SOUS-SECTION 2 CONTESTATIONS NE RELEVANT PAS DE LA COMPÉTENCE DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE
SOUS-SECTION 2
Contestations ne relevant pas de la compétence
de la juridiction administrative
A. EXCEPTIONS CONCERNANT TOUS LES IMPÔTS
Opposition aux actes de poursuites.
1D'une manière générale, les conclusions tendant à l'annulation d'actes de poursuites ne resortissent pas à la compétence de la juridiction administrative (CE 16 janvier 1985, n° 60845).
En effet, aux termes de l'article L. 281 du LPF, les oppositions qui portent sur la régularité en la forme des actes de poursuites doivent être portés devant le juge de l'exécution, quelle que soit la nature des impositions dont le recouvrement est poursuivi.
Le contentieux des poursuites est étudié DB 12 C 231 à laquelle il convient de se reporter.
Action en responsabilité (cf. 13 O 72 ).
2Le tribunal administratif est incompétent pour connaître :
- des conclusions d'un contribuable tendant à la réparation du préjudice qui lui aurait été causé par des poursuites en recouvrement et notamment par une saisie d'objets mobiliers lui appartenant, les fautes invoquées ne pouvant être regardées comme détachables de la procédure d'exécution dont le contrôle appartient à l'autorité judiciaire (CE, arrêt du 15 mai 1968, n° 65846, dame X... , RJ, 2e partie, p. 129) ;
- d'une demande d'indemnité présentée par un contribuable et fondée sur les conditions dans lesquelles le comité départemental de confiscation des profits illicites a sollicité la mise sous séquestre de ses biens par l'autorité judiciaire dès lors qu'un tel litige se rattache à une procédure judiciaire (CE, arrêt du 30 septembre 1960, n°s 35063 et 45526, BOCD, II, n° 1352, Leb. chron., p. 506).
Avis des commissions départementales des impôts.
3Les avis émis par les commissions départementales des impôts directs (actuellement commissions départementales des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires) ne constituent pas des décisions faisant grief aux contribuables et ne sont dès lors pas susceptibles de faire l'objet de recours contentieux. Ils ne peuvent en conséquence, être contestés qu'à l'occasion de réclamations introduites selon la procédure prévue à l'article R* 190-1 du LPF et dirigée contre les impositions qui y ont fait suite (CE, arrêt du 19 novembre 1956, n° 38216, RO, p. 206).
Dans le même sens, la décision par laquelle la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prononce la nullité d'un forfait 1 n'est pas détachable de la procédure d'imposition et ne peut, à ce titre, faire l'objet d'un recours direct en annulation. Son irrégularité éventuelle peut seulement être contestée à l'appui de la demande dirigée contre le titre de perception (act. avis de mise en recouvrement) [CE, arrêt du 13 janvier 1967, n° 64717, dame X... Eléonore, RJ, 2e partie, p. 14] 2 .
4De même, ni la décision du directeur de soumettre à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires le désaccord qui existe entre le service et un contribuable, ni l'avis émis par ladite commission ne constituent des actes faisant grief au redevable. Leur validité ne peut donc être contestée qu'à l'occasion et à l'appui d'une réclamation introduite selon la procédure prévue par l'article R* 190-1 du LPF et dirigée contre l'imposition établie à la suite de l'avis de la commission (CE, arrêt du 25 octobre 1961, n°s 47330 et 47331, RO, p. 435).
Convention internationale (validité d'une).
5 La validité des dispositions de la convention franco-monégasque du 18 mai 1963 régulièrement ratifiée et publiée au Journal Officiel de la République française le 27 septembre 1963 ne peut être discutée devant le juge administratif. Par suite, un contribuable, qui ne conteste pas entrer dans le champ d'application desdites dispositions, n'est pas recevable à soutenir que les articles 7 et 26 de la convention violeraient l'article 2 du Code civil et les principes généraux du droit international et du droit interne (CE, arrêt du 29 janvier 1971, n° 78569, RJ, n° IV, p. 15).
Décisions de l'Administration.
6Les décisions de l'Administration relatives aux opérations de contrôle fiscal ne constituent pas des actes détachables de la procédure d'imposition et ne peuvent être attaquées qu'à l'occasion d'une réclamation introduite selon la procédure prévue par l'article R* 190-1 du LPF et dirigée contre l'imposition établie à la suite desdites opérations. Jugé, en conséquence, qu'un contribuable, n'est pas recevable à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle le directeur départemental a refusé de mettre fin à une vérification de sa comptabilité (CE, arrêt du 29 janvier 1965, n° 62558, RO, p. 269).
Demande en restitution d'ordre contractuel.
7Si, dans le contrat passé avec l'un de ses fournisseurs, l'État s'est engagé à rembourser audit fournisseur l'impôt payé par celui-ci, la demande en restitution basée sur les clauses du marché est d'ordre contractuel et il ne peut être statué sur cette demande par le juge de l'exigibilité de l'impôt (CE, arrêt du 25 juillet 1929, n° 88364, Compagnie générale des Tabacs, Bull. 1929, n° 24, p. 238, TJCA, n° 53003, Leb. chron., p. 853).
8Dommages-intérêts. Cf. ci-dessus n° 2 , « Action en responsabilité ».
Droit de propriété (désaccord sur le).
9Quand la solution que comporte une demande en mutation de cote ou en décharge de la taxe des biens de main-morte est subordonnée à une question d'attribution de propriété, le tribunal administratif ne peut valablement statuer qu'après le jugement définitif par les tribunaux civils, du droit à la propriété ou, du moins, qu'après l'expiration d'un délai imparti au réclamant pour justifier de sa diligence à saisir le tribunal compétent [CE, arrêts des 29 février 1924, X... , RO, 4911 ; 20 avril 1942, Sté Paris-France Immobilier, n°s 46313 et 55035, RO, p. 104 et 5 juillet 1952, dame X... , RO, p. 79] 3 .
En outre, jugé que la circonstance que le contribuable s'est pourvu devant le Conseil d'État 4 contre le premier jugement du tribunal administratif le mettant en demeure de faire trancher par l'autorité judiciaire la question de propriété ne saurait, à défaut d'effet suspensif de sa requête, le dispenser d'exécuter les obligations résultant dudit jugement. Le tribunal administratif est, dès lors, fondé à rejeter sa demande lorsqu'il n'a pas fourni, à l'expiration du délai qui lui avait été assigné, les justifications prescrites (CE, arrêt du 20 avril 1942, Société « Paris-France Immobilier », susvisé).
Injonction à l'Administration.
10Il n'appartient pas à la juridiction administrative d'adresser des injonctions à l'Administration en vue de faire délivrer aux contribuables des certificats de non-imposition à certains impôts ou contributions (CE, arrêts des 22 décembre 1969, n° 77183, RJ, 2e partie, p. 171, 3 mars 1986, n° 41505).
Juridiction gracieuse.
11Il n'appartient pas à la juridiction administrative de se prononcer sur le bien fondé d'une remise gracieuse des pénalités légalement infligées (CE, arrêt du 14 juin 1967, n° 66376, X... , RJ, 2e partie, p. 145).
Il est cependant précisé qu'une décision gracieuse peut utilement faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir notamment lorsqu'elle est entachée d'une erreur de droit ou fondée sur des faits matériellement inexacts (cf. 13 O 7112, n° 3 ).
Mandat.
12Le tribunal administratif n'a pas à connaître du litige survenu entre un contribuable et son mandataire au sujet de l'accomplissement du mandat (CE, arrêt du 28 mars 1955, n° 32890, RO, p. 279).
Privilège du Trésor.
13Toutes les difficultés relatives au privilège du Trésor sont de la compétence de l'autorité judiciaire. D'où il suit que c'est à tort qu'un tribunal administratif annule la revendication, par l'Administration, du bénéfice du privilège institué par l'article 1926 du CGI (CE, arrêt du 21 juin 1967, n° 51032, SA Établissements Délest, RJ, 2e partie, p. 158).
Question de droit civil.
14Dans les cas exceptionnels où une contestation soulevée à l'occasion de la perception des taxes sur le chiffre d'affaires porte sur une question de pur droit civil, telle que l'existence d'une sûreté spéciale pour le recouvrement de l'impôt, et ressortit à la compétence des tribunaux judiciaires, elle doit être instruite et jugée par ces tribunaux suivant les règles de droit commun et la décision qui y statue est susceptible d'appel (Cass. civ., arrêt du 16 mars 1927, X... , Bull. n° 9, 1927, p. 143, TJCA, n° 53001).
Question de droit pénal.
15La juridiction administrative n'est pas compétente, pour connaître des conclusions d'un contribuable tendant à la condamnation pénale d'un fonctionnaire des Services fiscaux pour infraction aux dispositions de l'article L 103, L 113, L 114, L 118, L 135 et L 136 du LPF relatives au secret professionnel (CE, arrêt du 22 décembre 1969, req. n° 77183, RJ, 2e partie, p. 171).
16Question préjudicielle (Voir 13 O 161 ).
B. EXCEPTIONS PROPRES AUX IMPÔTS DIRECTS
Ne constituent pas des réclamations contentieuses pouvant être portées devant le tribunal administratif :
17- une demande tendant à la rectification, soit de l'adresse portée au rôle (CE, arrêt du 16 février 1901, n°s 90974 et 93237, X... , Leb. chron., p. 197, 4e esp.), soit des erreurs commises dans la rédaction des nom et adresse d'un contribuable portés sur un avertissement (CE, arrêt du 1er juin 1953, n° 21549, X... , RO, p. 265, Leb. chron., p. 650) ;
- une demande tendant à la refonte d'un rôle (CE, arrêt du 27 février 1903, n° 9099, X... , Leb. chron., p. 175, 1re esp.) ;
- une demande tendant à la révision du contingent assigné à une commune en matière de contribution mobilière (CE, arrêt du 13 mars 1903, n° 8232, X... , RO, 3922, Leb. chron., p. 218, 4e esp.) ;
- une demande tendant à l'imposition d'un immeuble sous un article de rôle spécial (CE, arrêt du 26 juin 1907, n° 24087, X... , Leb. chron., p. 595, 1re esp.).
Compétence du comptable du Trésor.
18Lorsque le directeur a prononcé d'office la réduction de droits contestés par un contribuable et sur le montant desquels le service du recouvrement avait appliqué la majoration de 10 % pour paiement tardif, c'est au comptable du Trésor, saisi du certificat de dégrèvement, qu'il appartient d'accorder d'office le remboursement de ladite majoration en proportion des droits dégrevés. Tout litige pouvant s'élever à ce sujet relève, dès lors, de la compétence du trésorier-payeur général et le contribuable n'est pas recevable à contester ladite majoration dans une demande adressée au tribunal administratif et portant sur le bien-fondé de l'imposition elle-même (CE, arrêt du 21 juillet 1970, n° 76892, RJ, n° IV, p. 115).
Contestation de la procédure de redressement ayant abouti à la simple réduction d'un déficit déclaré.
19Lorsque la réduction par l'Administration du déficit déclaré par un contribuable au titre d'un exercice déterminé n'a entraîné l'établissement d'une imposition qu'au titre de l'exercice suivant, l'intéressé n'est pas fondé, à l'occasion d'une réclamation dirigée contre cette imposition établie à la suite d'une procédure régulière, à invoquer un vice quelconque affectant la notification du redressement qui a abouti à la réduction dudit déficit ; il est seulement recevable à contester le bien-fondé du redressement ainsi opéré dans la mesure où il a une répercussion sur le montant de l'imposition dont il s'agit (CE, arrêt du 23 avril 1971, n° 77799, RJ, n° IV, p. 71).
Évaluations des propriétés bâties et non bâties.
20Cf. 13 O 7112, n° 5 .
Inscription d'un tiers sur un rôle (demande d').
21Le tribunal administratif n'est pas compétent pour connaître d'une demande tendant à faire ordonner l'inscription d'un tiers sur les rôles (CE, arrêt du 8 décembre 1911, commune de Bagneux, n° 29138, RO, 4418, Leb. chron., p. 1558, 3e esp.).
Juridiction gracieuse (domaine de la).
22Les demandes tendant à la remise ou à la modération d'impôts directs relèvent de la juridiction gracieuse conformément à l'article L 247 du LPF et ne peuvent être portées devant la juridiction contentieuse (CE, arrêts des 21 novembre 1938, X... , RO, p. 513 et 10 novembre 1952, n° 19458, X... ), alors même que la décision par laquelle le directeur a rejeté la demande en remise ou modération serait rédigée comme en matière contentieuse (au motif, en l'espèce, que ladite demande ne comportait ni la signature de l'intéressé, ni l'exposé des faits et moyens) [CE, section, arrêt du 18 décembre 1970, n° 75639, RJ, n° IV, p. 176].
Ainsi, la juridiction contentieuse administrative n'a pas qualité pour connaître des demandes en remise ou modération d'impôts directs présentées notamment dans les cas d'indigence ou de gêne (CE, arrêts des 22 janvier 1958, X... , RO, p. 27 et 3 juillet 1970, req. n° 79300, X... , RJ, n° IV, p. 107).
Mais, bien que les demandes en remise ou modération ne relèvent pas de la juridiction contentieuse, le juge de l'impôt peut, pour apprécier l'existence ou l'exigibilité de la dette du contribuable, constater la réalité ou le défaut d'une mesure gracieuse prise par l'autorité compétente et, lorsqu'il s'agit d'une remise conditionnelle, rechercher si la condition se trouve ou non remplie (CE, arrêt du 26 novembre 1943, n° 72918, Vve X... , RO, p. 384, Leb. chron., p. 270).
Enfin, il est précisé qu'une décision gracieuse peut utilement faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir notamment lorsqu'elle est entachée d'une erreur de droit ou fondée sur des faits matériellement inexacts (cf. 13 O 7112, n° 3 ).
1 Et le remplace par le montant réel du chiffre d'affaires.
2 Cf. toutefois 13 O 7112. n° 9 .
3 La taxe visée est supprimée mais le principe exposé demeure.
4 Avant la réforme du contentieux administratif.