B.O.I. N° 29 DU 12 MARS 2012
Section 3 :
Règles fiscales applicables aux « désaffectations » de biens d'une EIRL
Sous-section 1 :
Désaffectation isolée d'un bien figurant au patrimoine de l'EIRL
A. REGLES APPLICABLES AUX EIRL RELEVANT D'UN REGIME REEL D'IMPOSITION
51.Dès lors que l'EIRL est assimilée, sur le plan fiscal, à une EURL ou à une EARL, la sortie d'un bien du patrimoine affecté et sa reprise dans le patrimoine privé de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée 15 doivent être traitées comme le serait la sortie de ce bien du patrimoine social d'une EURL ou d'une EARL. Cette « désaffectation » est donc équivalente à la cession du bien suivie de la distribution des sommes réputées perçues en rémunération de cette cession.
52.Lorsque les résultats de l'EIRL sont imposés dans les conditions de l'article 8, « la désaffectation » du bien est donc génératrice d'une plus-value ou moins-value, imposée dans les conditions de droit commun applicables à l'impôt sur le revenu aux plus-values ou moins-values professionnelles. La plus-value ou moins-value devra être calculée à partir de la valeur d'origine 16 du bien « désaffecté » dans le patrimoine de l'EIRL et pourra bénéficier, le cas échéant, des exonérations et abattements prévus aux articles 151 septies et 151 septies B.
53.Du fait de l'assimilation à une structure soumise au régime des sociétés de personnes, la distribution des sommes réputées perçues en rémunération de cette cession n'est pas imposée.
54.Lorsque l'EIRL a opté pour son imposition à l'impôt sur les sociétés, la désaffectation du bien est génératrice d'une plus-value ou moins-value, imposée dans les conditions de droit commun applicables à l'impôt sur les sociétés. En outre, les sommes réputées avoir été perçues par l'EIRL en rémunération de cette cession puis distribuées à l'entrepreneur individuel sont imposées à l'impôt sur le revenu, entre les mains de ce dernier, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et soumises aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, dans les conditions précisées au n° 27 . Toutefois, conformément au 1° de l'article 112, n'est pas assimilable à une distribution, la répartition correspondant à un remboursement d'apports ou de primes d'émission : à hauteur de ce remboursement, les sommes réputées distribuées ne sont donc soumises à aucune imposition. Il est par ailleurs rappelé qu'en application des dispositions combinées des articles 112 et 113, les réserves incorporées au capital ainsi que les bénéfices incorporés directement au capital ne sont pas considérés comme des apports, et qu'une répartition ne peut présenter le caractère de remboursement d'apports qu'à la condition que tous les bénéfices et réserves autres que la réserve légale aient été auparavant répartis. Aussi, dès lors que conformément à l'article 441/12 du plan comptable général, l'EIRL doit systématiquement virer le résultat de l'exercice au compte de capital, la désaffectation d'un bien de l'EIRL ne pourra être, en tout ou partie, assimilée à un remboursement d'apport que si tous les bénéfices, incorporés ou non au capital, ont été auparavant prélevés par l'entrepreneur individuel.
55.Lorsque le bien « désaffecté » du patrimoine de l'EIRL avait figuré, préalablement à son inscription au patrimoine de l'EIRL, dans le patrimoine professionnel de l'entrepreneur individuel et que son affectation avait généré une plus-value professionnelle dont l'imposition avait été reportée en application de l'article 151 octies (cf. n° 37 ), sa « désaffectation » met fin à ce report, dans les conditions prévues à cet article.
B. REGLES APPLICABLES AUX EIRL RELEVANT D'UN REGIME FORFAITAIRE D'IMPOSITION
56.La « désaffectation » d'un bien figurant au patrimoine affecté d'une EIRL relevant d'un régime forfaitaire d'imposition est traitée comme la reprise dans le patrimoine privé de l'entrepreneur d'un bien provenant du patrimoine professionnel de son entreprise individuelle. Cette « désaffectation » est donc génératrice d'une plus ou moins-value déterminée et imposée dans les conditions décrites aux n os 94 et 95 . Les précisions figurant aux n os 51 à 55 ne concernent en revanche que les EIRL relevant d'un régime réel d'imposition et ne sont donc pas applicables dans le cas où l'EIRL est imposée selon un régime d'imposition forfaitaire.
Sous-section 2 :
Liquidation de l'EIRL
57.Conformément aux articles L. 526-15 et L. 526-16 du code de commerce, la déclaration d'affectation cesse de produire ses effets, sur le plan juridique, en cas de renonciation de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée ou en cas de décès de celui-ci, sauf si l'un de ses héritiers ou ayants droit manifeste son intention de poursuivre l'activité professionnelle à laquelle le patrimoine était affecté.
A. SITUATION DES EIRL SOUMISES A UN REGIME REEL D'IMPOSITION
58.En application de l'article 1655 sexies, la liquidation de l'EIRL emporte les mêmes conséquences fiscales que la cessation d'entreprise et l'annulation des droits sociaux d'une EURL ou d'une EARL, à savoir :
- l'imposition immédiate des résultats non encore imposés à la date de cette cessation, y compris les éventuelles plus-values latentes, avec application, lorsque l'EIRL est imposée selon le régime des sociétés de personnes prévu à l'article 8 et, sous réserve du respect des conditions d'éligibilité, des exonérations et abattements prévus aux articles 151 septies et 151 septies B ;
- lorsque l'EIRL est imposée selon le régime des sociétés de personnes prévu à l'article 8, l'imposition de la plus-value ou moins-value d'annulation des « parts » de l'EIRL que l'entrepreneur individuel est réputé détenir, déterminée en fonction des règles posées par la jurisprudence « Quemener » (CE, 16 février 2000, n° 133296) 17 ;
- lorsque l'EIRL est imposée à l'impôt sur les sociétés, l'imposition entre les mains de l'entrepreneur individuel du « boni de liquidation » de l'EIRL, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et dans les conditions précisées au n° 27 . Par boni de liquidation, il convient d'entendre la différence entre le montant de l'actif net réel de l'EIRL à la date de sa liquidation et les sommes correspondant, par assimilation, à des apports dans l'EIRL.
59.La cessation fiscale de l'EIRL peut également entraîner l'imposition immédiate de plus-values en report, sur le fondement de l'article 151 octies (report survenu dans les cas décrits au n° 37 ) ou 151 nonies (report portant sur les « parts » de l'EIRL que l'entrepreneur individuel est réputé détenir, par exemple dans le cas où il en a hérité ou dans le cas où l'EIRL, d'abord imposée selon le régime des sociétés de personnes prévu à l'article 8, a opté pour son imposition à l'impôt sur les sociétés, entraînant le retrait de ces « parts » de son patrimoine professionnel à son patrimoine privé).
60.Dès lors que l'EIRL est assimilée, sur le plan fiscal, à une EURL ou à une EARL, le décès de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée n'emporte pas en soi cessation fiscale de l'EIRL. En effet, de la même façon que le décès de l'associé d'une EURL ou d'une EARL n'emporte la cessation fiscale de la société que dans le cas où celle-ci est par la suite liquidée, le décès de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée n'entraîne la cessation de l'EIRL que si celle-ci est liquidée 18 , c'est-à-dire que si son héritier ou ayant droit ne manifeste pas son intention de poursuivre l'activité professionnelle à laquelle le patrimoine était affecté. En revanche, lorsque celui-ci manifeste l'intention de poursuivre l'activité, le décès de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée n'emporte pas cessation fiscale de l'EIRL. Lorsque l'EIRL était imposée chez le défunt selon les modalités prévues pour les sociétés de personnes défini à l'article 8, il y a alors lieu de constater une plus-value ou une moins-value afférente à la transmission des « parts » que ce dernier était réputé détenir sur l'EIRL, dont l'héritier ou l'ayant droit pourra reporter l'imposition en application de l'article 151 nonies.
61.La renonciation à l'affectation emporte également cessation fiscale de l'EIRL ; tel est également le cas lorsque le patrimoine affecté est cédé à une personne morale ou apporté en société (ce qui, en application du dernier alinéa du II de l'article L. 526-17 du code de commerce, entraîne renonciation à l'affectation).
62.Outre les cas où la cessation fiscale de l'EIRL intervient du fait de sa disparition sur le plan juridique, la cessation fiscale de l'EIRL peut également intervenir pour des motifs purement fiscaux : cessation totale ou partielle de l'activité, changement réel d'activité, changement de régime d'imposition (sous réserve du mécanisme de l'atténuation conditionnelle, voir n° 23 ).
B. SITUATION DES EIRL SOUMISES A UN REGIME D'IMPOSITION FORFAITAIRE
63.Le décès de l'entrepreneur à responsabilité limitée entraîne automatiquement la cessation fiscale de l'EIRL. Lorsque l'héritier ou l'ayant droit a manifesté l'intention d'en poursuivre l'activité – de sorte qu'elle ne disparaît pas sur le plan juridique mais cesse sur le plan fiscal – celui-ci peut prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 41 (prévoyant un report d'imposition des plus-values et un sursis d'imposition des profits sur stocks).
64.La renonciation à l'affectation emporte cessation de l'EIRL sur le plan juridique, mais n'entraîne pas en tant que telle sa cessation fiscale. En effet, si l'activité exercée dans le cadre de l'EIRL est poursuivie par l'entrepreneur individuel sous forme d'entreprise individuelle « classique », la disparition de l'EIRL est autant un non-événement sur le plan fiscal que l'avait été sa constitution.
65.Lorsque la renonciation à l'affectation résulte de la cession de l'EIRL à une personne morale ou de son apport en société, celle-ci doit être traitée comme la cession ou l'apport d'une entreprise individuelle « classique », le cas échéant éligible aux dispositions de l'article 151 octies.
66.Bien qu'elle n'entraîne pas cessation de l'EIRL sur le plan juridique, la cession à titre onéreux ou la transmission à titre gratuit entre vifs de l'EIRL à une personne physique doit être traitée comme la cession ou la donation d'une entreprise individuelle « classique », le cas échéant, éligible aux dispositions de l'article 41.
Sous-section 3 :
Transmission d'une EIRL
A. SITUATION DES EIRL SOUMISES A UN REGIME REEL D'IMPOSITION
67.La transmission d'une EIRL soumise à un régime réel d'imposition doit être assimilée à la transmission d'une EURL ou d'une EARL. Plus précisément :
- dans les cas où la transmission de l'activité emporte liquidation de l'EIRL, la transmission de l'EIRL doit être assimilée à la transmission de l'activité par l'EURL ou l'EARL ;
- dans les cas où la transmission de l'activité n'emporte pas liquidation de l'EIRL, la transmission de l'EIRL doit être assimilée à la transmission des parts d'une EURL ou d'une EARL.
68.Lorsque l'assimilation ainsi pratiquée aboutit à une situation où le contribuable serait éligible à un régime de faveur (articles 150-0 D ter, 151 septies A ou 238 quindecies), le même régime de faveur est applicable à la transmission de l'EIRL.
69.Ainsi, à titre d'exemple :
- la cession à titre onéreux d'une EIRL à une personne morale emporte liquidation de l'EIRL : il y a donc lieu de l'assimiler à la transmission de son activité par une EURL ou une EARL. Si l'EIRL était imposée à l'impôt sur les sociétés, l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée pourra, toutes conditions requises étant réputées satisfaites, invoquer le bénéfice de l'article 238 quindecies. Si l'EIRL était imposée selon les règles applicables aux sociétés de personnes prévues à l'article 8, l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée pourra, toutes conditions requises étant réputées satisfaites, invoquer le bénéfice de l'article 238 quindecies ou, en cas de départ à la retraite, de l'article 151 septies A ;
- la cession à titre onéreux d'une EIRL à une personne physique n'emporte pas liquidation de l'EIRL : il y a donc lieu de l'assimiler à la transmission des parts d'une EURL ou d'une EARL. Si l'EIRL était imposée à l'impôt sur les sociétés, l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée pourra, toutes conditions requises étant réputées satisfaites, invoquer, en cas de départ à la retraite, le bénéfice de l'article 150-0 D ter. Si l'EIRL était imposée selon les règles applicables aux sociétés de personnes prévu à l'article 8, l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée pourra, toutes conditions requises étant réputées satisfaites, invoquer le bénéfice de l'article 238 quindecies ou, en cas de départ à la retraite, de l'article 151 septies A ;
- la cession à titre gratuit d'une EIRL à une personne physique n'emporte pas liquidation de l'EIRL : il y a donc lieu de l'assimiler à la transmission à titre gratuit des parts d'une EURL ou d'une EARL.
B. SITUATION DES EIRL SOUMISES A UN REGIME D'IMPOSITION FORFAITAIRE
70.La transmission d'une EIRL soumise à un régime d'imposition forfaitaire doit être traitée comme la transmission d'une entreprise individuelle « classique ».
CHAPITRE 3 :
REGIME FISCAL DE L'EIRL APPLICABLE A COMPTER DE L'ENTREE EN VIGUEUR DE L'ARTICLE 15 DE LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2011
71.L'article 15 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011 modifie, à compter de son entrée en vigueur c'est-à-dire à compter du 30 juillet 2011, l'article 1655 sexies sur deux points, à savoir que :
- l'assimilation de l'EIRL à une EURL ou, lorsque l'activité exercée est de nature agricole, à une EARL, résulte dorénavant d'une option irrévocable de l'entrepreneur, laquelle vaut également option pour l'impôt sur les sociétés ;
- l'application du régime de neutralité fiscale dit des « biens migrants » aux biens ou droits privés que l'entrepreneur affecte au patrimoine de l'EIRL qui a opté pour l'impôt sur les sociétés.
Toutefois, il est rappelé que ces modifications ne concernent que les EIRL soumises à un régime réel d'imposition dès lors que les EIRL soumises à un régime forfaitaire d'imposition n'ont jamais été assimilées à des EURL ou à des EARL (cf. n os 17 ).
Section 1 :
Régime fiscal de droit commun
72.A compter du 30 juillet 2011, les EIRL ne sont plus assimilées à des EURL ou à des EARL, sous réserve que l'entrepreneur individuel qui exerce son activité dans le cadre d'une EIRL, n'opte pas pour l'assimilation fiscale de son EIRL à une EURL ou à une EARL.
Dès lors, par principe, les EIRL sont traitées au plan fiscal comme toutes les entreprises individuelles.
73.La création d'une EIRL ou la transformation d'une entreprise individuelle en EIRL n'entraîne plus la création d'une personne fiscale distincte de celle de l'entrepreneur individuel, mais emporte toujours des conséquences sur le plan juridique (cf. Chapitre I ).
Par ailleurs, l'affectation de biens provenant du patrimoine privé de l'entrepreneur individuel tout comme la transformation d'une entreprise individuelle en EIRL ne constituent plus des événements fiscaux et n'emportent donc notamment plus la réalisation de plus-values, sous réserve que l'EIRL n'opte pas pour l'assimilation au régime des EURL ou des EARL.
74.Par suite, le résultat fiscal de l'EIRL est soumis à l'impôt sur le revenu au nom de l'entrepreneur individuel et est déterminé selon les règles propres à la cédule d'imposition correspondant à la nature de l'activité exercée.
Si un déficit est constaté, celui-ci est imputé sur le revenu global de l'exploitant individuel 19 . Cependant, si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement (art. 156-I, 1er al).