SOUS-SECTION 6 ACTIVITÉS CIVILES
SOUS-SECTION 6
Activités civiles
La location de terrains nus ou d'immeubles non aménagés et la cession de brevets par les inventeurs ou leurs héritiers se situent dans le champ d'application de la TVA (cf. DB 3 A 1112, n° 12 ).
Il en est de même de la cession par le propriétaire du sol ou du sous-sol du droit d'exploiter une mine ou une carrière.
A. LOCATIONS DE LOCAUX NUS OU DE TERRAINS NON AMÉNAGÉS
1Les locations de locaux nus, quel que soit leur usage, ainsi que les locations de terrains nus entrent dans le champ d'application de la TVA. Mais, en règle générale, elles sont exonérées en vertu de l'article 261-D-2° du CGI même si elles sont consenties par des sociétés commerciales (cf. DB 3 A 316 ).
2En revanche, l'exonération prévue à l'article 261-D-2° du CGI n'est pas applicable dans les trois cas suivants :
- lorsque le bailleur participe aux résultats de l'entreprise locataire (CE, arrêt du 13 mars 1974, n° 90766, sieur X... ; réponses à question écrite : n° 4435, M. Chevallier, sénateur, JO, Débats Sénat du 9 octobre 1964, p. 1060 ; n° 15534, M. Cousté, député, JO, Débats AN du 11 septembre 1965, p. 3208 ; n° 5567, M. Maroselli, sénateur, JO, Débats Sénat du 3 avril 1966, p. 84 ; n° 6107, M. Bourda, sénateur, JO, Débats Sénat du 4 octobre 1966, p. 1239). Cette participation aux résultats doit s'entendre d'une association aux profits et aux aléas de l'exploitation du locataire ;
- lorsque les locations en cause constituent pour le bailleur un moyen de poursuivre sous une forme particulière l'exploitation d'un actif commercial.
Ainsi, la personne qui, ayant fait apport à une société de son fonds de commerce, donne en location à la même société l'immeuble nécessaire à l'exploitation de ce fonds poursuit sous une autre forme l'exploitation de l'actif commercial qu'elle détenait auparavant (CE, 21 décembre 1962, sieur X... ; 19 décembre 1966, n° 64833, sieur X... ; 19 décembre 1966, n° 64834, sieur X... ).
De même, il a été jugé que constitue un mode d'exploitation de son actif commercial et, par suite, une activité passible de la TVA la location de bâtiments nus faite par une société à une autre société qui s'engage à n'exercer dans les lieux loués que la fabrication ou la vente du produit prévu lors de la construction et à ne céder son droit au bail ni sous-louer sans le consentement par écrit de la société bailleresse, celle-ci détenant 76 % du capital de la société locataire et accordant à cette dernière des avances de fonds et les deux sociétés ayant, au surplus, un gérant commun et le même siège social (CE, arrêt du 15 novembre 1963, req. n° 47775, société Desmarais frères).
Également, apparaît comme le prolongement de son activité commerciale, la location non meublée, consentie par une société, d'une partie du magasin qu'elle occupait jusqu'alors en totalité pour y exercer son commerce dès lors que, par la sélection des activités que la société locataire s'engageait à exercer, par la définition de modalités, destinées à attirer la clientèle, enfin, par la réalisation d'aménagements propres à favoriser la circulation du public entre la portion louée et celle qui ne l'est pas, la société bailleresse, poursuivant l'exploitation de son commerce dans cette dernière, a entendu constituer un ensemble intégré où elle-même et la société locataire, dont elle détient d'ailleurs la moitié du capital, tireraient de leur voisinage une stimulation réciproque de leurs affaires (CE, arrêt du 26 novembre 1982, req. n° 28224).
En revanche n'est pas imposable la société qui a loué des immeubles à une autre société par bail emphytéotique, après lui avoir vendu le matériel et les installations les garnissant, dès lors que ces conditions de location marquent une renonciation pour une longue durée, par la société bailleresse, à l'utilisation desdits immeubles pour son commerce et ne peuvent être regardées comme un mode d'exploitation normal, même indirecte, d'un actif commercial, mais comme un acte de gestion purement civile (CE, 26 juin 1968, n°s 73865 et 73866, société fromagère du Massif central).
Il est à noter que cette jurisprudence concluant à l'imposition des locations qui constituent l'exploitation sous une autre forme d'un actif commercial, avait été infirmée par plusieurs arrêts de la Haute Assemblée (arrêt du 3 mars 1971, X... , n° 75437 ; arrêt X... , 13 mars 1974, n° 90490). Ces critères ne sont donc pas applicables pour la période antérieure à la publication de la loi n° 78-1240 du 29 décembre 1978, qui les a réintroduits ;
- lorsque les locations en cause constituent pour le bailleur un moyen d'accroître ses débouchés.
Ainsi, dans un arrêt du 29 avril 1977 (req. n° 275) rendu en assemblée plénière fiscale (SA Économiques Troyens et Docks réunis), le Conseil d'État fonde l'imposition de locations nues à des commerçants sur deux arguments :
a. Les locataires de locaux nus loués par un magasin à grande surface bénéficient d'un apport de clientèle du fait de la proximité du commerce du bailleur et leurs loyers sont de ce fait plus élevés que ceux de locaux à usage commercial ordinaires. La Haute Assemblée reprend ici, sous une forme atténuée, le critère de participation aux résultats ;
b. Le bailleur bénéficie en retour d'un apport de clientèle de la part de ses locataires et « l'ensemble commercial intégré » ainsi fermé, lui permet d'accroître ses débouchés.
3La question de savoir si la location de locaux nus ou de terrains non aménagés est imposable à la TVA doit être examinée, dans chaque cas d'espèce, compte tenu des conditions de fait dans lesquelles l'opération est réalisée, notamment au regard de la notion de continuité de l'exploitation et des liens d'intérêts qui unissent les parties au contrat.
B. LOCATIONS D'EMPLACEMENTS POUR LE STATIONNEMENT DES VÉHICULES
4Les locations d'emplacements pour le stationnement des véhicules sont exclues du bénéfice de l'exonération prévue à l'article 261-D-2° du CGI. Elles sont donc imposables à la TVA, à titre obligatoire, quelle que soit la nature du véhicule pour le stationnement duquel l'emplacement est loué (automobiles, bateaux 1 , avions, caravanes, etc.).
Il en est ainsi pour toutes les locations de l'espèce, consenties à titre onéreux :
- quels que soient les caractéristiques ou le type de l'emplacement loué (garages individuels, boxes, simples emplacements, en sous-sol, en surélévation ou en surface) ;
- que cette location s'accompagne ou non de prestations commerciales annexes telles que le gardiennage et la mise à disposition d'installations permettant l'entretien, la réparation ou le ravitaillement en carburant des véhicules ;
- quel que soit le statut juridique de la personne qui loue les emplacements (collectivités locales, sociétés commerciales, sociétés civiles ou simples particuliers, etc.) ;
- quelle que soit la périodicité de la location (à l'heure, à la journée, au mois) ou son mode de rémunération (parcmètres, loyer à la journée ou au mois).
5 Ce principe est toutefois assorti de deux exceptions :
- la première concerne les locations d'emplacements pour le stationnement des véhicules étroitement liées à celles, elles-mêmes exonérées, de biens immeubles destinés à un autre usage (habitation ou professionnel) ;
- la seconde concerne les autorisations payantes de stationnement sur la voie publique accordées par les collectivités locales.
I. Locations d'emplacements étroitement liées à des locations exonérées
6La location d'un emplacement pour le stationnement des véhicules est exonérée dès lors qu'elle est étroitement liée à la location, elle-même obligatoirement exonérée, d'un local :
- nu à usage d'habitation ;
- nu à usage professionnel lorsque l'option pour le paiement volontaire de la TVA prévue par l'article 260-2° du CGI (dans sa rédaction issue de l'article 27-II de la loi de finances pour 1991) n'a pas été exercée ;
meublé ou garni à usage d'habitation à compter du 1er janvier 1991.
7La location d'un emplacement pour le stationnement des véhicules étroitement liée à la location non soumise à la TVA d'un local destiné à un autre usage est exonérée dès lors que les conditions suivantes sont réunies :
- les emplacements sont situés dans le même ensemble immobilier ;
- les emplacements sont donnés en location par le même bailleur ;
- les emplacements sont pris en location par le même locataire ;
- les emplacements sont l'accessoire des locaux à usage d'habitation ou professionnel, qui constituent l'objet principal du bail. L'existence de baux ou de loyers distincts ne s'oppose pas par elle-même à ce que cette condition puisse être satisfaite.
II. Locations d'emplacements consenties par les collectivités locales
8En ce qui concerne les locations d'emplacements consenties par les collectivités locales, il y a lieu de distinguer entre le stationnement dans les parcs aménagés spécialement à cet effet, et le stationnement sur les voies publiques affectées à la circulation.
Dans le premier cas, les parcs publics sont spécialement aménagés pour le stationnement des véhicules et leur location représente indéniablement un service rendu aux usagers. Le fait que ces parkings soient généralement bâtis sur le domaine public, dont ils constituent une dépendance, ne peut faire perdre aux redevances de location le caractère de rémunération pour services rendus. Le Conseil d'État en a jugé ainsi à plusieurs reprises, écartant l'analyse qui aurait conduit à considérer ces redevances comme des taxes. En outre, l'article L. 2331-6 du code des collectivités territoriales classe « le produit de la location sur la voie publique » parmi les recettes non fiscales de la section de fonctionnement du budget des communes.
La location d'emplacements publics de stationnement des véhicules ne peut donc être considérée comme un service administratif, susceptible d'être placé en dehors du champ d'application de la TVA en vertu de l'article 256 B du CGI.
Dans le second cas, les droits perçus en contrepartie des autorisations de stationner pendant un temps limité, sur la chaussée réservée à la circulation, ont avant tout un caractère dissuasif et répondent à un objectif de régulation de la circulation et du stationnement.
Cette activité doit donc être rattachée à l'exercice du pouvoir de police du maire et considérée comme un service administratif hors du champ d'application de la TVA, en vertu de l'article 256 B du CGI.
C. EXPLOITATION DE BREVETS D'INVENTION
I. Brevets français
9Les cessions de brevets, les concessions de licences d'exploitation de brevets faisant l'objet d'une protection par l'Institut national de la propriété industrielle constituent des prestations de services imposables à la TVA (CGI, art. 256-IV ).
Peu importe à cet égard que de telles opérations soient effectuées par l'inventeur lui-même, par ses héritiers ou par des tiers qui cèdent des brevets ou concèdent des licences d'exploitation de brevets précédemment acquis de l'inventeur ou de ses héritiers.
Par ailleurs, l'inventeur qui met lui-même en oeuvre ses inventions en fabriquant des produits demeure imposable à la TVA dans les conditions de droit commun.
II. Brevets étrangers
10Conformément aux dispositions de l'article 259 B du CGI, les cessions de brevets et concessions de licences d'exploitation de brevets, marques de fabriques, ou d'autres droits similaires, par un inventeur étranger à un utilisateur français, sont imposables à la TVA en France dans la mesure où le preneur est assujetti en France à la TVA.
Cependant, les brevets d'origine soviétique continuent, en vertu de l'accord franco-soviétique du 14 mars 1967 (cf. note du 27 juin 1968), à bénéficier de l'exemption de TVA.
Pour ce qui concerne les règles de territorialité applicables aux cessions de brevets, il convient de se reporter aux commentaires figurant ci-après DB 3 A 2143, n°s 2 et suiv.
D. CESSIONS DE MARQUES DE FABRIQUE
11Les cessions de biens meubles incorporels entrent dans le champ d'application de la TVA défini par les termes de l'article 256-I et IV du CGI.
Mais la taxe n'est pas effectivement exigée lorsque la cession est soumise aux droits d'enregistrement. Or, le régime applicable aux cessions de marques de fabrique, en matière de droits d'enregistrement, diffère selon que la marque est ou non exploitée.
Ainsi, la cession d'une marque de fabrique exploitée entraînant non seulement cession de la marque, mais également de la clientèle qui y est attachée, s'analyse en une vente d'une universalité partielle de biens et doit être soumise aux droits d'enregistrement, dans les conditions prévues à l'article 719 du CGI, à l'exclusion de la TVA.
En revanche, la cession d'une marque de fabrique non exploitée ne donne pas lieu au paiement des droits d'enregistrement, mais de la TVA au vu de la déclaration de taxes sur le chiffre d'affaires du cédant, déposée dans les conditions habituelles.
1 En ce qui concerne le stationnement sur le domaine public fluvial, se reporter à la DB 3 A 121, n° 81 .