Date de début de publication du BOI : 15/12/1988
Identifiant juridique : 6C2331
Références du document :  6C233
6C2331

SECTION 3 MODALITÉS DE L'ÉVALUATION


SECTION 3

Modalités de l'évaluation



SOUS-SECTION 1

Évaluation au moyen de baux écrits ou de déclarations de locations verbales 1


1Les modalités d'utilisation des baux écrits ou des déclarations de locations verbales appellent les commentaires ci-après.


  A. LOCAUX ADMINISTRATIFS 2


2Dans le cas de locaux pris à bail par l'État, les régions, les départements, les communes, les établissements publics et les offices de ces mêmes collectivités, les services d'intérêt public, les entreprises publiques ou nationalisées, les sociétés d'économie mixte, la fixation du montant du loyer est effectuée après intervention de divers organismes de contrôle : autorité de tutelle, service des domaines, commissions des opérations immobilières de l'architecture et des espaces protégés, etc.

Cette intervention permet de poser, en principe, que les baux de l'espèce répondent au critère de normalité recherché.

3Cependant, dans certains cas exceptionnels, le service public locataire peut être contraint d'accepter des conditions de location manifestement exagérées, afin d'éviter, par exemple, des frais de réinstallations considérables (tel est le cas de certains bureaux des PTT). Ces actes de location peuvent dès lors être tenus pour anormaux et écartés.


  B. LOCAUX COMMERCIAUX ET ARTISANAUX


4Aux termes de l'article 23 du décret du 30 septembre 1953 modifié par le décret du 3 janvier1966, le montant du loyer des baux commerciaux ou artisanaux à renouveler ou à réviser doit correspondre à la valeur locative.

5Celle-ci est, sauf circonstances particulières justifiant la prise en compte d'autres éléments, déterminée en prenant en considération les facteurs ci-après :

- la surface affectée à la réception du public ou à l'exploitation, la nature et la conformation des lieux, ainsi que leur disposition dans l'immeuble (locaux au rez-de-chaussée, en sous-sol ou en étage) ;

- la destination et les modalités de jouissance des lieux prévues au bail (durée du bail, faculté de sous-louer, faculté accordée au locataire d'étendre ses activités ou d'en modifier la nature, droit à une enseigne) ;

- l'état d'entretien ou de vétusté des locaux et les charges imposées à chacune des parties (versement d'un pas de porte ; obligation faite au preneur de payer l'impôt foncier, de faire des réparations et travaux incombant normalement au bailleur, etc.) ;

- l'importance des locaux annexes et des dépendances affectés, le cas échéant, à l'exploitation du fonds ;

- la nature et l'état des équipements mis à la disposition du locataire, ainsi que l'existence de vitrines d'exposition ;

- l'importance de la ville, du quartier et de la rue (zones de commercialité, lieux de passage) ;

- l'intérêt de l'emplacement du point de vue de l'exercice de l'activité commerciale ou artisanale (zone où se recrute la clientèle, importance de la concurrence, voisinage, situation particulière en angle de rues, qualité des accès - largeur des rues, des trottoirs - facilités de stationnement, etc.) ;

- la nature de l'exploitation et l'adaptation des locaux à la forme d'activité exercée dans les lieux (proportionnalité de la surface à la nature du commerce exercé), ainsi que les commodités offertes pour l'entreprendre (locaux polyvalents).

6Il s'ensuit que l'éventail des prix de location est, en général, assez ouvert. Mais cette hétérogénéité des prix n'est qu'apparente. En effet, les écarts constatés s'expliquent, en principe, soit par la date ancienne de la dernière révision du bail, soit essentiellement par l'influence déterminante des facteurs de commercialité.

7Les facteurs locaux de commercialité, dépendent principalement de l'intérêt que présente, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité en cause et des modifications que ces éléments subissent d'une manière durable ou provisoire.

Ainsi, en matière commerciale, l'emplacement se révèle un élément déterminant de la valeur locative ; parfois même, dans les bons emplacements, la valeur commerciale du lieu l'emporte, dans le loyer, sur la valeur de la construction.

Chaque emplacement a, en conséquence, sa propre valeur commerciale, variable d'ailleurs suivant les espèces de locaux 3 .

8Toutefois, les écarts constatés peuvent dans certains cas, résulter de pratiques commerciales qui se sont actuellement généralisées.

91. Travaux d'amélioration exécutés par les locataires en dehors de toute obligation contractuelle.

Dans cette hypothèse, la valeur locative doit être appréciée en tenant compte des caractéristiques physiques réelles des locaux, c'est-à-dire des travaux d'amélioration ou d'équipement réalisés par le locataire.

Lorsque le service n'est pas en mesure de rectifier le prix des baux, notamment lorsque le montant des travaux est inconnu, ou que le nombre d'années sur lesquelles ce montant doit être étalé est incertain, les baux doivent être écartés et la valeur locative des locaux déterminée par comparaison.

Ainsi, les travaux de modernisation, de transformation d'intérieur et de devanture effectués en dehors de ses obligations contractuelles par le locataire d'un local commercial et destinés à revenir gratuitement au propriétaire à l'expiration du bail sont pris en compte pour le calcul de la valeur locative servant de base à la taxe foncière due par le propriétaire et à la taxe professionnelle due par le locataire lorsqu'ils ont pour effet de modifier les caractéristiques physiques du local. Tel est le cas, notamment, lorsqu'ils correspondent à l'adjonction d'équipements nouveaux (chauffage par exemple) à la rénovation du gros oeuvre (portes, fenêtres, carrelages, vitrerie, etc.) ou affectent la structure interne du local (suppression ou élévation de cloisons etc.). Ces changements ne sont toutefois pris en considération que lorsqu'ils entraînent une modification de la valeur locative du local supérieure à 10% (RM. à M. Robert BISSON, JO AN du 24 novembre 1978, p. 8284).

Par ailleurs, lorsque des travaux d'amélioration exécutés par le locataire de locaux commerciaux ont eu pour effet d'accroître la valeur locative de l'immeuble, il y a lieu, pour déterminer la base de la taxe foncière due par le propriétaire, de prendre en compte la plus-value correspondante sans avoir à rechercher si les travaux ont été effectués aux frais du propriétaire ou aux frais du locataire et quels sont les droits respectifs de l'un et de l'autre sur les aménagements et installations. La valeur locative à retenir doit dès lors être portée au total formé par le loyer normal stipulé dans le bail avant l'exécution des travaux et par le supplément de valeur locative procuré à l'immeuble par les travaux.

Ce supplément de valeur locative est réputé proportionnel à la plus-value ressortant de la comparaison entre la valeur vénale de l'immeuble lors de la conclusion du bail et sa valeur vénale après l'exécution des travaux (CE, arrêt du 8 mai 1981, n° 14930).

102. Location de murs nus.

Le propriétaire met à la disposition du locataire une construction partiellement terminée (gros murs, charpente, toiture, planchers) laissant à l'occupant le soin de réaliser à ses frais tous les travaux intérieurs (cloisonnement, plafonds, revêtements de sol, chauffage, sanitaire, peintures, finitions, etc.).

La valeur locative doit être déterminée comme dans le cas précédent.

113. Pas de porte (droit d'entrée ou de renouvellement de bail).

Les sommes versées à titre d'indemnité de pas de porte ou de droit d'entrée, par le preneur d'un local à usage commercial ou artisanal, doivent être considérées selon les circonstance :

- soit comme ayant le caractère d'un supplément de loyer payé d'avance ;

- soit comme étant le prix d'acquisition d'un élément incorporel du fonds de commerce. Tel est le cas, par exemple, lorsque le versement trouve son fondement dans l'engagement du bailleur de ne pas consentir de bail à un commerce concurrent dans le centre commercial qui se trouve sous sa dépendance.

Ces sommes peuvent également entrer pour partie dans l'une et l'autre des deux catégorie précédentes.

Lorsqu'il s'agit d'un supplément de loyer payé d'avance, le montant de ce supplément doit être réparti sur la durée du bail et une quote-part ajoutée au montant du loyer annuel stipulé dans le contrat.

Lorsque la nature des sommes versées n'est pas exactement connue, il convient de déterminer la valeur locative par comparaison avec celle de locaux similaires.

12Remarque importante. - Il résulte des dispositions de l'article 1498 du CGI que pour les immeubles loués à des conditions de prix normales le montant du loyer effectif est en principe retenu comme valeur locative cadastrale.

Lorsque le loyer est anormal, l'évaluation doit être effectuée par comparaison avec des locaux-types. Encore convient-il de déterminer à partir de quel seuil un loyer peut être considéré comme anormal.

À cet égard une appréciation trop extensive de la normalité des loyers, se traduisant par la prise en compte quasi systématique du loyer effectif, ne manquerait pas de présenter d'importants inconvénients du point de vue de la proportionnalité des évaluations. L'expérience prouve en effet que dans certains cas, des commerçants commettent une erreur d'appréciation lors de leur entrée dans les lieux et acceptent un loyer qui se révèle ultérieurement trop élevé. La fixation de la valeur locative à ce niveau « figerait » l'erreur pour plusieurs années.

Par ailleurs, la législation sur les baux commerciaux résultant du décret n° 53-960 du 30 septembre 1953 modifié, en particulier par la loi n° 88-18 du 5 janvier 1988, a des incidences non négligeables sur le montant des loyers stipulés dans les baux.

Il s'ensuit que des locaux identiques peuvent donner lieu à des loyers différents selon l'époque à laquelle ils ont été renouvelés et la législation qui leur est applicable.

Le critère du loyer effectif risque donc d'aboutir à des valeurs locatives également très différentes qui fausseraient la concurrence entre deux exploitants.

13Dès lors l'appréciation de la normalité des baux écrits et locations verbales exige la mise en oeuvre du processus d'analyse suivant :

1° Chaque commune est découpée en zones de commercialité, avec le concours de la commission communale des impôts directs.

2° Dans chaque zone, des locaux-types sont retenus pour les principaux groupes d'activités, la notion de groupe étant appréciée avec toute la largeur de vue souhaitable.

3° Le loyer au mètre carré pondéré de chaque local à évaluer est ensuite rapproché de celui du local-type correspondant. Deux hypothèses doivent être distinguées :

a. L'écart avec le loyer unitaire au mètre carré pondéré du local type n'excède par 20% en plus ou en moins.

Le loyer du local à évaluer est alors considéré comme normal et retenu comme valeur locative, sauf preuve contraire apportée par le contribuable. En effet, si bien délimitées que puissent être les zones de commercialité, elles n'ont pas une homogénéité parfaite et les écarts modérés par rapport à la moyenne ne sont souvent qu'un reflet de cette situation.

Exemple.

Local-type n° 2 de 70 m 2 de surface pondérée, loué 16 800 F ; valeur locative au mètre carré pondéré : 16 800 F : 70 = 240 F.

Fourchette de normalité des locations :

- maximum : 240 + (240 x 20 / 100) = 288 F ;

- minimum : 240 - (240 x 20 / 100) = 192 F.

Soit un local loué 11 000 F, dont la surface pondérée est de 40 m 2 . Le local-type correspondant est le local-type n° 2 susvisé.

Valeur locative au mètre carré pondéré :

11 000 : 40 = 275 F Cette valeur locative unitaire se situant à l'intérieur de la fourchette de normalité, le loyer effectif, soit 11 000 F, est retenu comme valeur locative cadastrale.

b. Le loyer unitaire du local à évaluer se trouve en dehors de la fourchette de plus ou moins 20%.

L'Administration et la commission communale, des Impôts directs recherchent alors l'explication de cet état de choses, essentiellement les facteurs de commercialité particuliers (emplacement très favorable à l'intérieur de la zone de commercialité, zone de commercialité peu propice à la nature de l'activité exercée, etc.). À défaut de justifications suffisantes, le loyer est considéré comme anormal et la valeur locative fixée par comparaison avec celle du local-type.


  C. LOCAUX MIXTES 4  [CGI, ann. III, art. 324 Y]


14Lorsque les actes de locations visés à l'article 324-C de l'annexe III au CGI (cf. C 2133 ) portent sur des locaux dont chacune des parties a reçu une affectation différente, la fraction desdits locaux affectée à l'habitation ou à l'exercice d'une profession est évaluée selon les règles prévues par les articles 324 D à 324 X de la même annexe (cf. C 2221 à 2226) ; la valeur locative ainsi obtenue est imputée sur le montant global du bail écrit ou de la location verbale pour déterminer la valeur locative du surplus du local (CGI, ann. III, art. 324 Y).

15Toutefois, dans le cas d'un immeuble dont une partie est affectée à l'habitation et l'autre partie à usage commercial, mais dont les deux parties ne sont pas dissociables et font l'objet d'un bail unique, le caractère normal des conditions de location doit être apprécié compte tenu des stipulations du bail pris dans son ensemble. Il n'y a donc pas lieu dans cette situation d'évaluer séparément la valeur locative de la partie de l'immeuble affectée à l'habitation en procédant par voie de comparaison en vue de constater, par soustraction de cette valeur du prix global stipulé, le loyer des locaux à usage commercial et d'en apprécier le caractère normal ou anormal (CE, arrêt du 24 juin 1981, n oS 20602 et 24392).

La solution du Conseil d'État est applicable, de la même façon, aux immeubles dont une partie est affectée à un usage professionnel et l'autre à un usage commercial.

 

1   Cette méthode d'évaluation n'est utilisée que pour les locaux existant à la date de référence de la révision générale. La valeur locative cadastrale des constructions nouvelles et celles deslocaux qui changent de consistance, d'affectation, de caractéristiques physiques ou d'environnement, dans l'intervalle de deux révisions générales doivent obligatoirement être déterminées soit par comparaison, soit par voie d'appréciation directe.

2   Il s'agit de locaux destinés à abriter des services administratifs, à l'exclusion de ceux affectés à l'habitation personnelle des agents qui doivent être évalués comme des locaux d'habitation ordinaires.

3   Certains emplacements de boutiques ont une valeur décisive sur la prospérité du commerce, mais la plupart des bureaux peuvent sans inconvénient majeur être déplacés dans un périmètre assez étendu. Les ateliers s'installent commodément dans les quartiers où loge la main-d'oeuvre, mais le développement des communications et du camionnage a apporté des facilités qui allongent les rayons d'utilisation et qui tendent à accroître les degrés de commercialité des zones périphériques. Pour les locaux en étage, le niveau aune importance, dans la mesure où il n'y a pas d'ascenseur et où il importe que des enseignes aux fenêtres soient visibles de la rue.

4   Il est rappelé qu'en ce qui concerne les éléments d'un local affecté à usage mixte l'évaluation doit être effectuée selon les règles prévues ci-avant (cf. chap. 1).