SOUS-SECTION 3 IMMOBILISATIONS ACQUISES À LA SUITE DE CESSIONS D'ÉTABLISSEMENTS, DE FUSIONS DE SOCIÉTÉS ET D'OPÉRATIONS ASSIMILÉES (VALEUR LOCATIVE « PLANCHER »)
SOUS-SECTION 3
Immobilisations acquises à la suite de cessions d'établissements, de fusions
de sociétés
et d'opérations assimilées (valeur locative « plancher »)
1La valeur locative retenue dans la base d'imposition à la taxe foncière et à la taxe professionnelle est, pour certains biens, déterminée à partir de leur prix de revient Cette valeur locative se trouve donc modifiée lorsque ces biens sont cédés à un autre redevable.
2L'article 1518 B du CGI a pour objet d'éviter qu'à l'occasion de ces cessions, les collectivités locales ne subissent des pertes de matière imposable trop importantes alors même que la cession des biens est sans incidence sur l'activité de l'établissement cédé.
Aux termes de cet article, la valeur locative des immobilisations corporelles acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements, réalisés à compter du 1er janvier 1976 ne peut être inférieure aux deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'apport, la scission, la fusion ou la cession.
3L'article 87 de la loi de finances pour 1992 (n° 91-1322 du 30 décembre 1991) et l'article 73 de la loi de finances rectificative pour 1992 (n° 92-1476 du 31 décembre 1992) ont modifié les dispositions de cet article sur plusieurs points.
L'article 87 de la loi de finances pour 1992 comporte des dispositions interprétatives destinées à lever certaines hésitations sur les modalités d'application de l'article 1518 B. Il relève également le seuil de valeur locative, de 66,66 % (213) à 80 % (4/5), et à 85 % dans certains cas.
L'article 73 de la loi de finances rectificative pour 1992 modifie, à compter de 1992, la date de référence retenue pour l'application des dispositions de l'article 1518 B et précise les modalités de calcul du seuil fixé à cet article.
Ces dispositions donnent lieu aux commentaires suivants.
A. CHAMP D'APPLICATION DE L'ARTICLE 1518 B DU CGI
4Contrairement à l'article 1499 A qui vise les seules immobilisations passibles d'une taxe foncière acquises à la suite d'apports, de scissions ou de fusions réalisés avant 1976, les dispositions de l'article 1518 B concernent toutes les immobilisations, qu'elles soient ou non passibles d'une taxe foncière ; elles s'appliquent donc aussi bien en matière de taxe foncière que de taxe professionnelle.
Le champ d'application de l'article 1518 B du CGI est également plus large que celui de l'article 1499 A dans la mesure où il concerne non seulement les opérations d'apports, de scissions ou de fusions de sociétés mais également les cessions d'établissements.
I. Biens concernés
5Compte tenu de son objet, l'article 1518 B ne vise que les biens dont la valeur locative peut être modifiée lors de leur cession.
Par ailleurs, la règle d'évaluation fixée par cet article est générale et s'applique en principe à toutes les immobilisations corporelles (terrains, constructions, matériels, équipements, biens mobiliers ...), quel que soit leur usage (industriel, commercial ou non commercial).
En pratique, cette règle joue seulement :
6- pour les immobilisations passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties :
• lorsque celles-ci sont évaluées d'après leur prix de revient pour l'ancien et pour le nouveau propriétaire. Il en est ainsi (cf. CGI, art. 1499 et 1500) lorsqu'il s'agit d'immobilisations industrielles et que l'ancien et le nouveau propriétaire sont soumis aux obligations définies à l'article 53 A du CGI (contribuables imposés d'après le bénéfice réel) ;
• ou lorsque, s'agissant d'immobilisations industrielles, la cession entraîne changement de la méthode d'évaluation. Il en est ainsi lorsque l'évaluation d'après le prix de revient n'est retenue qu'à l'égard de l'ancien ou du nouveau propriétaire (cf. DB 6 C-2521, § 4 ).
7-pour les immobilisations corporelles non passibles d'une taxe foncière (matériels, équipements, biens mobiliers etc.) ;
• lorsque leur valeur locative est évaluée à partir de leur prix de revient (matériels ne faisant pas l'objet d'une location).
II. Opérations concernées
8Les opérations à l'occasion desquelles l'article 1518 B du CGI est susceptible de s'appliquer sont les opérations d'apports, de scissions, de fusions de sociétés, ainsi que les cessions d'établissements.
Par cession d'établissement, il convient d'entendre, conformément aux dispositions de l'article 310 HA , de l'annexe II, sixième alinéa, au CGI :
91. soit la cession d'une installation utilisée par une entreprise en un lieu déterminé.
Les cessions qui portent seulement sur des immeubles imposables à la taxe foncière sur les propriétés bâties entrent ainsi dans le champ d'application de l'article 1518 B.
102. soit la cession d'une unité de production intégrée dans un ensemble industriel ou commercial, lorsque celle-ci peut faire l'objet d'une exploitation autonome.
En cas de cession d'un établissement muni de tous ses moyens d'exploitation, l'article 1518 B s'applique donc à tous les biens meubles ou immeubles ainsi vendus.
En revanche, si les matériels et équipements sont vendus isolément, il n'y a pas lieu d'appliquer les dispositions de l'article 1518 B, sauf si ces matériels 1 constituent à eux seuls une unité de production susceptible d'une exploitation autonome qui continue à être assurée par le nouvel acquéreur 2
B. MODALITÉS D'APPLICATION DE L'ARTICLE 1518 B DU CGI
11La valeur locative obtenue après application des règles de droit commun pour les immobilisations acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissement ne peut, aux termes de l'article 1518 B du CGI, être inférieure à un certain seuil (valeur locative plancher).
12Les modalités de calcul de la « valeur locative plancher » différent selon la date de l'opération :
- L'article 87 de la loi de finances pour 1992 a modifié en effet les conditions d'application de l'article 1518 B pour les opérations réalisées du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1991 lorsque celles-ci revêtent une certaine importance pour les communes concernées.
- L'article 73 de la loi de finances rectificative pour 1992 a modifié à nouveau cet article, d'une part, pour les opérations intervenues à compter de 1992 et, d'autre part, pour les opérations réalisées à compter de 1993.
I. Apports, scissions, fusions de sociétés ou cessions d'établissements effectués avant 1992
1. Principe : la valeur locative des immobilisations cédées ne peut être inférieure aux deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'opération.
a. Immobilisations concernées.
13L'article 87 de la loi de finances pour 1992 précise que les dispositions de l'article 1518 B du CGI s'appliquent aux seules immobilisations corporelles directement concernées par les opérations d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements visées à cet article, et pour lesquelles une valeur locative a été retenue au titre de l'année précédant l'opération.
14Cette disposition vise à écarter l'interprétation selon laquelle les dispositions de l'article 1518 B ne permettaient pas de taxer les immobilisations acquises ou créées postérieurement à l'opération tant que la valeur locative de l'ensemble des immobilisations de l'établissement restait inférieure à la « valeur locative plancher ».
15Sont donc seules visées par les dispositions de l'article 1518 B, les immobilisations :
- qui sont directement concernées par les opérations visées à cet article, c'est-à-dire celles qui ont fait l'objet d'un transfert de propriété dans l'acte d'apport, de fusion, de scission ou de cession (cf. ci-dessus, n°s 5 à 10 ) ;
- et dont la valeur locative a été retenue au titre de l'année précédant l'opération ; il faut donc que leur valeur locative ait été imposée à la taxe professionnelle ou à la taxe foncière au titre de l'année précédant l'opération (arrêts du Conseil d'État n° 63-846 du 24 mai 1989 et n° 70-689 du 6 juillet 1990).
16Restent donc en dehors du champ d'application de l'article 1518 B :
- les biens acquis ou construits au cours de l'année de l'opération (année N), de l'année précédente (année N - 1), et de l'antépénultième (année N - 2) en ce qui concerne la taxe professionnelle 3 ;
- les biens en cours d'exonération temporaire au titre de l'année précédant l'opération (année N - 1).
17Mais quand bien même ils n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 1518 B, les biens temporairement exonérés ou non imposés l'année précédant l'opération ont une valeur locative ; celle-ci est déterminée dans les conditions de droit commun.
b. Calcul de la valeur locative.
181° Pour l'application de l'article 1518 B du CGI, il convient donc de comparer :
- d'une part, les 2/3 de la valeur locative pour laquelle les immobilisations ayant fait l'objet de l'une des opérations mentionnées à cet article ont été imposées l'année précédente ;
- et, d'autre part, la valeur locative de ces mêmes biens telle qu'elle résulte, après l'opération, de l'application des règles de droit commun.
19Selon le Conseil d'État (cf. arrêt n° 62-543 du 26 avril 1989), cette comparaison doit être faite globalement, c'est-à-dire en retenant le total des valeurs locatives des immobilisations faisant l'objet de l'opération, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre, d'une part, les biens passibles d'une taxe foncière et, d'autre part, les équipements et biens mobiliers.
Cette jurisprudence infirme la doctrine administrative antérieure selon laquelle la comparaison devait être opérée par catégorie d'immobilisations. Cette doctrine est donc rapportée pour l'application des dispositions de l'article 1518 B aux opérations d'apports, de fusions, de scissions d'entreprises ou de cessions d'établissements intervenues avant le 1er janvier 1992.
202° Les immobilisations concernées par les opérations d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements sont imposées sur la plus élevée des deux valeurs locatives définies au 1° ci dessus.
21Sous réserve de l'application, le cas échéant, (immobilisations passibles d'une taxe foncière) des coefficients de majoration forfaitaire annuels prévus à l'article 1518 bis (cf. ci-après n°s 48 et 49 ), les immobilisations évaluées dans les conditions prévues à l'article 1518 B restent imposées sur la valeur locative qui leur a été ainsi attribuée tant qu'elles figurent à l'actif de l'entreprise.
22Lorsque ces immobilisations font l'objet de modifications susceptibles d'augmenter leur valeur locative (ex : additions de construction), le supplément de valeur locative à leur attribuer doit être calculé selon les règles de droit commun et s'ajoute à l'évaluation résultant de l'application de l'article 1518 B.
23Elles font l'objet d'une démolition, d'une suppression ou d'une cession partielle, la valeur locative résultant de l'article 1518 B doit être réduite en proportion de la diminution de leur prix de revient comptable.
2. Exception : la valeur locative des immobilisations cédées ne peut être inférieure à 85 % de la valeur locative retenue l'année précédant l'opération pour certaines opérations intervenues du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1991.
a. Opérations concernées.
24La « valeur locative plancher » fixée à l'article 1518 B du CGI est portée à 85 % de la valeur locative retenue l'année précédant l'opération (au lieu des 2/3) lorsque :
- les opérations d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements sont intervenues durant la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1991 ;
- et que ces opérations ont porté sur des établissements dont les bases d'imposition à la taxe professionnelle représentaient l'année précédant l'opération, plus de 20 % des bases de taxe professionnelle imposées au profit de la commune d'implantation.
25Pour le calcul de ce pourcentage :
1° les bases de taxe professionnelle à prendre en considération s'entendent non seulement des valeurs locatives mais aussi des autres éléments entrant dans la composition des bases de taxe professionnelle de l'établissement (fraction des salaires).
2° lorsque dans une même commune, plusieurs établissements sont concernés par l'opération d'apport, de scission, de fusion de sociétés ou par l'opération de cession, c'est la totalité des bases d'imposition de ces établissements qui doit être prise en compte, même si ces établissements ne sont pas repris par le même acquéreur. Dans ce cas, le seuil de 85 % s'applique à chacun des acquéreurs.
3° les bases de taxe professionnelle imposées au profit de la commune ne comprennent pas les bases écrêtées au profit du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle.
4° il y a lieu de procéder au calcul commune par commune ; une entreprise qui reprend plusieurs établissements peut donc avoir des établissements dont les bases seront fixées, selon le cas, à 85 % ou à 66,66 % des bases de l'année précédant l'opération.
26Dès lors que les bases d'imposition de taxe professionnelle d'un établissement concerné par une opération d'apport, de scission, de fusion de sociétés ou par une opération de cession représentent plus de 20 % des bases de taxe professionnelle imposées, l'année précédant l'opération, au profit de la commune, la valeur locative des immobilisations de l'établissement ne peut, en matière de taxe foncière sur les propriétés bâties comme en matière de taxe professionnelle, être inférieure à 85 % de celle retenue l'année précédant l'opération.
1 Y compris les outillages et installations visés au 11e de l'article 1382 du CGI.
2 Les dispositions de l'article 1518 B ne sont cependant pas applicables lorsque l'opération s'accompagne d'un transfert de ces éléments dans une autre commune.
3 Lorsque l'opération réalisée l'année N porte sur un établissement créé l'année N - 2, seuls les biens acquis l'année de l'opération et l'année précédente restent en dehors du champ d'application de l'article 1518 B.