Date de début de publication du BOI : 01/10/1996
Identifiant juridique : 13E3392
Références du document :  13E3392

SOUS-SECTION 2 DÉCISIONS SUSCEPTIBLES DE POURVOI. CONDITIONS

  B. PERSONNES AYANT QUALITE POUR SE POURVOIR

  I. Conditions générales

17Selon une jurisprudence constante, est sans qualité pour se pourvoir devant la chambre criminelle le demandeur qui n'a pas été partie à l'instance devant la juridiction répressive (Cass. crim., 10 janvier 1946, Bull. crim. 7, p. 10 ; Cass. crim., 4 mars 1965, Bull. crim. 67, p. 10 ; Cass. crim., 14 mai 1968, Bull. crim. 151, p. 367 ; Cass. crim., 9 mars 1976 [Aff. X... ]),

Sont donc irrecevables les pourvois formés par des personnes ou des organismes qui auraient pu se porter parties civiles dans des poursuites formées par le ministère public, mais ne l'ont pas fait et n'ont pas figuré dans l'instance (Cass. crim., 10 janvier 1946 précité, Bull. crim. 7, p. 10 [arrêt rendu à l'égard de l'administration des Douanes]). .

De même, ne saurait être admise l'intervention devant la Cour de cassation d'une association qui n'a pas figuré au procès, lors du jugement sur l'action fiscale (Cass. crim., 20 octobre 1971, RJ, I p. 42).

18Afin de connaître si une personne est ou non partie dans l'instance, il convient d'examiner le dispositif (griefs apportés par la décision).

Il ne suffit pas que le demandeur ait figuré dans la procédure mais il faut encore qu'il y ait été impliqué pendant tout son déroulement depuis la contestation portée devant la juridiction de jugement jusqu'à la décision finale.

Toutefois, selon certains arrêts de la chambre criminelle, le pourvoi d'une partie serait recevable, même si elle n'a pas figuré en cause d'appel, lorsque, par exemple la décision de relaxe du prévenu entraîne cependant le maintien d'une condamnation civile à son égard (Cass. crim., 8 janvier 1959, Bull. crim. 34, p. 58).

  II. Les différentes parties à l'instance pénale

19Les règles applicables sont similaires à celles exposées en matière d'appel (cf. ci-avant E 3383, n°s 4 et suiv. ).

La voie du pourvoi en cassation est donc ouverte à deux groupes :

1° Aux personnes ou organismes visés par les poursuites pénales et civiles, accusés et prévenus, personnes ou organismes civilement responsables ;

2° Aux personnes ou organismes recherchant la répression de l'infraction et la réparation du dommage en résultant, c'est-à-dire :

- ministère public ;

- administrations publiques ;

- parties civiles.

Comme toute action en justice, le pourvoi en cassation est soumis à la règle : « Pas d'intérêt, pas d'action ».

Il en résulte qu'une personne non visée par le dispositif ne peut pas former un pourvoi car la décision ne lui fait pas grief.

1. Prévenu

20Il peut se pourvoir, mais seulement contre la décision qui intervient à son égard ou contre lui et sous réserve que celle-ci ne soit pas devenue définitive et lui fasse grief.

La Cour de cassation a notamment jugé :

- que l'appel d'une société ne pouvant profiter à son président non appelant, le pourvoi de celui-ci, qui n'était plus partie à l'instance, ne saurait remettre en question des dispositions définitivement jugées et doit être déclaré irrecevable (Cass. crim., 3 mai 1972, RJ, I, p. 22, I-1-a, 2e al.) ;

- que lorsqu'un prévenu a été acquitté par un arrêt rendu par défaut et qu'il n'a ainsi aucun intérêt à former une opposition qui ne serait d'ailleurs pas recevable, il s'ensuit que le droit de se pourvoir en cassation est ouvert à l'Administration à partir du prononcé de cet arrêt (TGI, Cassation II, Décisions susceptibles de pourvoi n° 30 ; Cass. crim., 28 juillet 1949, RJCI 23) ;

- qu'un prévenu condamné, demandeur en cassation, est sans qualité pour se faire grief de ce qu'en violation des dispositions de l'article 149 du Code d'Instruction criminelle (actuellement Code de Proc. pén., art. 411 à 413), l'arrêt attaqué aurait statué contradictoirement à l'égard de coprévenus, condamnés par le même arrêt, mais qui ne se sont pas pourvus, dès lors que les dispositions de l'article 149 précité, aux termes desquelles le débat ne peut être contradictoire lorsque le prévenu n'a pas comparu, que s'il a personnellement demandé ou consenti à ce que le débat ait lieu en son absence, sont prescrites en faveur de ce prévenu, et qu'en conséquence les coprévenus sont sans qualité pour se faire grief de leur méconnaissance (Cass. crim., 4 décembre 1956, RJCI 1956, n° 61, p. 405).

- que le demandeur à un pourvoi est sans qualité pour critiquer la décision de relaxe dont ont bénéficié ses coprévenus (Cass. crim., 24 mars 1958, RJCI 36, p. 90).

2. Personnes ou organismes civilement responsables

21Le tiers civilement responsable peut se pourvoir en cassation, mais uniquement contre les décisions répressives qui engagent sa responsabilité civile et lui font grief (Code de Proc. pén., art. 567).

Dès lors que le prévenu a été définitivement condamné, son pourvoi n'est plus recevable (Cass. crim., 17 octobre 1973, Bull. crim. 259, JCP 1973, IV, 385).

En cas de relaxe du prévenu, voir arrêt précité du 8 janvier 1959, Bull. crim. 34, p. 58.

3. Ministère public

22Il a qualité pour se pourvoir en cassation, en vue de la défense des intérêts de la société, contre toutes les décisions rendues sur l'action publique.

Mais à défaut d'intérêt, il ne peut se pourvoir contre les décisions relatives à l'action civile.

L'exercice de l'action fiscale appartient exclusivement à l'Administration et le ministère public est sans qualité pour se pourvoir contre un arrêt rendu sur la poursuite de l'Administration (cf. E 3312 ).

En effet, le ministère public n'a pas le droit, généralement, de poursuivre les infractions aux lois sur les contributions indirectes : d'où il suit que le ministère public, qui est non recevable à poursuivre, est également non recevable à se pourvoir en cassation (TGI, Poursuites correctionnelles n° 26 ; Cass. crim., 1er avril 1837, Mém. 15, p. 72, Bull. crim. 97 ; S. 37, I, 900 ; D. 37, I, 82, Ann. des Cl 38, 129, Trescaze (X), chr. 1837, 1, 270 ; TGI Poursuites correctionnelles, n° 52 ; Cass. crim., 4 novembre 1898, BCI 1900, 4 ; Bull. crim. 336).

23Il a été également jugé que le ministère public est sans qualité, comme sans intérêt, pour se pourvoir en cassation, au nom de l'administration des Douanes, à raison de l'omission d'une amende constituant une réparation civile et se rattachant à une infraction spéciale dont la poursuite n'appartenait qu'à ladite administration, dès l'instant où il n'apparaît pas que celle-ci ait été représentée devant la juridiction du second degré ni même qu'elle y ait été appelée (TGI Cassation II, Décisions susceptibles de pourvoi n° 18 ; Cass. crim., 15 février 1939, BCI 38).

4. Administration

24Elle a le droit exclusif d'exercer l'action fiscale et peut en conséquence se pourvoir en cassation.

Lorsqu'une infraction fiscale est punie seulement de peines pécuniaires, l'Administration a seule qualité pour exercer la poursuite, à l'exclusion du ministère public (jurisprudence constante précitée, cf. E3312, n°s 15 et 16 , et Cass. crim., 16 octobre 1957, RJCI 55, p. 163 ; Cass. rejet., 16 janvier 1995, Bull. crim., n° 19, p. 44 et les arrêts cités).

Il n'appartient au ministère public d'exercer l'action fiscale qu'exceptionnellement dans le cas où une infraction aux lois sur les contributions indirectes est frappée à la fois d'une peine corporelle et de peines pécuniaires ou dans celui où le fait unique, objet de la poursuite, constitue, à la fois, deux infractions distinctes, l'une de droit commun, l'autre fiscale (voir E 3312 , TGI, Action fiscale n° 23 ; Cass. crim., 24 janvier 1929, BCI 5, Bull. crim. 29 ; Cass. crim., 12 mai 1910, Bull. crim. 254).

25Dans les affaires mixtes, le pourvoi de l'Administration est recevable, même en l'absence de pourvoi de la part du ministère public, comme d'ailleurs est admis dans ce cas le pourvoi de la partie civile.

Dans cette hypothèse, les pouvoirs du juge sont limités aux seules sanctions fiscales pécuniaires.

La cour suprême a jugé :

- que dans le cas où l'Administration est intervenue comme partie civile à l'effet d'obtenir les pénalités fiscales, l'action du ministère public n'a plus pour effet que l'exercice de l'action publique et l'action fiscale est exercée par « l'Administration » qui peut, dès lors, quant à ses intérêts, interjeter appel ou former pourvoi, même s'il y a acquittement du prévenu passé en force de chose jugée au regard du ministère public (TGI, Action fiscale n° 19 ; Cass. crim., 10 décembre 1920, BCI 1921, 6, Bull. crim. 478) ;

- qu'en cas d'« infractions mixtes », l'Administration a le droit d'interjeter appel, nonobstant l'absence de recours du ministère public, celle-ci n'ayant d'autre effet que de limiter les pouvoirs des juges d'appel aux seules condamnations pécuniaires (jurisprudence applicable mutatis mutandis au pourvoi en cassation ; JCPP, art. 567 à 621 III, § 141 et suiv. ; Cass. crim., 12 octobre 1966, RJCI 20, p. 63).

5. Partie civile

26Le pourvoi en cassation doit être justifié par un préjudice personnel et direct causé par l'infraction à la partie civile (jurisprudence constante : Cass. crim., 29 janvier 1958, Bull. crim. 95, p. 163 ; Cass. crim., 16 décembre 1959, Bull. crim. 556, p. 107 ; Cass. crim., 11 mars 1965, Bull. crim. 75, p. 163 ; n° 76, p. 165).