Date de début de publication du BOI : 10/08/1998
Identifiant juridique : 13O3322
Références du document :  13O3322

SOUS-SECTION 2 AUTRES MESURES D'INSTRUCTION


SOUS-SECTION 2

Autres mesures d'instruction



  A. VISITE DES LIEUX


1Le tribunal administratif peut ordonner qu'il se transportera tout entier, ou que l'un ou plusieurs de ses membres se transporteront sur les lieux pour y faire les constatations et vérifications déterminées par son jugement (C. TA-CAA, art. R 171, 1er al.).

La visite des lieux peut également être décidée au cours de l'instruction par le président de la formation de jugement (5ème alinéa nouveau de l'article R 171 du C. TA-CAA, issu du décret n° 97-563 du 29 mai 1997 dont les dispositions sont entrées en vigueur le 1er septembre 1997).

La visite des lieux peut être ordonnée soit d'office, soit sur la demande des parties, mais elle est toujours facultative pour le tribunal.

Dès lors, le tribunal administratif peut, sans méconnaître les dispositions susvisées, décider que la visite des lieux sollicitée par les requérants est inutile et refuser pour cette raison de l'ordonner (CE, arrêt du 9 mars 1927, n° 80170, X... et autres, Leb. chron., p. 294).


  I. Déroulement de la visite des lieux


2Les parties (contribuable et Administration) sont informées du jour et de l'heure auxquels cette mesure d'instruction doit se faire, soit par la voie administrative, soit le plus souvent par lettre recommandée (C. TA-CAA, art. R 139, 2e al., R 140 et R 171, 3e al.).

Aux jour et heure fixés, le tribunal administratif (le ou les conseillers désignés) se rend sur les lieux.

À cet égard, l'absence d'un conseiller ou du commissaire du Gouvernement n'est pas de nature à constituer une irrégularité si les parties n'ont élevé, au cours des opérations, aucune objection ni réserve (CE, arrêt du 20 février 1903, n° 89993, X... , Leb. chron., p. 158).

D'autre part, la circonstance que les juges qui ont procédé à la visite des lieux, ne fassent plus partie du tribunal, au jour ou le jugement est rendu, n'est pas davantage de nature à entraîner l'annulation de la mesure d'instruction (ibid).

Au cours de la visite des lieux, le tribunal ou ses membres chargés d'y procéder peuvent entendre les personnes susceptibles de fournir des renseignements ; ils peuvent également faire exécuter en leur présence, au besoin par un expert, les opérations qu'ils jugent utiles (C. TA-CAA, art. R 171, 2e al.).


  II. Procès-verbal de la visite des lieux


3Il est dressé procès-verbal de la visite des lieux (C. TA-CAA, art. R 171, 4e al.).

Ce procès-verbal n'est pas notifié aux parties qui peuvent toutefois le consulter au greffe. Mais aucune disposition de la loi ne prescrit d'inviter les parties à prendre connaissance de ce procès-verbal (CE, arrêt du 11 mars 1898, n° 82723, X... , Leb. chron., p. 223).

En outre, bien qu'il constitue une pièce du dossier, il ne figure pas au nombre des pièces qui doivent être adressées d'office en communication à l'Administration (cf. ci-dessus 13 O 3313, n° 8 ).


  III. Frais de la visite des lieux


4Par application de l'article 3 de la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977, instaurant la gratuité des actes de justice devant les juridictions civiles et administratives, les frais de la visite des lieux sont directement pris en charge par l'Etat.


  B. VÉRIFICATION D'ÉCRITURES


5Le tribunal administratif peut ordonner une vérification d'écritures par un ou plusieurs experts, en présence, le cas échéant, d'un de ses membres (C. TA-CAA, art. R 180).

La vérification d'écritures intervient dans le cas où l'une des parties met en doute l'authenticité d'une pièce manuscrite versée au dossier de l'instance, pièce dont l'écriture ou la signature est déniée par son auteur ou n'est pas reconnue par l'une des parties.

Cette mesure d'instruction peut être ordonnée soit d'office, soit à la demande des parties, mais en aucun cas elle n'est obligatoire pour le tribunal.

Le ou les experts chargés de procéder à la vérification sont nommés par le tribunal lui-même. L'opération s'effectue au siège du tribunal en présence d'un conseiller.

Les frais et honoraires dus aux experts sont liquidés et attribués dans les mêmes conditions que les frais d'expertise (cf. C. TA-CAA, art. R 181 et ci-dessus 13 O 3321, n°s 76 et suiv. ).


  C. INSCRIPTION DE FAUX


6Lorsqu'une partie entend faire écarter de l'instance, comme fausse ou falsifiée, une pièce produite par la partie adverse, elle doit s'inscrire en faux.

Saisi d'une demande manifestant l'intention de son auteur de s'inscrire en faux contre une pièce du dossier, le tribunal administratif fixe un délai dans lequel la partie qui a produit la pièce contestée sera tenue de déclarer si elle entend s'en servir (C. TA-CAA, art. R 188, 1er al. ; CE, arrêt du 13 mars 1968, Sté Scierie des Alpilles, SARL, n°s 69080 et 72468, RJ, 2e partie, p. 71).

Dans le cas où la partie ainsi mise en demeure déclare renoncer à se servir de la pièce contestée ou s'abstient de toute déclaration, la pièce est rejetée et la procédure reprend son cours normal (C. TA-CAA, art. R 188, 2e al.).

Si, au contraire, la partie qui a produit la pièce arguée de faux déclare qu'elle entend se servir de cette pièce, deux éventualités sont susceptibles de se présenter :

- ou bien le tribunal estime que sa décision ne dépend pas de la pièce contestée et, dans ce cas, il statue au fond sans avoir recours à ladite pièce pour motiver son jugement (C. TA-CAA, art. R 188, 2ème al. ; CE, arrêt du 29 janvier 1875, n° 47622, X... , Leb. chron., p. 79) ;

- ou bien la solution à donner à l'affaire dépend de la pièce arguée de faux.

Dans cette situation, le tribunal ne peut rejeter la demande en inscription de faux. Le Conseil d'État a ainsi jugé que, dans le cas où la valeur probante de la comptabilité d'un contribuable, reconnue régulière en la forme, dépend essentiellement de la portée qu'il convient d'attacher à une pièce produite par l'Administration et arguée de faux, c'est à tort que le tribunal administratif rejette la demande en inscription de faux et ordonne la poursuite immédiate des opérations d'expertise, puis statue au fond (CE, arrêt du 13 mars 1968, précité).

Dans cette hypothèse, le tribunal administratif doit surseoir à statuer jusqu'après le jugement du faux par les tribunaux de l'ordre judiciaire (C. TA-CAA, art. R 188, 2e al. ; CE, arrêt du 24 juillet 1931, n° 14304, élections municipales d'Eugène-Etienne Hennaya, Leb. chron., p. 854). À cet égard, il impartit un délai à la partie qui conteste la pièce litigieuse pour engager la procédure d'inscription de faux devant ces tribunaux.

S'il n'est pas justifié que l'autorité judiciaire a été saisie dans le délai imparti, le tribunal administratif statue au fond (CE, arrêt du 17 mars 1933, n° 14304, élections municipales d'Eugène-Etienne Hennsya, Leb. chron., p. 1427). Dans le cas contraire, il ne statue qu'après jugement définitif sur le faux et compte tenu de ce jugement.


  D. SUPPLÉMENT D'INSTRUCTION

(cf. également 13 O 3311, n° 17 )



  I. Champ d'application


1. Conclusions nouvelles et moyens nouveaux présentés par le contribuable.

7En application de l'article R 156, 2e alinéa du C. TA-CAA, si les parties présentent avant la clôture de l'instruction des conclusions nouvelles ou des moyens nouveaux, le tribunal ne peut les adopter sans ordonner un supplément d'instruction. Toutefois, il a été jugé que ne méconnaît pas la portée de cet article le tribunal qui, sans prescrire un complément d'instruction, tient compte d'un mémoire déposé à l'audience et dans lequel l'auteur dudit mémoire se borne, à l'appui de ses conclusions antérieures, à discuter le rapport d'expertise en tirant argument des pièces comptables examinées par l'expert (CE, arrêt du 12 mars 1943, req. n° 63483, X... , Rec. n° 2, 1943, p. 132, TJCA, n° 59012).

2. Éléments d'information insuffisants.

8Dans tous les cas où il apparaît -même en l'absence de moyens nouveaux- que les échanges de mémoires intervenus entre les parties ou les mesures spéciales d'instruction déjà ordonnées (cf. notamment ci-dessus 13 O 3321, n° 75 ) n'ont pas apporté des éléments d'information suffisants pour lui permettre de se prononcer en toute connaissance de cause sur le litige, le tribunal administratif a la faculté d'ordonner un supplément d'instruction dont il précise l'objet.

Il appartient au tribunal d'apprécier l'opportunité d'une telle mesure même lorsque le commissaire du Gouvernement a conclu à son adoption (CE, arrêt du 12 mars 1941, n° 42727, X... , Bull., n° 5, 1941, p. 242, TJCA, n° 263002, Leb. chron., p. 37, 1re esp.).

Le tribunal administratif, saisi d'un litige présentant à juger de la question de savoir si une société d'intérêt collectif agricole remplit les conditions auxquelles est subordonné le bénéfice de l'exemption de patente (act. taxe professionnelle) prévue par l'article 1454-5° du CGI (ancien), peut valablement ordonner un supplément d'instruction en cas de désaccord des parties sur les faits de la cause (CE, arrêt du 7 novembre 1956, n°s 25282 et 25283, Sté d'intérêt collectif agricole de la région de Pithiviers, RO, p. 198, Leb. chron., p. 418).

Par ailleurs, lorsque, à propos de l'évaluation d'un immeuble en matière de contribution foncière (act. taxe foncière), le tribunal administratif s'estime insuffisamment informé sur les conditions dans lesquelles a été effectuée la comparaison établie avec l'immeuble-type, il ne peut annuler purement et simplement les opérations de révision de l'évaluation contestée et il lui appartient seulement d'ordonner un complément d'instruction à l'effet notamment de rechercher s'il a été tenu compte des corrections prévues par l'article 17 de l'instruction du 1er octobre 1941 (CE, arrêt du 30 juin 1947, X... , RO, p. 258).


  II. Caractère contradictoire du supplément d'instruction


9Le supplément d'instruction doit se dérouler d'une manière contradictoire. Les mémoires contenant les faits ou motifs nouvellement invoqués par une partie sont donc notifiés par le greffe à la partie adverse qui est ainsi mise en mesure de répliquer.

Le Conseil d'État a jugé que le caractère contradictoire de cette mesure était respecté :

- lorsque les observations de l'Administration ont été communiquées au contribuable qui y a répondu par un mémoire (CE, arrêt du 10 janvier 1938, n° 48683, X... ., Bull. n° 7, 1938, p. 202, TJCA, n° 188004) :

- dès lors qu'avant d'être adressé au tribunal administratif le résultat du supplément d'instruction a été notifié au redevable (CE, arrêt du 22 mars 1968, n°s 71367, 72797, 72956, RJ, 2e partie, p. 91).