Date de début de publication du BOI : 30/10/1999
Identifiant juridique : 12C251
Références du document :  12C251

SECTION 1 L'ORDRE

  II. Convocation des créanciers inscrits

20.Le juge-commissaire, dans les huit jours de sa nomination, ou le juge aux ordres, dans les trois jours de la réquisition, doit convoquer les créanciers inscrits,

Tous les créanciers inscrits doivent être convoqués. En effet, leur consentement unanime est exigé pour le règlement amiable.

Les créanciers chirographaires du saisi ou du vendeur n'ont pas à être convoqués.

En cas d'omission des créanciers inscrits, il convient de distinguer :

- si l'omission est imputable au conservateur des hypothèques, la procédure d'ordre est régulière mais la responsabilité civile du conservateur peut être engagée (art. 2198 du Code civil) ;

- si l'omission est imputable à l'avocat poursuivant ou au greffier, le créancier omis peut demander la nullité de l'ordre par la voie de la tierce opposition.

La convocation est faite par lettre recommandée avec avis de réception expédiée par le greffier et adressée tant aux domiciles élus par les créanciers dans leurs inscriptions qu'à leur domicile réel en France. Elles indiquent l'immeuble sur lequel l'ordre est ouvert, la somme à distribuer, les noms du saisi (ou vendeur) et de l'adjudicataire (ou l'acquéreur) la date, le lieu et l'objet de la réunion. Les frais de convocation sont avancés par celui qui requiert l'ordre.

La partie saisie (ou le vendeur) et l'adjudicataire (ou l'acquéreur) sont également convoqués.

Le délai pour comparaître est de dix jours au moins entre la date de la convocation et le jour de la réunion (art 751, 4e al. du cpc).

  III. Réunion des créanciers

21.L'obligation de comparaître en personne ou dûment représenté, à la réunion d'ordre amiable s'impose à tout créancier convoqué, même si son inscription n'est pas susceptible d'arriver en rang utile.

Le Trésor ne saurait se soustraire à cette obligation.

Il a d'ailleurs été jugé que le fait pour un créancier de ne pas de présenter à une réunion d'ordre amiable et de ne pas donner de raison à son absence, alors qu'il était établi qu'il avait été touché par la convocation, équivalait à un refus de consentement à l'ordre amiable. Or, bien que cette opinion soit discutée, il a été jugé également que le refus sans motif valable par un créancier qui ne pouvait prétendre venir en ordre utile, de consentir à un règlement amiable, l'exposait à supporter à titre de dommages-intérêts, les frais de la procédure que son refus injustifié avait nécessités.

22.Cette règle souffre toutefois une exception : il est admis que les créanciers qui ont été déjà désintéressés peuvent le faire savoir par lettre, au juge ou au greffe. Cette lettre équivaut alors à un accord pour ordre amiable.

23.Les créanciers convoqués doivent en principe comparaître en personne. Ils ne peuvent pas se borner à faire connaître leurs prétentions par lettre au juge aux ordres (TGI VIENNE, 11 mars 1965, Gaz Pal. 1965, somm. p. 192).

24.Toutefois, ils peuvent se faire représenter par un mandataire de leur choix qui doit alors être muni d'une procuration spéciale. Il a été jugé que la procuration dont le mandataire est tenu de justifier peut être donnée dans la forme sous-seing privé (CA AIX, 13 mars 1860, DP 1860. 2. p. 165).

25.Tout créancier est libre de se faire représenter par un avocat. Mais celui-ci n'agit alors que comme simple mandataire.

Quoi qu'il en soit, la constitution d'avocat non seulement n'est pas nécessaire, mais n'est surtout pas souhaitable, dès lors qu'il s'agit d'enlever à l'ordre amiable tout ce qui peut avoir un caractère litigieux.

Aussi, à moins que le Trésor n'ait pris l'initiative de requérir l'ouverture de l'ordre, ce qui est un acte d'avocat, il n'y a pas lieu d'en constituer.

26.Si le receveur principal, créancier inscrit, chez qui domicile a été élu, n'assiste pas lui-même à l'audience du règlement amiable, il paraît préférable pour éviter toutes difficultés lors de la réunion, que le receveur divisionnaire ou l'agent chargé à la recette divisionnaire de suivre les procédures contentieuses se munisse d'un pouvoir d'agir en son nom (modèle ci-joint en annexe).

Si certains créanciers ne comparaissent pas, il ne peut y avoir d'ordre amiable, celui-ci supposant le consentement de tous les créanciers, y compris ceux qui ne viennent pas en rang utile. Le juge peut alors adresser de nouvelles convocations. A défaut de comparution, il doit ouvrir l'ordre judiciaire. Les créanciers non comparants encourent alors une amende de 10 à 50 F (art. 751, dernier al. du cpc), sauf s'ils justifient d'une excuse légitime.

Lorsque tous les créanciers comparaissent, le juge, qui connaît la situation hypothécaire de l'immeuble par la lecture de l'état des inscriptions, leur demande de faire valoir leurs droits et tente de faciliter un accord amiable, en veillant à ce que aucun créancier ne se voit attribuer une part supérieure à celle qu'il obtiendrait dans un ordre judiciaire 1 .

Dès lors trois hypothèses peuvent se présenter :

- tous les créanciers se mettent d'accord ;

- aucun accord ne peut être réalisé ;

- l'accord n'est que partiel.

1. Accord des créanciers.

27.Le juge constate l'accord de tous les créanciers et dresse procès-verbal de la distribution du prix par règlement amiable 2 dans lequel il ordonne la délivrance des bordereaux aux créanciers utilement colloqués et la radiation des inscriptions des créanciers non admis en ordre utile (art. 751, al. 5 ancien du cpc). Le bordereau de collocation est un extrait du procès-verbal délivré à chaque créancier et qui contient copie littérale de la partie du règlement qui concerne sa collocation. Il est revêtu de la formule exécutoire.

28.Le procès-verbal de règlement amiable est revêtu de la signature du juge et de celle du greffier, qui lui donnent le caractère d'un acte authentique qui fait foi, jusqu'à inscription de faux.

Les signatures des créanciers ou de leurs avocats (ou représentants) ne sont pas nécessaires (CA ALGER 2 février 1898, sous Req. 25 juin, 1. 1900, Rec. Sirey 1901. 1. p. 131).

A compter de la remise desdits bordereaux, les intérêts et arrérages des créanciers utilement colloqués cessent de courir à l'égard de la partie saisie (art. 765, 2e al. du cpc).

Les inscriptions des créanciers non utilement colloqués sont rayées sur la présentation à la conservation des hypothèques d'un extrait de l'ordonnance du juge, délivré par le greffier (art. 751, 6e al. du cpc).

Le conservateur des hypothèques n'a pas à rechercher, en cas d'incapacité du créancier, si la radiation a pu être valablement ordonnée.

Il est couvert par cette ordonnance comme il le serait pour un jugement passé en force de chose jugée.

Conformément à l'article 771 du cpc, les hypothèques venant en rang utile sont radiées par le conservateur des hypothèques après paiement de chaque collocation au vu du bordereau et de la quittance du créancier.

Si la radiation des hypothèques tarde à la conservation, une intervention du comptable peut être faite au plan administratif en soulignant l'intérêt du Trésor.

Sauf consignation des fonds (cf. infra n° 79 ), l'adjudicataire règle les créanciers colloqués au fur et à mesure de leurs demandes. Les paiements faits par l'adjudicataire nécessitent une quittance notariée comportant mainlevée de l'inscription hypothécaire correspondante. Le choix du notaire et les frais sont à la charge de l'adjudicataire (art. 1248 du Code civil).

En cas de défaillance de l'adjudicataire, non libéré sur consignation totale du prix, il peut être contraint par toutes voies de droit, le bordereau de collocation étant exécutoire, sur tous ses biens. L'adjudicataire n'ayant pas la qualité de redevable, les poursuites doivent être exercées dans les formes du droit commun. La prescription est trentenaire, à compter du jour où l'ordonnance de clôture est devenue définitive.

Il est également possible de poursuivre la revente de l'immeuble adjugé, sur folle enchère, lorsque l'acquisition, impayée, a eu lieu aux enchères publiques.

2. Désaccord des créanciers.

29Il résulte des termes de l'article 752 du cpc, que le règlement amiable doit intervenir dans le délai d'un mois à compter du jour de la convocation. Ce délai n'est pas d'ordre public.

A défaut de règlement amiable dans ce délai, le juge constate sur le procès-verbal que les créanciers n'ont pu se régler entre eux, et prononce l'amende contre ceux qui n'ont pas comparu. Il déclare l'ordre judicaire ouvert et commet un ou plusieurs huissiers à l'effet de sommer les créanciers de produire.

3. Accord partiel des créanciers.

30.Si le désaccord entre les créanciers inscrits n'est pas total, le juge peut convoquer une nouvelle réunion dans le délai d'un mois ou envisager le règlement amiable de l'ordre partiel.

L'ordre partiel permet de limiter l'ordre judicaire aux seules créances sur lesquelles un accord n'a pu se faire.

  IV. Effets de l'ordre amiable

31.Le juge commis dans un ordre amiable exerce une juridiction et fait oeuvre de juge susceptible de produire les effets de la chose jugée (Cass. com. 25 mai 1948, Gaz. Pal. 1948-2, p. 115).

L'autorité de la chose jugée ne s'attache toutefois qu'aux créances garanties par une sûreté et qui sont concernées par l'ordre. Elle n'interdit pas à un créancier de poursuivre le recouvrement de la créance qui n'est pas couverte par la sûreté (Cass. civ. 19 mai 1980, Bull. civ., II, n° 117 p. 83).

Le règlement amiable peut être attaqué par les voies de recours prévues pour les actes juridictionnels. Ainsi les créanciers qui ont été omis peuvent former tierce opposition pendant trente ans ; quant aux créanciers régulièrement convoqués, il a été admis qu'ils puissent former opposition, en cas d'irrégularité de procédure ou de vice de consentement, dans les formes et dans le délai de huitaine prévu en matière de règlement de l'ordre judiciaire par l'article 767 du cpc (Cass. civ. 7 novembre 1985, D. 1986, p. 156 ; 20 mai 1992, Bull. civ., II, n° 145 p.72).

A peine de nullité, le délai de recours doit être, dans les deux cas, compté de la date du procès-verbal de règlement de l'ordre amiable celui-ci n'ayant pas à être dénoncé (Cass. civ. 12 décembre 1979, Gaz. Pal. 1980 I, p. 178 pour ce qui concerne le délai de huitaine).

32.Ce n'est que par l'examen du procès-verbal, qu'ils ne sont pas appelés à signer, que les créanciers peuvent s'apercevoir que la distribution n'est pas opérée ainsi qu'ils l'avaient entendu. Peu de temps leur est laissé pour prendre connaissance, au greffe, du texte établi par le juge et pour vérifier que ce dernier est conforme à l'accord qui avait été arrêté. Aussi, est-il recommandé au receveur principal, ou au représentant de ce dernier, de suivre la publication du procès-verbal et de vérifier ses énonciations pour, éventuellement, faire opposition aussitôt.

L'ordre amiable a force exécutoire. Les créanciers nantis de leur bordereau de collocation peuvent donc éventuellement procéder à une saisie à l'encontre de l'adjudicataire ou de l'acquéreur défaillant.

  C. L'ORDRE JUDICIAIRE

33.A défaut de règlement amiable, dans le mois de la convocation, le juge déclare l'ordre judiciaire ouvert. Mais l'ordre ne peut être provoqué s'il y a moins de quatre créanciers inscrits ; dans cette hypothèse, la distribution du prix est réglée par le tribunal de grande instance du lieu de situation de l'immeuble, selon la procédure prévue à l'article 773 du c p c (cf. n° 75 ).

34.Dans tous les cas où l'ordre judiciaire est ouvert, il y a lieu de constituer avocat et d'adresser à ce dernier tous les éléments et pièces nécessaires à la production de la créance du Trésor dans les délais prescrits par les textes

35.Il convient de veiller à ce que la procédure soit scrupuleusement suivie par l'avocat et que celui-ci rende compte régulièrement de son évolution. Il faut exiger en particulier, d'obtenir communication du règlement provisoire d'ordre dressé par le juge de manière à pouvoir le cas échéant y former un contredit (cf. infra n°s et suivants).

  I. Procédure préalable au règlement provisoire

1. Sommation aux créanciers.

36.En même temps qu'il déclare l'ordre ouvert, le juge commet un ou plusieurs huissiers à l'effet de sommer les créanciers de produire (art. 752 du cpc). Cette sommation doit être faite dans les huit jours de l'ouverture de l'ordre (art. 753 du cpc).

Il appartient à l'avocat du poursuivant de faire signifier ces sommations. A cet effet, il dresse la liste des créanciers à sommer. A défaut du respect du délai de huit jours qui lui est imparti, l'avocat poursuivant est déchu de la poursuite, sans sommation ni jugement. Le juge pourvoit à son remplacement, d'office ou sur la réquisition d'une partie, par ordonnance inscrite sur le procès-verbal ; cette ordonnance n'est susceptible d'aucun recours (art. 776 du cpc).

Seuls les créanciers inscrits sont sommés de produire.

37.La signification est faite aux domiciles élus des créanciers dans leurs inscriptions, ou à celui de leurs avocats.

Cette disposition n'est pas prescrite à peine de nullité. En effet, si le domicile élu est le seul où le créancier poursuivant soit légalement tenu de signifier la sommation de produire à l'ordre, ledit article n'exclut pas la validité d'une signification faite en temps utile au domicile réel de ce dernier (Cass. 4 juin 1941 Gaz. Pal. 1941. 2. p.107). Si le vendeur (précédent propriétaire créancier de son prix de vente) n'a pas élu domicile ou s'il n'a pas constitué avocat, la sommation doit être signifiée à son domicile réel situé en France (art. 753 du cpc).

Par ailleurs, l'huissier doit aviser, par lettre simple, la personne qui a élu domicile de la signification le jour même ou au plus tard le premier jour ouvrable (Cass. civ. 28 février 1990, Gaz. Pal. 1990-2, pan. jur. p. 125).

Ces significations sont faites par le ou les huissiers commis à cet effet par le juge.

Elles contiennent l'avertissement que faute de produire dans lès quarante jours, le créancier sera déchu du droit d'être colloqué dans l'ordre (art. 753 du cpc).

L'ouverture de l'ordre doit, en même temps, être dénoncée à l'avocat de l'adjudicataire. Il n'est fait qu'une seule dénonciation à l'avocat qui représente plusieurs adjudicataires (art 753, 3e al. du cpc.).

38.Dans les huit jours de la sommation, l'original doit être remis au juge, qui en fait mention sur le procès-verbal (art. 753, 4e al. du cpc). Ainsi le juge peut vérifier que l'avocat du poursuivant a bien respecté le délai qui lui était imparti pour faire signifier les sommations (cf. n° 36 ) et il connaît le point de départ du délai accordé aux créanciers pour produire.

1   Le cahier des charges d'une saisie immobilière ne peut modifier directement ou indirectement l'ordre dans lequel le prix des biens du débiteur sera réparti entre les créanciers (Cass. Civ. 2 décembre 1992, D. 1994 p. 116).

2   Dans le cas où le procès-verbal prévu par l'article 751 n'a pas été dénoncé aux créanciers présents ou représentés qui en ont nécessairement connaissance, le délai de huitaine pour faire opposition commence à courir à leur égard à compter de la date du procès-verbal (Cass. Civ. 12 décembre 1979, Bull. Civ. Il, n° 288 p. 198).