SECTION 6 AMORTISSEMENTS
SECTION 6
Amortissements
L'article 93-1-2° du CGI pose en principe que les amortissements en matière de bénéfices non commerciaux sont effectués selon les règles applicables aux bénéfices industriels et commerciaux.
Il ne peut en être ainsi, cependant, que dans la mesure où lesdites règles sont compatibles avec la nature des obligations qui sont imposées aux membres des professions libérales.
Par application de ce principe, il est admis que le système de l'amortissement dégressif est applicable aux contribuables placés sous le régime de la déclaration contrôlée.
Par ailleurs, dans certains cas, des amortissements exceptionnels peuvent être constatés.
SOUS-SECTION 1
Généralités
A. PRINCIPES
1Toute dépréciation des éléments de l'actif affectés à l'exercice de la profession constituant une perte en substance, l'amortissement permet de compenser celle-ci en l'imputant sur les résultats des années au cours desquelles elle se produit. Aussi, il ne peut y avoir amortissement en l'absence de dépréciation effective.
L'exploitant n'a pas à prouver la dépréciation pour tous les éléments qui sont réputés se déprécier du seul fait de l'usure ou du temps. L'amortissement est en conséquence, admis, dès lors que les biens considérés sont la propriété de l'intéressé.
2La perte totale que l'amortissement est destiné à couvrir est limitée par le chiffre même des capitaux engagés pour l'acquisition des éléments sujets à dépérissement : c'est-à-dire que l'amortissement doit être égal à la dépréciation et ne peut l'excéder.
En pratique, il donne lieu à une déduction forfaitaire calculée, d'après la durée probable d'utilisation, sur le prix de revient des éléments amortissables.
De ce principe, il résulte que le prix de revient constitue à la fois la base et la limite de l'amortissement (cf. ci-dessous, n°s 9 et suiv. ).
C'est pourquoi, pour être admis en déduction, l'amortissement doit être réellement effectué et comptabilisé (cf. ci-dessous, n°s 28 et suiv. ).
3Par ailleurs, à titre de règles générales, il y a lieu de préciser que :
- lorsqu'un élément est acquis ou cédé en cours d'année, l'annuité déductible doit être réduite prorata temporis (cf. DB 5 G 2362, n°s 10 et suiv. ) ;
- si un élément est mis hors de service ou détruit avant amortissement complet, le montant de l'amortissement non pratiqué, qui correspond à la valeur résiduelle de l'élément considéré, est déductible pour l'assiette de l'impôt, en tant que moins-value à court terme, au titre de l'année où intervient l'événement ;
- lorsque, à la fin de l'amortissement, un élément est toujours en service, aucun supplément d'amortissement n'est possible ;
- en cas de cession, il est tenu compte des amortissements pratiqués pour le calcul de la plus-value ou de la moins-value éventuelle.
4L'amortissement pratiqué doit être mentionné sur le registre des immobilisations et des amortissements que les exploitants soumis au régime de la déclaration contrôlée sont dans l'obligation de tenir (cf. ci-après n°s 28 et suiv. et DB 5 G 3123 ).
Pour les exploitants soumis au régime déclaratif spécial, le deuxième alinéa du I de l'article 102 ter du CGI prévoit que l'abattement forfaitaire pour frais de 35 % est réputé tenir compte des amortissements pratiqués selon le mode linéaire.
B. ÉLÉMENTS AMORTISSABLES
5Les éléments affectés à l'exercice de la profession et dépendant du patrimoine professionnel ne peuvent donner lieu à un amortissement que dans la mesure où la dépréciation que ledit amortissement a pour objet de constater est effectivement supportée par l'exploitant qui en demande la déduction, c'est-à-dire le propriétaire.
6Lorsqu'un bien, affecté à l'exercice de la profession, est pris à bail, alors même que le preneur est tenu d'en assurer l'entretien, aucun amortissement ne peut être pratiqué, car la dépréciation et l'obligation d'y faire face ne sont pas à sa charge.
De même, si un bien est grevé d'usufruit, aucun amortissement ne peut être pratiqué, ni par le nu-propriétaire, ni par l'usufruitier 1 .
7En principe, constituent des biens amortissables, les éléments corporels affectés à l'exercice de la profession et dépendant du patrimoine professionnel du contribuable (rapp. ci-avant DB 5 G 2112 et ci-après DB 5 G 242, n°s 1 à 6 ).
Il s'agit notamment des immeubles 2 , du matériel, du mobilier, des véhicules automobiles.
Leur utilisation engendre généralement une dépréciation, traduite par une perte réelle, qui réduit à due concurrence le bénéfice de l'exploitant et à laquelle il est fait face par l'amortissement.
8Quant aux éléments incorporels affectés à l'exercice de la profession (charge ou office, clientèle, droit au bail, etc.), ils ne sont pas susceptibles d'être amortis car, d'une manière générale, ils ne subissent pas de dépréciation du fait de l'usure ou du temps (dans ce sens, CE, arrêt du 9 juillet 1980, req. n° 11847 ; cf. également RM Authié n° 16373, Sénat, 19 décembre 1996, p. 3402).
C. BASE DE L'AMORTISSEMENT
9L'amortissement doit être calculé sur le prix de revient des éléments affectés à l'exercice de la profession et ne peut excéder ce prix.
Il ne peut, en aucun cas, être calculé sur la valeur de remplacement des éléments à amortir.
La détermination du prix de revient obéit aux règles suivantes :
1. Biens acquis à titre onéreux.
10Le prix de revient est représenté par la somme déboursée pour l'acquisition du bien affecté à l'exercice de la profession, c'est-à-dire par sa valeur d'origine, telle qu'elle doit être inscrite sur le registre des immobilisations.
Cette valeur s'entend du coût réel d'achat de l'élément considéré, augmenté, le cas échéant, des frais accessoires (droits de douane, frais de transport, frais d'installation, etc.) 3 ainsi que, des taxes sur le chiffre d'affaires qui l'ont grevé.
Toutefois, lorsque l'exploitant est assujetti à la TVA et que les biens amortissables ouvrent droit à déduction 4 , le prix de revient doit être diminué de la déduction opérée. Dans ce cas, l'amortissement est calculé sur la base du prix d'achat ainsi réduit 5 .
Cette règle est applicable aux membres des professions non commerciales qui deviennent redevables de la TVA en ce qui concerne les immobilisations en cours d'utilisation qu'ils détiennent à la date de leur assujettissement et pour lesquelles l'article 226 de l'annexe II au CGI leur ouvre un droit à déduction partielle.
Les immobilisations dont il s'agit sont amorties, à compter de cette date, d'après leur valeur d'origine diminuée du crédit de TVA récupérable.
• Éléments acquis moyennant le versement d'une rente viagère.
11La doctrine distinguait traditionnellement en fonction de la nature juridique du contrat selon que la rente représentait la transformation d'un prix fixé une fois pour toutes dès l'origine du contrat, ou qu'elle constituait la rémunération directe de la cession.
Lorsque la rente viagère résultait de la transformation du prix d'acquisition de l'immobilisation, elle n'en constituait alors qu'une modalité de paiement ; le prix stipulé constituait le prix de revient de l'élément acquis et par conséquent la base de calcul de l'amortissement.
En revanche, lorsque la rente constituait la rémunération directe de la cession d'une immobilisation, le contrat revêtait alors un caractère aléatoire et la valeur retenue lors de l'achat était provisoire car les arrérages versés conservaient, quel que soit leur montant cumulé, le caractère de prix de cession ou de prix de revient de l'élément concerné.
Le Conseil d'État a rejeté cette analyse dans un arrêt du 23 novembre 1983 (n° 41 631) et a considéré que, même dans cette dernière hypothèse, le prix de revient du bien acquis est le prix stipulé dans l'acte et que lorsque les arrérages dépassent le prix d'acquisition stipulé, ils ne constituent pas un supplément de prix de revient mais une charge financière immédiatement déductible à due concurrence.
La distinction doctrinale qui avait été réaffirmée à la suite de l'arrêt du Conseil d'État précité dans une réponse à une question écrite (RM Fosset n° 10313, JO Sénat 7 février 1991, p. 245) est abandonnée.
Désormais, il y a lieu d'admettre que lorsqu'un professionnel non commercial acquiert un bien moyennant le versement d'une rente viagère, le prix stipulé exprime le prix de revient de l'élément qui entre dans l'actif de ce professionnel, quelle que soit la nature juridique du contrat (que la rente résulte de la conversion du prix de vente ou constitue en elle-même le prix de cession).
2. Biens acquis à titre gratuit.
12La transmission peut s'opérer, sous certaines conditions, sous le bénéfice de l'article 41 du CGI. Cette question est examinée ci-après DB 5 G 244, n° 37 .
En pareil cas, les amortissements susceptibles d'être pratiqués par le nouvel exploitant, qui poursuit l'exploitation doivent, en principe, être calculés sur les mêmes bases et aux mêmes taux que lorsque l'ancien exploitant exerçait la profession.
13En dehors des cas d'application de l'article 41 du CGI, l'amortissement déductible pour l'établissement de l'impôt doit, en ce qui concerne les biens acquis à titre gratuit, être déterminé d'après la valeur indiquée dans l'acte publié constatant l'entrée dans le patrimoine du contribuable ou, en cas de rehaussement, d'après l'estimation retenue pour le paiement des droits de mutation à titre gratuit.
14 Remarque : Les droits de mutation à titre gratuit constituant des frais d'acquisition d'immobilisations (cf. DB 5 G 233, n° 31 ) ne doivent pas être compris dans la valeur des biens amortissables.
3. Règles particulières.
a. Véhicules automobiles.
15Il résulte des dispositions de l'article 93-1-2° du CGI, que la limite prévue à l'article 39-4 du même code pour l'amortissement des voitures particulières s'applique en matière de bénéfices non commerciaux.
Ainsi, l'amortissement des voitures particulières n'est pas déductible pour la fraction de leur prix d'acquisition 6 , taxes comprises, qui excède :
-120 000 F pour les véhicules dont la première mise en circulation est intervenue à compter du 1er novembre 1996 ;
-100 000 F pour les véhicules dont la première mise en circulation est intervenue entre le 1er novembre 1993 et le 31 octobre 1996 ;
- 65 000 F pour les véhicules dont la première mise en circulation est intervenue entre le 1er janvier 1988 et le 31 octobre 1993 ;
- 50 000 F pour les véhicules dont la première mise en circulation est intervenue entre le 1er juillet 1985 et le 31 décembre 1987 ;
- 35 000 F pour les véhicules dont la première mise en circulation est antérieure au 1er juillet 1985.
1° Date de première mise en circulation à retenir.
La date à prendre en considération est celle qui figure à ce titre sur la « carte grise » du véhicule.
2° Prix d'acquisition à retenir.
16Le prix d'acquisition à retenir s'entend du prix d'achat, taxes comprises, augmenté le cas échéant du coût, taxes comprises, des équipements et accessoires que ceux-ci soient fournis avec le véhicule ou qu'ils fassent l'objet d'une livraison distincte.
Cette mesure concerne tous les équipements et accessoires divers, à l'exception des radiotéléphones acquis à compter du 1er janvier 1992 (cf. n° 17 ci-après).
Cas particulier des radiotéléphones.
17Les installations de radiotéléphone acquises à compter du 1er janvier 1992 sont considérées comme constituant des immobilisations distinctes du véhicule dans lequel elles sont utilisées 7 .
De ce fait, elles ne doivent plus être prises en compte comme équipements et accessoires pour la détermination du prix d'acquisition de ces véhicules et pour l'application de la limite prévue à l'article 39-4 du CGI.
À condition que le radiotéléphone soit inscrit sur le registre des immobilisations, le prix de revient de cet équipement est donc amorti distinctement du véhicule dans lequel il est installé. Cet amortissement est à calculer selon le mode linéaire, sur la durée normale de son utilisation.
Bien entendu, l'amortissement d'un radiotéléphone, de même que ses dépenses d'abonnement et de fonctionnement, ne peuvent être admis en déduction sur le plan fiscal que dans la mesure où cet équipement est utilisé à des fins professionnelles.
Cas particulier des véhicules neufs acquis avec l'aide de l'État.
18Le décret n° 94-137 du 17 février 1994 avait institué une aide de l'État d'un montant de 5 000 F accordée à toute personne physique qui acquérait ou prenait en location (crédit-bail ou location avec option d'achat) d'un véhicule neuf en France métropolitaine ou dans les départements d'Outre-mer. Cette aide était accordée sous réserve que cet acquéreur remette, au vendeur du véhicule neuf, un véhicule d'un âge au moins égal à dix ans, à des fins de destruction. Ce dispositif était temporaire. Il s'appliquait aux véhicules commandés à partir du 4 février 1994 et facturés au plus tard le 30 juin 1995.
De la même manière, le décret n° 95-1119 du 19 octobre 1995 avait institué une aide de l'État d'un montant de 5 000 F ou de 7 000 F, accordée à toute personne physique qui acquérait ou prenait en location (crédit-bail ou location avec option d'achat) un véhicule neuf en France métropolitaine ou dans les départements d'outre-mer, sous réserve que cet acquéreur remette au vendeur du véhicule neuf, à des fins de destruction, un véhicule d'un âge au moins égal à huit ans. Ce dispositif était temporaire. Il s'appliquait aux véhicules facturés à partir du 1er octobre 1995 et au plus tard le 30 septembre 1996.
Le champ d'application de ces aides a été respectivement fixé par les articles 1 à 3 du décret de 1994 et 1 à 4 du décret de 1995 (cf. annexes I et II).
Les professionnels libéraux imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux pouvaient bénéficier de ces mesures.
• Régime fiscal des aides :
19Ce régime était applicable aux titulaires de bénéfices non commerciaux qui affectaient le véhicule à l'exercice de leur activité professionnelle, et l'inscrivaient à ce titre au tableau des immobilisations (il s'appliquait également à ceux qui avaient choisi de déduire de leur bénéfice non commercial les loyers des véhicules acquis en crédit-bail).
Il ne visait donc pas les personnes qui conservaient dans leur patrimoine privé le véhicule qu'ils utilisaient à des fins professionnelles.
Dans l'hypothèse d'une acquisition directe du véhicule, l'une ou l'autre des aides restait sans incidence sur le résultat de l'année, quel que soit son mode de perception. L'acquéreur qui inscrivait le véhicule au tableau des immobilisations a dû retenir le prix d'acquisition après déduction du montant de l'aide.
Par suite, la base d'amortissement des véhicules concernés, ainsi que la plus-value réalisée lors de leur cession, sont déterminés dans les conditions de droit commun, à partir du prix ainsi réduit. De même, s'agissant plus particulièrement des véhicules de tourisme, la limite de 100 000 F 8 prévue à l'article 39-4 du CGI est appréciée par rapport à ce prix réduit.
1 Seules peuvent être déduites les charges supportées pour satisfaire aux obligations incombant à l'usufruitier.
2 Sont visés les immeubles construits, c'est-à-dire les locaux professionnels. En effet, les sols et terrains n'étant pas, par nature, susceptibles d'une diminution de valeur par l'effet du temps, ne peuvent pas faire l'objet d'un amortissement.
3 Les frais d'acquisition des immeubles (droits d'enregistrement, frais d'actes qui constituent des frais d'établissement, cf. DB 5 G 232 ) ne doivent pas être compris dans la valeur d'origine des biens amortissables.
En revanche, il convient d'y inclure les frais de démolition d'un immeuble acquis en vue d'une reconstruction immédiate, ou le prix d'un droit d'option ou d'une promesse de vente sur l'immeuble acquis, par exemple.
4 Sur les conditions et modalités d'exercice du droit à déduction, cf. DB 3 D .
5 Ce principe s'applique alors même que l'exploitant n'aurait pas effectivement utilisé son droit à déduction.
6 Il n'est pas déductible non plus lorsque le contribuable a opté pour la déduction forfaitaire de ses frais de voiture (sur l'utilisation du barème forfaitaire BNC, cf. DB 5 G 2354, n°s 9 et suivants ).
7 Pour ce qui concerne les entreprises relevant du régime des bénéfices industriels et commerciaux ou de l'impôt sur les sociétés, cf. DB 4 C 351, n°s 6 et suivants.
8 Limite de l'amortissement des véhicules de tourisme dont la première mise en circulation est intervenue entre le 1er novembre 1993 et le 31 octobre 1996 (cf. n° 15 ci-avant).