et 63 945 F. Ceux-ci ne se trouvaient donc pas dépourvus de ressources leur permettant de subvenir à leurs besoins et à ceux d'un autre fils appelé à accomplir ses obligations militaires ainsi que de venir eux-mêmes -en aide à un ascendant (CE, arrêt du 4 juin 1982, n° 24543).

Les parents d'un contribuable avaient disposé de pensions de retraite s'élevant à 29 352 F en 1971, 31 981 F en 1972, 34 918 F en 1973 et 40 002 F en 1974. Compte tenu de leurs ressources, ils n'ont pas été considérés dans le besoin ; la somme de 5 000 F versée chaque année par l'intéressé à ses parents n'a donc pas été admise en déduction de ses revenus imposables (CE, arrêt du 3 décembre 1982, n°s 13571 et 15426).

Les parents d'un contribuable étaient propriétaires du pavillon qu'ils occupaient et avaient perçu des sommes s'élevant respectivement à 22 532 F en 1974 et 26 326 F en 1975. Dès lors, l'Administration n'a pu admettre en déduction du revenu imposable de l'intéressé le versement des pensions alimentaires au profit de ses parents que dans la limite de 7 142 F en 1974 et 7 752 F en 1975 (CE, arrêt du 14 mars 1984, n° 35718).

2. Caractère alimentaire reconnu.

15Un contribuable disposait, sans compter le bénéfice forfaitaire provenant d'une exploitation agricole, d'un revenu brut de l'ordre de 110 000 F. Il avait versé, en 1962, une pension alimentaire de 9 000 F à ses parents. Ces derniers n'avaient comme ressource qu'une pension de retraite vieillesse de 2 700 F environ et ne recevaient aucune aide de leurs autres enfants (CE, arrêt du 21 juillet 1970, n° 72151, RJCD, p. 157).

Le règlement par un contribuable des dépenses occasionnées par un grave accident dont ses beaux-parents ont été les victimes et auxquelles ils ne pouvaient faire face, doit être considéré comme correspondant à l'obligation alimentaire à laquelle l'intéressé était tenu à l'époque. La circonstance que, deux ans plus tard, l'assureur du responsable de l'accident a été condamné à indemniser les victimes et que celles-ci ont remboursé une partie importante de la somme en cause ne permet pas de regarder cette dernière comme correspondant à une avance, dès lors qu'au 31 décembre de l'année de son versement, date du fait générateur de l'impôt, il n'existait aucune créance certaine contre l'assureur dans le patrimoine des victimes et qu'à cette même date celles-ci n'avaient pris aucun engagement de rembourser à leur gendre tout ou partie de la somme dont il s'agit (CE, arrêt du 29 novembre 1972, n° 85497, RJCD, p. 197).

Nota. - Les dépenses dont il est question correspondaient aux soins médicaux, au salaire de la garde-malade et aux frais de transport des victimes de l'accident de leur propre résidence au domicile de leur gendre.

Est déductible du revenu global du contribuable, la pension alimentaire servie à un ascendant, même si celui-ci tirait de son travail un revenu légèrement supérieur au salaire minimum légal, dès lors que cette pension n'est hors de proportion ni avec les ressources du débiteur, ni avec les besoins du créancier (CE, arrêt du 21 mars 1983, n° 28054).

De même, est déductible la pension alimentaire versée à un père âgé de 77 ans vivant seul et contraint de recourir à des aides extérieures rémunérées, compte tenu de son âge et de son état de santé (CE, arrêt du 3 juin 1983, n° 34295).

  III. Cas particuliers

1. Récupération de l'allocation supplémentaire visée à l'article L. 815-4 du code de la sécurité sociale (ex-FNS) sur l'actif successoral.

16Le montant de l'allocation supplémentaire servie à la personne âgée peut être recouvré sur l'actif successoral. Les héritiers ne sont pas susceptibles de déduire de leur revenu global une somme équivalente au montant des arrérages ainsi prélevés sur la succession.

2. Rentes versées à un ascendant en exécution d'une clause d'un partage d'ascendant. Rentes résultant de la conversion en rente viagère de l'usufruit du conjoint survivant. Rentes servies en exécution d'une clause d'une donation entre vifs et à titre de charge imposée au donataire.

17Ayant pour contrepartie la transmission d'un bien, ces rentes ne peuvent, en principe, être considérées comme ayant le caractère d'une pension alimentaire. Elles ne sont pas normalement déductibles du revenu global (cf. DB 5 B 2428 , en ce qui concerne les rentes constituées avant le 1er janvier 1961).

18Toutefois, un contribuable, qui verse une rente viagère à un ascendant, en contrepartie d'une donation ou d'un partage, peut déduire de son revenu global, à titre de pension alimentaire au sens des articles 205 à 211 du Code civil, la fraction des arrérages excédant le montant de la rente que le crédirentier, eu égard à la valeur des biens ou droits cédés, aurait pu normalement obtenir d'un acquéreur à titre onéreux non tenu par une obligation alimentaire (CE, arrêt du 22 mai 1989, n° 84386, Plénière).

En jugeant que le caractère alimentaire d'une rente servie en exécution des clauses d'une donation-partage doit s'apprécier par rapport au montant de la rente que le crédirentier aurait pu obtenir d'un acquéreur non tenu par une obligation alimentaire, le Conseil d'État retient une solution qui présente deux avantages :

- elle permet de respecter la décision prise par le propriétaire d'aliéner son bien ;

- elle conduit à comparer deux éléments de même nature : la rente servie et la rente normalement exigible compte tenu de la valeur du bien cédé.

Cette solution, qui se réfère à la valeur de la rente elle-même, est préférable à celle que retenait la doctrine administrative, fondée sur la notion de « revenu potentiel », et qui consistait à comparer la rente servie au bénéficiaire avec le revenu que le bien transmis lui aurait procuré s'il l'avait conservé.

Il convient donc de se conformer à cette seule solution.

Il en résulte que si la rente versée en exécution d'une clause de donation-partage excède celle qui aurait pu être obtenue d'un acquéreur à titre onéreux non tenu par une obligation alimentaire, la fraction excédentaire peut être regardée comme servie à titre gratuit et peut, dès lors, être déduite du revenu global du débiteur, dans la mesure où le versement de cette fraction répond aux conditions fixées par les articles 205 à 211 du Code civil.