SOUS-SECTION 2 DÉTERMINATION DU REVENU TAXÉ D'OFFICE
SOUS-SECTION 2
Détermination du revenu taxé d'office
1En cas de taxation d'office, l'administration détermine directement le montant du revenu qui sert de base à cette taxation.
Notamment, lorsqu'elle taxe d'office un contribuable qui s'est abstenu de souscrire sa déclaration de revenu global malgré l'envoi d'une mise en demeure, elle peut évaluer par tout moyen le revenu imposable.
2Bien entendu, le service doit s'attacher à faire une évaluation aussi exacte que possible des différents revenus dont a disposé le contribuable de manière à éviter l'établissement d'impositions manifestement excessives ou insuffisantes.
Ainsi, compte tenu du principe d'annualité de l'impôt, les revenus reconstitués à partir des crédits bancaires d'un contribuable en situation de taxation d'office ne doivent pas être répartis par parts égales sur la période vérifiée, si l'administration est en mesure de procéder à une répartition exacte de ces crédits en fonction de la date à laquelle l'intéressé a disposé des sommes correspondantes (CE, arrêt du 25 juillet 1980, n° 11107, RJ III, p. 113).
L'évaluation des bases d'imposition à des chiffres judicieusement fixés revêt d'autant plus d'importance que l'administration doit obligatoirement faire connaître au contribuable 1 , les modalités de détermination des bases ou des éléments servant au calcul des impositions d'office, afin de permettre, le cas échéant, au contribuable d'apporter la preuve de leur caractère exagéré devant la juridiction contentieuse (cf. DB 5 B 8241 ). En effet, la mise en oeuvre de la procédure de taxation d'office met fin au dialogue entre le service et le contribuable.
Dans ces conditions, le service doit faire application des principes suivants.
3S'il trouve, parmi les renseignements qu'il a recueillis, des éléments lui permettant de déterminer directement le revenu global avec une approximation suffisante, le service retient le chiffre ainsi obtenu. En particulier, si au moment où il procède à la taxation d'office, le service est en possession d'une déclaration souscrite tardivement (au-delà des trente jours de la première mise en demeure), il doit retenir les bases d'imposition résultant de cette déclaration, à moins qu'un motif précis ou les résultats d'une vérification ne fassent apparaître que ladite déclaration comporte des insuffisances, des inexactitudes ou des omissions.
4Lorsqu'il n'a pu obtenir la souscription d'une déclaration, le service doit s'attacher à déterminer, à l'aide de toutes les données en sa possession, le produit net de chacune des sources de revenus dont, à sa connaissance, le contribuable dispose. Il aboutit, en totalisant ces revenus partiels, à une évaluation du revenu global.
Lorsque l'administration procède à la taxation d'office pour défaut de souscription de la déclaration de revenu global, elle est fondée à retenir les sommes que le contribuable a perçues et dont l'origine n'est pas établie avec exactitude. En revanche, dans le cas où leur origine est connue, elle ne peut les comprendre dans les bases de la taxation que si les sommes peuvent être rattachées à une catégorie de bénéfices ou de revenus (CE, arrêt du 10 décembre 1980, n° 20709, RJ III, p. 178).
Par contre, en cas de taxation d'office pour absence de réponse aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration n'est pas tenue de qualifier la nature des revenus dont l'origine demeure inexpliquée (cf. DB 5 B 8222 ).
5À moins que le service n'ait acquis la certitude d'avoir ainsi tenu compte de toutes les sources d'où le contribuable tire ses revenus, il ne doit pas s'arrêter au résultat de l'évaluation détaillée à laquelle il a procédé sans le confronter avec le chiffre des revenus que le train de vie de l'intéressé dénote manifestement. Autrement, il courrait le risque de faire bénéficier le contribuable d'une atténuation d'impôt injustifiée, de telle sorte que la taxation d'office constituerait pour les assujettis un régime beaucoup plus favorable que l'imposition établie d'après la déclaration exacte du revenu. Or, il serait inadmissible que le refus par le contribuable de déclarer le montant de son revenu eût pour conséquence de le soustraire au paiement de l'impôt qu'il aurait intégralement acquitté s'il s'était conformé à la prescription impérative de la loi.
6Le service doit, en s'aidant de tous les signes apparents du degré d'aisance ou de richesse du contribuable, faire une appréciation très sérieuse de l'importance globale des ressources de l'intéressé et, lorsque l'estimation du montant apparent de ces ressources dépasse la somme des revenus que fait ressortir l'évaluation détaillée, de l'adopter comme taxation. Il convient enfin, d'ajouter que la recherche des contribuables défaillants et la régularisation de leur situation doivent, pour les raisons d'équité évoquées ci-dessus, être conduites avec le souci de faire verser par les intéressés les droits qu'ils doivent au Trésor dans les délais les plus rapides possibles.
7Dans la pratique, en l'absence de toute précision légale à cet égard, le conseil d'Etat a admis expressément qu'à défaut d'éléments certains permettant d'arriver à un chiffre supérieur, les revenus en cause soient évalués au moyen du barème des éléments du train de vie annexé à l'article 168-1 du CGI, (CE, arrêts des 8 mai 1970, n° 78044, du 21 mars 1975, n° 85496, du 26 juillet 1982, n° 14509, du 15 octobre 1982, n° 24226, du 25 mars 1987, n° 57028).
Toutefois, si l'administration est en droit, lorsqu'elle procède à la taxation d'office en cas de déclaration tardive, d'user, en vue de déterminer le revenu global du contribuable, de tous éléments d'information en sa possession, sous le contrôle du juge de l'impôt, si elle peut notamment, à cette fin, se référer aux rubriques du barème figurant à l'article 168-1 du CGI, elle ne peut pas, en revanche, dès lors qu'elle agit en vertu de l'article L. 66 du LPF et que par conséquent la base légale de l'imposition n'est pas l'article 168, appliquer les dispositions de cet article autres que le barème (CE, arrêt du 15 octobre 1982, n° 24226 déjà cité).
En effet, il est bien précisé qu'il ne s'agit là que d'un mode d'évaluation du revenu global et non d'une taxation régie par l'ensemble des dispositions de l'article 168.
Il s'ensuit notamment que le service n'a pas à démontrer au préalable l'existence d'une disproportion marquée et que la base d'imposition peut être inférieure au seuil d'application des dispositions de l'article 168 du CGI.
En revanche, le contribuable est admis à faire la preuve que son revenu imposable est inférieur à la base d'imposition résultant du barème en justifiant notamment que ses dépenses de train de vie ont été financées par des aliénations de capitaux ou des subsides reçus de tiers.
Apporte aussi cette preuve, le contribuable qui établit que des logements que l'administration a regardés comme des résidences secondaires, pour l'application du barème de l'article 168, étaient vacants et non garnis de meubles et n'ont donc pas été significatifs de revenus (CE, arrêt du 21 mars 1983, n° 30134).
Par ailleurs, le contribuable peut déduire de la base d'imposition le déficit qu'il a subi dans une catégorie de bénéfice ou de revenu s'il en justifie (CE, arrêt du 26 juillet 1982, n° 14509 déjà cité).
8Depuis l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 82-I de la loi de finances pour 1987 (à compter de l'imposition des revenus de l'année 1986), les dispositions de l'article 168 du CGI sont applicables même en cas d'absence de déclaration d'ensemble des revenus pour l'année d'imposition et l'année antérieure (cf. DB 5 B 5221 ) 2 .
Auparavant, les dispositions de l'article 168 du CGI ne pouvaient être appliquées à un contribuable qui n'avait pas souscrit la déclaration d'ensemble de ses revenus au titre des années considérées.
9Le service peut aussi utiliser les dépenses du contribuable.
Mais, il convient d'extourner, dans toute la mesure du possible, les sommes ayant servi à financer ces dépenses qui n'ont pas le caractère de revenu (désinvestissements, emprunts, etc.), de manière à parvenir à la fixation d'un revenu aussi proche que possible du revenu réel.
10Enfin, le service peut, pour reconstituer le revenu imposable d'un redevable taxé d'office, utiliser le solde créditeur de la balance de trésorerie établie dans le cadre d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle.
Une fois le revenu imposable évalué, l'impôt sur le revenu correspondant doit être calculé suivant les règles de droit commun. À cet égard, il convient de tenir compte de la situation et des charges de famille du contribuable, toutes les fois que celles-ci ont été signalées par l'intéressé ou qu'elles sont notoirement connues.
Le cas échéant, le contribuable pourrait d'ailleurs, après établissement du rôle, obtenir par voie de réclamation le bénéfice des réductions auxquelles il aurait droit en raison de sa situation de famille.
1 Ainsi qu'au juge de l'impôt, en cas de contentieux.
2 La taxation d'office prévue aux articles L. 66 et L. 67 du LPF peut aussi s'appliquer, toutes autres conditions étant supposées remplies.