B.O.I. N° 101 du 5 JUIN 2001
BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS
7 G-4-01
N° 101 du 5 JUIN 2001
7 E. / 16
INSTRUCTION DU 23 MAI 2001
MUTATIONS A TITRE GRATUIT - DONATIONS - DROITS D'ENREGISTREMENT
DIVORCE - PRESTATIONS COMPENSATOIRES ENTRE EPOUX
COMMENTAIRES DES ARTICLES 18 ET 19 DE LA LOI N° 2000-596 DU 30 JUIN 2000
(C.G.I., art. 757 A)
NOR : ECO F 01 10013 J
[Bureau B 2 ]
ECONOMIE GENERALE DE LA MESURE
Le divorce met fin, en principe, au devoir de secours prévu par l'article 212 du code civil, mais l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respective (code civil, art. 270). La loi relative à la prestation compensatoire en matière de divorce (n° 2000-596 du 30 juin 2000, JO du 1er juillet 2000, p. 9946) réaffirme le principe selon lequel la prestation compensatoire doit être versée en capital. Désormais, ce n'est qu'à titre exceptionnel que le juge peut, par décision spécialement motivée, en raison de l'âge ou de l'état de santé du créancier ne lui permettant de subvenir à ses besoins, fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère. Afin de favoriser le règlement rapide des prestations compensatoire sous forme de capital, les dispositions de l'article 757 A du code général des impôts relatives à l'application des droits de mutation à titre gratuit ont fait l'objet d'aménagements par les articles 18 et 19 de la loi précitée. Désormais, seuls les versements en capital entre ex-époux provenant de biens propres de l'un d'eux qui s'échelonnent sur une période au plus égale à douze mois sont soumis aux drois de mutation à titre gratuit en application de l'article 757 A du code général des impôts. Par ailleurs, les prestations compensatoires en capital versées au moyen de biens indivis entre deux époux séparés de biens et acquis pendant la durée du mariage sont soumises au droit de partage au taux de 1 % liquidé conformément aux dispositions de l'article 748 du code précité. Le régime fiscal des prestations compensatoires versées par exception sous forme de rente demeure, pour sa part, inchangé. Celles-ci ne sont pas imposées aux droits de mutation à titre gratuit. La présente instruction précise les conditions d'application de ces dispositions. • |
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A. RAPPEL DES DISPOSITIONS APPLICABLES AUX PRESTATIONS COMPENSATOIRES SERVIES AVANT L'ENTREE EN VIGUEUR DE LA LOI RELATIVE A LA PRESTATION COMPENSATOIRE EN MATIÈRE DE DIVORCE
Il résulte des dispositions des articles 274 et 275 anciens du code civil que la prestation compensatoire entre époux prend la forme d'un capital lorsque la consistance des biens de l'époux débiteur le permet.
A défaut de capital ou si celui-ci n'est pas suffisant, la prestation prend la forme d'une rente (code civil, art 276).
L'attribution ou l'affectation de biens en capital peut être réalisée par :
- le versement d'une somme d'argent ;
- l'abandon de biens en nature, meubles ou immeubles, mais pour l'usufruit seulement ;
- le dépôt de valeurs productives de revenus entre les mains d'un tiers chargé de verser les revenus à l'époux créancier de la prestation compensatoire jusqu'au terme fixé.
L'époux débiteur de la prestation peut constituer ce capital en trois annuités dans le cas où il ne dispose pas de liquidités immédiates.
I. Versements sous forme de rentes
Lorsque, conformément aux dispositions de l'article 276 du code civil, la prestation compensatoire prend la forme d'une rente, il n'y a pas lieu à imposition aux droits de mutation à titre gratuit.
II. Versements sous forme de capital
Pour l'application des dispositions exposées ci-dessous, il convient d'entendre par « versement en capital » le versement d'une somme d'argent ainsi que l'abandon de l'usufruit de biens meubles ou immeubles. En revanche, l'affectation de biens productifs de revenus ne constitue pas un « versement en capital » et ne peut, en aucun cas, donner ouverture aux droits de mutation à titre gratuit.
Ces versements en capital peuvent être constitués en biens de communauté ou en biens propres de l'époux débiteur.
Dans le premier cas, l'opération constitue une opération de partage et le régime fiscal prévu à l'article 748 du code général des impôts est applicable. Seul le droit de 1 % est exigible sur la valeur nette de l'actif partagé sans déduction des soultes ou plus-values. Il en est de même lorsque les biens dépendent d'une société d'acquêts accessoire à un régime de séparation de biens ou à un régime dotal.
Il est également admis que le droit de donation n'est pas exigible lorsque la convention définitive prévoit que la totalité des biens de la communauté est attribuée à un époux moyennant une soulte compensée par une prestation compensatoire d'égal montant.
Au contraire, lorsque le capital provient de biens propres de l'époux débiteur, les droits de mutation à titre gratuit sont dus (CGI, art. 757 A). Il en est ainsi alors même que l'article 280 du Code civil indique que les transferts et abandons prévus pour l'exécution des prestations compensatoires après divorce ne sont pas assimilés à des donations (Cass. Com, arrêt du 6 décembre 1984, X... . RJ, p. 51).
Pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit, il est alors fait application des exonérations existant en faveur de certains biens, de l'abattement de 500 000 F prévu entre conjoints et du tarif des droits entre époux et, le cas échéant, des réductions de droits prévues à l'article 790 du code général des impôts.
Par ailleurs, dès lors que l'article 1536 du code civil prévoit que les biens détenus en indivision par des époux séparés de biens constituent des biens personnels à chacun d'eux, le versement d'une prestation compensatoire par la remise de parts d'un immeuble indivis entre époux séparés de biens ou par compensation avec une soulte normalement due à l'occasion d'un partage de biens indivis entre ces ex-époux constitue, pour l'époux qui s'y oblige, un versement en capital provenant de biens propres au sens de l'article 757 A du code général des impôts. Ce versement est en conséquence soumis aux droits de mutation à titre gratuit (RM à M. DEJOIE, sénateur, J.O. débats Sénat du 22 décembre 1994, p. 3022).
B. AMÉNAGEMENTS DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 757 A RÉSULTANT DE LA LOI N° 2000-596 DU 30 JUIN 2000 RELATIVE À LA PRESTATION COMPENSATOIRE EN MATIÈRE DE DIVORCE
Les dispositions des articles 18 et 19 de la loi relative à la prestation compensatoire en matière de divorce déjà citée modifient le régime fiscal applicable aux prestations compensatoires versées sous forme de capital.
I. La définition du nouveau champ d'application des droits de mutation à titre gratuit
A titre liminaire, il est précisé que les versements en capital constitués en biens de communauté demeurent, comme par le passé, assujettis au seul droit de 1 % prévu à l'article 748 du code général des impôts.
Le II de l'article 18 déjà cité modifie les dispositions de l'article 757 A du code général des impôts.
Ces dispositions ainsi modifiées prévoient que les versements en capital entre ex-époux qui ne sont pas soumis aux dispositions de l'article 80 quater du code général des impôts prises en matière d'impôt sur le revenu sont assujettis aux droits de mutation à titre gratuit lorsqu'ils proviennent de biens propres de l'un d'eux.
Les dispositions de l'article 80 quater du code général des impôts visent les versements de sommes d'argent effectués sur une période supérieure à douze mois à compter de la date à laquelle le jugement de divorce est passé en force de chose jugée. Une instruction publiée au bulletin officiel des impôts dans la série 5 FP a commenté ces dispositions.
Par suite, sont imposables aux droits de mutations à titre gratuit les prestations compensatoires en capital provenant de biens propres du conjoint débiteur et qui prennent la forme :
- soit d'un seul versement de somme d'argent ou de plusieurs versements échelonnés de sommes d'argent sur une durée au plus égale à douze mois ;
- soit d'un abandon de biens.
Bien entendu, les modalités de liquidation des droits de mutation à titre gratuit ne sont pas modifiées (cf. A 11).
En revanche, les prestations compensatoires en capital réalisées au moyen de versements échelonnés d'une somme d'argent sur une période de plus de douze mois ne rendent pas exigibles les droits de mutation à titre gratuit.
Décompte de la durée de douze mois.
a) Point de départ du délai
Le délai de douze mois court à compter de la date à laquelle la décision judiciaire est passée en force de chose jugée.
Cette date est déterminée de manière différente selon qu'il s'agit d'un divorce par consentement mutuel ou d'un divorce à la demande d'une partie (divorce pour faute, divorce pour rupture de la vie commune ou divorce demandé par une partie et accepté par l'autre).
* divorce par consentement mutuel
Les époux ont la faculté de former un pourvoi en cassation contre les décisions du juge aux affaires familiales qui homologue les conventions définitives entre époux ou qui prononcent le divorce dans un délai de quinze jours à compter de leur prononcé. Ce pourvoi est suspensif, de sorte que la décision ne passe en force de chose jugée qu'à compter :
- soit de l'expiration du délai de quinze jours à compter du jour de la décision, en l'absence de pourvoi ;
- soit, en cas de pourvoi, à la date de signification à partie de l'arrêt de rejet de la cour de cassation ou, en cas de cassation, à la date de signification à partie de l'arrêt de renvoi.
* divorce à la demande d'une partie
La date à laquelle la décision judiciaire prononçant le divorce prend force de chose jugée est :
• lorsque la décision a été prononcée par un jugement du tribunal de grande instance :
- à la date d'acquiescement au jugement ;
- à la date d'expiration du délai d'appel (1 mois à compter de la signification du jugement à partie) à défaut d'acquiescement et en l'absence d'appel ;
- à la date du désistement, en cas d'appel puis de désistement.
• lorsque la décision résulte d'un arrêt d'appel :
- à la date d'acquiescement à l'arrêt d'appel ;
- à la date d'expiration du délai de pourvoi (2 mois à compter de la signification de l'arrêt à partie) à défaut d'acquiescement et de pourvoi en cassation.
• lorsqu'un pourvoi en cassation est formé : à la date de signification à partie de l'arrêt de rejet ou, en cas de cassation, à la date de la signification à partie de l'arrêt de renvoi.
b) Point d'arrivée du délai
Le décompte du délai de douze mois s'effectue de date à date. Il expire par suite la veille du jour du mois de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée.
Exemple : Dans le cadre d'une procédure de divorce par consentement mutuel, le juge aux affaires familiales prononce la décision qui homologue la convention des époux le 10 juillet 2000. Le délai de pourvoi en cassation est de quinze jours à compter de cette date. En l'absence de recours devant cette juridiction, la convention entre époux est passée en force de chose jugée à compter du 26 juillet 2000.
Le délai de douze mois débute le 26 juillet 2000 et s'achève le 25 juillet 2001.
II. L'application du régime des biens de communauté aux prestations compensatoires versées au moyen de biens indivis acquis pendant le mariage par deux époux séparés de biens
Il est rappelé que les partages de biens acquis conjointement par des époux séparés de biens pendant la durée du mariage, et effectués en application des dispositions de l'article 1542 du Code civil, bénéficient des dispositions de l'article 748 du code général des impôts 1 . Seul le droit de 1 % est, dans cette hypothèse, exigible sur la valeur nette de l'actif partagé sans déduction des soultes ou plus-values.
L'article 19 de la loi relative à la prestation compensatoire en matière de divorce précité complète les dispositions de l'article 757 A du code général des impôts en précisant que les prestations compensatoires en capital versées au moyen de biens indivis entre deux époux séparés de biens et acquis pendant la durée du mariage sont soumises au droit de partage au taux de 1 % liquidé conformément aux dispositions de l'article 748 du code général des impôts.
En revanche, les versements en capital effectués au moyen de biens indivis entre les époux séparés de biens, acquis antérieurement à leur union, demeurent assujettis aux droits de mutation à titre gratuit dans les conditions de droit commun prévues à l'article 757 A du code général des impôts.
C. ENTRÉE EN VIGUEUR
Les dispositions commentées ci-dessus s'appliquent aux jugements de divorce prononcés à compter de l'entrée en vigueur de la loi.
Elles s'appliquent également aux instances en cours qui n'ont pas donné lieu à une décision passée en force de chose jugée à la date d'entrée en vigueur de la loi.
Annoter : documentation de base 7 G 311 n° 17 et suivants.
Le Directeur de la législation fiscale
Hervé LE FLOC'H-LOUBOUTIN
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ANNEXE
1 Voir en ce sens la documentation de base 7 F 1321
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