Date de début de publication du BOI : 01/12/1997
Identifiant juridique : 5I1142
Références du document :  5I1142

SOUS-SECTION 2 REVENUS IMPOSABLES

SOUS-SECTION 2

Revenus imposables

Entrent dans le champ d'application de l'impôt sur le revenu sous réserve des exonérations expressément prévues par la loi (cf. 5 1 1143) tous les intérêts, arrérages, primes de remboursement et autres produits des créances, dépôts, cautionnements et comptes courants et des clauses d'indexation afférentes aux sommes mises ou laissées à la disposition d'une société par ses associés ou ses actionnaires (CGI, art. 124 ).

La circonstance que le débiteur des intérêts, arrérages, primes de remboursement ou produits est domicilié hors de France n'est pas de nature par elle-même à faire échapper ces revenus à l'impôt.

Les profits réalisés par les contribuables qui effectuent des placements en report constituent également des revenus de créances (cf. CGI, art. 124 A ). Les dispositions des articles 124 et 124 A appellent les commentaires suivants en ce qui concerne les revenus et capitaux concernés.

  A. REVENUS CONCERNÉS

1Sont compris dans la catégorie des revenus de créances, dépôts, cautionnements et comptes courants, au sens de l'article 124, les intérêts, arrérages, primes de remboursement et tous autres produits de capitaux visés par cette disposition (cf. ci-après n°s 2 et suiv. ).

Les intérêts sont les fruits civils produits par une somme d'argent due à titre de prêt ou autrement et remboursable soit à la volonté du débiteur, soit à celle du créancier.

Les arrérages sont le produit d'un capital non exigible et plus spécialement les prestations périodiques fournies en vertu d'un contrat de constitution de rente.

Toutefois, les arrérages de rentes viagères entrent dans le champ d'application de la catégorie des traitements, salaires, pensions et rentes viagères visée à l'article 79 du CGI (cf. 5 F 1261).

Les primes de remboursement des titres et contrats visés à l'article 124, conclus ou démembrés à compter du 1er janvier 1993 (CGI, art. 238 septies A-III) sont constituées par la différence entre la valeur de remboursement et le prix d'acquisition de ces titres ou contrats (CGI, art. 238 septies A-II).

Quant à l'expression «  tous autres produits  », elle englobe tous les « produits » des capitaux mobiliers, qu'il s'agisse de produits périodiques ou de produits extraordinaires, quels que soient leur dénomination, leur origine et leur caractère juridique.

Par suite, sont imposables, en plus de l'intérêt, toutes les prestations que le créancier reçoit à titre de rémunération complémentaire du capital et notamment l'avantage indirect que constitue pour lui, éventuellement, la prise en charge par le débiteur de tout ou partie de l'impôt dont il est personnellement redevable à raison desdits intérêts 1 .

Par ailleurs, l'article 11-III de la loi de finances pour 1984 codifié à l'article 124-5° du CGI, dispose qu'à compter du 1er janvier 1983, les produits des clauses d'indexation afférentes aux sommes mises ou laissées à la disposition des sociétés par leurs associés sont assimilés à des intérêts.

  B. CAPITAUX CONCERNÉS

2L'article 124 du CGI énumère les cinq sortes de capitaux dont les produits ressortissent à la catégorie de revenus qu'il définit.

Ce sont :

- les créances ;

- les dépôts ;

- les cautionnements ;

- les comptes courants ;

- les clauses d'indexation afférentes aux sommes mises ou laissées à la disposition d'une société par ses associés ou ses actionnaires.

Toutefois, les capitaux de l'espèce, lorsqu'ils sont générateurs de produits figurant dans les recettes provenant de l'exercice d'une profession, n'entrent pas dans la catégorie des revenus mobiliers au point de vue fiscal (cf. 5 I 1141 ).

  I. Créances

1. Principes.

3Sous cette dénomination, sont visées toutes les créances productives d'intérêts quelle que soit leur cause, quels que soient la nature juridique du contrat dont elle découlent et le mode de constatation de la convention, quelles que soient aussi les modalités qui les affectent ou les garanties qui leur sont attachées.

Entrent dès lors dans cette catégorie, non seulement les créances qui trouvent leur origine dans un prêt, mais encore celles qui résultent, par exemple :

- d'une vente mobilière ou immobilière et notamment de la cession d'un fonds de commerce ;

- d'une cession de droits quelconques ;

- d'une condamnation judiciaire ;

- d'une donation ou d'un legs, etc.

Peu importe, en l'occurrence, que les créances soient constatées par des actes authentiques ou sous seings privés ou soient simplement verbales, qu'elles soient privilégiées, hypothécaires ou chirographaires, garanties par un nantissement ou une antichrèse.

4L'article 124-1° du CGI exclut toutefois expressément de la catégorie les créances représentées par des obligations, effets publics et autres titres d'emprunt négociables dont les produits font partie :

- des revenus des obligations entrant dans le champ d'application des articles 118 et 119 du code (cf. 5 I 1112 ) ;

- des revenus des valeurs mobilières émises hors de France et revenus assimilés visés aux articles 120 à 123 du même code (cf. 5 I 23 ).

5 Remarque. - Les titres de créances négociables sur un marché réglementé visés à l'article 125 A-III bis , 1° bis du CGI ne sont pas négociables au sens de l'article 118 du CGI précité dès lors qu'ils ne sont pas cotés ; les produits de ces titres entrent donc exclusivement dans les prévisions de l'article 124 du code. Ils font l'objet de la section 6 ci-après.

2. Applications.

Les principes énoncés ci-dessus donnent lieu aux applications suivantes :

1° Intérêts judiciaires.

6Les condamnations pécuniaires prononcées par les tribunaux sont généralement assorties d'une allocation d'intérêts moratoires ou compensatoires (dommages et intérêts).

Quel que soit leur caractère juridique, les intérêts courus depuis la condamnation jusqu'au paiement constituent toujours, du point de vue fiscal, des intérêts de créances (Cass. req., 29 octobre 1930).

Les intérêts alloués pour la période antérieure à la condamnation, peuvent avoir juridiquement le caractère d'intérêts moratoires lorsqu'ils sanctionnent le retard dans l'exécution des obligations au paiement d'une somme d'argent (Code civil, art. 1153 al. 1 à 3).

Ils ont le caractère d'intérêts compensatoires lorsqu'ils constituent :

- soit la réparation d'un préjudice indépendant de ce retard (Code civil, art. 1153, al. 4) ;

- soit la sanction de l'inexécution d'une obligation de faire ou de ne pas faire (Code civil, art. 1142) ;

- soit encore l'accessoire d'une indemnité allouée en réparation d'un délit ou d'un quasi-délit.

Sur le plan fiscal, seuls les intérêts alloués pour le passé qui ont le caractère d'intérêts moratoires peuvent à ce titre constituer un revenu imposable (cf ci-après 2°). Les autres intérêts ou dommages et intérêts antérieurs à la décision judiciaire constituent un des éléments de la réparation accordée à la victime ou au créancier et n'ont pas dès lors le caractère de produits d'une créance de capital mobilier.

Le Conseil d'État a fait application de ces principes dans l'espèce suivante :

À la suite de son licenciement, un salarié avait sollicité de son employeur par la voie judiciaire le paiement de diverses indemnités qui lui avaient été allouées par décision de justice avec paiement d'intérêts au taux légal. Lui ayant reconnu ultérieurement le droit à un complément d'indemnisation, la Cour d'appel lui avait alloué immédiatement à titre provisionnel une somme de 20 000 F. Il a été jugé que, dès lors qu'elle était destinée, selon les termes mêmes de l'arrêt de la Cour d'appel, à réparer, à titre d'intérêts compensatoires, le préjudice propre résultant de l'attitude dilatoire de l'employeur, ladite somme avait le caractère non d'un revenu de créance au regard de l'article 124 du CGI, mais de dommages-intérêts non imposables (CE, 30 mars 1977 n° 99269, RJ, n° III, p. 74).

2° Intérêts moratoires.

7Par un arrêt du 4 décembre 1992 le Conseil d'État a estimé que les intérêts moratoires afférents à des indemnités dont ils ne sont que l'accessoire doivent être soumis au même régime fiscal que ces indemnités (CE 4 décembre 1992, n° 83205, section, X... ).

Le Conseil d'État établit pour principe que les intérêts moratoires constituent un élément accessoire et indissociable de l'obligation principale dont ils permettent l'actualisation permanente.

Lorsque l'obligation principale consiste en un paiement de revenu imposable, les intérêts moratoires sont eux-mêmes imposables dans la même catégorie de revenus que le principal.

Inversement, quand le principal n'a pas la nature d'un revenu imposable, les intérêts moratoires sont affranchis d'impôt sur le revenu. Tel est le cas :

- des intérêts moratoires, liquidés au taux du droit civil, versés conformément aux dispositions de l'article L 208 du LPF en sus du remboursement des droits primitivement acquittés par le contribuable, lorsque l'administration opère un dégrèvement. Toutefois, les intérêts moratoires dont sont assortis les dégrèvements d'impôts demeurent imposables si les droits dégrevés le sont, ce qui est le cas lorsqu'il s'agit d'impositions antérieurement admises dans les charges déductibles (CGI, art. 39-1-4°, taxe foncière ou taxe professionnelle, par exemple) ;

- des intérêts alloués en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique.

3° Intérêts des billets de fonds.

8En cas de vente à terme d'un fonds de commerce dont tout ou partie du prix est représenté par des billets de fonds productifs d'intérêts, ces derniers produits sont passibles de l'impôt au titre des intérêts de créances sous réserve du cas où le cédant du fonds poursuit une activité industrielle et commerciale et inscrit la créance à l'actif de son entreprise (cf. 5 I 1141 n° 1 ).

Dans le cas ou des billets de cette nature ont été endossés au profit d'une tierce personne, la différence entre le montant de la créance en principal (ou le prix d'acquisition des billets én cas d'endossements successifs) et le prix retiré de la négociation des billets ne constitue pas un revenu mobilier entre les mains de l'endosseur En revanche, les intérêts encaissés par le bénéficiaire de l'endossement à échéance des billets constituent pour leur totalité un revenu mobilier.

4° Clauses d'indexation d'un prêt

9Lorsqu'ils constituent le résultat d'une opération réalisée dans le cadre de la gestion d'un patrimoine privé, les gains réalisés ou les pertes subies lors du remboursement de prêts indexés restent en dehors du champ d'application de l'impôt.

Toutefois, le point de savoir si une clause d'indexation d'un prêt a effectivement pour but de prémunir le prêteur contre les fluctuations économiques ou tend au contraire à déguiser un transfert de revenus, ne peut être apprécié que compte tenu des circonstances de fait propres à chaque cas particulier.

Ainsi, l'administration établit que les sommes forfaitaires dont sont majorées les annuités d'un prix de cession d'actions constituent des intérêts et non le produit de l'indexation du capital dû, dès lors que le bénéficiaire n'est pas en mesure de justifier de l'existence d'une telle indexation (CE. arrêt du 18 mai 1984, n° 37005).

Pour les produits des clauses d'indexation afférentes aux sommes mises ou laissées à la disposition d'une société par ses associés ou actionnaires, voir n°s 23 et suivants ci-après.

5° Cessions de créances.

10Le régime d'imposition des gains retirés par des personnes physiques de la cession de contrats de créances, effectuée directement ou par des personnes interposées, suit à compter du 1er septembre 1992 2 celui des produits de ces contrats (cf. infra 5 I 115 ).

6° Avances sur titres.

11Cette opération s'analyse, pratiquement, en un prêt pur et simple. Les intérêts qui y sont attachés constituent des revenus de créances.

7° Ristournes commerciales.

12L'opération par laquelle une entreprise de distribution d'électricité place dans le public, à un prix inférieur à leur valeur nominale, des tickets qu'elle accepte ultérieurement en règlement des quittances de consommation pour ladite valeur nominale, doit être regardée comme une vente avec paiement anticipé et la différence entre la valeur nominale et le prix d'émission constitue une ristourne commerciale et non un produit de créances, dépôts ou cautionnements au sens de l'article 124 du CGI (CE, arrêt du 2 juillet 1965, n°s 53698 et 53902, RO, p. 379).

8° Produits de créances hypothécaires ou chirographaires

13Présentent le caractère de produits de créances imposables, et non de gains en capital, les sommes perçues par un contribuable, en application de stipulations de contrats de prêts hypothécaires prévoyant :

- que si les intérêts n'étaient pas payés à la date convenue, leur taux serait majoré de 1 % et que cette majoration porterait elle-même intérêt au bout d'un an ;

- qu'en cas de vente forcée des immeubles hypothéqués, l'emprunteur s'obligerait à payer, d'une part, trois mois d'intérêts de la somme restant due, en plus de ceux dont il serait normalement redevable, d'autre part, une indemnité égale à 3 % de la même somme.

Le Conseil d'État a jugé en effet, qu'eu égard à leur caractère forfaitaire, ces stipulations n'avaient en réalité pour objet que d'augmenter le rendement du capital prêté dans des conditions déterminées (CE, 15 novembre 1978, n° 06924, RJ, n° III, p. 171).

Cette décision peut être rapprochée de l'arrêt du 10 octobre 1966 n° 65534, RO, p. 238 dans lequel il a été jugé que présentait le caractère de produits de créances, au sens de l'article 124-1° du CGI et non celui d'une libéralité, la somme versée au titulaire d'une créance chirographaire après remboursement intégral de celle-ci, à titre de compensation et d'indemnité de retard.

1   En ce qui concerne l'interdiction faite au débiteur de prendre en charge la retenue à la source pour les valeurs émises à compter du 1er janvier 1965, et le prélèvement forfaitaire pour les produits de placements à revenu fixe payés postérieurement au 31 décembre 1965, cf. 5 I 1214, n°s 3 et 4 et 5 I 1226, n° 115 .

2   Antérieurement à cette date, les gains retirés de la cession de créances non négociables par un particulier n'entraient pas dans le champ d'application de l'impôt.