Date de début de publication du BOI : 15/05/2000
Identifiant juridique : 5E121
Références du document :  5E12
5E121

CHAPITRE 2 PERSONNES IMPOSABLES


CHAPITRE 2

PERSONNES IMPOSABLES


Les bénéfices de l'exploitation agricole sont imposables au nom de l'exploitant. Il en résulte que ces profits ne sont soumis à l'impôt sur le revenu que dans l'hypothèse où l'exploitant est une personne physique, un groupement, une association ou une société non passible de l'impôt sur les sociétés et n'ayant pas opté pour cet impôt.

Au contraire, lorsque l'exploitant est une société assujettie à l'impôt sur les sociétés, les bénéfices de l'exploitation agricole sont soumis à l'impôt sur les sociétés.

Le présent chapitre ne vise donc que les exploitations passibles de l'impôt sur le revenu.

Deux sections sont consacrées respectivement :

- aux exploitations individuelles ;

- aux exploitations qui revêtent une forme sociale.


SECTION 1

Exploitant individuel


1Ainsi qu'il a été indiqué DB 5 E 10 , seul le contribuable qui met en valeur des biens ruraux peut être imposé dans la catégorie des bénéfices agricoles (CGI, art. 63 ).

Par suite, le propriétaire qui donne ses terres à bail, sans les exploiter lui-même et se borne ainsi à faire acte de gestion de son capital immobilier, est passible de l'impôt sur le revenu dans les conditions précisées DB 5 E 112, n° 3 .

2Il va de soi également que l'exploitation ou l'utilisation du sol en vue d'une destination autre que la production agricole ne peut donner lieu à l'application de l'impôt au titre des bénéfices agricoles. Tel est le cas de l'exploitation des carrières, ardoisières, sablières, tourbières, ou de l'utilisation de terrains affectés à un usage industriel ou commercial

À cet égard, il est rappelé cependant que les sommes perçues par les exploitants agricoles, telles que les produits du droit d'exploitation de carrières, les redevances tréfoncières ou autres redevances analogues ayant leur origine dans le droit de propriété ou d'usufruit, constituent des revenus accessoires à comprendre selon le cas dans les bénéfices agricoles de l'exploitation ou dans les revenus fonciers (cf. DB 5 E 112, n°s 4 et suiv. ).

3La mise en valeur de biens ruraux peut revêtir différentes formes. Quatre modes d'exploitation doivent être distingués :

- le faire-valoir direct par le propriétaire (propriétaire exploitant) ;

- le fermage ;

- le métayage (ou bail à portion de fruits) ;

- « l'exploitation familiale » avec les enfants majeurs.

D'autre part des règles particulières sont prévues en cas de changement d'exploitant ou de décès de l'exploitant.


  A. PROPRIÉTAIRE EXPLOITANT


4Le contribuable qui exploite lui-même les biens ruraux dont il est propriétaire est imposable à l'impôt sur le revenu -sous réserve du principe de l'imposition par foyer (cf. DB 5 B 12 )- à raison des profits que lui procure cette exploitation.

5Le terme de propriétaire exploitant ne doit pas être interprété restrictivement. C'est ainsi qu'un contribuable qui ne participe pas effectivement aux travaux agricoles en raison de son âge, a néanmoins la qualité d'exploitant agricole dès lors qu'il conserve la direction de l'exploitation des parcelles dont il est propriétaire et qu'il reste, de ce fait, titulaire de l'exploitation (CE, arrêt du 6 février 1963, req. n° 55986).

De même un propriétaire qui fait exploiter ses biens ruraux par des gardiens ayant la qualité de salariés -et non de fermiers ou de métayers- doit être regardé comme exploitant personnellement sa propriété et par suite doit être soumis à l'impôt sur le revenu à raison des profits tirés de cette exploitation, quand bien même il aurait abandonné le produit de l'exploitation à ses gardiens à titre d'avantage en nature (CE, arrêt du 13 juillet 1954, req. n° 20704, RO, p. 123 ; cf. dans le même sens, CE, arrêt du 6 avril 1998, req. n° 161481, 9° et 8° s.-s.).

6Par ailleurs, il n'est pas nécessaire, pour que l'impôt soit exigible, que l'exploitation agricole constitue l'activité principale du redevable. C'est ainsi qu'un contribuable, qui cultive des terres peu importantes et exerce à titre principal une profession salariée, est passible de l'impôt au titre des bénéfices agricoles, dès lors qu'il tire un revenu régulier de la vente des produits agricoles qu'il récolte en sus des légumes et des fruits réservés à sa consommation familiale (CE, arrêt du 22 mars 1952, req. n° 12208, RO, p. 41).


  B. FERMIER


7Le bail à ferme est un contrat par lequel une des parties, le bailleur, transmet à l'autre, le fermier, la libre jouissance d'un fonds et de ses accessoires, pour que le fermier en assure l'exploitation agricole à son profit et fournisse en retour au bailleur, en numéraire ou en produits, des prestations déterminées.

En sa qualité d'exploitant, c'est donc le fermier qui est imposable dans la catégorie des bénéfices agricoles à raison des revenus que lui procure cette exploitation. Le fermage reçu par le bailleur est imposé dans les conditions exposées DB 5 E 112, n° 3 .

À cet égard, il est fait observer que de nombreux exploitants agricoles présentent la double qualité de propriétaire et de fermier. Dans ce cas, il va de soi que, pour la détermination du bénéfice forfaitaire, il n'est tenu compte que de la « rente du sol » afférente aux propriétés appartenant à l'exploitant, à l'exclusion de toutes les parcelles prises à ferme (cf. DB 5 E 112, n° 2 ).


  C. MÉTAYER


8L'article L. 417-1 du code rural définit le bail à colonat partiaire ou métayage comme le contrat par lequel le possesseur d'un domaine rural le remet pour un certain temps à un preneur qui s'engage à le cultiver, sous la condition d'en partager les produits avec le bailleur.

À la différence du bailleur à ferme, le bailleur à colonat partiaire, ou « à portion de fruits », ne reçoit donc pas du preneur un fermage indépendant de la production mais une rémunération en nature représentée par une fraction des produits du domaine. Le bailleur participe, par ailleurs, aux dépenses d'exploitation.

Il s'ensuit que le propriétaire qui donne en location ses biens ruraux en vertu d'un tel contrat présente au même titre que le métayer, la qualité d'exploitant agricole, et que les profits réalisés tant par le bailleur que par le métayer, entrent dans la catégorie des bénéfices agricoles.

Il résulte de ces principes que la simple modification du mode de faire valoir d'une exploitation (exploitant en faire valoir direct louant son exploitation par bail à métayage ou inversement bailleur à métayage reprenant l'exploitation de ses biens en faire valoir direct) n'emporte ni cessation d'activité, ni modification de la structure du bilan. Le fait que le mode d'imposition d'une exploitation en métayage soit similaire à celui d'une exploitation par une société de personnes relevant de l'article 8 du CGI est sans incidence à cet égard, le bailleur à métayage conservant à la fois la propriété de son exploitation et la qualité d'exploitant.

9Aux termes de l'article 77, 1er alinéa, du CGI, le bailleur et le métayer sont personnellement imposés pour la part de revenu imposable revenant à chacun d'eux proportionnellement à leur participation dans les bénéfices ou dans les produits, suivant décision de la commission départementale qui, en tout état de cause, se conforme aux usages locaux.

À cet égard, il convient d'observer que la répartition du bénéfice forfaitaire entre bailleur et métayer peut être faite suivant une proportion différente de celle prévue par la.commission susvisée.

Dans la pratique, en effet, cette répartition doit être faite en fonction de la participation réelle de chacun des intéressés dans les produits de l'exploitation et non pas, nécessairement, sur la base du rapport fixé par le statut du métayage (CE, arrêt du 20 mars 1954, req. n° 17 650, RO, p. 32).

Aux termes du 2e alinéa de l'article 78 du CGI, la déclaration que le propriétaire est tenu de souscrire à chaque renouvellement ou modification de bail doit, lorsqu'il s'agit d'un contrat à portion de. fruits, indiquer la part proportionnelle de chacune des parties et comporter l'accord écrit du preneur.

Le service des impôts doit donc, pour la détermination des bases d'imposition du bailleur et du métayer, appliquer les proportions résultant des contrats qui lui sont présentés si ces proportions diffèrent de celles généralement constatées, sous réserve toutefois d'un accord écrit du bailleur et du métayer sur la répartition des bases respectives d'imposition.

Sur cette question, voir également DB 5 E 3134 .

10Bien entendu, les revenus accessoires (cf. DB 5 E 112, n°s 4 et suiv. ) éventuellement perçus dans le cadre de l'exploitation agricole doivent, selon le cas, soit être déclarés au titre des revenus fonciers, soit être ajoutés aux bénéfices agricoles du bailleur et du métayer, chacun pour leur part respective dans les produits des redevances dont il s'agit.

11Lorsque le même propriétaire donne en métayage plusieurs exploitations, les diverses parts de revenus qu'il en tire sont ajoutées, le cas échéant, aux bénéfices agricoles provenant des propriétés qu'il exploite directement.

Il en va de même pour le métayer, lorsque celui-ci exploite plusieurs domaines.

12Sur la fixation du bénéfice forfaitaire en cas de métayage, cf. DB 5 E 3134 .


  D. EXPLOITANT TRAVAILLANT AVEC SES ENFANTS MAJEURS


13Lorsqu'un contribuable exploite des biens ruraux avec ses enfants majeurs, la question de savoir s'il y a lieu d'imposer les bénéfices agricoles réalisés au seul nom de l'exploitant ou, au contraire, de considérer les enfants comme exploitant en association avec celui-ci, doit être résolue en fonction de la distinction ci-après :

* Dans le cas où l'exploitant et ses enfants sont copropriétaires indivis de la propriété exploitée en commun, il y a lieu de considérer que l'on se trouve en présence d'une véritable exploitation en association et de soumettre séparément chacun des intéressés à l'impôt pour la part lui revenant dans les bénéfices de l'exploitation commune ;

* Dans le cas contraire, c'est en principe, l'exploitant -propriétaire, fermierou métayer- qui doit être soumis à l'impôt pour la totalité des bénéfices de l'exploitation, la circonstance que l'intéressé exploiterait avec le concours de ses enfants n'étant pas suffisante, à elle seule, pour caractériser l'existence d'une association.

Il n'en serait autrement que si l'exploitant établissait que ses enfants majeurs, non rémunérés par un salaire, participent effectivement à la gestion et aux risques de l'exploitation.

14La preuve d'une association doit résulter, en fait, d'une convention passée entre l'exploitant et ses enfants établissant, tant la participation à la direction, au contrôle et aux risques de l'exploitation (aux pertes et aux bénéfices), que les apports matériels faits à l'entreprise.

Le Conseil d'État a ainsi jugé que l'existence d'une société de fait entre un contribuable et son fils, pour l'exploitation d'un domaine agricole, ne saurait être reconnue lorsque le père est seul propriétaire de l'exploitation et qu'il n'est établi, ni que le fils ait fait un apport quelconque dans cette exploitation ni que les bénéfices aient été répartis en fin de campagne entre le père et le fils dans une proportion déterminée.

Sur cette question, voir également DB 5 E 122, n°s 24 et suiv. , " Société de fait " .

Associés d'exploitation

15Certains aides familiaux peuvent être dotés du statut d'associé d'exploitation.

Aux termes de l'article L. 321-6 du code rural, l'associé d'exploitation est la personne non salariée âgée de dix-huit ans révolus et de moins de trente-cinq ans qui, descendant, frère, soeur ou allié au même degré du chef d'exploitation agricole ou de son conjoint, a pour activité principale la participation à la mise en valeur de l'exploitation. Quant aux articles L. 321-7 et L. 321-9 du même code, ils prévoient que les associés d'exploitation sont rémunérés par un intéressement aux résultats de l'exploitation, qui prend la forme d'une allocation dont le montant est fixé, pour l'ensemble du territoire, par un accord conclu entre les organisations professionnelles les plus représentatives des exploitants agricoles d'une part, des associés d'exploitation d'autre part, et homologué par arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et du ministre chargé de l'économie et des finances, lorsque les droits et obligations respectifs de l'exploitant et de l'associé d'exploitation ne sont pas régis par la convention type départementale mentionnée à l'article L. 321-7.

Sur le plan fiscal, cet intéressement perçu en application du 2° de l'article L. 321-7 du code rural, est soumis au régime prévu par l'article 83 et le 5 de l'article 158 du CGI (CGI, art. 77 A), c'est-à-dire que la détermination du revenu imposable obéit aux règles propres à la catégorie des traitements et salaires.

Le revenu net est donc constitué par la différence entre le montant brut de l'intéressement effectivement perçu au cours de l'année d'imposition et les frais professionnels. Ces derniers peuvent être pris en compte, soit de manière forfaitaire, soit pour leur montant réel.

Remarque : Lorsque l'associé d'exploitation opte pour la méthode forfaitaire, il est autorisé à pratiquer la déduction de 10 %, avec application du minimum de déduction (cf. DB 5 F 252, n°s 7 et suiv. ). S'il choisit de faire état de ses frais réels, il doit être en mesure de justifier de ceux-ci à l'aide des pièces et documents nécessaires.

Enfin, la rémunération nette est imposable, en application des dispositions du quatrième alinéa de l'article 158-5-a du CGI, à raison de 80 % de son montant déclaré spontanément, depuis l'imposition des revenus de 1993 (cf. DB 5 F 3121 ).

En ce qui concerne la détermination du bénéfice agricole de l'exploitant cf. DB 5 E 311, n° 3 et DB 5 E 3234, n° 10 .

16 Agriculteurs stagiaires : cf. DB 5 E 1112 n° 86 .


  E. CHANGEMENT D'EXPLOITANT OU DÉCÈS DE L'EXPLOITANT


17Dans le cas de changement d'exploitant, le bénéfice de l'exploitation transférée est imposable au nom de l'exploitant qui a levé les récoltes au cours de l'année de l'imposition. Si l'exploitant sortant et l'exploitant entrant ont participé l'un et l'autre aux récoltes, le bénéfice forfaitaire est partagé au prorata de la durée d'exploitation de chacun d'eux au cours de l'année considérée.

Toutefois, ce bénéfice est partagé au prorata de la part des produits revenant respectivement à l'exploitant sortant et à l'exploitant entrant, sur demande expresse et conjointe des intéressés indiquant les conditions exactes dans lesquelles ces produits ont été ou seront répartis.

18Les mêmes dispositions sont applicables dans le cas où le changement résulte du décès de l'exploitant (CGI, art. 77).

19Lorsque l'exploitant sortant et l'exploitant entrant d'un domaine agricole n'ont pas formé la demaride expresse et conjointe prévue à l'article 77 du CGI et tendant à ce que le bénéfice imposable soit réparti entre eux suivant le partage réel des produits de l'exploitation, la circonstance que l'exploitant entrant n'a pas levé la récolte de céréales de l'année envisagée ne s'oppose pas à ce qu'il soit imposé au prorata de la durée pendant laquelle il a exploité le domaine au cours de l'année en cause, alors qu'il a bénéficié durant cette période du croît du cheptel et des produits de basse-cour (CE, arrêt du 25 octobre 1954, req. n° 23222, RO, p. 138).