SECTION 2 ÉLÉMENTS CORPORELS
SECTION 2
Éléments corporels
1La plupart des éléments corporels que comprend l'actif d'une entreprise (bâtiments, mobilier, matériel, outillage, ...) diminuent de valeur en raison de la vétusté ou de l'usure résultant du temps ou de l'usage. Leur dépréciation constitue une perte réelle qui réduit à due concurrence le bénéfice de l'exploitant, et à laquelle il est fait face par l'amortissement.
Cette règle comporte toutefois, une exception importante en ce qui concerne les terrains.
La situation des principaux éléments corporels au regard de l'amortissement appelle les précisions ci-après :
Constructions.
2Les constructions figurant à l'actif de l'entreprise peuvent faire l'objet d'un amortissement normal même si cet amortissement excède sensiblement la valeur locative.
Mais seul le prix de revient de la construction à l'exclusion de celui du sol, est susceptible d'être amorti.
Il est précisé que les constructions comprennent les bâtiments et ouvrages d'art.
Il y a lieu de considérer comme bâtiments les fondations et leurs appuis, les murs, les planchers, les toitures ainsi que les aménagements faisant corps avec eux, à l'exclusion de ceux qui peuvent en être facilement détachés ou encore de ceux qui, en raison de leur nature et de leur importance, justifient une inscription distincte.
Les ouvrages d'art sont les ouvrages destinés à assurer les communications sur terre, sous terre, par fer et par eau ainsi que les barrages pour la retenue des eaux et les pistes d'aérodromes.
En ce qui concerne les constructions et aménagements sur sol d'autrui, cf. 4 D 264 .
3 Éléments d'actif acquis en cours d'exercice, cf. 4 D 2121 .
4 Éléments d'actif non encore mis en service, cf. 4 D 2121 et 2123 .
5 Éléments (immeubles et matériels) pris à bail.
Une entreprise industrielle qui a pris à bail l'usine affectée à son exploitation, à charge pour elle d'entretenir les lieux loués en bon état de réparation de toute nature, locatives ou autres, et de pourvoir au remplacement des machines et des outils, ne peut pratiquer aucun amortissement sur les immeubles et les matériels qui composent ladite usine, car ces éléments ne font pas partie de son actif. Elle est seulement en droit de déduire chaque année de ses bénéfices imposables les dépenses (frais de remplacement du matériel usé ou démodé, ...) qui résultent pour elle de l'exécution des clauses du bail (CE, arrêts du 14 mars 1938, req. n° 54678, RO, p. 171 et du 2 mars 1960, req. n° 44498, RO, p. 35).
En ce qui concerne la possibilité, pour les entreprises astreintes au renouvellement d'éléments dont elles ne sont pas propriétaires, de pratiquer une provision pour renouvellement, voir même série 4 E 2331.
6 Éléments comptabilisés à tort en immobilisations.
Il a été jugé que le fait pour une société d'avoir inscrit à son bilan, en immobilisation, les dépenses diverses qu'elles avaient engagées à l'occasion de la prise en location d'un appartement par son président-directeur général, ne l'autorise pas à pratiquer l'amortissement de ces dépenses dès lors que la société n'a acquis aucun bien mobilier ou immobilier, ni aucun droit dont la dépréciation pourrait justifier les amortissements litigieux (CE, arrêt du 15 décembre 1976, req. n° 1208, RJ, n° II, p. 119).
Nota . - Les dépenses dont il s'agit correspondaient à la « reprise » versée au précédent locataire ainsi qu'à des travaux d'aménagement effectués dans l'appartement. Leur montant a été regardé comme une libéralité consentie par la société à son président-directeur général et intégralement soumis en tant que revenu distribué à la retenue à la source sur les revenus de capitaux mobiliers.
7 Éléments passés à tort par frais généraux lors de leur acquisition.
Un contribuable n'est pas fondé à demander la déduction extra-comptable d'un amortissement par un élément d'actif dont le prix passé à tort par frais généraux a été réintégré par le service dans les bénéfices de l'entreprise (CE, arrêts du 30 octobre 1957, req. n° 34047 et 38838, RO, p. 434 ; du 13 février 1974, req. n° 80476 ; du 22 décembre 1976, req. n° 95228 ; et du 4 novembre 1977, req. n° 94836).
Mais, lorsque le prix de revient d'un élément d'actif directement porté à frais généraux a été réintégré dans les bénéfices imposables, l'entreprise peut, sous réserve des dispositions de l'article 39 B du CGI (cf. 4 D 153 ) pratiquer en franchise d'impôt l'amortissement de l'élément considéré à partir du moment où elle inscrit la somme correspondant au prix de revient au débit d'un compte d'immobilisations par le crédit d'un poste de réserve.
En revanche, si la comptabilisation en frais généraux a été réalisée au cours d'un exercice prescrit (ou amnistié) aucun redressement ne peut être effectué de ce chef. Mais la décision ainsi prise par le contribuable dans la gestion de son entreprise est devenue définitive et lui est opposable. Aucune possibilité d'amortissement ne saurait lui être accordée pour des exercices postérieurs (CE, arrêts du 7 décembre 1959, req. n° 44825, RO, p. 522 ; et du 10 octobre 1963, req. n° 49380).
Emballages.
8Les emballages commerciaux comprennent :
- d'une part, les emballages perdus qui sont destinés à être livrés avec leur contenu sans consignation ni reprise ;
- d'autre part, les emballages récupérables qui sont susceptibles d'être provisoirement conservés par la clientèle et que le livreur s'engage à reprendre dans des conditions déterminées.
En principe les premiers sont seuls à inclure dans les stocks, les seconds constituant normalement des immobilisations. Toutefois, lorsqu'ils ne sont pas commodément identifiables, les emballages récupérables peuvent être assimilés à des stocks (CGI, ann. III, art. 38 ter ) 1 .
Immeubles appartenant à l'exploitant, affectés à l'exploitation, mais non inscrits à l'actif.
9Depuis l'abandon par le Conseil d'État de la théorie de l'affectation par nature (arrêt du 24 mai 1967, req. n° 65436, RO, p. 141), l'Administration considère que les immeubles ne peuvent être regardés comme faisant partie de l'actif de l'entreprise que lorsqu'ils sont inscrits au bilan de cette dernière. Le fait pour un exploitant d'inscrire ou de ne pas inscrire à son bilan 2 un immeuble lui appartenant et qu'il affecte à l'exploitation est donc une décision de gestion qui détermine :
- en cas d'inscription au bilan 2 la possibilité de comprendre dans les dépenses d'exploitation l'ensemble des charges afférentes à l'immeuble, y compris l'amortissement lorsqu'il s'agit de constructions. Mais le choix ainsi effectué ne peut corrélativement qu'entraîner la taxation des plus-values provenant d'une cession éventuelle de ces immeubles suivant les règles fixées soit aux articles 39 duodecies et suivants du CGI, soit aux articles 151 sexies et 151 septies du CGI (sur ce point, cf. 4 B 21) ;
- en cas de non inscription au bilan 2 le caractère privé de la gestion de l'immeuble ; dans ce cas le contribuable ne peut en principe déduire de ses résultats d'exploitation que les charges locatives de l'immeuble, à l'exclusion notamment de l'amortissement.
Toutefois, pour la détermination du bénéfice forfaitaire défini à l'article 51 du CGI, il y a lieu de tenir compte des charges exposées ou supportées normalement dans le cadre de l'exploitation de l'entreprise et notamment des amortissements destinés à faire face à la dépréciation annuelle des immeubles bâtis appartenant à l'exploitant et affectés par ce dernier à son exploitation, même si ces immeubles ne font pas partie, du point de vue fiscal, de l'actif de l'entreprise forfaitaire.
10S'agissant des travaux effectués sur un bâtiment appartenant à l'exploitant, affecté à l'exploitation, mais non inscrit à l'actif, ceux-ci ne pourraient, après avoir été inscrits à l'actif, donner lieu à la constatation d'annuités d'amortissement déductibles des bénéfices imposables qu'à condition d'avoir abouti à la création d'immobilisations distinctes de l'immeuble préexistant. Il ne saurait en être ainsi, par exemple, pour les travaux de transformation d'une façade qui font corps avec la construction.
Immeubles acquis ou construits après acquisition d'un droit au bail.
11Dans le cas d'une société commerciale qui, après avoir acquis le droit au bail de l'immeuble qu'elle occupe, achète l'immeuble lui-même, le prix d'achat du droit au bail -ou, le cas échéant, la valeur nette pour laquelle il figure encore en comptabilité- doit être ajouté au prix de revient de l'immeuble et peut, dès lors, seulement faire l'objet d'un amortissement dans les mêmes conditions que ce dernier.
Mais s'agissant d'une société qui, après avoir acquis le droit au bail de deux magasins d'alimentation, a procédé, avec l'accord du propriétaire, à la démolition des locaux puis s'est rendue acquéreur du terrain ainsi libéré où elle a fait construire un supermarché, le Conseil d'État a jugé que l'acquisition du droit au bail n'avait été poursuivie qu'en vue d'obtenir la libération du terrain d'assiette du futur supermarché ; par suite, le prix d'acquisition du droit au bail devait être regardé comme un élément du prix de revient, non de l'immeuble abritant le supermarché, mais du terrain d'assiette de celui-ci lequel ne peut donner lieu à amortissement (CE, arrêt du 25 mai 1977, req. n° 99470, RJ n° II, p. 66).
Immobilisations acquises avec une clause de réserve de propriété.
12 Certains contrats de vente peuvent être assortis d'une clause de réserve de propriété qui a pour effet de différer le transfert de propriété des biens en cause à l'acquéreur, jusqu'au paiement intégral du prix, malgré leur livraison.
L'article 3 de la loi n° 80-335 du 12 mai 1980 relative aux effets des clauses de propriété dans les contrats de vente (JO des 12 et 13 mai 1980, p. 1202) dispose, d'une part, que la livraison au sens de l'article 38-2 bis du CGI s'entend de la remise matérielle du bien et, d'autre part, que les biens vendus avec une telle clause doivent figurer sur une ligne distincte à l'actif du bilan de l'acquéreur.
Dans un avis relatif à la comptabilisation des transactions avec clause de réserve de propriété en date du 16 décembre 1980, le Conseil national de la comptabilité a estimé que les dispositions rappelées ci-dessus de la loi du 12 mai 1980 visaient notamment les immobilisations et que, dans la mesure où l'acquéreur est appelé à supporter l'éventuelle dépréciation des biens entre le moment de la livraison et celui du transfert de propriété, sans que le prix à payer puisse en être diminué, la dépréciation des biens doit être constatée chez l'acquéreur par voie d'amortissement ou de provision pour dépréciation dont le montant est déterminé suivant les règles communément admises.
13 Il en résulte que les immobilisations acquises avec clause de réserve de propriété sont soumises au même régime fiscal que celles acquises en pleine propriété.
Le point de départ de l'amortissement est constitué par la date de mise en service de l'immobilisation ou par la date à laquelle l'immobilisation aurait été réputée acquise sans clause de réserve de propriété, selon que l'amortissement est pratiqué suivant le mode linéaire ou le mode dégressif.
14 Les dotations aux amortissements sont enregistrées dans les comptes correspondants .
Conformément à ce qui est indiqué ci-dessus (n° 12 ) le coût de revient de l'ensemble des immobilisations acquises avec clause de réserve de propriété est mentionné sur la dernière ligne de renvoi du tableau n° 2050 (bilan actif) joint à la déclaration de résultat souscrite par les entreprises soumises au régime du bénéfice réel.
Immeubles appartenant à une société immobilière dont l'entreprise est membre.
1. Cas d'une société immobilière transparente.
15En vertu de l'article 375-I, 1er alinéa, de l'annexe II au CGI, les entreprises membres des sociétés immobilières de copropriété dotées de la « transparence fiscale » doivent comptabiliser dans leurs propres écritures l'amortissement des locaux représentés par leurs actions ou parts sociales. Mais, corrélativement, elles ne sauraient évidemment être admises à déduire de leurs bénéfices imposables l'amortissement que la société immobilière aurait éventuellement pratiqué de son côté.
L'amortissement susceptible d'être pratiqué par l'entreprise est calculé d'après le prix de revient effectif, pour ladite entreprise, des actions ou parts sociales considérées. Ce prix correspond, en principe, au prix de souscription ou d'acquisition des droits augmenté des sommes payées ultérieurement à titre de versement de libération ou à la suite d'appels de fonds faits par la société. Mais, bien entendu, seule peut être amortie la fraction de ce prix de revient correspondant au coût de la construction, à l'exclusion de la valeur du terrain.
2. Cas des sociétés immobilières non transparentes.
16Lorsque les entreprises détiennent des parts ou actions de sociétés civiles immobilières non transparentes, l'amortissement des immeubles inscrits à l'actif de ces dernières sociétés doit normalement être pratiqué dans la comptabilité des sociétés immobilières, que celles-ci soient ou non passibles de l'impôt sur les sociétés.
Toutefois, sous le régime applicable avant l'entrée en vigueur du décret n° 71-1118 du 30 décembre 1971 relatif aux obligations fiscales des sociétés immobilières non transparentes et qui relèvent de l'impôt sur le revenu, l'entreprise membre d'une société civile immobilière non passible de l'impôt sur les sociétés pouvait pratiquer directement dans ses propres écritures, à concurrence de la quote-part correspondant à ses droits, l'amortissement des immeubles sociaux.
Mais dans cette hypothèse, l'amortissement devait être calculé, non pas en fonction du prix d'acquisition des parts par l'entreprise membre, mais d'après la valeur pour laquelle les locaux considérés étaient portés au bilan de la société immobilière propriétaire.
Depuis l'entrée en vigueur du décret du 30 décembre 1971, pris pour l'application de l'article 19 de la loi n° 70-1283 du 31 décembre 1970 (c'est-à-dire pratiquement pour la déclaration des résultats des exercices 1971 et suiv.), cette solution a cessé d'être applicable dès lors que les sociétés civiles immobilières non passibles de l'impôt sur les sociétés sont désormais tenues de déterminer suivant les règles définies aux articles 38 et 39 du CGI et de déclarer elles-mêmes la part de leurs bénéfices sociaux revenant à leurs associés passibles de l'impôt sur les sociétés ou qui ont inscrit leurs parts à l'actif d'une entreprise industrielle ou commerciale.
1 En ce qui concerne la notion d'emballages récupérables identifiables ou non identifiables (cf. 4 B 121, n° 6).
2 Ou sur l'annexe n° 2033 C jointe à la déclaration n° 2031 souscrite par les entreprises relevant de l'impôt sur le revenu, placées sous le régime simplifié d'imposition et dispensées de produire un bilan. Pour la détermination des résultats imposables des exercices ouverts à compter du 1er janvier 1996, seuls les exploitants individuels et les sociétés visées à l'article 239 quater A soumis à l'impôt sur le revenu sont dispensés de la production du bilan.