Date de début de publication du BOI : 30/10/1997
Identifiant juridique : 4C31
Références du document :  4C3
4C31
Annotations :  Lié au BOI 4C-5-09
Lié au BOI 4C-3-02

TITRE 3 LES DÉPENSES SOMPTUAIRES


TITRE 3

LES DÉPENSES SOMPTUAIRES



CHAPITRE 1  

GÉNÉRALITÉS



  A. DÉFINITION DES DÉPENSES SOMPTUAIRES


1L'article 39-4 du CGI exclut expressément des charges déductibles pour l'établissement de l'impôt sur le revenu et de l'impôt sur les sociétés :

- les dépenses et charges de toute nature ayant trait à l'exercice de la chasse ainsi qu'à l'exercice non professionnel de la pêche ;

- les charges -à l'exception de celles ayant un caractère social 1 - résultant de l'achat, de la location ou de toute autre opération faite en vue d'obtenir la disposition de résidences de plaisance ou d'agrément ainsi que de l'entretien de ces résidences.

2Le même article prévoit en outre l'exclusion, sauf justifications de trois autres catégories de charges :

- les dépenses de toute nature résultant de l'achat, de la location ou de toute autre opération faite en vue d'obtenir la disposition de yachts ou de bateaux de plaisance à voile ou à moteur ainsi que de leur entretien ;

- l'amortissement des voitures particulières pour la fraction de leur prix d'acquisition qui dépasse 120 000 F 2  ;

- en cas d'opérations de crédit-bail ou de locations de longue durée, la part du loyer supportée par le locataire et correspondant à l'amortissement pratiqué par le bailleur pour la fraction du prix d'acquisition de voitures particulières excédant 120 000 F 2 .

De même, ne peut être admis dans les charges déductibles, l'amortissement des biens somptuaires autres que les voitures particulières d'un prix supérieur à 120 000 F 2 [cf. article 39 . 4 du CGI].

3Les dépenses énumérées ci-dessus sont exclues des charges déductibles quelle que soit la forme sous laquelle elles sont supportées par l'entreprise : prise en charge directe, allocation forfaitaire, remboursement de frais.

Il a été jugé à cet égard que doivent être réintégrées dans le bénéfice imposable d'une entreprise les sommes que cette dernière a versées à une société au titre d'un contrat de publicité mais qui ont eu essentiellement pour objet de permettre à l'entreprise en cause de disposer de chasses auxquelles étaient invités ses clients (CE, arrêt du 20 juin 1969, req. n° 75235).


  B. ENTREPRISES VISÉES PAR CES DISPOSITIONS


4Le principe de non-déduction des dépenses somptuaires est opposable non seulement à l'ensemble des entreprises relevant de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux mais aussi à toutes les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés tant étrangères que françaises et sans distinguer selon qu'il s'agit de sociétés civiles ou commerciales, d'organismes de droit public ou d'établissements privés à caractère soit lucratif soit désintéressé.


  C. JUSTIFICATIONS AUTORISANT LA DÉDUCTION



  I. Dépenses pour lesquelles des justifications peuvent être admises


5Le 2e alinéa de l'article 39-4 du CGI prévoit expressément que les frais et charges de caractère somptuaire qu'il désigne (fraction de l'amortissement ou du loyer des voitures particulières afférente à la partie du prix d'acquisition excédant 120 000 F, dépenses de toute nature afférentes à la navigation de plaisance) ne sont pas rapportés au bénéfice imposable en cas de justification.

6Bien que le premier alinéa de ce même article ne prévoie pas une disposition identique, il a été admis d'étendre aux autres dépenses qui y sont visées (chasse, pêche, résidences de plaisance ou d'agrément) la faculté ouverte aux entreprises de présenter des justifications permettant d'en autoriser la déduction.

La généralité des dépenses et charges visées par l'article 39-4 est donc susceptible d'échapper à l'interdiction de déduction si les justifications exigées sont produites par les entreprises qui les exposent.


  II. Nature des justifications à produire


7L'expression « sauf justifications » ne saurait être considérée comme autorisant la déduction des frais et charges de caractère somptuaire sous le seul motif que leur engagement serait consenti dans l'intérêt de l'entreprise. La mesure d'exclusion n'aurait en effet aucune portée si cette interprétation était admise puisque la déduction de l'ensemble des dépenses professionnelles est d'une manière générale déjà subordonnée à la condition que ces dépenses soient exposées pour les besoins de l'exploitation. En réalité, il ressort des débats parlementaires (cf. notamment JO déb., Sénat du 7 décembre 1961, p. 2326) que les frais et charges de caractère somptuaire ne peuvent être admis en déduction que s'il est justifié qu'ils sont nécessaires à l'activité de l'entreprise en raison même de son objet.

En pratique, cette justification est considérée comme valablement apportée lorsqu'il peut être démontré que l'entreprise a précisément pour objet -exclusif ou non- la vente, la location ou toute autre forme d'exploitation lucrative des biens ou droits à propos desquels ont été engagées les dépenses qu'il s'agit d'admettre en déduction. On trouvera ci-après, lors de l'étude détaillée de chacune des catégories de dépenses ou charges, des exemples de situations dans lesquelles les justifications présentées peuvent, sauf cas de fraude, être tenues pour probantes.


  III. Mode de présentation des justifications


8Les justifications exigées des entreprises qui prétendent à la déduction des dépenses de caractère somptuaire ne sont soumises à aucune forme particulière.

Il appartient donc aux redevables d'exposer dans une note les motifs qui leur paraissent de nature à emporter la décision qu'ils sollicitent, en fournissant à l'appui tous documents justificatifs utiles. Le service ne manquera pas, en cas de besoin, de les inviter à préciser ou compléter les documents produits.

La loi n'a fixé aucun délai pour la production des justifications. Cependant, il est de l'intérêt.des entreprises de présenter ces dernières à l'appui de leur déclaration de résultats. En agissant ainsi, elles n'encourent, si les justifications présentées ne sont pas reconnues probantes, que le rappel des droits simples correspondant aux rehaussements opérés, à l'exclusion de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du CGI, la production simultanée de la déclaration et des justifications valant « indication expresse » au sens de l'article 1732 du même code à la condition que le montant des dépenses somptuaires soit effectivement mentionné.

Toutefois, les entreprises admises, au titre d'un exercice déterminé, à déduire des bases de l'impôt des dépenses pour lesquelles elles ont produit des justifications reconnues valables peuvent se dispenser de reproduire pour les exercices suivants le détail de ces justifications tant qu'aucun changement n'affecte, soit la nature des dépenses exposées, soit l'objet de leur activité. Il leur suffit pour être réputées avoir fait mention expresse desdites dépenses au sens de l'article 1732 précité d'en indiquer le montant pour chaque exercice en se référant, pour en motiver la déduction, aux justifications initialement fournies.


  IV. Cas particulier des organismes visés à l'article 206-5 du CGI


9Les établissements publics -autres que les établissements scientifiques, d'enseignement et d'assistance- ainsi que les associations et collectivités visés à l'article 206-5 du CGI ne se trouvant soumis à l'impôt sur les sociétés que du chef de leurs revenus immobiliers, de leurs bénéfices agricoles et de certains revenus mobiliers, les dépenses somptuaires qu'ils pourraient éventuellement exposer ne devraient être regardées comme justifiées au sens de l'article 39-4 du code précité que si elles étaient nécessaires à l'acquisition, à la conservation ou à l'amélioration des revenus imposables.

Une telle situation ne semble pas devoir se présenter dans la pratique, remarque étant faite que le problème ne se pose qu'à l'égard des organismes percevant des revenus mobiliers ou agricoles dont le montant net est déterminé en tenant compte des charges réelles et non forfaitairement.

En tout état de cause, il convient d'appliquer strictement les dispositions de l'article 39-4 aux organismes -associations régies par la loi du 1er juillet 1901 notamment- qui, sous le couvert d'un objet apparemment non lucratif, apparaîtraient en fait comme ayant été constituées dans le dessein d'assumer des dépenses somptuaires pour le compte d'entreprises ou de leurs dirigeants.


  D. PLUS-VALUES ET MOINS-VALUES RÉSULTANT DE LA CESSION DES BIENS SOMPTUAIRES

(cf. 4 B 2212, n°s 18 et suiv. et BOI 4 B-2-94)


10Les dispositions de. l'article 39 duodecies du CGI prévoient que les plus-values à court terme résultant de la cession des biens en cause sont majorées et les moins-values à court terme diminuées des amortissements expressément exclus des charges déductibles.

Cette mesure a pour objet d'éviter que l'interdiction légale de déduction des amortissements ne soit systématiquement neutralisée lors de la cession des biens concernés.

Sans remettre en cause ce dispositif, la jurisprudence récente du Conseil d'État a mis en évidence les difficultés que comportait son application en cas de cession de biens somptuaires autres que les véhicules de tourisme.

Par un arrêt du 22 mai 1992, n° 82072, le Conseil d'État a jugé que le correctif prévu à l'article 39 duodecies du code général des impôts n'était pas applicable à la plus-value réalisée à l'occasion de la cession d'une résidence de tourisme ou d'agrément, au motif que les amortissements afférents à ces biens n'étaient pas expressément exclus des charges déductibles. Cette jurisprudence était potentiellement susceptible de s'appliquer à la cession de tous les biens somptuaires autres que les véhicules de tourisme.

11Afin de remédier à ces imprécisions, l'article 35 de la loi de finances rectificative pour 1993, n° 93-1353 du 30 décembre 1993, a complété l'article 39-4 et le 2 a de l'article 39 duodecies du code.

Le paragraphe I de l'article 35 précise la rédaction de l'article 39-4 du code en mentionnant expressément aux premier et cinquième alinéas de cet article que les amortissements des biens somptuaires font partie des charges et dépenses non déductibles.

Dès lors, les plus-values à court terme réalisées lors de la cession de l'ensemble des biens somptuaires sont majorées du montant de l'amortissement afférent à ces biens, qui est exclu des charges déductibles.

Si la cession fait apparaître une moins-value, celle-ci est diminuée du même montant.

12 Entrée en vigueur.

En application du II de l'article 35 de la loi du 30 décembre 1993, les dispositions du I du même article ont un caractère interprétatif 3 .

En conséquence, les impositions établies avant l'entrée en vigueur de cette loi et qui résulteraient de l'application des 2 b et 4 b de l'article 39 duodecies aux plus ou moins-values à court terme provenant de la cession de l'ensemble de biens somptuaires, sont validées.


  E. MESURES DE PUBLICITE INFORMATION DES ACTIONNAIRES ET ASSOCIES


13Indépendamment de la réintégration extra-comptable découlant de l'article 39-4 du CGI, l'article 223 quater du même code prévoit que les sociétés et personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés à l'exception des collectivités sans but lucratif visées à l'article 206-5 dudit code qui, directement ou indirectement, notamment par filiales, possèdent des biens ou droits générateurs de dépenses exclues doivent faire apparaître distinctement en comptabilité lesdites dépenses et charges, quelle que soit la forme sous laquelle elles les supportent.

En outre, ces entreprises doivent soumettre chaque année à l'approbation de l'assemblée générale ordinaire de leurs actionnaires ou associés, le montant global des dépenses et charges dont il s'agit, ainsi que de l'impôt supporté en raison de ces dépenses et charges. Ces dispositions sont applicables aussi bien aux entreprises nationales qu'aux entreprises privées.


  F. CONSÉQUENCES, AU REGARD DE LA TAXATION DES SOMMES DISTRIBUEES, DE LA RÉINTÉGRATION DES DÉPENSES SOMPTUAIRES DANS LES RÉSULTATS DE L'ENTREPRISE

(cf. 4 J 1212, n°s 126 et suiv. )


14L'article 39-4 du CGI exclut des charges déductibles pour l'assiette de l'impôt dû par les entreprises, les dépenses de caractère somptuaire qu'elles aient été supportées directement par celles-ci ou sous forme d'allocations forfaitaires ou de remboursements de frais (cf. ci-dessus n° 3 ).

Conformément à l'article 111 e du CGI, ces dépenses, réalisées par des sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés, sont considérées comme des revenus distribués.

15Toutefois, le premier alinéa de l'article 30 de la loi de finances pour 1988 (loi n° 87-1060 du 30 décembre 1987), supprime cette présomption de distribution en ce qui concerne les amortissements et loyers des voitures particulières non déductibles en application de l'article 39-4.

 

1   Propriété affectée à une colonie de vacances par exemple.

2   Cette limite est applicable aux véhicules dont la première mise en circulation intervient à compter du 1er novembre 1996. Pour les limites antérieurement applicables voir 4 C 351 .

3   Ce texte confirme donc que l'amortissement afférent à l'ensemble des biens somptuaires n'est pas admis en déduction sur le plan fiscal, tant pour le passé que pour l'avenir, au même titre que les autres charges et dépenses afférentes à ces biens (en ce qui concerne les voitures particulières, voir toutefois DB 4 C 351, n° 4 ).