Date de début de publication du BOI : 27/04/2011
Identifiant juridique :

B.O.I. N° 38 DU 27 AVRIL 2011


Sous-section 2 :

L'engagement de construire .


21.Lorsque les mutations d'immeubles ou de droits immobiliers ont vocation à déboucher sur la production d'un immeuble neuf soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, le législateur a prévu d'écarter l'application des droits de mutation (sous réserve du paiement du droit fixe de 125 €). Il s'agit ainsi d'éviter un cumul d'imposition entre ces droits et la TVA qui sera supportée finalement du fait de l'utilisation de l'immeuble (que ce soit par son occupant non déducteur, ou par répercussion du coût de la construction dans les prix des produits ou des prestations fournies par l'utilisateur assujetti). Dans cette logique, et eu égard aux aléas propres à la production immobilière, il n'y a pas lieu d'enserrer ce régime de faveur spécifique dans une contrainte de délai trop rigide à condition que les éventuels intermédiaires successifs soient en mesure de justifier de la réalité du projet immobilier.

22.A cet effet, le I du A de l'article 1594-0 G dispose que, sous réserve d'application de l'article 691 bis, sont exonérées de taxe de publicité foncière ou de droits d'enregistrement les acquisitions d'immeubles réalisées par des personnes assujetties au sens de l'article 256 A lorsque l'acte d'acquisition contient l'engagement, pris par l'acquéreur, d'effectuer dans un délai de quatre ans (éventuellement prorogeable) les travaux conduisant à la production d'un immeuble neuf au sens du 2° du 2 du I de l'article 257 (en ce compris les travaux qui seraient nécessaires pour terminer un immeuble inachevé).

Le III de l'article 266 bis de l'annexe III au code général des impôts prévoit que l'acte d'acquisition précise l'objet et la consistance des travaux sur lesquels porte l'engagement. Au titre de l'objet, il conviendra d'indiquer si les travaux prévus consistent en une construction nouvelle, en une surélévation à partir d'un immeuble existant ou à rendre celui-ci à l'état neuf, ou encore à terminer un immeuble inachevé. Au titre de la consistance, l'engagement comportera les indications nécessaires pour apprécier dans quelle proportion l'exonération est susceptible de s'appliquer lorsqu'il n'est pas prévu que le terrain ou l'immeuble bâti qui fait l'objet de l'acquisition soient entièrement destinés à la construction prévue (voir 26 infra).

23.Il demeure admis que l'engagement puisse être pris dans un acte complémentaire présenté au service des impôts du lieu de situation de l'immeuble en charge de l'enregistrement. En pareil cas, la restitution des droits de mutation perçus initialement peut être effectuée sur demande formulée dans les limites du délai de réclamation prévu à l'article R* 196-1 du livre des procédures fiscales.

24.Cette exonération est subordonnée à la justification par l'acquéreur, à l'expiration du délai qui lui est imparti pour construire, de l'exécution des travaux auxquels il s'est engagé comme assujetti à la TVA agissant en tant que tel.

La production d'un immeuble neuf comme l'achèvement d'un immeuble repris en cours de construction donne déjà lieu à une information de l'administration destinée au suivi de la livraison à soi-même qui intervient à cette occasion. Le I de l'article 266 bis de l'annexe III au CGI précise donc que la justification du respect de l'engagement pris par l'acquéreur résulte du dépôt de la déclaration spéciale prescrite au I de l'article 244 de l'annexe II au code général des impôts (imprimé n° 940), lequel doit intervenir dans le mois de l'achèvement de l'immeuble.

25.Conformément à l'article 1840 G ter, lorsque l'engagement de construire n'est pas respecté à l'échéance du délai qu'il comporte, l'acquéreur est redevable des droits dont il a été dispensé, liquidés d'après les tarifs en vigueur au jour de l'acquisition de l'immeuble sur lequel portait l'engagement, ainsi que du complément de frais d'assiette, de recouvrement, de dégrèvement et de non valeur qui en résultent.

L'intérêt de retard prévu à l'article 1727 est décompté du premier jour du mois suivant la date d'expiration du délai légal de présentation de l'acte d'acquisition à la formalité (ou suivant, s'il y a lieu, la date à laquelle l'engagement dont il s'agit a été substitué à un engagement de revendre dans les conditions décrites au 17 supra) et doit être versé comme le principal dans le mois suivant l'expiration du délai imparti. Dans le cas où l'acquisition est affectée d'une condition suspensive, le point de départ du décompte des intérêts de retard est la date de la réalisation de la condition suspensive.

Dans le cas où l'engagement doit être abandonné du fait que des constructions ne sont plus autorisées par suite d'une modification des documents d'urbanisme, il est admis que les droits soient liquidés sur la base de la valeur vénale du bien telle qu'elle résulte de cette modification et que l'intérêt de retard soit décompté du premier jour du mois suivant la date d'effet de celle-ci.

26.L'exonération de droits de mutation n'est applicable qu'à concurrence d'une certaine superficie qui varie selon que le terrain est destiné à la construction de maisons individuelles, d'immeubles collectifs ou d'immeubles non affectés à l'habitation pour les trois quarts au moins de leur superficie totale, ou encore d'une surélévation à partir d'immeubles préexistants (cf. III de l'article 1594-0 G et II de l'article 266 bis de l'annexe III au code général des impôts) :

- une construction nouvelle s'entend de toute construction incorporée au sol 20 à partir d'un terrain nu ou qui lors de son acquisition était recouvert de bâtiments destinés à être démolis. L'exonération profite entièrement aux emprises occupées par les constructions elles-mêmes, ainsi que par les cours et dépendances lorsque il s'agit d'immeubles collectifs affectés à l'habitation pour les trois quarts au moins de leur superficie totale, ou à défaut seulement par les dépendances nécessaires à l'exploitation 21 . Lorsqu'il s'agit de maisons individuelles, l'exonération est réduite, s'il y a lieu, à proportion de la surface du terrain qui excède par maison construite 2.500 mètres carrés, ou la superficie minimale exigée par la réglementation de l'urbanisme si elle est supérieure 22  ;

- une surélévation à partir d'un immeuble existant n'ouvre droit à l'exonération de l'acquisition de l'immeuble d'emprise qu'à proportion de la surface hors œuvre brute (SHOB) des locaux résultant des constructions réalisées en surélévation rapportée au total de cette même surface et de celle des locaux préexistants. En revanche, lorsque l'acquisition ne porte que sur le droit de surélévation, il y lieu d'admettre que l'exonération soit acquise à proportion de la SHOB construite rapportée à la superficie de l'emprise du bâtiment qui la supporte ;

- en revanche, la remise à l'état neuf d'un immeuble existant au sens du 2° du 2 du I de l'article 257 ouvre droit à l'exonération de l'acquisition de l'ensemble du bâtiment qui fait l'objet de cette rénovation 23  ;

- enfin, les travaux nécessaires pour terminer un immeuble inachevé valent exonération de l'acquisition de cet immeuble dès lors qu'ils conduisent au dépôt de la déclaration spéciale mentionnée au I de l'article 244 de l'annexe II au code général des impôts.

Lorsqu'à l'échéance du délai qu'il comporte, l'engagement de construire n'est respecté que pour une fraction de l'immeuble sur lequel il portait, l'acquéreur est redevable à due concurrence des droits dont il a été dispensé, ainsi que des frais et intérêt de retard qui en résultent.

27.Une même acquisition peut être soumise à des régimes différents en fonction des engagements que peut prendre un acquéreur assujetti. Ainsi, un acquéreur assujetti au sens de l'article 256 A peut prendre un engagement de revendre (art. 1115) sur une partie du bien alors que le reste fait l'objet d'un engagement de construire (art. 1594-0 G). L'application de régimes de droits d'enregistrement différents sur un même immeuble conduira l'acquéreur à procéder dans l'acte à une ventilation opérée sous sa responsabilité et sous le contrôle de l'administration.

28.Sur demande de l'acquéreur, une prolongation annuelle renouvelable du délai de quatre ans fixé à l'article 1594-0 G peut être accordée par le directeur départemental ou régional des finances publiques du lieu de situation de l'immeuble dans les conditions fixées au III de l'article 266 bis de l'annexe III au CGI.

Cette demande doit être formulée au plus tard dans le mois qui suit l'expiration du délai de quatre ans précédemment imparti pour construire et adressée par pli recommandé avec avis de réception postale. Elle doit être motivée, en rappelant notamment les circonstances de l'engagement initial et les éléments de fait qui justifient que son échéance doive être retardée. Elle précise la consistance des travaux concernés ainsi que le montant des droits dont l'exonération demeure subordonnée à la réalisation de la construction envisagée.

La prorogation susceptible d'être accordée peut être renouvelée dans les mêmes conditions.

29.Le souci de sécurité juridique a conduit à prévoir que l'absence de notification d'un refus motivé de l'administration à l'issue d'un délai de deux mois suivant une demande de prolongation de l'engagement de construire vaut acceptation de la demande.

La motivation d'un tel refus, qui est susceptible d'être soumise au contrôle du juge, peut être fondée notamment sur la circonstance que le demandeur n'est pas en situation à court et moyen terme de mener à bien son engagement, voire qu'il y a expressément renoncé, ou encore qu'il apparaît définitivement acquis que ni la construction envisagée ni aucune autre de nature à satisfaire les prescriptions du I de l'article 1594-0 G n'est en mesure d'aboutir au regard de l'évolution des contraintes d'urbanisme, d'environnement ou de sécurité.

30.La circonstance que l'immeuble acquis n'ait pas au moment de la signature de l'acte la qualité de terrain à bâtir ne fera pas obstacle à ce que l'acquéreur assujetti au sens de l'article 256 A puisse souscrire un engagement de construire.

Cette hypothèse peut trouver à se rencontrer en présence notamment d'un acquéreur qui suppose que le terrain deviendra constructible dans le délai de quatre ans de son acquisition. Si tel n'est pas le cas, le non respect de l'engagement de construire entraînera dès ce terme la remise en cause du droit fixe initialement perçu au bénéfice de l'application du taux de droit commun assorti de l'intérêt de retard, sans que l'acquéreur puisse invoquer un cas de force majeure en l'absence d'imprévisibilité.

31.Le bénéfice de l'application du régime de faveur lié à la souscription d'un engagement de construire est indépendant de la qualité du cédant. Toutefois, en cas d'acquisitions successives entre personnes assujetties à la TVA, le deuxième alinéa du II du A de l'article 1594-0 G précise que : « l'engagement pris par le cédant peut être repris par l'acquéreur auquel s'impose alors le délai imparti au cédant ». Cette faculté ne vaut que pour autant que ce délai n'ait pas été touché par la forclusion. Elle est ouverte sans préjudice de l'engagement de construire que le nouvel acquéreur souscrira pour son propre compte s'il entend que l'acquisition soit également enregistrée en application du même régime de faveur prévue au I 24 .

La reprise de l'engagement doit être formalisée dans l'acte d'acquisition qui fera référence à la date et au numéro d'enregistrement et de publication de l'acte antérieur dans lequel le cédant s'était lui-même engagé à construire. Elle a pour effet de libérer le cédant de tout rappel éventuel, pour le cas où le nouvel acquéreur ne serait finalement pas en mesure de justifier de l'exécution des travaux requise au terme du délai qu'il a repris et qui s'impose à lui, sauf à en obtenir la prolongation dans les conditions prévues au IV du A de l'article précité. Il en ira de même si cet acquéreur est amené à son tour à céder l'immeuble en cause à un autre assujetti, ce dernier ayant la possibilité de reprendre les engagements du cédant, et ainsi de suite.

Dans l'hypothèse où l'acquéreur ainsi engagé serait amené à ne pas demander la prolongation de l'un des engagements auxquels il est tenu ou se la verrait refuser par l'administration, il sera admis pour éviter qu'il ait à supporter des multiples impositions qu'il soit libéré conjointement des autres engagements si ceux-ci portent sur le même immeuble et dans une même proportion d'exonération. Le redevable devra alors acquitter les droits dont il aura été lui-même dispensé ainsi que les frais proportionnels. Quant à l'intérêt de retard, il sera décompté du premier jour du mois suivant la date d'expiration du délai légal de présentation à la formalité de l'acte d'acquisition de la première acquisition associée à un engagement repris par ce redevable, en sorte de dissuader les opérations de pure complaisance visant à échapper au prix du temps pour la perception différée de la créance des collectivités bénéficiaires. Sa liquidation s'opérera donc à raison du montant des droits éludés lors de chacune des mutations successives et de la durée courue jusqu'à la mutation suivante.

Exemple  : un promoteur A acquiert en N un TAB auprès d'un non assujetti et souscrit l'engagement d'y construire un immeuble neuf dans des termes permettant de soumettre son acquisition au droit fixe pour la totalité. En N + 3, ce promoteur A revend le terrain à un confrère B qui accepte de reprendre son engagement et souscrit le même (au délai près) à son propre compte. Jusqu'en N + 8, le promoteur B sollicite sans objection de l'administration les prolongations de délai attachées à chacun des deux engagements qu'il a respectivement repris et pris. Il cède cette même année le terrain à C qui reprend les deux engagements de B et souscrit le sien propre. Mais en N + 10, le promoteur C prend conscience de la vanité de tout projet immobilier sur cette emprise et, à l'échéance annuelle de l'un des engagements qu'il avait repris, renonce à en demander la prolongation. Appelé à solder les droits correspondants, il sera dégagé de l'ensemble de ses obligations au regard des travaux en cause s'il acquitte les droits dont il avait été exonéré lors de son acquisition auprès de B, ainsi que l'intérêt de retard liquidé sur les droits éludés par A de N à N +3, puis sur les droits éludés par B de N + 3 à N + 8, et enfin sur les droits dont il est redevable jusque N +10.

32.Par ailleurs, en application du même deuxième alinéa du II du A de l'article 1594-0 G, la personne à laquelle s'impose un engagement de construire tel que mentionné au I du A du même article peut, dans la limite de cinq années à compter de la date à laquelle il a été souscrit par l'acquéreur (ou par le premier acquéreur en cas de mutations successives réalisées entre assujettis à la TVA) y substituer l'engagement de revendre prévu à l'article 1115 qui est réputé avoir pris effet à compter de cette même date.

Cette disposition peut répondre aux préoccupations d'un promoteur qui serait en mesure de s'engager sur un projet de construction comportant une certaine part d'incertitude mais ne souhaiterait pas s'exposer, de ce fait, au risque de supporter l'intérêt de retard décompté à raison des reports antérieurs à son propre engagement. Par parallélisme avec les dispositions de l'article 1115, cette faculté est donc cantonnée aux cinq années qui suivent une première acquisition ayant bénéficié d'un régime de faveur au regard de cet article ou du I de l'article 1594-0 G 25 .

Exemple  : un marchand de bien A acquiert en novembre de l'année N un vieil immeuble auprès d'un investisseur privé pour lequel la cession présente un caractère patrimonial et souscrit un engagement de revendre sur le fondement de l'article 1115. Il le revend en février de N + 1 à un promoteur B qui s'engage à construire un immeuble neuf, mais qui le revend lui-même l'année suivante à un autre promoteur C qui accepte de reprendre son engagement (outre l'engagement qu'il souscrit pour son propre compte : cf. 31 supra). En février de N + 5, C fait proroger la validité de l'engagement repris de B, mais doute de sa propre capacité à le mener à bien. Un promoteur D est disposé à racheter l'immeuble qui lui paraît présenter une opportunité de reconstruction à moyen terme, sans accepter pour autant en cas d'échec de supporter les intérêts de retard calculés depuis N + 1 (origine de l'acquisition de B qui est opposable à C). Avant le cinquième anniversaire de l'acquisition initiale de A 26 , le promoteur C pourra donc substituer à son engagement de construire un engagement de revendre (moyennant 0,715 % de droits sur son acquisition auprès de B et les intérêts de retard courus depuis mars N + 1 à raison de l'engagement repris auprès de B en février), puis céder l'immeuble à D, lequel sera alors en mesure de s'engager dans les conditions souhaitées.

Les modalités de cette substitution qui prend la forme d'un acte complémentaire à l'acte de mutation comportant l'engagement de construire auquel se substitue le nouvel engagement sont précisées au VI de l'article 266 bis de l'annexe III au code général des impôts. Cet acte précise l'objet et la consistance des travaux auxquels le demandeur renonce, ainsi que la valeur de l'acquisition d'origine dont l'exonération était jusque là subordonnée à la réalisation de la construction en cause et pour laquelle il sollicite le bénéfice rétroactif des dispositions de l'article 1115. L'acquéreur, seule partie à l'acte, le fera enregistrer dans les conditions mentionnées au 1° du 1 de l'article 635.

L'acte complémentaire se rattachant comme accessoire à l'acte d'acquisition du demandeur, lequel donnait ouverture au droit proportionnel, celui-ci est exigible au taux global de 0,715 %, assorti de l'intérêt de retard décompté du premier jour du mois suivant la date d'expiration du délai légal de présentation à la formalité de l'acte qui fait l'objet de la substitution 27 . Le demandeur se trouve alors libéré de l'engagement de construire qu'il avait souscrit (y compris dans les conditions décrites au 17 supra). Dans l'hypothèse où, pour les avoir repris dans les conditions décrites au 31 ci-dessus, il serait également tenu par d'autres engagements portant sur le même immeuble et dans une même proportion d'exonération, il sera également libéré de ceux-ci sous réserve d'acquitter l'intérêt de retard décompté selon les modalités décrites au même 31 , la substitution prévue par le législateur trouvant son plein effet à la date de la première acquisition associée à un engagement repris par l'intéressé.

DB rapportée 7 C 141 , 7 C 1481  ;

DB liées : 7 C 1223 , 7C 1224 , 7 C 1225 , 7 C 1461 , 7 C 22 à 7 C 25 , 7 E 412  ;

BOI liés : 3 A-3-10 , 3 A-9-10  ; 7 C-5-02 .

La Directrice de la législation fiscale

Marie-Christine LEPETIT