Date de début de publication du BOI : 20/12/1996
Identifiant juridique : 7G2311
Références du document :  7G23
7G231
7G2311
Annotations :  Lié au BOI 7G-3-04
Lié au BOI 7G-4-09
Lié au BOI 7G-2-06
Lié au BOI 7G-3-10
Lié au BOI 7G-6-04

Permalien


CHAPITRE 3 ASSIETTE

CHAPITRE 3  

ASSIETTE

Les droits de mutation par décès sont assis sur la valeur des biens transmis (cf. infra 7 G 2311 ), abstraction faite de certaines déductions particulières et du passif successoral (cf. infra 7 G 2320 ).

SECTION 1  

Évaluation des biens transmis

Préalablement à l'examen des dispositions touchant l'évaluation des biens transmis à titre gratuit, il est précisé que la présente section n'a pas pour objet de traiter de la « technique » de l'évaluation. En tant que de besoin il conviendra de se reporter :

- soit, à la documentation de base série 9 D, division G ;

- soit, au guide de l'évaluation des biens. Cet ouvrage résume les différents types de méthodes d'évaluation possibles pour les diverses catégories de biens figurant, le plus fréquemment, dans le patrimoine d'une personne physique.

SOUS-SECTION 1  

Principe

TEXTES

CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS

(Législation applicable au 12 mai 1996)

Art. 666. - Les droits proportionnels ou progressifs d'enregistrement et la taxe proportionnelle de publicité foncière sont assis sur les valeurs.

Art. 676. - En ce qui concerne les mutations et conventions affectées d'une condition suspensive, le régime fiscal applicable et les valeurs imposables sont déterminés en se plaçant la date de la réalisation de la condition.

Toutefois, lorsqu'elle ne tient pas lieu des droits d'enregistrement, la taxe de publicité foncière est perçue sur racte conditionnel d'après le régime applicable à la date à laquelle la formalité de publicité foncière est requise. Les valeurs imposables sont déterminées en se plaçant à la date de l'acte.

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1En principe, les biens transmis sont évalués à leur valeur vénale au jour du fait générateur de l'impôt 1 [CGI, art. 666 ].

Toutefois, pour les transmissions sous condition suspensive, la valeur des biens est appréciée au jour de la réalisation de la condition (CGI, art. 676 ).

Les droits de mutation par décès sont en conséquence assis sur une déclaration estimative des redevables. Cependant pour certains biens, il existe des bases légales d'évaluation (cf. infra 7 G 2312 ).

  A. NOTION DE VALEUR VÉNALE

2Par deux arrêts du 23 octobre 1984, la Cour de cassation a précisé la notion de valeur vénale.

1. Les clauses d'une promesse de vente d'un immeuble rural prévoyaient la conclusion d'un bail au profit du promettant concomitamment à la régularisation de la vente par acte authentique.

3La Cour de cassation a estimé que, pour l'assiette des droits de mutation, les terres cédées devaient être considérées comme occupées au motif que « la valeur vénale réelle d'après laquelle les immeubles sont estimés pour la liquidation » de ces droits « en vertu de l'article 667-I du CGI 2 , est constituée par le prix qui pourrait en être obtenu par le jeu de l'offre et de la demande dans un marché réel compte tenu de l'état dans lequel se trouve l'immeuble avant la mutation et des clauses de l'acte de vente » (Cass. Com., 23 octobre 1984, aff. G.F.A. de Plaimpied ; Bull. IV, n° 275, p. 224).

42. Dans un arrêt rendu le même jour en matière de mutation à titre gratuit, la Cour suprême a considéré que les droits résultant du bail préalablement consenti au donataire affectaient la valeur intrinsèque d'une propriété rurale au jour de la donation de celle-ci et que la moins-value qui s'ensuivait devait, par conséquent, être prise en considération pour fixer la valeur vénale réelle à retenir à cette date (Com., 23 octobre 1984, aff. X...  ; Bull. IV, n° 274, p. 223).

53. Ces deux décisions participent d'une conception objective de la notion de valeur vénale réelle d'un bien immobilier, conception déjà affirmée par la Cour en droit commun en cas de rescision pour lésion (Civ. 1re, 16 novembre 1959, Bull. I, n° 477, p. 396), et selon laquelle il convient, pour appréhender cette valeur, de se placer du point de vue d'un acheteur quelconque (valeur commune, intrinsèque, cf. supra n° 4 ) et non d'une personne déterminée (valeur de convenance). Autrement dit, seuls sont à prendre en compte pour l'estimation du bien les éléments réels d'appréciation - qu'il s'agisse de facteurs d'ordre socio-économique, physique ou juridique (cf. supra n° 3 ) - abstraction faite de circonstances propres à la situation personnelle des parties.

6Bien entendu, lorsqu'il s'agit d'un ensemble de biens, c'est la valeur de cet ensemble qui doit être prise en considération.

7L'évaluation des biens d'après leur valeur vénale s'oppose à la publication et à l'utilisation de tableaux indicatifs, par exemple, relatifs à la valeur au mètre carré des appartements ou aux coefficients de capitalisation pour les immeubles loués. La publication par l'administration de barèmes ou de coefficients conduirait à des estimations forfaitaires contraires à l'esprit de la loi.

  B. DÉTERMINATION DE LA VALEUR VÉNALE

8  Les principes généraux gouvernant l'évaluation des diverses catégories de biens sont exposés dans le Guide de l'évaluation des biens diffusé par l'administration. Cet ouvrage précise, pour chaque catégorie de biens (immeubles, fonds de commerce, clientèles, biens meubles, etc.), les principales méthodes d'évaluation susceptibles d'être utilisées et généralement admises par les experts privés ou publics.

9Le Guide de l'évaluation des biens n'impose pas une méthode, ni n'édicte d'exclusive à l'égard d'une autre, mais cherche à être une synthèse des travaux des experts privés ou publics et de l'expérience quotidienne du marché des biens. Il pourra être complété par la consultation d'ouvrages spécialisés dans l'évaluation de tel ou tel bien.

  C. PRÉCISIONS DIVERSES

  I. Monuments historiques 3

10Les demeures et bâtiments classés monuments historiques (ou inscrits à l'inventaire supplémentaire) se trouvent dans une situation particulière en raison, notamment, de leur nature spécifique, des charges souvent importantes qui les grèvent, du nombre limité des acquéreurs potentiels et des difficultés qui en découlent pour les vendre.

Il convient, en particulier, de tenir compte des contraintes qui résultent, pour les propriétaires de tels biens, de leur ouverture plus ou moins fréquente au public et de leur utilisation à des fins d'animation collective dans un but essentiellement culturel.

  II. Entreprises en difficulté

11Dans le cas d'entreprises en difficulté, c'est-à-dire d'entreprises ayant subi chroniquement des déficits traduisant une situation particulièrement obérée et dont les perspectives d'avenir sont compromises, le service doit faire preuve de prudence dans l'évaluation de leur valeur.

Il en est notamment ainsi, lorsqu'elles sont déficitaires depuis plusieurs exercices, des entreprises :

- dont le marché des produits est saturé ou est dominé par la concurrence ;

- ou dont la production est très liée à une mode ou repose sur des procédés techniques périmés ;

- ou dont les mécanismes de prise de décision et les modes d'organisation sont inadaptés et inefficaces.

Par ailleurs, le recours par des voies multiples à des aides publiques, le refus répété de crédits bancaires ou, à plus forte raison, la réalisation, dans un tel contexte, d'actifs importants constituent de très fortes présomptions de difficultés durables.

Remarque : Comptes courants détenus dans des sociétés en difficulté.

12Si le compte courant n'est pas bloqué, il appartient au redevable de l'évaluer à la valeur pour laquelle il peut être recouvré compte tenu de la situation financière de la société.

Si le compte courant est bloqué, il s'analyse en une créance à terme susceptible d'être évaluée d'après les règles prévues par l'article 760 du CGI (cf. infra 7 G 2312, n° 3 ). Il convient alors de retenir la valeur du compte courant en capital augmentée des intérêts échus et non encore payés à la date du fait générateur de l'impôt de même que des intérêts courus à la même date. En revanche, si la société se trouve en état de redressement ou liquidation judiciaire à la date du fait générateur de l'impôt, c'est alors la valeur probable de recouvrement qu'il y a lieu de déclarer. Si les sommes recouvrées sont ensuite supérieures à celles déclarées, la déclaration doit être régularisée en conséquence.

  III. Stocks des entreprises

13Les stocks doivent être pris en compte pour leur valeur marchande, laquelle englobe la marge de commercialisation dès lors que, dans le cadre d'opérations courantes, leur vente en l'état à un acquéreur quelconque procurerait un bénéfice et que les liquidités ainsi dégagées seraient de toute façon comprises dans l'assiette des biens taxables. Mais, bien entendu, les produits en cours et les produits semi-ouvrés qui ne peuvent être vendus avec bénéfice qu'après transformation ou achèvement, doivent être évalués à partir de leur prix de revient.

  IV. Immeuble occupé par son propriétaire.

14  Pour l'assiette des droits de mutation à titre gratuit, les biens immobiliers sont retenus pour leur valeur vénale, c'est-à-dire au prix auquel ils pourraient être vendus si leur propriétaire décidait de les vendre à la date du fait générateur de l'impôt. Dès lors, un immeuble occupé par son propriétaire, qui n'est grevé d'aucun engagement de location, ne peut être évalué que comme un immeuble libre.

La Cour de Cassation, statuant en matière de recouvrement d'allocation aux vieux travailleurs salariés, qui fait référence à l'actif net de succession, a confirmé cette analyse et précisé qu'un immeuble occupé par les héritiers du défunt est juridiquement libre et doit être évalué comme tel dans la mesure où les intéressés ne disposent sur les biens en cause d'aucun titre régulier de location. Ce principe est transposable aux droits de mutation à titre gratuit (le service des domaines en fait une stricte application  ; ainsi la résidence principale occupée par son propriétaire a toujours été estimée, notamment pour le calcul de l'indemnité principale à allouer dans le cadre d'une opération d'expropriation, en valeur libre, c'est-à-dire sans abattement ; un tel abattement n'est appliqué, éventuellement, que dans le cas d'un immeuble loué).

  V. Biens immobiliers situés en Corse.

15Les biens immobiliers situés en Corse font l'objet, en matière de successions, de règles particulières instituées par l'article 3 de l'arrêté du 21 Prairial An IX pris par l'administrateur Miot. L'article 20 de la loi n° 67-1114 du 21 décembre 1967 a confirmé la jurisprudence antérieure de la Cour de Cassation selon laquelle cet arrêté a force de loi.

  VI. Biens à usage agricole

1. Terres agricoles.

16Conformément à la règle générale, la valeur vénale des biens agricoles est le prix auquel ces biens pourraient ou auraient pu normalement être négociés à l'époque considérée tel qu'il résulte en particulier de l'analyse des prix déclarés lors des mutations d'immeubles présentant des caractéristiques physiques et juridiques identiques et affectés au même usage. En ce qui concerne les terres agricoles, cette valeur correspond aux prix constatés sur le marché foncier lors de mutations de parcelles ayant la même situation locative. Ce marché présente une extrême variété sur le territoire national. Dans certaines régions agricoles naturelles, il se peut que l'étude du marché ne relève pas de différence sensible entre les prix pratiqués pour des terres agricoles libres et ceux payés pour des parcelles données en location, exactement comparables. En revanche, dans la plupart des régions, il s'agit de deux marchés distincts, s'adressant à des acquéreurs qui poursuivent des buts différents. Aussi, il est indispensable, pour éviter tout arbitraire, d'écarter la méthode qui consiste à calculer la valeur vénale d'une terre louée en pratiquant une décote forfaitaire sur la valeur libre supposée. Seul un examen attentif des mutations d'immeubles ruraux occupés permet de déterminer la valeur vénale du bien en cause.

À cet égard, les acquisitions et les cessions réalisées par les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural constituent, au même titre que les mutations intervenues entre particuliers, des éléments d'appréciation très utiles.

2. Terres agricoles situées en zone constructible.

17Leur valeur correspond aux prix constatés sur le marché foncier lors des mutations de parcelles de terre situées dans une même zone d'urbanisme, bénéficiant des mêmes éléments de viabilité et affectées au même usage. Dans la mesure où le marché des terrains situés dans une même zone constructible du POS aurait fait apparaître une valeur supérieure à celle que leur confère l'usage purement agricole auquel ils sont affectés, cette plus-value doit être prise en considération.

3. Bâtiments d'habitation des exploitations agricoles.

18Lorsque les bâtiments d'habitation ne peuvent être dissociés de l'ensemble de l'exploitation, la valeur de l'ensemble peut effectivement être inférieure à la somme des valeurs particulières de chacun des éléments constitutifs de cette exploitation.

A contrario, si les bâtiments d'habitation peuvent être dissociés de l'ensemble, la valeur patrimo-niale de l'exploitation peut être augmentée de la plus-value dégagée par le caractère dissociable du bien.

1   Sur la notion de fait générateur, cf. supra 7 G 22 .

2   Actuellement codifié sous rarticle L.17 du L.P.F.

3   En ce qui concerne l'exonération dont peuvent bénéficier certains de ces biens, cf. infra 7 G 2624 .