Date de début de publication du BOI : 15/06/1999
Identifiant juridique : 13S2432
Références du document :  13S2432

SOUS-SECTION 2 INTERVENTION DE LA COMMISSION DE SURENDETTEMENT DES PARTICULIERS


SOUS-SECTION 2

Intervention de la commission de surendettement des particuliers



  A. GÉNÉRALITÉS


1La loi du 31 décembre 1989 (dite « Loi Neiertz »), codifiée au titre III du livre III du Code de la consommation, a institué une procédure de traitement du surendettement des particuliers dans laquelle le rôle essentiel est tenu par une commission constituée à cet effet dans chaque département et qui est chargée d'établir un plan amiable d'apurement des dettes des ménages surendettés recueillant l'approbation des créanciers privés. Selon ce dispositif, l'intervention du juge était néanmoins requise en cas d'échec de cet essai préalable de conciliation.

Pour surmonter les difficultés d'application de ces dispositions, tenant notamment à l'engorgement des juridictions, la loi du 8 février 1995 a recentré le dispositif sur les commissions en leur conférant le pouvoir, de formuler elles-mêmes des recommandations d'apurement auxquelles le juge donne ensuite force exécutoire.

2L'augmentation du nombre de personnes en difficulté d'une part, le changement de nature du surendettement d'autre part (plus souvent lié à une chute de revenus qu'à des engagements financiers excessifs), ont conduit le gouvernement à réformer l'ensemble du dispositif.

3Ainsi, la loi d'orientation n° 98-657 du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions (publiée au JO du 31) a apporté un certain nombre d'aménagements à la procédure de traitement du surendettement des particuliers.

Les modifications apportées par les articles 86, 93 et 94 de cette loi ont pour objet d'associer davantage l'administration fiscale au règlement de la situation des personnes en état de surendettement par :

- l'élargissement de la composition des commissions départementales de surendettement aux directeurs des services fiscaux ;

- une meilleure coordination entre les mesures préconisées par ces commissions à l'égard des créanciers privés et celles que l'administration fiscale peut, de son côté, consentir pour aider les intéressés à surmonter leurs difficultés.

Les conditions d'application de la loi du 29 juillet 1998 ont été précisées par le décret n° 99-65 du 1er février 1999 publié au JO du 2 février 1999.


  B. CADRE GÉNÉRAL ET DÉROULEMENT DE LA PROCÉDURE DE TRAITEMENT DU SURENDETTEMENT


4Il convient de distinguer deux phases successives :

- une phase amiable ;

- une phase de recommandation.


  I. Phase amiable


1. Examen de la recevabilité de la demande.

5La commission, saisie par le débiteur, s'assure que les conditions de recevabilité de sa demande sont réunies.

Il doit s'agir :

- d'une personne physique ;

- de bonne foi ;

- en situation de surendettement.

6Par ailleurs :

- ne sont prises en compte que les dettes non professionnelles ;

- la situation de surendettement est caractérisée par l'impossibilité manifeste, pour le débiteur, de faire face a l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles ou à échoir.

2. Vérification des créances.

7Informés par la commission, les créanciers disposent d'un délai de trente jours pour contester les déclarations du débiteur en fournissant les justificatifs de leurs créances.

La commission soumet ensuite au débiteur l'état de son passif. Ce dernier peut le contester dans les vingt jours en demandant la saisine du juge de l'exécution.

Dès le début de cette phase amiable, la commission peut saisir le juge aux fins de suspension des procédures d'exécution diligentées contre le débiteur et portant sur les dettes autres qu'alimentaires.

En cas d'urgence, la saisine du juge peut intervenir à l'initiative du président de la commission, du délégué de ce dernier, du représentant local de la Banque de France ou du débiteur.

3. Élaboration d'un plan conventionnel de redressement.

8La commission a pour mission d'élaborer un plan de règlement recueillant l'approbation du débiteur et de ses principaux créanciers (article L. 331-6 du Code de la consommation).


  II. Phase de recommandation


9Deux situations peuvent se présenter, selon l'importance de la dégradation de la situation financière du surendetté.

10 a. Après l'échec de la mission de conciliation, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir examiné les observations des parties (article L. 331-7 du Code de la consommation), faire des recommandations (report ou rééchelonnement des dettes sur huit ans au maximum, imputation prioritaire des paiements sur le capital, réduction des taux d'intérêt, diminution du solde restant dû d'un prêt immobilier contracté pour l'acquisition du logement principal, après la vente de celui-ci, ...).

La commission notifie ses recommandations aux parties qui peuvent les contester dans le délai de quinze jours.

En l'absence de contestation, dans les quinze jours, le juge de l'exécution confère force exécutoire aux recommandations (article L. 332-1 du code précité) ;

En cas de contestation, le juge prend les mesures d'instruction qu'il juge nécessaires (auditions, vérifications complémentaires, ...) puis statue (il peut alors prendre les mêmes mesures que celles sur lesquelles l'article L. 331-7 du même code autorise la commission à recommander, mais celles-ci ont alors force exécutoire).

11 b. Si la situation financière du débiteur rend illusoire la recommandation des mesures prévues à l'article L. 331-7 du Code de la consommation, la commission peut recommander un moratoire (suspension de l'exigibilité) des créances autres qu'alimentaires et fiscales (article L. 331-7-1 du code précité) qui doit être homologué par le juge sous les formes et dans les conditions prévues pour les recommandations (article L. 332-1 du même code).

Ce moratoire ne peut excéder trois ans.

À l'issue de ce moratoire, la commission réexamine la situation du débiteur :

- si celui-ci reste insolvable, la commission recommande l'effacement total ou partiel des dettes autres qu'alimentaires ou fiscales (cette recommandation est soumise à homologation du juge pour être exécutoire). Aucun nouvel effacement ne peut intervenir dans une période de huit ans pour des dettes similaires ;

- dans le cas contraire, la commission procède aux recommandations comme indiqué ci-dessus (cf. n° 10 ).


  C. DISPOSITIONS INTÉRESSANT L'ADMINISTRATION FISCALE



  I. Présentation générale


12La réforme de 1995 n'a pas modifié le domaine de compétence des commissions de surendettement : celles-ci ne traitent que des dettes non professionnelles des personnes physiques. En demeurent, par ailleurs, exclues les dettes fiscales pour lesquelles l'administration conserve sa compétence propre en matière gracieuse.

La situation globale de l'endettement (incluant les dettes fiscales) doit néanmoins être prise en compte pour apprécier la situation financière des intéressés et leur capacité de rétablissement.

13À cet effet, la loi du 29 juillet 1998 a introduit deux mesures visant à assurer une meilleure coordination entre l'action des commissions et celle des services fiscaux, ces derniers restant toutefois seuls compétents, en dernière analyse, pour apprécier l'opportunité d'une mesure gracieuse.

14 a. La commission instituée en 1989 dans chaque département était composée, à l'origine, du représentant de l'État dans le département (président), du trésorier-payeur général (vice-président), du représentant local de la Banque de France (secrétaire) ainsi que de deux personnalités. Sa composition est désormais élargie au directeur des services fiscaux (deuxième alinéa de l'article L. 331-1 du Code de la consommation).

La participation du directeur des services fiscaux a pour objet de permettre un double échange d'informations :

- en direction des membres de la commission pour faire valoir les efforts que l'État consent à l'égard de certains débiteurs dont les dossiers sont examinés par la commission et porter à la connaissance de cet organisme les informations jugées utiles ;

- en direction des services fiscaux pour les informer des difficultés rencontrées par certains débiteurs.

15 b. Il est indiqué à l'article L. 331-7-1 du Code de la consommation que lorsque la commission recommande soit la suspension de l'exigibilité des créances autres que fiscales, soit leur effacement total ou partiel, « les dettes fiscales peuvent faire l'objet de remises totales ou partielles dans les conditions visées à l'article L. 247 du livre des procédures fiscales ».

Le deuxième alinéa de l'article L. 247 du LPF a, pour sa part, été complété ainsi : « ces remises totales ou partielles sont également prises au vu des recommandations de la commission visée à l'article L. 331-1 du code de la consommation ou des mesures prises par le juge visées à l'article L. 332-3 du même code ».

Par ces dispositions, le législateur a entendu :

- rappeler, à ces deux stades importants de la procédure de surendettement, que les dettes fiscales pouvaient, de leur côté, faire l'objet de remises ou modérations gracieuses dans les conditions prévues à l'article L. 247 du LPF, c'est-à-dire lorsque les débiteurs sont dans l'impossibilité de payer par suite de gêne ou d'indigence, cette appréciation continuant toutefois à relever de la compétence exclusive de l'administration fiscale ;

- faire obligation à l'administration fiscale de prendre connaissance de l'endettement privé des contribuables qui sollicitent une remise ou modération gracieuse avant de prendre sa décision en toute connaissance de cause.

Observations :

161°- La portée de la réforme dépasse le cadre de la juridiction gracieuse. En devenant membre à part entière de la commission, le directeur des services fiscaux participera à l'analyse et au traitement de la situation des personnes surendettées, même en l'absence de dette fiscale.

Il interviendra à la fois comme membre de la commission, organe d'information ou interlocuteur de celle-ci lorsque la personne surendettée aura également des dettes fiscales.

172°- La saisine d'une commission de surendettement par un contribuable ayant par ailleurs des dettes fiscales ne vaut pas, par elle-même, demande de remise ou modération gracieuse de celles-ci. Il appartiendra toujours à l'intéressé, ou à son représentant, de formuler expressément cette demande comme l'exige l'article L. 247 du LPF.


  II. Directeur appelé à siéger au sein de la commission


18Il s'agit de celui qui est responsable de la Direction des Services fiscaux dans le ressort de laquelle le contribuable à son domicile. Il lui appartiendra, le cas échéant, de compléter son information en prenant l'attache de son collègue chargé d'une Direction spécialisée de vérification ou d'une autre Direction territoriale si tout ou partie de la dette du contribuable a pris naissance à la suite d'un contrôle externe ou lorsque l'intéressé était antérieurement domicilié dans un autre département.


  III. Représentation du directeur au sein de la commission


19Le directeur peut se faire représenter par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur 1 . Pour assurer un fonctionnement optimal du dispositif, il est nécessaire que les commissions aient, dans chaque Direction des Services fiscaux, un interlocuteur unique, ce qui suppose que, sauf empêchement ou circonstance particulière, la représentation du directeur soit toujours assurée par le même agent.


  IV. Informations susceptibles d'être échangées


20L'administration fiscale est déliée du secret professionnel par l'article L. 331-3 du Code de la consommation.

En application de ce texte, la commission « peut obtenir communication auprès des administrations publiques, des établissements de crédit, des organismes de sécurité et de prévoyance sociale ainsi que des services chargés de centraliser les risques bancaires et les incidents de paiement, de tout renseignement de nature à lui donner une exacte information sur la situation du débiteur, l'évolution de celle-ci et les procédures de conciliation amiables en cours ».

21Le montant et le détail des dettes fiscales seront communiqués à la commission par le trésorier-payeur général pour les impositions dont le recouvrement incombe aux services de la comptabilité publique et par le directeur des services fiscaux pour ce qui concerne les taxes et droits recouvrés par la DGI 2 .

S'agissant des autres renseignements détenus par les services de la DGI, devront être communiqués à la commission tous ceux qui présentent un intérêt pour l'instruction du dossier du contribuable surendetté, à la demande de celle-ci ou à l'initiative du directeur.

Il en est ainsi de toutes informations permettant à la commission d'apprécier le comportement de la personne surendettée au regard de ses obligations fiscales, ainsi que de mieux appréhender l'ensemble de ses ressources.

Ces dernières, doivent s'entendre non seulement des revenus proprement dits et des éléments composant le patrimoine de l'intéressé, mais également, par exemple, des aides de toutes sortes lui bénéficiant ou susceptibles de lui bénéficier (ex : personnes tenues, à son égard, à une obligation d'assistance, concubins aux ressources suffisantes pour partager certaines charges de la vie commune, etc.).

Lorsqu'un contrôle fiscal est en cours, il conviendra d'informer la commission des redressements envisagés dès lors qu'ils ont été acceptés ou confirmés par lettre n° 3926.

De même, la commission devra être tenue informée du dépôt des réclamations et de l'engagement de recours juridictionnels, de l'issue des procédures contentieuses ou gracieuses, ainsi que des dégrèvements contentieux et gracieux prononcés ou envisagés, dans la mesure où cette information peut permettre une appréciation actualisée et prospective de la situation de la personne surendettée.

Elle est également informée des décisions prises mais non encore notifiées au débiteur, afin d'avoir une vue globale des remboursements auxquels celui-ci devra faire face.

Le directeur ou son représentant devront être les interlocuteurs uniques de la commission pour tout échange d'information au sein de chaque direction des services fiscaux.


  V. Instruction des demandes de remise ou modération gracieuses présentées par des personnes qui ont, par ailleurs, saisi une commission de surendettement


22Remarque préliminaire : lorsque la commission se prononce sur la recevabilité d'un dossier, elle informe le débiteur, si celui-ci a également des dettes fiscales, qu'il peut en solliciter la remise ou modération auprès du service des Impôts dans les conditions prévues à l'article L. 247 du LPF.

23Au cours de la phase amiable, aucune recommandation n'ayant encore été formulée, il conviendra d'informer la commission de la composition de la dette fiscale de la personne surendettée ainsi que, le cas échéant, des mesures gracieuses prononcées ou envisagées.

Si l'Administration conserve, en cette matière, sa compétence propre et ne peut être contrainte d'adhérer à un plan amiable d'apurement du passif, il est néanmoins souhaitable qu'un règlement harmonisé soit recherché, dans le respect des critères habituels de la juridiction gracieuse.

Par souci d'équité, il devra toujours être veillé à ce que, à situation financière comparable, les demandes gracieuses ne soient pas traitées plus favorablement lorsque leurs auteurs ont, au préalable, saisi une commission de surendettement.

24Il convient de distinguer ensuite selon que la décision de l'administration intervient avant ou après les recommandations de la commission.

a. Si l'administration ne s'est pas encore prononcée lorsqu'une commission formule des recommandations.

25L'Administration, prenant connaissance du contenu des recommandations et de l'ensemble des renseignements détenus par la commission, prononce, s'il y a lieu, une remise ou modération gracieuse en fonction des critères traditionnels d'octroi de ce type de mesure, de l'état et de la nature de l'ensemble des dettes.

Le directeur en informe ensuite la commission soit par courrier au président, soit à l'occasion de la première séance suivant la décision.

b. Si les recommandations de la commission sont postérieures à la décision de l'administration fiscale.

26L'Administration réexamine le dossier du contribuable au vu des recommandations de la commission et de l'évolution éventuelle des ressources de l'intéressé.

Elle peut, le cas échéant, réviser sa décision initiale et en informe alors la commission dans les conditions précisées ci-dessus.

Si de nouvelles dettes fiscales sont nées depuis la demande initiale, le contribuable peut déposer une nouvelle demande de remise ou modération gracieuse qui sera instruite comme indiqué ci-dessus au n° 25 .

Remarque :

27Le délai moyen de traitement des demandes gracieuses s'est, au cours de ces dernières années, réduit dans des proportions sensibles (actuellement 94 % des demandes traitées dans un délai de moins de trois mois).

L'effort entrepris dans ce domaine, qui s'inscrit dans l'objectif que s'est fixé la Direction Générale des Impôts de mieux répondre aux attentes des usagers, ne doit pas se relâcher, a fortiori dans les situations de détresse rencontrées en matière de surendettement.

La coordination de l'instruction des demandes gracieuses avec celle des dossiers de surendettement par les commissions ne doit pas conduire, à cet égard, à une régression des progrès accomplis. Tel serait le cas si une décision gracieuse devait, par exemple, être retardée dans l'attente de l'avancement des travaux d'une commission, l'Administration pouvant toujours réexaminer la situation du contribuable si les mesures préconisées par cet organisme le justifiaient.


  VI. Entrée en vigueur


28Aux termes de son article 99, les nouvelles dispositions issues de la loi du 29 juillet 1998 s'appliquent aux procédures en cours.

 

1   L'article 1er du décret n° 99-65 du 1er février 1999, modifiant l'article R. 331-2 du Code de la consommation précise que : « le directeur des services fiscaux choisit son délégué parmi les fonctionnaires de la direction ayant au moins le grade d'inspecteur ».

2   Les dettes relatives à une activité professionnelle sont par nature en dehors de la compétence de la commission. Cela dit, pour apprécier les capacités de rétablissement financier d'un particulier, la commission peut souhaiter avoir une connaissance du passif global de l'intéressé.