Date de début de publication du BOI : 01/10/1999
Identifiant juridique : 7S331
Références du document :  7S33
7S331

CHAPITRE 3 EXONÉRATION DES BIENS PROFESSIONNELS


CHAPITRE 3

EXONÉRATION DES BIENS PROFESSIONNELS


1L'impôt de solidarité sur la fortune est, en principe, assis selon les mêmes règles que les droits de mutation par décès. Cette règle comporte toutefois des exceptions, notamment en ce qui concerne les exonérations.

2Les articles 885 N à 885 R du CGI définissent les biens professionnels qui sont exonérés de l'impôt de solidarité sur la fortune par l'article 885 A, dernier alinéa, du même code.

Ces biens peuvent être regroupés en trois grandes catégories, à savoir :

1° Les biens nécessaires à l'exercice à titre principal, tant par leur propriétaire que par son conjoint, d'une profession industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale : il s'agit du cas des professions exercées sous forme individuelle (cf. DB 7 S 331 ) ;

2° Les parts ou actions de sociétés : il s'agit du cas des professions exercées dans le cadre d'une société (cf. DB 7 S 332 ) ;

3° Un cas particulier : les biens ruraux donnés à bail à long terme et les parts de groupements fonciers agricoles non exploitants (cf. DB 7 S 333 et S 334 ).

Enfin, le problème particulier des biens situés hors de France est étudié DB 7 S 335 .


SECTION 1

Biens nécessaires à l'exercice, à titre principal, sous la forme individuelle,
d'une profession industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale

(CGI, art. 885 N)


1Les biens visés s'entendent de ceux appartenant à des personnes qui exercent à titre principal, sous la forme individuelle, une profession industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et qui sont nécessaires à l'exercice de cette activité professionnelle.

L'exonération des biens entrant dans cette catégorie est subordonnée aux quatre conditions suivantes :

- les biens doivent être utilisés dans le cadre d'une profession industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ;

- l'activité professionnelle doit être exercée par le propriétaire des biens ou par son conjoint ;

- l'activité professionnelle doit être exercée à titre principal par le propriétaire des biens ;

- les biens doivent être nécessaires à l'exercice de la profession.

2L'exercice de la profession sous la forme individuelle appelle les précisions suivantes :


  A. DISTINCTION ENTRE PROFESSION EXERCÉE SOUS FORME INDIVIDUELLE ET PROFESSION EXERCÉE DANS LE CADRE D'UNE SOCIÉTÉ


3Dans un arrêt du 10 mai 1989 (Bull. IV n° 147, p. 98), la Cour de Cassation a jugé que constituent des biens professionnels, au sens de l'article 885 N du CGI, les biens nécessaires à l'exercice d'une activité dont les revenus relèvent de la catégorie des bénéfices agricoles. Tel est le cas des revenus d'un massif forestier exploité par son propriétaire au travers d'une société coopérative agricole.

Observations :

• Les circonstances de l'affaire étaient les suivantes.

Mme X... était propriétaire de forêts et de parts de groupements forestiers.

L'exploitation de cet ensemble forestier était confiée à une coopérative agricole. Mme X... était membre de cette coopérative et lui donnait les ordres nécessaires pour la production et la commercialisation.

Le litige portait sur la question de savoir si Mme X... exerçait une activité professionnelle effective , susceptible de conférer aux biens en cause le caractère de biens professionnels exonérés de l'impôt sur les grandes fortunes.

• Dans sa motivation, reproduite ci-dessus, l'arrêt de la Cour s'écarte de la doctrine administrative pour qualifier l'activité exercée dans le cadre d'une société 1 . La Haute juridiction a fondé sa décision sur l'article 885 N du CGI, alors que, selon l'administration, cette disposition ne concerne que les professions exercées sous la forme individuelle (cf. DB 7 R 331 et ci-dessus, n° 1 ) 2 .

• Compte tenu des circonstances particulières de l'affaire jugée, il y a lieu de considérer l'arrêt commenté comme une décision d'espèce. Aussi, est-il prescrit aux services de continuer à appliquer strictement la doctrine administrative énoncée en matière d'impôt sur les grandes fortunes et d'impôt de solidarité sur la fortune.

• En ce qui concerne l'autre aspect de cet arrêt relatif aux caractéristiques de l'exercice effectif d'une profession, cf. DB 7 S 3311, n° 11 .


  B. UNICITÉ DU PATRIMOINE


4Lorsque les liquidités provenant de l'exploitation d'un commerce à titre personnel sont considérées comme ayant été appréhendées en vue d'un placement à caractère privé, il ne peut être admis qu'il existe une créance et une dette réciproques au sein du patrimoine unique de l'exploitant, le régime des biens professionnels en matière d'impôt sur les grandes fortunes, n'impliquant pas une telle dérogation aux règles de droit civil (Cass. com., arrêt du 10 juillet 1989, bull IV, n° 219, p. 147 ; cf. DB 7 S 3314, n° 7 ).

Observations :

• Confirmation du principe d'unicité du patrimoine. De fait, en ne prenant pas en compte les biens professionnels pour l'assiette de l'impôt sur les grandes fortunes (CGI, art. 885 A), le législateur n'a pas entendu déroger à ce principe.

• Jurisprudence transposable à l'impôt de solidarité sur la fortune (cf. art. 885 A précité).

 

1   L'incidence -éventuelle- de la spécificité d'une exploitation sous forme de coopérative n'était pas dans le débat.

2   Il convient, à cet égard, de souligner que la rédaction des articles 885 O et 885 O bis du CGI ( " ... sont également considérés comme des biens professionnels... ) fait clairement apparaître un champ d'application distinct de celui de l'article 885 N du CGI.