SECTION 1 VENTES OU TRAVAUX
VI. Vente de matériel neuf avec reprise d'un matériel usagé
16Le prix de vente total du matériel neuf, qui est facturé au client, doit être inscrit au titre des produits d'exploitation de l'exercice en cours à la date de la vente, et s'il y a lieu, comme le prévoit l'article 38-2 bis à la date de la livraison. Il n'y a pas lieu de distinguer entre la partie du prix réglée en espèces et la partie du prix réglée en nature lorsque les parties ont prévu un tel mode de règlement. Quant au matériel repris par le cédant et non encore revendu à la clôture de l'exercice considéré et, éventuellement, des exercices suivants, il doit être compris dans l'évaluation du stock existant à la clôture de chacun de ces exercices, pour sa valeur de reprise augmentée, le cas échéant, des frais de remise en état qui ont été engagés par l'entreprise. La vente ultérieure de ce matériel doit être comptabilisée dans les conditions de droit commun, c'est-à-dire lorsque la créance correspondante peut être réputée acquise.
VII. Échange sans soulte de marchandises
17Une entreprise qui échange sans soulte des marchandises tirées de son stock contre des marchandises de valeur supérieure doit être regardée comme ayant cédé les éléments remis à l'échange pour un prix égal à la valeur réelle des éléments reçus en échange. Elle accroît donc son actif commercial de la différence entre cette valeur et le prix de revient des marchandises cédées et réalise, à due concurrence, un profit imposable à rattacher aux résultats de l'exercice en cours à la date de l'échange (CE, arrêt du 10 juillet 1956, req. n° 33288, RO, p. 155).
VIII. Règles particulières aux entreprises de construction ou de travaux publics
18La comptabilisation des créances, dans les entreprises de construction ou de travaux publics, se heurte à des difficultés particulières d'évaluation inhérentes à la conduite même des travaux dont la réalisation s'étend, le plus souvent, sur plusieurs exercices et dont le règlement n'intervient généralement qu'après d'assez longs délais.
Conformément aux principes fondamentaux, les entreprises en cause, doivent, d'une manière générale, faire figurer parmi les produits d'exploitation tous les acomptes ou créances correspondant à des travaux réputés achevés, en tout ou en partie, c'est-à-dire ayant donné naissance de ce fait à des recettes ou créances acquises à la date de clôture de l'exercice, à l'exclusion par conséquent des travaux qui, considérés comme inachevés à cette date, doivent être évalués à leur prix de revient au titre des travaux en cours (CE, arrêt du 27 avril 1964, req. n° 56982, RO, p. 79). Sur la définition des travaux en cours et les règles applicables pour leur évaluation, cf. DB 4 A 2531 .
Cependant, en raison de la variété des situations constatées, l'Administration a été amenée à préciser sa doctrine quant à la définition des travaux en cours et a formulé corrélativement les règles à suivre pour apprécier si une entreprise de construction ou de travaux publics doit ou non, pour l'assiette de l'impôt, être considérée comme ayant acquis une créance certaine dans son principe et dans son montant (cf. ci-après 4 A 2531, n° 7 ).
Nota - Compte tenu des modifications d'ordre terminologique intervenues lors de l'établissement du PCG 82, il y a lieu de considérer que la notion de travaux en cours visée à l'article 38-3 du CGI s'entend de l'ensemble des productions en cours.
Pour la détermination des résultats d'un exercice donné, qu'il s'agisse de travaux publics ou de travaux privés, les entreprises concernées doivent comprendre parmi les créances considérées comme acquises à la date de clôture de l'exercice :
- d'une part, dans le cas où le contrat ou le marché ne comporte pas une clause spécifiant que le versement d'acomptes entraîne transfert au maître de l'oeuvre de la propriété ou du risque de perte de la chose, les créances qui se rapportent à des travaux ayant fait l'objet, en tout ou en partie, d'une réception provisoire ou qui ont été mis à la disposition du maître de l'oeuvre et qui, dès lors, ne peuvent plus être considérés comme des travaux en cours ;
- d'autre part, dans le cas où le contrat ou le marché comporte une telle clause, le montant des acomptes stipulés correspondant aux travaux effectués jusqu'à la date à laquelle a été arrêtée la situation ayant donné lieu à la fixation du dernier acompte.
19Néanmoins, dans la première de ces deux situations, l'Administration ne s'oppose pas à ce que, pour la totalité ou pour certains de leurs travaux, les entreprises en cause portent au titre des produits d'exploitation les créances afférentes aux travaux effectués, telles qu'elles apparaissent sur la dernière situation établie avant la date de clôture de l'exercice considéré, à la condition, bien entendu, que ces mêmes travaux soient exclus corrélativement du poste « travaux en cours » (cette solution s'applique, mutadis mutandis, aux entreprises de constructions navales : cf. sur ce point 4 A 2531 n° 19 ).
Lorsqu'une entreprise entend, pour un chantier donné, faire état de ce mode de comptabilisation, elle peut l'utiliser, soit dès la clôture de l'exercice en cours au moment du commencement des travaux, soit à la clôture de l'un quelconque des exercices au cours desquels sont réalisés lesdits travaux. En cas d'option pour ce mode de comptabilisation, l'entreprise doit l'utiliser jusqu'à l'achèvement du chantier considéré.
Appelé à se prononcer sur l'incidence, au regard du régime fiscal des acomptes encaissés par une entreprise de travaux publics, des dispositions de l'article 18 du décret n° 53-405 du 11 mai 1953 relatif au règlement des marchés de l'État, selon lesquelles- « le bénéficiaire d'acomptes en est débiteur jusqu'au règlement final du marché », le Conseil d'État a jugé que ces dispositions n'ont pas pour objet et ne peuvent avoir pour effet de dispenser les bénéficiaires desdits acomptes d'en inscrire le montant dans les recettes de leur entreprise (CE, arrêt du 22 mai 1968, req. n° 71569, RJCD, 1re partie, page 175).
Au cas particulier, l'entreprise avait perçu, pour l'exécution d'un marché de travaux publics, des acomptes à concurrence de 5 599 687,05 F alors que la notification du décompte définitif des travaux se montait à 4 422 811,57 F. La Haute Assemblée a considéré que l'entreprise qui avait contesté par la voie contentieuse le montant du décompte définitif du marché de travaux exécuté pour le compte de l'État devait être regardée comme n'ayant pas reconnu un caractère certain à la créance de son co-contractant (créance correspondant à l'excédent sur le montant du décompte définitif, des sommes perçues à titre d'acomptes). Elle ne pouvait dès lors inscrire au passif de son bilan le montant de ladite créance, mais avait seulement la faculté, si elle s'y croyait fondée, de constituer une provision destinée à couvrir la charge éventuelle résultant de la restitution d'acomptes perçus en trop.
Par ailleurs, il a été jugé qu'une entreprise de travaux publics, qui a perçu une certaine somme en considération de la totalité des travaux qui lui ont été confiés mais qui n'avait pas assuré entièrement l'exécution de ces travaux à la fin de l'exercice, est tenue de porter dans les recettes dudit exercice l'intégralité de l'acompte effectivement encaissé. Elle peut, en contrepartie, constater par une écriture de passif la charge correspondant aux travaux restant à exécuter mais elle ne saurait, dès lors qu'elle n'a pas usé de cette faculté, obtenir par voie de réclamation que la fraction de l'acompte perçue en trop soit soustraite de son bénéfice imposable (CE, arrêt du 14 novembre 1970, req. n° 76474, RJ, n° II, p. 213).
En l'espèce, l'entreprise avait perçu de son client un acompte versé au vu d'une situation de travaux arrêtée au 25 octobre mais comprenant -de convention expresse entre les parties- tous les travaux à exécuter avant le 31 décembre de la même année.
Remarques.
a. Avances de démarrage.
20Lorsqu'une entreprise est en présence d'une commande dépassant ses possibilités financières immédiates, elle peut être conduite à demander à ses clients de lui verser des « avances de démarrage » lui permettant de se procurer notamment des matériaux et matières premières nécessaires avant même le commencement des travaux. Ces avances, qui doivent être comptabilisées à un compte d'attente au passif du bilan, ne constituent pas une recette imposable.
b. Retenues de garantie.
21Il y a retenue de garantie lorsqu'il est prévu que jusqu'à réception définitive de l'ouvrage, le maître de celui-ci sera en droit de retenir, à titre de garantie, un certain pourcentage sur le prix des travaux effectués. Le remboursement de la retenue à l'entreprise ayant exécuté les travaux, intervient en principe un an après livraison complète de l'ouvrage.
22Conformément aux dispositions de l'article 38 du CGI, les créances doivent être rattachées aux résultats de l'exercice au cours duquel elles peuvent être réputées acquises par l'entreprise créancière, c'est-à-dire lorsqu'elles deviennent définitives dans leur principe et dans leur montant (cf. ci-avant 4 A 212 ).
Or, les créances correspondant à des retenues de garantie, prévues par certains contrats de travaux ou de fournitures et pratiquées sur le montant des mémoires, ne sauraient être considérées comme incertaines dans leur principe. Étant par ailleurs fixées quant à leur montant, elles doivent être considérées comme constituant des créances acquises que les entreprises doivent comprendre dans les résultats de l'exercice au cours duquel elles ont pris naissance, sans qu'il y ait lieu d'attendre la vérification et l'acceptation des travaux en cause.
C. TRAVAUX FAITS PAR L'ENTREPRISE POUR ELLE-MÊME
23Lorsque les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ont pour conséquence une augmentation de l'actif, leur coût doit être inscrit à l'actif du bilan (compte 21).
D'autre part, lorsque les dépenses entraînées par de tels travaux ont le caractère de frais de premier établissement, leur montant est, en principe, inscrit à l'actif du bilan (compte 20) [Sur le régime fiscal des sommes correspondantes, cf. DB 4 C 231 ].
Dans l'une et l'autre de ces situations, le montant des sommes inscrites au compte d'actif est porté au crédit du compte 72 « Production immobilisée » au titre des « Travaux faits par l'entreprise pour elle-même ». L'écriture correspondante traduit, non pas la prise en compte véritable d'un produit imposable, mais bien la simple annulation comptable de la précédente inscription, au débit du compte de production immobilisée, des dépenses (achats de matériaux, salaires, travaux, fournitures et services extérieurs, etc.) exposées pour la réalisation des travaux faits par l'entreprise pour elle-même.
Nota. - Bien entendu si une entreprise, s'écartant des prescriptions du Plan comptable, comptabilisait immédiatement par le débit du compte d'actif approprié (Frais de premier établissement ou Immobilisations) le coût de travaux effectués pour elle-même, il n'y aurait pas lieu d'en ajouter le montant aux produits d'exploitation.