Date de début de publication du BOI : 22/11/2007
Identifiant juridique :

B.O.I. N° 121 du 22 NOVEMBRE 2007


  II. Incidences fiscales


20.Afin de mettre en concordance les règles civiles et fiscales, le nouvel article 788 bis prévoit expressément que les biens recueillis par un héritier ou un légataire suite à l'exercice du cantonnement prévu à l'article 1002-1 ou au second alinéa de l'article 1094-1 du code civil sont réputés transmis à titre gratuit par le défunt. Ils ne sont donc pas considérés comme une libéralité faite aux autres successibles par celui qui décide de cantonner son émolument.

21.En matière de droits de mutation à titre gratuit, il en résulte qu'en cas de cantonnement de l'émolument du légataire ou du conjoint survivant, ce dernier n'est imposé que sur la part qu'il prend effectivement dans son legs. En conséquence, l'époux ou le légataire exerçant le cantonnement est taxé aux droits de mutation à titre gratuit, au tarif qui lui est personnellement applicable, uniquement sur les biens qu'il recueille effectivement.

22.S'agissant des successibles qui bénéficient du cantonnement, les droits sont liquidés sur leur part successorale (qui comprend les biens reçus suite à l'exercice du cantonnement) selon le tarif et les abattements applicables en fonction de leur lien de parenté avec le défunt pour l'ensemble des biens qu'ils reçoivent.


  D. LA RENONCIATION A SUCCESSION



  I. Dispositif civil


23.La loi du 23 juin 2006 précitée introduit en droit successoral la possibilité pour un héritier de renoncer à une succession et de se faire représenter par ses descendants. Cette loi modifie l'article 754 du code civil afin de permettre la représentation des renonçants dans les successions dévolues en ligne directe ou collatérale, alors qu'auparavant seule la représentation du prédécédé ou de l'indigne était autorisée.

En effet, avant la réforme du 23 juin 2006, si un héritier renonçait purement et simplement à une succession, la part à laquelle il renonçait augmentait la masse à partager entre les autres cohéritiers, s'il en existait. A défaut, elle profitait aux héritiers du degré ou de l'ordre subséquent. Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 23 juin 2006 précitée et sous réserve du rapport des libéralités auquel le renonçant peut être expressément astreint par le disposant, la part du renonçant échoit à ses représentants ; à défaut, elle accroît à ses cohéritiers ; s'il est seul, elle est dévolue au degré subséquent.

24.En conséquence, à compter du 1 er janvier 2007, la représentation de l'héritier renonçant est possible mais uniquement dans les successions dévolues en ligne directe ou collatérale. Il en résulte que les petits-enfants pourront, du fait de la renonciation de leur auteur direct, hériter directement de leur grand-père ou grand-mère. De même, les neveux du défunt peuvent représenter leur père ou leur mère renonçant dans la succession de leur oncle.


  II. Incidences fiscales


25.L'article 785 disposait que les héritiers, donataires ou légataires acceptants étaient tenus, pour les biens leur advenant par l'effet d'une renonciation à une succession, à un legs ou à une donation, d'acquitter, au titre des droits de mutation par décès, une somme qui, nonobstant tous abattements, réductions ou exemptions, ne pouvait être inférieure à celle que le renonçant aurait payée, s'il avait accepté.

26.L'article 52 de la loi du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006 ayant abrogé l'article 785, il en résulte que dans l'hypothèse visée à l'article 754 du code civil dans laquelle un héritier renonce à une succession, les droits dus par les héritiers acceptants, c'est-à-dire les descendants du renonçant, sont calculés comme si ces derniers avaient été les bénéficiaires directs de la succession. En conséquence, il n'y a donc plus lieu, dans cette situation, de procéder à une double liquidation des droits.

27.L'article 51 de la loi de finances rectificative pour 2006 a par ailleurs modifié l'article 779 afin que les représentants d'un renonçant, en ligne directe ou collatérale, puissent bénéficier de l'abattement personnel de ce dernier. En conséquence, à compter du 1 er janvier 2007, les représentants d'un renonçant se partagent l'abattement personnel dont aurait dû bénéficier ce dernier. Cette règle de liquidation est donc identique à celle applicable en cas de représentation d'un parent prédécédé.

28.En outre, s'agissant de la représentation en ligne directe, il est précisé que l'abattement global de 50 000 euros applicable sur l'actif net successoral, prévu par l'article 775 ter , bénéficie aux représentants du 1 renonçant.

29.Ainsi, en ligne directe, les enfants du renonçant se partagent l'abattement personnel de 50 000 euros prévu par l'article 779 2 , ainsi que la part de l'abattement global à laquelle le renonçant aurait pu prétendre.

30.En ligne collatérale, les représentants du renonçant se partagent l'abattement personnel du renonçant de 5 000 euros 3 . A cet égard, il est précisé que dans l'hypothèse ou le partage de l'abattement du renonçant entre ses représentants aboutit à ce que chacun d'eux dispose d'un abattement inférieur à 1 500 euros, il y a lieu d'appliquer sur la part de chacun l'abattement de 1 500 euros visé au IV de l'article 788.

31.Toutefois, pour la liquidation des droits, le barème applicable est celui résultant du degré de parenté entre le défunt et la personne bénéficiaire de la renonciation, qui reçoit les biens, et non celui applicable entre le défunt et le renonçant (cf. exemple n° 1 en annexe 3).

Précisions

32.Il est rappelé que le régime des renonciations translatives, c'est-à-dire celles consenties au profit d'une personne déterminée qui l'accepte, n'est pas modifié. Elles restent donc considérées comme opérant une double mutation taxable aux droits de mutation à titre gratuit.

En effet, la renonciation faite au profit d'une personne déterminée qui l'accepte opère un transfert de propriété entre le renonçant et le bénéficiaire de la renonciation. Elle suppose donc de la part de l'héritier l'acceptation de la succession dont il dispose ensuite. En conséquence, les droits de mutation par décès sont dus par le renonçant sur sa part successorale et le bénéficiaire de la renonciation doit acquitter les droits exigibles sur la donation qui lui est faite. Toutefois, les droits de donation ne sont exigibles que si l'accroissement de la part du bénéficiaire de la renonciation résulte de la seule volonté du renonçant. En outre, lorsqu'elle ne modifie pas, en fait, les règles de la dévolution légale, la renonciation en faveur d'une personne déterminée est assimilée à une renonciation pure et simple.


  E. AMENAGEMENTS DES PRESOMPTIONS DE PROPRIETE


Les articles 751 et 752 édictent des présomptions de propriété destinées à lutter contre les abus visant à diminuer artificiellement l'assiette des droits de successions.

33.L'article 751 dispose notamment qu'est « réputé, au point de vue fiscal, faire partie, jusqu'à preuve contraire, de la succession de l'usufruitier, toute valeur mobilière, tout bien meuble ou immeuble appartenant, pour l'usufruit, au défunt et, pour la nue-propriété, à l'un de ses présomptifs héritiers ou descendants d'eux, même exclu par testament ou à ses donataires ou légataires institués, même par testament postérieur, ou à des personnes interposées, à moins qu'il y ait eu donation régulière et que cette donation, si elle n'est pas constatée dans un contrat de mariage, ait été consentie plus de trois mois avant le décès ».

34.De même, l'article 752 prévoit que « sont présumées, jusqu'à preuve contraire, faire partie de la succession, pour la liquidation et le paiement des droits de mutation par décès, les actions, obligations, parts de fondateur ou bénéficiaires, parts sociales et toutes autres créances dont le défunt a eu la propriété ou a perçu les revenus ou à raison desquelles il a effectué une opération quelconque moins d'un an avant son décès ».

35.Les articles 46 et 47 de la loi de finances rectificative pour 2006 ont modifié ces dispositions.

36.Ainsi, l'article 751 a été complété pour préciser que la présomption qu'il pose ne s'applique pas en cas de démembrement de propriété effectué à titre gratuit, plus de trois mois avant le décès, constaté par acte authentique et pour lequel la valeur de la nue-propriété a été déterminée selon le barème prévu à l'article 669.

37.S'agissant de l'article 752, un troisième alinéa a été inséré pour préciser que la présomption de propriété qu'il pose ne s'applique pas aux biens ayant fait l'objet d'une libéralité graduelle ou résiduelle, telle que visée aux articles 1048 à 1061 du code civil.

38.Ces aménagements des dispositifs relatifs aux présomptions de propriété ont notamment pour objet d'éviter l'application de ces dispositions aux nouveaux modes de transmission institués par la loi du 23 juin 2006 précitée comme les libéralités graduelles et résiduelles. Ainsi, par exemple, ces aménagements permettent aux héritiers des premiers gratifiés de ne pas avoir à apporter la preuve qu'un bien donné par donation résiduelle n'appartenait pas au défunt, bien que ce dernier ait pu percevoir des fruits ou effectuer des opérations sur ce bien. A cet égard, il est rappelé que les biens faisant l'objet d'une libéralité graduelle ou résiduelle ne font pas partie sur le plan civil de la succession du grevé ou premier bénéficiaire, sauf renonciation ou prédécès du second gratifié, à moins que l'acte prévoit expressément que ses héritiers pourront la recueillir ou désigne un autre second gratifié (article 1051 et 1056 du code civil).


  F. LE MANDAT A EFFET POSTHUME



  I. Dispositif civil


39.La loi du 23 juin 2006 a instauré, à compter du 1 er janvier 2007, le mandat à effet posthume permettant à toute personne de désigner de son vivant, sous certaines conditions, un ou plusieurs mandataires, personnes physiques ou morales, qui seront chargés après son décès d'administrer tout ou partie du patrimoine successoral pour le compte et dans l'intérêt d'un ou plusieurs héritiers identifiés (art. 812 du code civil). Le mandataire peut être un héritier.

40.L'article 812-1-1 du code civil précise que ce mandat n'est valable que s'il est justifié par un intérêt sérieux et légitime au regard de la personne de l'héritier ou du patrimoine successoral, cet intérêt devant être précisément motivé. Les conditions de validité du mandat, qu'il s'agisse de l'intérêt sérieux et légitime ou de la capacité du mandataire, doivent persister pendant toute la durée d'exécution du mandat.

41.Ce mandat est donné pour une durée qui ne peut excéder deux ans, prorogeable une ou plusieurs fois par décision du juge, saisi par un héritier ou par le mandataire. Toutefois, il peut être donné pour une durée de cinq ans, prorogeable dans les mêmes conditions, en raison de l'inaptitude, de l'âge du ou des héritiers, ou de la nécessité de gérer des biens professionnels.

42.Ce mandat doit être donné et accepté en la forme authentique. En outre, il doit être accepté par le mandataire avant le décès du mandant.

43.Le mandataire a le pouvoir d'effectuer les actes conservatoires et les actes d'administration sur les biens de la succession. Mais les actes réalisés par le mandataire sont sans effet sur l'option héréditaire. Les pouvoirs du mandataire s'exercent sous réserve des pouvoirs confiés à l'exécuteur testamentaire.

44.Enfin, l'article 812-2 du code civil précise qu'en principe le mandat est gratuit sauf si une rémunération a été prévue par convention. En effet, « s'il est prévu une rémunération, celle-ci doit être expressément déterminée dans le mandat. Elle correspond à une part des fruits et revenus perçus par l'hérédité et résultant de la gestion ou de l'administration du mandataire. En cas d'insuffisance ou d'absence de fruits et revenus, elle peut être complétée par un capital ou prendre la forme d'un capital ». Selon l'article 812-3 du code civil, la rémunération du mandataire est une charge de la succession qui ouvre droit à réduction lorsqu'elle a pour effet de priver les héritiers de tout ou partie de leur réserve. Les héritiers visés par le mandat ou leurs représentants peuvent demander en justice la révision de la rémunération lorsqu'ils justifient de la nature excessive de celle-ci au regard de la durée ou de la charge résultant du mandat.

45.Le mandat prend fin par l'un des événements suivants :

- l'arrivée du terme prévu ;

- la renonciation du mandataire ;

- la révocation judiciaire, à la demande d'un héritier intéressé ou de son représentant, en cas d'absence ou de disparition de l'intérêt sérieux et légitime ou de mauvaise exécution par le mandataire de sa mission ;

- la conclusion d'un mandat conventionnel entre les héritiers et le mandataire titulaire du mandat à effet posthume ;

- l'aliénation par les héritiers des biens mentionnés dans le mandat ;

- le décès ou la mise sous mesure de protection du mandataire personne physique, ou la dissolution du mandataire personne morale ;

- le décès de l'héritier intéressé ou, en cas de mesure de protection, la décision du juge des tutelles de mettre fin au mandat.


  II. Incidences fiscales


46.La rémunération du mandataire étant une charge de la succession en application des dispositions de l'article 812-3 du code civil, celle-ci n'est pas constitutive d'un passif répondant aux critères de déductibilité des dettes fixés par l'article 768. Par conséquent, la déductibilité de cette rémunération au passif successoral ne peut être admise.

47.La présentation du mandat à effet posthume à la formalité de l'enregistrement donne lieu à la perception du droit fixe de 125 € prévu à l'article 680.