SOUS-SECTION 4 INSTRUCTION DE L'APPEL
3. Rétablissement de l'affaire.
30À moins que l'instance ne soit atteinte par la péremption (art. 385 et s. du NCPC ; cf. 13 O 4454 ; Civ. 2ème, 5 avril 1993, Bull. II, n° 147), le troisième alinéa de l'article 915 du NCPC permet, à l'appelant comme à l'intimé, de faire rétablir l'affaire au rôle.
Si l'appelant désire faire rétablir l'affaire, il doit conclure et justifier du dépôt de ces conclusions, mais l'intimé peut également prendre l'initiative de rétablissement.
31Il convient alors de distinguer deux situations :
32- Soit l'intimé conclut au fond, ou se borne à demander la confirmation du jugement.
En ce cas, la procédure reprend normalement et les parties sont recevables à produire de nouvelles écritures, communiquer de nouvelles pièces ou solliciter des mesures d'instruction.
33- Soit l'intimé peut user de la faculté que lui réserve l'article 915 al 3 du NCPC et demande que la clôture soit ordonnée et l'affaire renvoyée à l'audience pour être jugée au vu des conclusions de première instance.
Dans ce cas, le juge ne peut que faire droit à cette demande de renvoi, l'affaire étant en état d'être jugée ; aucune pièce, aucune conclusion, ne pouvant être alors valablement déposée et l'affaire doit être jugée au seul vu des écritures de première instance (rappr. Civ. 2ème, 13 janvier 1993, Bull. II, n° 9 ; 10 mars 1993, Bull. II, n° 88 ; 20 juin 1996, Bull. II, n° 166).
Pour autant la cour d'appel reste tenue, en vertu de l'article 561 du NCPC, de juger à nouveau l'affaire en fait et en droit, et a, par conséquent, le pouvoir de modifier la décision des premiers juges s'il y a lieu (Cass. avis du 24 février 1995, Bull. n° 1).
34Il résulte de ce qui précède que la détermination de la partie ayant pris l'initiative du rétablissement est essentielle pour apprécier la recevabilité des écritures nouvelles après le rétablissement.
De ce point de vue, c'est la date du dépôt au greffe des conclusions qui importe, et non celle de leur signification à avoué (Civ. 2ème, 23 février 1994, Bull. II, n° 65).
En tout état de cause, le choix de l'intimé, lorsque celui-ci prend l'initiative du rétablissement, de demander ou non le jugement de l'appel sur les seules conclusions de première instance dépend largement du contenu de ces écritures et de l'intérêt que peut présenter pour lui l'impossibilité de conclure dans laquelle l'appelant pourrait se trouver placé.
IV. Communication des pièces
35Si les règles générales relatives à la communication des pièces s'appliquent devant la cour d'appel (cf. 13 O 4313 ) quelques points doivent être précisés.
36D'abord, une nouvelle communication des pièces versées aux débats en première instance n'est pas exigée en cause d'appel, mais toute partie peut cependant l'exiger par voie de conclusions régulières (art. 132, al. 3 du NCPC).
37En revanche, les pièces nouvelles doivent être spontanément communiquées à tous les avoués constitués (NCPC, art. 909, al. 1), à l'appui d'un bordereau établi par l'avoué qui procède à la communication et signé par l'avoué destinataire (NCPC, art. 961, al. 2).
38La date de la communication des pièces est celle de la notification à l'avoué destinataire (Civ. 2ème, 1er mars 1995, Bull. II, n° 68) et non la date du dépôt de ce bordereau au greffe.
39Bien entendu, il convient de déposer au secrétariat-greffe les pièces en cause afin que celui-ci puisse procéder à la formalité du visa prévu à l'article 966 du NCPC, et que la cour puisse en prendre connaissance.
À défaut, le magistrat de la mise en état pourrait en demander la remise en copie. Il peut, par ailleurs, et en tout état de cause, se faire communiquer l'original des pièces versées au débat (combinaison des art. 765 et 910 du NCPC).
C. LA PROCÉDURE DE MISE EN ÉTAT
40Sous réserve de la mise en oeuvre de la procédure de renvoi à l'audience prévue à l'article 910, al. 2 du NCPC (cf. ci-après n°s 73 et suiv. ), l'affaire est instruite sous le contrôle d'un magistrat de la chambre à laquelle elle est distribuée (NCPC, art. 910, al. 1).
Cette attribution à une chambre précise est décidée par le premier président (NCPC, art. 907).
C'est la procédure de mise en état.
I. Les attributions du conseiller de la mise en état
41Le conseiller de la mise en état dispose des attributions reconnues au juge de la mise en état devant le tribunal de grande instance et figurant aux articles 763 à 787 du NCPC.
Il dispose par ailleurs de pouvoirs particuliers propres à l'instance d'appel, tandis que les règles de la procédure spéciale applicable en matière fiscale apportent un certain nombre de dérogations aux dispositions du nouveau Code de procédure civile.
1. Les pouvoirs ordinaires du conseiller de la mise en état.
42Le conseiller de la mise en état a pour rôle de contrôler l'instruction de l'affaire en s'assurant du bon déroulement loyal de la procédure (art. 763, al. 2 du NCPC).
43Dans les instances relevant de la procédure spéciale, les pouvoirs qu'il tire des prévisions du nouveau Code de procédure civile sont limités par les dispositions des articles R * 202-2 et suivants du LPF (cf. ci-après n° 61 ).
44Il veille ainsi à la ponctualité de l'échange des conclusions et de la communication des pièces (NCPC, art. 763, al. 2), en adressant au besoin des injonctions aux avoués (NCPC, art. 763, al. 3), fixe au fur et à mesure les délais nécessaires à l'instruction après avoir provoqué l'avis des avoués, et accorde, le cas échéant, leur prorogation (NCPC, art. 764), peut inviter les avoués à répondre aux moyens sur lesquels ils n'auraient pas conclu ou leur demander des explications de fait et de droit nécessaires à la solution du litige (NCPC, art. 765).
Dans l'exercice de ses missions, le conseiller de la mise en état observe et fait observer le principe du contradictoire.
Il peut inviter les parties à mettre en cause tous les intéressés dont la présence lui paraît nécessaire à la solution du litige (NCPC, art. 768-1).
45Il dispose par ailleurs de pouvoirs en ce qui concerne les jonctions et disjonctions d'instances (NCPC, art. 766). Il peut constater l'extinction de l'instance (NCPC, art. 769), notamment en cas de péremption (C.A. Paris, 6 avril 1990, Bull. avoués 90.1.18 ; 3 avril 1991, Bull. avoués 91.2.65) ou de désistement, exerce les pouvoirs nécessaires à la communication et la production des pièces (NCPC, art. 770).
46Il dispose également de la compétence exclusive pour ordonner, même d'office, toute mesure d'instruction (NCPC, art. 771, 4 ; cf. ci-après n°s 61 et suiv. sur les mesures d'instruction admissibles dans le cadre de la procédure spéciale) et peut statuer sur les dépens (NCPC, art. 772).
47Il prononce la clôture de l'instruction et le renvoi à l'audience (cf. ci-après n°s 75 et suiv. ).
48Dans le cas où les avoués s'abstiennent d'accomplir les actes de la procédure dans les délais impartis, le conseiller de la mise en état a la faculté de prendre une ordonnance de radiation de l'affaire dans les conditions prévues à l'article 781 du NCPC.
L'affaire peut alors être rétablie (sauf si la péremption est survenue) dans les conditions prévues à l'article 383 du NCPC.
49Par ailleurs, à compter de sa désignation et jusqu'à son dessaisissement, c'est-à-dire jusqu'à l'ouverture des débats (NCPC, art. 779, al. 3), le conseiller de la mise en état a compétence exclusive pour statuer sur les exceptions dilatoires et les nullités pour vices de formes (NCPC, art. 771-1).
Il résulte de ces dispositions que le conseiller de la mise en état n'est, en revanche, pas compétent pour statuer sur les exceptions d'incompétence de fond, ni pour connaître d'une nullité pour irrégularité de fond.
50En outre, dès lors que les jugements rendus en matière fiscale sont assortis de l'exécution provisoire de droit et que les parties disposent à son encontre d'un recours spécifique devant le premier président, les dispositions des 2. et 3. de l'article 771 du NCPC, en matière de provisions, ne s'appliquent pas aux affaires jugées selon la procédure spéciale.
2. Les pouvoirs spécifiques en cause d'appel.
51Aux termes de l'article 911 du NCPC, le conseiller de la mise en état est compétent pour déclarer l'appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel.
Il peut ainsi constater la forclusion, statuer sur la validité de la signification (CA Lyon 9 novembre 1983, Gaz. Pal 1984, somm. 174), le point de départ du délai d'appel (CA Nancy, 11 février 1981, JCP 1982-IV-208) et plus généralement sur l'irrégularité et la nullité de l'acte d'appel (CA Paris 15 février 1985 Bull. avoués 1985, n° 49 ; 7 octobre 1994, Bull. avoués n° 133). Il est ainsi compétent pour statuer sur l'existence d'un acquiescement (C.A. Paris, 10 avril 1984, Bull. avoués 86.115).
Le conseiller de la mise en état peut également fixer à l'appelant un délai plus court que celui de quatre mois prévu à l'article 915 du NCPC pour déposer ses conclusions (cf. ci-avant n° 24 ).
52Toutefois, il ne peut trancher sur le fond quant à la capacité, l'intérêt ou la qualité pour agir (CA Paris 10 mars 1984, Bull. avoués n° 99).
Il n'a pas davantage le pouvoir de constater la caducité de la déclaration d'appel (Civ. 2ème, 10 décembre 1980, Bull. II, n° 265).
53Par ailleurs, les dispositions de l'article 912 du NCPC ne sont pas applicables en matière fiscale, dès lors, d'une part, que ce texte ne vise que les pouvoirs du conseiller de la mise en état en matière d'exécution provisoire ordonnée -alors que celle-ci est de droit dans les instances relevant de l'article L 199 du LPF- et, d'autre part, que les pouvoirs d'arrêt ou d'aménagement de cette exécution provisoire appartiennent exclusivement au premier président de la cour d'appel.
3. La forme des décisions du conseiller de la mise en état.
54Les avis ou injonctions du conseiller de la mise en état sont valablement adressés aux seuls avoués, tandis que ces derniers ont seul qualité pour représenter les parties et conclure en leur nom (art. 913, al. 1 du NCPC).
Les avoués sont donc les seuls interlocuteurs du conseiller de la mise en état, qui les avise des charges qui leur incombent et les convoquent dans les conditions fixées à l'article 971 du NCPC, sauf pour les avocats éventuellement constitués, la possibilité d'être entendu sur leur demande (NCPC, art. 913, al. 2).
55Si, en règle générale, les décisions du conseiller de la mise en état font l'objet d'une simple mention au dossier, les avoués en étant avisés (NCPC, art. 773 al. 1), le conseiller de la mise en état statue par voie d'ordonnance (NCPC, art. 773 al. 2) dans un certain nombre de cas.
Ainsi en va-t-il de la constatation de l'extinction de l'instance (NCPC, art. 769), des incidents relatifs à la communication, l'obtention et la production des pièces (NCPC, art. 770), des décisions sur les exceptions dilatoires et nullités visées à l'article 771-1°du même code, de celles afférentes aux mesures d'instruction (NCPC, art. 771-4°) ainsi qu'aux dépens (NCPC, art. 772).
56Mis à part le cas particulier du défaut de diligence des avoués qui permet au conseiller de la mise en état de prendre d'office une ordonnance de clôture de l'instruction (art. 780 du NCPC ; cf. ci-après n°s 75 et suiv. ), ou de radiation lorsque l'appelant n'a pas déposé ses conclusions dans le délai de quatre mois (NCPC, art. 915, al. 2 ; Civ. 2ème, 26 juin 1991, Bull. II n° 190 ; cf. ci-avant n° 28 ), ainsi que celui des mesures d'instruction qui font l'objet de développements ci-après n°s 61 et suiv. auxquels il convient de se reporter, une ordonnance ne peut être prise qu'après que les avoués aient été entendus ou appelés sur convocation à l'audience de mise en état (NCPC, art. 774, al. 1), laquelle doit indiquer clairement la question devant être débattue à l'audience afin de mettre le destinataire en mesure de préparer sa défense (CA Paris, 24 juin 1983, Gaz. Pal 1983, 2, somm. 288).
57Les ordonnances doivent être motivées (NCPC, art. 773, al. 2) et n'ont pas, au principal, l'autorité de la chose jugée (NCPC, art 775).
4. Recours contre les ordonnances du conseiller de la mise en état.
58L'article 914 du NCPC prévoit, en son premier alinéa, que les ordonnances du conseiller de la mise en état ne sont susceptibles d'aucun recours indépendamment de l'arrêt sur le fond.
Ce principe connaît plusieurs atténuations.
59D'abord, une ordonnance du conseiller de la mise en état se prononçant, en application des dispositions de l'article 911 du NCPC, en faveur de la recevabilité de l'appel, ne fait pas obstacle à ce que le moyen tiré de l'irrecevabilité du recours puisse être repris devant la cour et accueilli par la juridiction (Civ. 2ème, 20 juillet 1987, Bull. II, n° 270 ; 20 juillet 1988, Bull. II, n° 184).
60Ensuite, l'alinéa 2 de l'article 914 du NCPC ouvre la possibilité d'un recours lorsque l'ordonnance a pour effet de mettre fin à l'instance, lorsqu'elle constate son extinction.
Le recours s'exerce sous forme de déféré à la cour par simple requête dans le délai de quinze jours de leur date. Passé ce délai, les ordonnances ne peuvent plus être déférées à la cour (Civ. 2ème, 21 avril 1983, Bull. II n°101).
Ce recours ne s'applique pas aux ordonnances portant simple radiation de l'affaire, l'instance n'étant alors que suspendue (rappr. Civ. 2ème, 26 juin 1991 précité).