Date de début de publication du BOI : 14/10/2009
Identifiant juridique :

B.O.I. N° 87 DU 14 OCTOBRE 2009


Section 3 :

Modalités d'utilisation de l'épargne et conséquences sur le revenu imposable


29.L'épargne professionnelle placée sur le compte bancaire spécifique est réputée utilisée lorsque l'exploitant retire tout ou partie de cette épargne du compte bancaire au cours de l'exercice. Tout retrait au cours d'un exercice quel qu'en soit le motif (utilisation de l'épargne conformément à son objet ou non) entraîne la réintégration des sommes retirées au bénéfice imposable de cet exercice dans les conditions précisées ci-après.


Sous-section 1 :

Cas d'utilisation de l'épargne conformément à son objet



  A. UTILISATION CONFORME EN L'ABSENCE D'ALEA


30.Conformément au a du I de l'article 72 D bis, l'épargne peut être utilisée, en l'absence d'aléa, pour le règlement des cotisations et primes des contrats d'assurance figurant parmi la liste des assurances à souscrire pour pouvoir pratiquer la déduction pour aléas (cf. nos 13 à 17 ) et le rachat des franchises prévues par ces mêmes contrats.

31.Dans cette situation, le montant de l'épargne pouvant être utilisé est plafonné au montant des cotisations et primes d'assurance réglées et des franchises rachetées au cours de l'exercice. Ce montant est rapporté au titre de l'exercice d'utilisation et doit être effectivement prélevé sur le compte bancaire spécifique (cf. n° 38 ).


  B. UTILISATION EN CAS DE SURVENANCE D'UN ALEA



  I. Nature des aléas visés


32.L'épargne peut être utilisée en application des dispositions des b et c du I de l'article 72 D bis :

1° - en cas de survenance d'un incendie, d'un dommage aux cultures ou d'une perte de bétail couvert par un contrat d'assurance ;

2° - en cas de survenance d'un aléa non assuré d'origine climatique, naturelle ou sanitaire soit reconnu par une autorité administrative compétente, soit déclaré par l'exploitant, à condition d'être suivi, dans ce dernier cas, d'une baisse de chiffre d'affaires significative.

33.En application du I de l'article 38 sexdecies J de l'annexe III, les aléas d'origine climatique, naturelle ou sanitaire reconnus par une autorité administrative compétente sont les suivants :

- les sinistres constatés dans les conditions prévues à l'article R. 361-41 du code rural ;

- les calamités agricoles, constatées dans les conditions prévues à l'article L. 361-3 du code rural ;

- les catastrophes naturelles constatées dans les conditions prévues à l'article L. 125-1 du code des assurances ;

- les maladies ou suspicions de maladie des animaux de l'exploitation ayant fait l'objet d'un arrêté portant déclaration d'infection en application de l'article L. 223-8 du code rural ou d'une indemnisation prévue à l'article L. 221-2 du code rural ;

- les événements ayant justifié l'application sur les productions animales ou végétales de l'exploitant de mesures de police administrative prévues aux articles L. 234-4, L. 251-2 et L. 251-9 du code rural ;

- les événements ayant justifié l'application sur l'exploitation conchylicole soit de mesures de police sanitaire prévues par l'arrêté du 4 novembre 2008 relatif aux conditions de police sanitaire applicables aux animaux et aux produits d'aquaculture et relatif à la prévention de certaines maladies chez les animaux aquatiques et aux mesures de lutte contre ces maladies, soit de mesures sanitaires prises en application de l'article R. 231-39 du code rural ;

- la suspension, le retrait ou la modification de l'autorisation d'exploitation de cultures marines pour motif d'insalubrité non imputable au bénéficiaire de l'autorisation d'exploitation de cultures marines en application de l'article 15 du décret n° 83-228 du 22 mars 1983 fixant le régime de l'autorisation des exploitations de cultures marines (pour plus de précisions, cf. annexe 3).

34.S'agissant des aléas déclarés par l'exploitant et non reconnus par une autorité administrative, ne sont concernés que les aléas dont la survenance au titre de l'exercice peut être justifiée par l'exploitant, par exemple par la production d'un bulletin météorologique, et qui s'accompagne d'une baisse significative du chiffre d'affaires, c'est-à-dire d'une différence entre la moyenne des chiffres d'affaires hors taxes des trois exercices précédents et le chiffre d'affaires hors taxes de l'exercice, réalisé dans des conditions comparables, excédant 10 % de cette moyenne. Aucun lien de causalité entre la survenance de l'aléa et la baisse de chiffre d'affaires n'a en revanche à être établi par l'exploitant.

Pour l'application de la condition de baisse significative du chiffre d'affaires, le chiffre d'affaires hors taxes s'entend du montant hors taxes des recettes réalisées par le redevable dans l'accomplissement de son activité agricole normale et courante. Il n'est par conséquent pas tenu compte des produits financiers, ni des recettes revêtant un caractère exceptionnel, telles que les produits provenant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé, ni des refacturations de frais effectuées entre sociétés lorsqu'elles présentent le caractère de débours au sens du 2° du II de l'article 267. En pratique, il s'agit des sommes figurant à la ligne FR de l'imprimé n° 2146 (exploitants soumis au régime du réel normal) ou à la somme des lignes EA à EE de l'imprimé n° 2139-B (exploitants soumis au régime réel simplifié).

Le chiffre d'affaires hors taxes de l'exercice doit être comparé à la moyenne des chiffres d'affaires hors taxes des trois exercices précédents réalisés dans des conditions comparables. Par conséquent en cas de modification substantielle des conditions d'exploitation au cours d'un de ces quatre exercices par suite notamment de la cession d'une partie de l'exploitation ou inversement du développement de nouvelles activités ou de l'extension des activités préexistantes (acquisitions de nouvelles terres, augmentation de la taille du troupeau …), le chiffre d'affaires devra être retraité pour pouvoir être comparé. Il en sera également ainsi en cas d'exercices de durées différentes.

Dès lors que la baisse du chiffre d'affaires d'un exercice est appréciée par rapport à la moyenne des chiffres d'affaires hors taxes des trois exercices précédents, les nouveaux exploitants ne peuvent se prévaloir de cette faculté d'utilisation de la déduction pour aléas avant leur quatrième exercice d'activité.


  II. Montant du prélèvement autorisé


35.En cas de survenance d'un aléa assuré (cf. 1° du § n° 34), l'épargne professionnelle peut être utilisée dans la limite du montant de la franchise prévue par le contrat d'assurance. Toutefois, lorsque la survenance de l'aléa entraîne un montant de perte subie n'excédant pas celui de la franchise, et par conséquent l'absence d'indemnisation, le montant du prélèvement autorisé est alors limité au montant de perte réellement subie. Dans cette dernière situation, le montant de cette perte, déterminé suivant les modalités d'indemnisation prévues par le contrat d'assurance, devra être justifié par tout moyen, notamment par la production de factures ou d'un rapport d'expert.

36.En cas de survenance d'un aléa non assuré reconnu ou déclaré par l'exploitant (cf. nos 33 et 34 ), l'épargne professionnelle peut être utilisée dans la limite du montant de la perte de chiffres d'affaires subie au titre de l'exercice de cette survenance et déterminé par différence entre la moyenne des chiffres d'affaires hors taxes des trois exercices précédents et le chiffre d'affaires hors taxe de l'exercice réalisé dans des conditions comparables (cf. n° 34 ). En conséquence, les nouveaux exploitants ne peuvent se prévaloir d'une utilisation pour un aléa non assuré reconnu avant leur quatrième exercice d'activité.

Lorsque l'aléa n'est pas reconnu par une autorité administrative compétente, cette perte de chiffres d'affaires excède nécessairement 10 % de la moyenne des chiffres d'affaires hors taxes des trois exercices précédents. En revanche, s'agissant des aléas reconnus par une autorité administrative compétente, cette perte peut être inférieure ou égale à ce pourcentage.

37.En cas de survenance d'un aléa au titre d'un exercice, l'épargne professionnelle peut être prélevée en principe dans la limite des montants définis ci-avant au titre de cet exercice quelle que soit l'origine de l'épargne : les sommes déduites en application de l'article 72 D bis, tel que modifié par l'article 78 de la loi de finances rectificative pour 2008, ou les intérêts capitalisés (cf. n° 21 ). Toutefois, il sera admis dans ces situations que ce prélèvement puisse être opéré au plus tard un an après l'intervention de cet aléa.

38.L'épargne ainsi prélevée est réintégrée dans les résultats de l'exercice au cours duquel est réalisé ce prélèvement. Cette réintégration est opérée de manière extra-comptable : le montant de cette réintégration est porté sur la ligne des réintégrations diverses du tableau de détermination du résultat fiscal, c'est-à-dire en pratique sur la ligne WO du tableau 2151 pour les entreprises relevant du régime réel normal d'imposition et sur la ligne FP du tableau 2139 B pour les entreprises relevant du régime réel simplifié d'imposition. Ce montant est par ailleurs détaillé sur un feuillet séparé joint à la déclaration de résultat. Sur demande du service, l'exploitant devra être en mesure d'indiquer le motif de l'utilisation de l'épargne et de présenter tout document permettant d'attester de la réalité du cas d'utilisation invoqué. Le supplément de bénéfice résultant de cette réintégration extra-comptable ne constitue pas un revenu exceptionnel au sens de l'article 75-0 A (cf. instruction administrative 5 E-5-06 n° 22 ).

39.A défaut d'ordre d'imputation fixé par l'article 72 D bis, l'exploitant peut librement déterminer l'ordre d'imputation de son prélèvement sur l'épargne professionnelle.


Sous-section 2  :

Epargne non utilisée conformément à son objet



  A. EPARGNE NON UTILISEE



  I. En cours d'exploitation


40.Conformément au I de l'article 72 D bis, l'épargne professionnelle doit être utilisée au cours des dix exercices qui suivent celui de son inscription au compte d'affectation. A défaut, elle est rapportée aux résultats de ce dixième exercice et doit être retirée du compte bancaire spécifique (cf. n° 42 ).

Pour calculer ce délai, les exercices doivent s'entendre d'exercices d'une durée égale à douze mois. Ainsi, les sommes déduites au titre d'un exercice doivent être utilisées dans un délai de dix ans décompté à partir du premier jour de l'exercice suivant celui au titre duquel ces sommes ont été déposées sur le compte bancaire spécifique. Les intérêts produits par les sommes déduites qui sont capitalisés et non soumis à l'impôt doivent quant à eux être utilisés dans un délai de dix ans décompté à partir du premier jour de l'exercice suivant celui de leur capitalisation. Ces sommes ou intérêts non utilisés dans ce délai de dix ans sont réintégrés au cours de l'exercice d'expiration de ce délai ou au cours de l'année civile d'expiration de ce même délai en cas d'arrêté provisoire des comptes en application de l'article 37.


  II. En cas de cessation d'activité


41.En cas de cessation d'activité ou de retour au forfait, les sommes inscrites dans le compte bancaire spécifique sont rapportées aux résultats de l'exercice clos à l'occasion de cet événement (cf. n° 38 ).

Le dispositif de dispense de réintégration prévue au II de l'article 72 D bis en cas d'apport à une société civile agricole dans les conditions du I de l'article 151 octies ou d'une transmission à titre gratuit d'une exploitation dans les conditions prévues à l'article 41 demeure applicable sous les mêmes conditions qu'avant l'adoption de l'article 78 de la loi de finances rectificative pour 2008 sous réserve de l'extension du délai d'utilisation des sommes inscrites sur le compte bancaire spécifique à dix exercices (Pour plus de précisions sur ces dispositifs de dispense, cf. instructions administratives 5 E-1-03 n°s 81 et suivants , 5 E-4-05 n°s 52 et suivants et 5 E-4-06 n° 29 ). A cet égard, lorsque l'exploitant individuel a inscrit l'épargne en cause sur le compte d'affectation après la clôture de l'exercice au titre duquel la déduction correspondante a été pratiquée, il sera admis que le délai d'utilisation de cette épargne par la société bénéficiaire de l'apport ou par le(s) bénéficiaire(s) de la transmission soit décompté à partir de l'exercice d'inscription de cette épargne sur le compte bancaire spécifique au lieu de l'exercice précédent au titre duquel la déduction a été pratiquée. Par ailleurs, lorsque l'apport ou la transmission intervient avant que l'exploitant individuel n'ait satisfait à son obligation d'inscription de l'épargne sur le compte d'affectation dans les trois mois de la clôture de l'exercice de déduction, il appartient à la société bénéficiaire de l'apport ou aux bénéficiaires de la transmission de respecter cette obligation d'inscription.


  B. EPARGNE NON UTILISEE CONFORMEMENT A SON OBJET AU COURS DES DIX EXERCICES


42.Lorsque l'épargne professionnelle est prélevée, au cours de l'un des dix exercices suivant la déduction (ou la capitalisation pour les intérêts), à un usage autre que ceux prévus à l'article 72 D bis (cf. sous-section 1), l'épargne ainsi prélevée doit être rapportée au résultat majorée d'un montant égal au produit de cette épargne par le taux de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727, soit 0,40 % par mois ou 4,8 % l'an. Le point de départ du calcul de l'intérêt de retard est fixé au 1 er juillet de l'année suivant celle au titre de laquelle est établie l'imposition du résultat de l'exercice de déduction, conformément au 1 du IV l'article 1727, soit pour un exercice clos au cours de l'année N, le 1 er juillet N+1.

Le point d'arrêt du calcul de l'intérêt de retard correspond en principe conformément au 1 du IV l'article 1727 au dernier jour du mois de paiement de l'impôt dû au titre de l'exercice au cours duquel la déduction pour aléas en cause a été utilisée pour un usage non conforme à son objet. A titre de règle pratique, ce point d'arrêt est fixé au 30 juin de l'année suivant celle au titre de laquelle est établie l'imposition du résultat de l'exercice d'utilisation non conforme de l'épargne, soit pour une utilisation au cours d'un exercice clos en N, le 30 juin N+1. En pratique, l'intérêt de retard sera donc décompté en années.

L'exploitant peut librement déterminer l'ordre d'imputation des sommes prélevées sur l'épargne professionnelle (cf. n° 39 ).

43.Dès lors que le compte bancaire spécifique ne peut accueillir aucune épargne libre, l'exploitant ne peut pas redéposer les sommes prélevées sur le compte, que ce soit au cours de l'exercice de leur prélèvement ou d'un exercice ultérieur, à moins de pratiquer une nouvelle déduction pour aléas au titre de l'un de ces exercices.