SOUS-SECTION 2 BIEN RURAL DONNÉ À BAIL À LONG TERME (CGI, ARTICLES 793-2-3° ET 793 BIS)
b. Exceptions à la déchéance.
39L'exonération partielle n'est pas remise en cause en cas :
- de transmission à titre gratuit résultant du décès du bénéficiaire intervenant dans les cinq ans de la mutation à titre gratuit initiale (cf. déclaration du Ministre délégué, chargé du budget, débats Sén. JO du 19 décembre 1989 p. 5237) ;
- d'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- de force majeure, c'est-à-dire, d'après la Cour de Cassation, d'un événement imprévisible, insurmontable et totalement étranger au bénéficiaire de la transmission, à la condition qu'il y ait un lien de causalité directe avec le non-respect de la conservation du bien ;
- d'échange à condition que le respect de la conservation du bien cédé soit reporté sur les biens ruraux reçus en contre échange et que les biens reçus soient d'une valeur au moins égale à celle des biens cédés ;
- d'apport en jouissance à une société civile agricole quelle que soit sa forme, ou d'un apport pur et simple à un GAEC.
Remarques :
40 - Location, mise à disposition ou apport en jouissance à un GFA de biens ruraux loués à long terme : cf. ci-dessus n° 17 .
Il est admis que la location, la mise à disposition et l'apport en jouissance à un GFA n'entraînent pas la remise en cause de l'exonération partielle dont a bénéficié la mutation à titre gratuit.
- Activités commerciales annexes exercées par le preneur.
41Lorsque le preneur à bail rural à long terme exerce des activités commerciales annexes, il est admis que le régime de faveur résultant de l'article 793-2-3° du CGI ne soit pas remis en cause dans la mesure où ces activités commerciales sont compatibles avec l'application du statut du fermage.
- Absence de publication du bail à long terme.
42L'absence de publication par le donateur ou le défunt d'un bail rural à long terme n'est pas de nature, à elle seule, à priver le donataire ou l'héritier du bénéfice des dispositions de l'article 793-2-3° du CGI.
c. Conséquences fiscales de la déchéance du régime de faveur.
1° Droits complémentaires et pénalités exigibles.
43Le non-respect du délai de conservation des biens reçus pendant cinq ans à compter de la transmission à titre gratuit par le donataire, l'héritier ou légataire entraîne l'exigibilité du complément de droits de mutation à titre gratuit, dont la mutation initiale a été exonérée, majoré de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du CGI.
2° Redevable des droits.
44Le complément de droits de mutation et l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du même code doivent être supportés par les ayants droit qui ont bénéficié de l'exonération partielle lors de la liquidation initiale des droits de mutation à titre gratuit.
En conséquence, sont redevables du complément de droits de mutation et de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 de ce code le ou les ayants droit qui étaient déjà redevables de l'impôt lors de cette liquidation initiale des droits.
3° Recouvrement des droits et pénalités rappelés.
45Les droits rappelés et l'intérêt de retard légalement exigibles devront être acquittés à la première réquisition de l'administration. Celle-ci devra être précédée, dans tous les cas, de la mise en oeuvre de la procédure de redressement contradictoire.
II. Régime applicable avant le 1er juillet 1992
1. Généralités.
46 Le régime de faveur applicable jusqu'à l'entrée en vigueur de l'article 59 de la loi n° 91-1323 du 30 décembre 1991 différait du régime actuel dès lors que l'exonération était limitée à la première transmission à titre gratuit.
Par ailleurs, pour la détermination de la limite de 500 000 F au-delà de laquelle l'exonération partielle est ramenée de 75 % à 50 %, il était tenu compte de l'ensemble des donations consenties par la même personne à un titre, à une date ou sous une forme quelconque.
D'autre part, en cas de transmission à titre gratuit au preneur ou à ses proches parents, l'exonération comportait une limite de superficie fixée à une fois et demie la superficie minimum d'installation mais aucune condition d'antériorité du bail n'était exigée.
47En revanche, la loi précitée n'a pas modifié les conditions générales et les modalités d'application du régime de faveur (cf. ci-avant n°s 11 à 20 et 31 à 45 ).
Dès lors, les développements qui suivent se limitent aux règles spécifiques qui s'appliquaient aux successions ouvertes avant le 1er juillet 1992.
2. Portée du régime.
a. Première transmission à titre gratuit.
48L'exonération n'était susceptible de bénéficier à un même bien qu'une seule fois, lors de sa première transmission à titre gratuit même si ce bien faisait l'objet de baux à long terme successifs au profit de personnes différentes.
En aucun cas, la seconde transmission à titre gratuit d'un bien donné ne pouvait profiter de l'exonération, alors même que la première mutation aurait pu être totalement ou partiellement exclue du bénéfice de cette exonération par suite, notamment, du jeu des abattements édictés par les articles 779 ou 788 du CGI.
En revanche, il n'était tenu aucun compte des mutations à titre onéreux qui avaient pu affecter le bien.
Lorsqu'un bien loué par bail à long terme avait subi des modifications dans sa consistance entre la première et la seconde mutation à titre gratuit, seuls les biens nouveaux, qui n'avaient pas encore bénéficié de l'exonération du chef du propriétaire actuel ou du chef d'un précédent propriétaire, pouvaient en profiter, si les conditions prévues par la loi étaient remplies.
49Pour déterminer s'il s'agissait de la première transmission de la totalité ou d'une fraction seulement d'un immeuble rural donné à bail à long terme, il convenait de tenir compte des règles de droit civil applicables en matière de régimes matrimoniaux (cf. ci-avant 7 G 2111 ).
S'agissant d'un immeuble de communauté, l'exonération pouvait s'appliquer successivement lors du décès de chaque époux, à la fraction de cet immeuble lui revenant en sa qualité de commun en biens. Ainsi, au décès d'un époux marié sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, l'immeuble rural donné à bail à long terme acquis au cours de la communauté est attribué pour moitié à l'époux survivant en qualité de coïndivisaire. Dès lors, seule l'autre moitié de l'immeuble considéré dépendait de la succession et bénéficiait de l'exonération des droits de mutation si, bien entendu, les conditions exigées par l'article 793-2-3° du CGI étaient satisfaites.
b. Prise en considération des donations antérieures pour la limitation de l'exonération.
50Comme sous le régime actuel (cf. ci-avant n°s 25 et suiv. ), l'exonération n'était applicable qu'à concurrence des trois quarts de la valeur des biens loués par bail à long terme (CGI, art. 793-2-3° ) ; toutefois, lorsque cette valeur excédait 500 000 F, l'exonération était ramenée à 50 % pour la fraction excédant cette limite (CGI, art. 793 bis ).
51Pour l'appréciation du plafonnement de 500 000 F, l'article 793 bis du CGI précisait qu'il était tenu compte de l'ensemble des donations consenties par la même personne à un titre, à une date ou sous une forme quelconque.
Il convenait donc de retenir, non seulement la valeur des biens, objet de la transmission soumise à la formalité, mais également celle des biens préalablement donnés par le même donateur ou le même défunt au même héritier, donataire ou légataire. Bien entendu, devait être prise en compte la valeur totale des biens ainsi transmis et non la seule fraction ayant été taxée.
c. Bail consenti au bénéficiaire de la transmission, à son conjoint, à un de leurs descendants ou à une société contrôlée par une ou plusieurs de ces personnes.
52L'article 793-2-3° ancien du CGI prévoyait que lorsque le bail avait été consenti, par un acte n'ayant pas acquis date certaine avant le 1er novembre 1973, au bénéficiaire de la transmission, à son conjoint, à un de leurs descendants ou à une société contrôlée par une ou plusieurs de ces personnes, l'exonération partielle de droit de mutation à titre gratuit en faveur de biens ruraux loués à long terme s'appliquait seulement dans la limite d'une superficie au plus égale à une fois et demie la superficie minimum d'installation (SMI) prévue à l'article L 312-5 du Code rural, quel que soit le nombre des transmissions successives intervenues du chef d'une même personne.
En d'autres termes, lorsque les conditions de son application étaient réunies, l'exonération de droit ne portait, dans cette hypothèse, que sur les trois quarts ou la moitié de la superficie ainsi limitée.
1° Conditions d'application.
53L'application de ce régime était subordonnée à deux conditions qui devaient être réunies simultanément. La première était relative à la date du bail à long terme, la seconde à la qualité de preneur du bénéficiaire de la transmission.
- Date du bail.
54La limitation de l'exonération ne pouvait s'appliquer tout d'abord qu'aux baux à long terme n'ayant pas acquis date certaine avant le 1er novembre 1973.
Dans le cas contraire, l'exonération s'appliquait dans les conditions normales.
On rappelle qu'un acte a date certaine s'il revêt la forme authentique. S'il est rédigé sous seing privé, il n'a date certaine que du jour où il a été enregistré, du jour de la mort de l'une des parties contractantes ou du jour où il a été relaté dans un acte dressé par un officier public (Code civil, art. 1328).
- Qualité de preneur du bénéficiaire de la transmission.
55Pour que ce régime puisse s'appliquer, il fallait que le bail ait été consenti au bénéficiaire de la transmission, à son conjoint, à un de leurs descendants ou à une société contrôlée par une ou plusieurs de ces personnes. Les personnes ainsi énumérées étaient considérées comme des personnes interposées et le bail consenti à l'une d'entre elles était censé avoir été consenti au bénéficiaire de la transmission.
Remarques :
Personnes interposées.
56Il est précisé que pour l'application de ces dispositions, le régime matrimonial du conjoint n'avait pas à être pris en considération.
De même, lorsque le preneur était un descendant, il n'y avait pas à tenir compte du degré de parenté de ce descendant avec le preneur ou son conjoint.
Enfin, une société devait être considérée comme contrôlée par le bénéficiaire de la transmission, son conjoint ou un de leurs descendants, non seulement lorsque les intéressés détenaient la majorité des voix, mais également lorsque, sans posséder cette majorité, ils contrôlaient, en fait, ladite société.
Cas où le bien loué à long terme était transmis pour partie au preneur ou réputé tel et pour partie à d'autres personnes et, notamment à des frères ou soeurs.
57La limitation s'appliquait à la part revenant au preneur ou réputé tel.
En revanche, les parts revenant aux autres personnes bénéficiaient intégralement de l'exonération partielle (cf. ci-après exemple n° 2 de l'annexe II).
Le service avait la possibilité, sous le contrôle du juge de l'impôt, de remettre en cause l'exonération ainsi accordée à ces personnes dès lors que les transmissions faites à leur profit n'étaient pas sincères et répondaient à des préoccupations d'évasion fiscale, le service était fondé notamment si les biens attribués aux frères ou soeurs du preneur ou réputé tel étaient revendus dans un court délai à ce dernier, à réunir tous les éléments de nature à établir que le véritable attributaire était le preneur et à taxer la transmission en conséquence.
2° Détermination de la fraction exonérée.
58Lorsque les conditions précitées étaient remplies, l'exonération partielle n'était applicable que dans la limite d'une certaine superficie.
Conformément aux dispositions alors en vigueur, cette superficie était égale à une fois et demie la superficie minimum d'installation (SMI) visée à l'article L 312-5 du Code rural.
- Détermination de la superficie minimum d'installation.
59Aux termes de l'article L 312-5 du Code rural, la SMI est fixée dans le schéma directeur départemental des structures agricoles pour chaque région naturelle du département et pour chaque nature de culture. Elle est révisée périodiquement.
La SMI en polyculture-élevage ne peut être inférieure de plus de 30 % à la surface minimum d'installation nationale 1 , sauf dans les zones de montagne ou défavorisées où la limite inférieure peut atteindre 50 %. La SMI nationale est fixée tous les cinq ans par arrêté du ministre de l'agriculture.
Dans les départements d'outre-mer, la SMI est fixée tous les cinq ans par décision du ministre de l'agriculture pris après avis de la Commission départementale d'orientation de l'agriculture.
Pour les productions animales dites « hors sol », une décision du ministre de l'agriculture fixe les coefficients d'équivalence applicables uniformément à l'ensemble du territoire sur la base de la SMI nationale (cf. DB 7 C 1443).
La plupart des départements ont adopté et publié au Journal officiel un schéma directeur départemental des structures agricoles.
Toutefois, depuis la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990, l'adoption ou la révision des schémas directeurs départementaux des structures ne requièrent plus un arrêté ministériel mais un arrêté du représentant de l'État dans le département (Préfet).
Les modifications apportées aux schémas départementaux existants ne sont donc plus publiés au Journal Officiel mais dans le recueil des actes administratifs des départements en cause qui peut être consulté en Préfecture.
60Dans les départements dotés d'un schéma, les SMI sont fixées par région naturelle et par nature de culture (cf. arrêtés préfectoraux). Les SMI applicables aux productions hors sol résultent de l'application des coefficients d'équivalence nationaux fixés par l'arrêté ministériel du 18 septembre 1985 à partir de la SMI nationale de polyculture (cf. DB 7 C 1443 - Annexe II).
Dans les autres départements, jusqu'à la mise en place du schéma directeur, c'est l'ancien régime des SMI qui continue de s'appliquer : fixation par arrêté ministériel du 16 juin 1975 des SMI, par régions naturelles, mais uniquement pour les cultures générales ; fixation de coefficients d'équivalence pour les autres productions.
- Détermination de la fraction exonérée.
61Dans le cas où il n'existait pour les biens transmis à titre gratuit qu'une seule superficie minimale, la fraction de la valeur du bien qui bénéficiait de l'exonération était donc déterminée en appliquant à la valeur d'ensemble du bien loué à long terme le rapport existant entre une fois et demie la superficie minimum d'installation prévue dans le département (ou la région naturelle) du lieu de situation du bien et la superficie totale du bien.
Mais, bien entendu, ce n'étaient que les trois quarts ou la moitié de la valeur ainsi calculée qui pouvaient être exonérés de droits. Le surplus de la valeur du bien est imposé dans les conditions de droit commun.
62Cas particuliers :
- Donation consentie par deux époux communs en biens.
En cas de donation consentie par deux époux à un enfant d'un immeuble rural dépendant de la communauté et loué par bail à long terme à ce même enfant, la limite d'exonération s'appliquait sur la partie du bien donnée par chaque parent et le donataire pouvait bénéficier de deux fois la limite fixée, soit trois fois la SMI.
- Pluralité d'héritiers ou de donataires conjointement preneurs à bail, cf. ci-après n° 68 .
1 Un arrêté du 14 mars 1985 a fixé la SMI nationale à 25 hectares en polyculture-élevage.