Date de début de publication du BOI : 15/09/1998
Identifiant juridique :

Permalien


B.O.I. N° 170 du 15 SEPTEMBRE 1998


SECTION 2

L'organisme concurrence une entreprise



SOUS-SECTION 1

En cas de gestion désintéressée, le caractère lucratif d'un organisme ne peut être constaté que si celui-ci fait concurrence à des organismes du secteur lucratif.


17.La situation de l'organisme s'apprécie par rapport à des entreprises ou des organismes lucratifs exerçant la même activité, dans le même secteur.

18.L'appréciation de la concurrence ne s'effectue donc pas en fonction de catégories générales d'activités (spectacles, tourisme, activités sportives...) mais à l'intérieur de ces catégories. C'est à un niveau fin que l'identité d'activité doit être appréciée.

19.Ainsi, les activités de tourisme s'adressant aux enfants ne présentent pas un caractère identique à celles qui s'adressent aux étudiants ou aux familles. De même, des compétitions de sports différents ne sont pas des spectacles comparables. Il n'y a pas non plus concurrence entre un organisme qui organise des spectacles de variétés musicaux et un théâtre. Enfin, un organisme, lucratif ou non, dont l'activité consiste en l'enseignement d'une discipline sportive ne fait a priori pas de concurrence à un autre organisme qui se borne à donner en location le matériel nécessaire à l'exercice de ce sport.

En définitive, la question qu'il convient de se poser est de savoir si le public peut indifféremment s'adresser à une structure lucrative ou non lucrative. Cet élément s'apprécie en fonction de la situation géographique de l'organisme.


SOUS-SECTION 2

L'organisme concurrence une entreprise et ses conditions de gestion sont similaires


20.Le fait qu'un organisme à but non lucratif intervienne dans un domaine d'activité où il existe aussi des entreprises commerciales ne conduit pas ipso facto à le soumettre aux impôts commerciaux. Il convient en effet de considérer l'utilité sociale de l'activité, l'affectation des excédents dégagés par l'exploitation, ainsi que les conditions dans lesquelles le service est accessible, enfin les méthodes auxquelles l'organisme a recours pour exercer son activité.

21.Ainsi, pour apprécier si l'organisme exerce son activité dans des conditions similaires à celle d'une entreprise, il faut examiner successivement quatre critères selon la méthode du faisceau d'indices : le « Produit » proposé par l'organisme, le « Public » qui est visé, les « Prix » qui sont pratiqués, enfin les opérations de communication (Publicité) réalisées.

Mais ces critères n'ont pas tous la même importance. L'énumération qui précède les classe en fonction de l'importance décroissante qu'il convient de leur accorder. Par exemple, le critère de publicité ne peut à lui seul permettre de conclure à la lucrativité d'un organisme. A l'inverse, une attention toute particulière doit être attachée aux critères de l'utilité sociale (« Produit » et « Public ») et de l'affectation des excédents.


  A. LE CARACTERE D'UTILITE SOCIALE DE L'ACTIVITE (« PRODUIT » ET « PUBLIC »)



  I. Le « Produit »


22.Est d'utilité sociale l'activité qui tend à satisfaire un besoin qui n'est pas pris en compte par le marché ou qui l'est de façon peu satisfaisante.

Certaines administrations, notamment celles de l'Etat, ont mis en place des procédures de reconnaissance ou d'agrément des organismes sans but lucratif qui, agissant dans leur secteur d'intervention, peuvent contribuer à l'exercice d'une mission d'intérêt général, voire de service public. Dès lors qu'ils prennent en compte la nature du besoin à satisfaire et les conditions dans lesquelles il y est fait face, ces agréments peuvent contribuer à l'appréciation de l'utilité sociale d'un organisme.

Cela étant, les relations avec des organismes publics et les procédures d'agrément visées aux deux alinéas précédents constituent un élément qui n'est ni nécessaire ni suffisant pour établir ce caractère d'utilité sociale.


  II. Le « Public » visé


23.Sont susceptibles d'être d'utilité sociale les actes payants réalisés principalement au profit de personnes justifiant l'octroi d'avantages particuliers au vu de leur situation économique et sociale (chômeurs, personnes handicapées notamment,...).

Ce critère ne doit pas s'entendre des seules situations de détresse physique ou morale. Par exemple, le fait que le public visé nécessite un encadrement important relevant du travail d'assistance sociale dans un village de vacances contribue à l'utilité sociale de l'organisme organisateur.


  B. AFFECTATION DES EXCEDENTS


24. Il est légitime qu'un organisme non lucratif dégage, dans le cadre de son activité, des excédents, reflet d'une gestion saine et prudente. Cependant, l'organisme ne doit pas les accumuler dans le but de les placer. Les excédents réalisés, voire temporairement accumulés, doivent être destinés à faire face à des besoins ultérieurs ou à des projets entrant dans le champ de son objet non lucratif 5 .


  C. LES CONDITIONS DANS LESQUELLES LE SERVICE EST ACCESSIBLE AU PUBLIC CONCERNE (« PRIX »)


25.Il convient d'évaluer si les efforts faits par l'organisme pour faciliter l'accès du public se distinguent de ceux accomplis par les entreprises du secteur lucratif, notamment par un prix nettement inférieur pour des services de nature similaire. Cette condition peut éventuellement être remplie lorsque l'association pratique des tarifs modulés en fonction de la situation des clients.

26.Cette condition de prix est réputée respectée lorsque les tarifs de l'organisme se trouvent homologués par la décision particulière d'une autorité publique 6  ; ceci suppose que l'organisme soit soumis à une tarification qui lui est propre.


  D. LE CARACTERE NON COMMERCIAL DES METHODES UTILISEES (« PUBLICITE »)


27.En principe, le recours à des pratiques commerciales est un indice de lucrativité.

Mais, l'organisme peut, sans que sa non lucrativité soit remise en cause, procéder à des opérations de communication pour faire appel à la générosité publique (exemple : campagne de dons au profit de la lutte contre les maladies génétiques).

Il peut également réaliser une information sur ses prestations sans toutefois que celle-ci s'apparente à de la publicité commerciale destinée à capter un public analogue à celui des entreprises du secteur concurrentiel.

Pour distinguer l'information de la publicité, il convient de regarder si le contenu des messages diffusés et le support utilisé ont été sélectionnés pour tenir compte du public particulier auquel s'adresse l'action non lucrative de l'organisme en cause.

28.Ainsi, une association peut présenter les prestations qu'elle offre dans un catalogue si ce catalogue est diffusé soit par l'association elle-même aux personnes ayant déjà bénéficié de ses prestations ou qui en ont exprimé la demande, soit par l'intermédiaire d'organismes sociaux.

29.En revanche, la vente de ce catalogue en kiosque, la diffusion de messages publicitaires payants (passage de messages dans les journaux, à la radio, location de panneaux publicitaires, etc.) sont des éléments susceptibles de remettre en cause le caractère non commercial de la démarche. Il en serait de même de l'utilisation d'un réseau de commercialisation (agences de voyages, courtiers, participation à des foires ou salons dont les exposants sont principalement des professionnels, etc.).


  E. LE CAS PARTICULIER DES ORGANISMES SANS BUT LUCRATIF DONT L'OBJET MEME CONDUIT A LA REALISATION D'ACTES PAYANTS.


30.Certains organismes ont pour objet d'aider des personnes défavorisées en leur permettant d'exercer une activité professionnelle et en commercialisant sur le marché leurs produits ou leurs prestations. Dans ce cas, l'organisme n'est pas soumis aux impôts commerciaux si les conditions suivantes sont remplies :

- l'organisme a pour objet l'insertion ou la réinsertion économique ou sociale de personnes qui ne pourrait être assurée dans les conditions du marché ;

- l'activité ne peut pas être exercée durablement par une entreprise lucrative 7 en raison des charges particulières 8 rendues nécessaires par la situation de la population employée (adaptations particulières des postes de travail, productivité faible, etc.) ;

- les opérations en principe lucratives sont indissociables de l'activité non lucrative, en contribuant par nature et non pas seulement financièrement à la réalisation de l'objet social de l'organisme.

Bien entendu, l'organisme ne doit pas faire prévaloir la recherche du profit et sa gestion doit rester désintéressée (cf. n os2 et svts).

31.Dans ces conditions, l'organisme bénéficie, pour cette activité, du régime fiscal des organismes non lucratifs (cf. annexe).

32.Peuvent notamment bénéficier de cette mesure les centres d'aides par le travail (CAT) et les ateliers protégés. En effet, la réalisation de la même activité, dans les mêmes conditions, ne pourrait pas être rentable si elle était soumise aux conditions normales du marché en raison des surcoûts occasionnés par l'emploi de personnes handicapées. En l'occurrence, le service rendu n'est pas tant destiné aux clients du CAT ou de l'atelier protégé qu'aux personnes mêmes qui y sont employées.


CHAPITRE DEUXIEME :

L'ORGANISME ENTRETIENT DES RELATIONS PRIVILEGIEES AVEC LES ENTREPRISES


33.Un organisme sans but lucratif peut détenir des titres d'une ou plusieurs sociétés en conservant son caractère non lucratif (cf. chapitre quatrième).

34.En revanche, l'organisme est dans tous les cas soumis à l'impôt sur les sociétés, à la taxe professionnelle et à la taxe sur la valeur ajoutée s'il entretient des relations privilégiées avec les organismes du secteur lucratif qui en retirent un avantage concurrentiel.

35.La jurisprudence du Conseil d'Etat fournit plusieurs exemples.

36.Cette jurisprudence considère qu'une association, même si elle ne poursuit pas la réalisation de bénéfices et ne procure aucun avantage personnel à ses dirigeants, intervient dans un but lucratif dès lors qu'elle a pour objet de fournir des services aux entreprises qui en sont membres dans l'intérêt de leur exploitation [CE - 20 juillet 1990 - « Association pour l'action sociale » - Requête 84846 - CE - 6 novembre 1995 - »Service médical industriel de la Mayenne » - Requête 153024 - « Association patronale des services médicaux du travail » - Requête 153220 et « Centre interservices de santé et de médecine du travail en entreprise » - Requête 147388].

37.Est lucratif un organisme qui permet aux professionnels de réaliser une économie de dépenses, un surcroît de recettes, ou de bénéficier de meilleures conditions de fonctionnement, quand bien même cet organisme ne rechercherait pas de profits pour lui-même.

La jurisprudence a ainsi considéré qu'exerçait une activité lucrative une association constituée entre plusieurs entreprises pour coordonner leurs moyens d'information, d'études et de recherche, l'objet essentiel de cette association étant de permettre à ses membres de réaliser une économie de charges et de leur procurer divers avantages de nature à accroître leurs profits.

Est également lucrative l'activité d'un syndicat professionnel qui organise des journées d'information constituant une forme de publicité collective et prolongeant l'activité économique des adhérents de ce syndicat, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'organisation de ces journées soit encouragée par les pouvoirs publics, que cette activité ne donne pas lieu à perception de cotisations spéciales, et qu'il n'y ait aucune publicité de marque précise, ni aucune prise de commande [CE - « Syndicat des pâtes alimentaires » - 27 novembre 1987 - Requêtes 47042 et 47043 ].

Dans le même esprit, il a été jugé qu'une association de gestion agréée, dont le régime juridique est défini par l'article 64 de la loi de finances pour 1977, qui a pour objet de « développer l'usage de la comptabilité et de faciliter l'accomplissement de leurs obligations administratives et fiscales par les membres des professions libérales » et qui rend à ses adhérents, en contrepartie d'une cotisation annuelle, des services administratifs (tenue de documents comptables, demande de renseignements,...) et fiscaux (souscriptions de déclarations,...), a une activité de nature lucrative et est par suite soumise à la TVA, à l'impôt sur les sociétés et à la taxe professionnelle [CE - « Association de gestion agréée des professionnels de santé » - 20 mai 1987 - requêtes 57562 et 58414 ].

38.A l'inverse, une association qui se contenterait de défendre les intérêts collectifs de ses membres au plan national ou international (par exemple, la défense des principes comptables français dans les instances comptables internationales) est non lucrative.


CHAPITRE TROISIEME :

MESURES D'EXONERATION PROPRES A CHAQUE IMPÔT


39.Un certain nombre de dispositions légales permettent à des organismes réputés sans but lucratif, mais qui ne satisfont pas à certains des critères de non lucrativité exposés au chapitre premier, de bénéficier en tout état de cause d'exonérations de taxe sur la valeur ajoutée (Section 1), d'impôt sur les sociétés (Section 2), d'imposition forfaitaire annuelle (Section 3) ou bien encore de taxe professionnelle (Section 4).


SECTION 1

Taxe sur la valeur ajoutée



SOUS-SECTION 1

Le cas des organismes qui rendent à leurs membres des services sportifs, éducatifs, culturels ou sociaux.


40.Si ces organismes rendent des services à des tiers, il convient d'utiliser les critères exposés au chapitre premier pour apprécier si ces services sont exonérés.

En revanche, ces organismes, si leur gestion est désintéressée, sont exonérés de taxe sur la valeur ajoutée pour les services qu'ils rendent à leurs membres dès lors que les conditions suivantes sont remplies (article 261-7-1°-a) du C.G.I.).


  A. LES SERVICES SONT RENDUS A DE VERITABLES MEMBRES.


41.Sont ainsi considérés comme membres d'un organisme les personnes :

1- qui ont adhéré à l'association, sont personnellement titulaires du droit de participer aux assemblées générales et sont éligibles au conseil d'administration.

En ce qui concerne les mineurs, seule la condition d'adhésion à l'association est exigée. Les droits attachés à la qualité de membre du mineur peuvent être exercés par son représentant légal.

Les ayants droit des membres (conjoints par exemple) constituent des tiers vis-à-vis de l'association dès lors qu'ils n'en sont pas membres à titre personnel.

Les associations doivent établir que les membres sont mis en mesure d'exercer effectivement leurs prérogatives et notamment sont convoqués individuellement aux assemblées générales (pour les membres mineurs, cette exigence peut concerner le représentant légal).

42. Les personnes morales qui adhèrent à une association ne sont pas considérées comme des membres, pour l'application des exonérations fiscales, parce qu'elles ne sont pas les bénéficiaires directes des prestations qui sont, en réalité, rendues à leur personnel. Bien entendu, le personnel employé par ces personnes morales n'étant pas lui même membre de l'association, les prestations qui lui sont rendues ne peuvent pas bénéficier de cette exonération.

En revanche, les associations fédérées par des unions d'associations (ex. : fédération) sont considérées ainsi que leurs membres comme des membres de l'union.

43.2- et qui ont souscrit une adhésion présentant réellement un caractère de permanence.

Cette condition n'est pas remplie dans le cas de personnes qui adhérent à l'association, ou acquittent une cotisation, pour une durée a priori limitée et inférieure à l'année.

Ainsi, les personnes qui « adhérent » ou « cotisent » à l'organisme pour une journée, une semaine, etc., pour pouvoir bénéficier des services offerts par l'organisme, ne constituent pas des membres pour la détermination du régime fiscal applicable. Il en va de même des personnes qui, ne devant bénéficier que de façon occasionnelle des services de l'association, acquittent de ce fait une cotisation minorée.