Date de début de publication du BOI : 20/10/1999
Identifiant juridique : 3A211
Références du document :  3A2
3A21
3A211

TITRE 2 TERRITORIALITÉ


TITRE 2

TERRITORIALITÉ



GÉNÉRALITÉS


1De par son caractère territorial, l'impôt soumet à ses prescriptions toutes les personnes physiques et morales et tous les biens désignés comme imposables qui se trouvent inclus dans les frontières de l'État. C'est l'application d'un principe général du droit français (art. 1 et 3 du code civil).

2Pour tous les impôts, des conventions internationales, qui peuvent modifier la portée de la loi fiscale, l'emportent normalement, en droit français, sur une disposition d'une loi de droit interne dès lors que les stipulations de la loi internationale - qui doivent être explicites - ont été ratifiées par la France.

3La législation française relative à la TVA a dû être mise en conformité avec la sixième directive du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 qui, en vue d'harmoniser la législation des États membres en la matière, a fixé les règles de détermination d'une assiette uniforme de la TVA. Cette adaptation a été réalisée par les articles 24 à 49 de la loi n° 78-1240 du 29 décembre 1978 (loi de finances rectificative pour 1978) qui est entrée en vigueur au 1er janvier 1979.

La directive n° 91/680/CEE du 16 décembre 1991 a modifié la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, et a fixé de nouvelles règles permettant la suppression de tout contrôle et de toute formalité à finalité fiscale lors du franchissement des frontières intracommunautaires.

Les articles 5 à 12 de la loi n° 92-677 du 17 juillet 1992 publiée au Journal officiel du 19 juillet 1992 (pages 9700 et suivantes) ont pour objet de transcrire la directive du 16 décembre 1991 en droit français et d'apporter aux dispositions actuelles certaines modifications en matière notamment de territorialité. Cette loi est entrée en vigueur le 1er janvier 1993.

La directive 95/7/CE du Conseil du 10 avril 1995 porte de nouvelles mesures de simplification en matière de TVA. Cette directive a été transcrite en droit français par l'article 19 de la loi de finances rectificative pour 1995 (loi n° 95-1347 du 30 décembre 1995). Elle s'applique, pour l'essentiel, depuis le 1er janvier 1996.

4Les règles de territorialité sont actuellement codifiées sous :

- l'article 256-0 du CGI qui définit, à compter du 1er janvier 1996, le territoire des États membres de la Communauté européenne autres que la France. Il s'agit des États énumérés à l'article 227 du traité instituant la CE, cf. n° 6 ci-après ;

- les articles 258 à 258 B du CGI, qui déterminent le lieu d'imposition, notamment des livraisons de biens meubles corporels ;

- les articles 258 C et D du CGI pour le lieu d'imposition des acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels ;

- les articles 259 à 259 C du CGI, modifiés ou issus de l'article 28 de la même loi, qui fixent le lieu d'imposition des prestations de services.

Désormais, la notion d'importation est réservée aux biens en provenance de pays tiers à la Communauté européenne et de territoires tiers (cf. n° 6 )

5Par ailleurs, afin d'adapter les règles de territorialité des locations de biens meubles corporels autres que des moyens de transport aux dispositions de la dixième directive du Conseil des communautés européennes du 31 juillet 1984, l'article 91-II-1 de la loi de finances pour 1985 (loi n° 84-1208 du 29 décembre 1984) a, à compter du 1er janvier 1985, abrogé les dispositions du a de l'article 259-A-1° du CGI et inclus ces prestations parmi celles de la liste de l'article 259 B du même code.

6Outre la France, les États membres de la Communauté européenne comprennent : l'Allemagne (RFA), la Belgique, le Danemark, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, l'Irlande, l'Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Grèce depuis le 1er janvier 1981, l'Espagne et le Portugal depuis le 1er janvier 1986, l'Autriche, la Finlande et la Suède depuis le 1er janvier 1995.

Toutefois les territoires ci-après sont exclus du champ d'application de la sixième directive modifiée (CGI, art. 256-0 ) et sont donc considérés comme des pays tiers vis-à-vis de la France :

- l'île d'Helgoland et le territoire de Busingen, pour la république fédérale d'Allemagne ;

- Ceuta, Melilla et les îles Canaries, pour le royaume d'Espagne ;

- Livigno, Campione d'Italia et les eaux nationales du lac de Lugano, pour la République italienne ;

- le Mont Athos pour la République hellénique ;

- les îles Aland pour la République de Finlande.

Ces territoires sont considérés comme des pays tiers vis-à-vis de la France. Il en est de même des îles anglo-normandes.

L'île de Man est considérée comme faisant partie du territoire du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'lrlande du Nord.

Remarques :

1. Adhésion du Portugal aux communautés européennes.

7Le Portugal, qui a été autorisé à différer l'application du système commun de la TVA devait être, jusqu'au 31 décembre 1988, considéré comme un pays tiers à la CE 1 .

À compter du 1er janvier 1989, les règles de territorialité des services (CGI, art. 259 à 259 C ) qui sont applicables sont celles qui régissent les opérations réalisées avec les pays membres. Pour les opérations en cours au 1er janvier 1989 et par mesure de simplification, seuls les encaissements réalisés à compter de cette date sont affectés par la nouvelle situation.

2. Inclusion dans le territoire de la République fédérale d'Allemagne des cinq laender issus de l'ancienne République démocratique allemande.

8Depuis le 3 octobre 1990, date de l'inclusion dans le territoire de la République fédérale d'Allemagne, des laender de l'ancienne République démocratique allemande, ces territoires font partie intégrante de la Communauté européenne.

Les règles de territorialité des services (CGI, art. 259 à 259 C ) qui sont applicables sont celles qui régissent les opérations effectuées avec les pays membres. Pour les opérations en cours au 3 octobre 1990 et par mesure de simplification, seuls les encaissements réalisés à compter de cette date sont affectés par la nouvelle situation.

Les services des agences de voyages qui se rapportent à des voyages se déroulant dans les territoires de l'ancienne RDA sont exonérés ou soumis à la TVA selon que les prestations sont totalement exécutées au 3 octobre 1990 ou commandées et exécutées après cette date.

La TVA est également exigible pour les prestations commandées avant le 3 octobre 1990 et en cours d'exécution à cette date ou exécutées à partir de cette date. Toutefois, les encaissements effectués avant le 3 octobre 1990 ont pu bénéficier de l'exonération de l'article 262 bis du CGI.

3. Adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède à l'Union européenne.

9La sixième directive 77/388/CEE modifiée du 17 mai 1977 est applicable, depuis le 1er janvier 1995, sur le territoire des trois nouveaux États membres (Autriche, Finlande, Suède).

Les dispositions applicables aux opérations réalisées avec des personnes physiques ou morales domiciliées, établies ou identifiées dans les nouveaux États membres sont identiques à celles en vigueur depuis le 1er janvier 1993 pour les opérations réalisées avec des personnes physiques ou morales domiciliées, établies ou identifiées dans les onze autres États membres de la Communauté européenne.

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Le présent titre est consacré :

- aux règles générales de la territorialité (chap. 1) ;

- aux transports internationaux (chap. 2) ;

- aux entreprises étrangères (chap. 3) ;

- aux opérations triangulaires intracommunautaires portant sur des biens meubles corporels (chap. 4).


CHAPITRE PREMIER

RÈGLES GÉNÉRALES DE LA TERRITORIALITÉ


Dans le présent chapitre sont successivement définis :

- la notion de territoire français, c'est-à-dire le lieu où s'applique la législation relative à la TVA (sect. 1) ;

- le lieu d'imposition des livraisons de biens meubles corporels (sect. 2) ;

- le lieu d'imposition des acquisitions intracommunautaires (sect. 3) ;

- le lieu d'imposition des prestations de services (sect. 4).

Au préalable, il est précisé que le lieu de signature des contrats, celui où est effectué le paiement, la nature de la monnaie utilisée pour le règlement, la nationalité des personnes qui réalisent les opérations n'ont aucune influence sur l'exigibilité de la TVA.

En particulier, les conventions passées avec les divers États étrangers dans le but d'éviter une double imposition des revenus ne sauraient être utilement invoquées en la matière.


SECTION 1

Territoire français
Définition du territoire sur lequel s'applique la TVA


Le territoire sur lequel s'applique la TVA comprend :

1- la France continentale (y compris les zones franches du pays de Gex et de Savoie) ainsi que les îles du littoral ;

2- la Corse ;

3- la principauté de Monaco où la législation française est introduite par ordonnances princières, sous réserve des adaptations nécessaires ;

4- les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion (la TVA n'est pas actuellement applicable dans le département de la Guyane). Mais pour l'application de la TVA les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion, d'une part, et la France métropolitaine, d'autre part, sont considérés respectivement comme territoires d'exportation. Il en est de même pour chacun de ces trois départements par rapport aux deux autres (CGI, art. 294-2 dans sa rédaction applicable jusqu'au 31 décembre 1992)  ;

5 À compter du 1er janvier 1993, les départements de la Guadeloupe et de la Martinique ne sont plus considérés comme territoires d'exportation l'un par rapport à l'autre. Les départements de la Guyane et de la Réunion demeurent des territoires d'exportation par rapport aux départements de la Guadeloupe et de la Martinique (art. 294-2 du CGI, issu de l'article 12-1 de la loi 92-676 du 17 juillet 1992, relatif à l'octroi de mer).

6 À compter du 1er janvier 1996, la rédaction de l'article 294-2 du CGI a été modifiée par l'article 19-XVII-1° de la loi de finances rectificative pour 1995 (loi 95-1347 du 30 décembre 1995). Désormais, pour l'application de la TVA, est considérée comme exportation d'un bien  :

1° l'expédition ou le transport d'un bien hors de France métropolitaine à destination des départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique ou de la Réunion ;

2° l'expédition ou le transport d'un bien hors des départements de la Guadeloupe ou de la Martinique à destination de la France métropolitaine, d'un autre État membre de la Communauté européenne, des départements de la Guyane ou de la Réunion ;

3° l'expédition ou le transport d'un bien hors du département de la Réunion à destination de la France métropolitaine, d'un autre État membre de la Communauté européenne, des départements de la Guadeloupe, de la Guyane ou de la Martinique.

Pour l'application de la TVA, est considérée comme importation d'un bien  :

1° l'entrée en France métropolitaine d'un bien originaire ou en provenance des départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique ou de la Réunion ;

2° l'entrée dans les départements de la Guadeloupe ou de la Martinique d'un bien originaire ou en provenance de la France métropolitaine, d'un autre État membre de la Communauté européenne, des départements de la Guyane ou de la Réunion ;

3° l'entrée dans le département de la Réunion d'un bien originaire ou en provenance de la France métropolitaine, d'un autre État membre de la Communauté européenne, des départements de la Guadeloupe, de la Guyane ou de la Martinique.

7- les eaux territoriales qui s'étendent jusqu'à une limite fixée à 12 milles marins à partir des lignes de base. Les lignes de base sont la laisse de basse-mer ainsi que les lignes de base droites et les lignes de fermeture des baies qui sont déterminées par décret. La souveraineté de l'État français s'étend à l'espace aérien ainsi qu'au lit et au sous-sol de la mer dans la limite des eaux territoriales ;

8- le plateau continental sur lequel la République française exerce un droit de souveraineté conformément à la Convention de Genève du 29 avril 1958 (cf. ci-après).

Travaux d'exploration du plateau continental et d'exploitation de ses ressources naturelles

Textes applicables.

9La France a adhéré le 14 juin 1965 à la Convention internationale sur le plateau continental du 29 avril 1958, publiée par le décret n° 65-1049 du 29 novembre 1965 (JO du 4 décembre 1965, p. 10859).

Les conditions d'exploration du plateau continental français et d'exploitation de ses ressources naturelles ont été déterminées par la loi n° 68-1181 du 30 décembre 1968 (JO du 31 décembre 1968, p. 12404 à 12407) dont les conditions d'application ont été fixées par le décret n° 71-360 du 6 mai 1971 (JO du 15 mai 1971, p 4692 à 4695), codifié sous l'article 242 A de l'annexe II au CGI, qui précise par ailleurs les modalités du régime suspensif dont peuvent bénéficier les entreprises intéressées.

Définition de la notion de plateau continental.

10Aux termes de l'article premier de la Convention internationale sur le plateau continental en date du 29 avril 1958, l'expression « plateau continental » désigne le lit de la mer et le sous-sol des régions sous-marines adjacentes aux côtes (y compris celles des îles), mais situées en dehors de la mer territoriale, jusqu'à une profondeur de 200 mètres, ou, au-delà de cette limite, jusqu'au point où la profondeur des eaux surjacentes permet l'exploitation des ressources naturelles desdites régions.

L'État riverain exerce sur le plateau continental des droits souverains aux fins de l'exploration de celui-ci et de l'exploitation de ses ressources naturelles (art. 2). Mais ces droits ne portent pas atteinte au régime des eaux surjacentes, en tant que haute mer, ni à celui de l'espace aérien situé au-dessus de ces eaux (art. 3).

Par ailleurs, les installations et dispositifs nécessaires pour l'exploration du plateau continental et l'exploitation de ses ressources naturelles, tout en étant soumis à la juridiction de l'État riverain, n'ont pas de mer territoriale qui leur soit propre (art. 5-4 de la Convention).

Imposition à la TVA des opérations réalisées sur le plateau continental.

11Aux termes de l'article 5 de la loi sur le plateau continental, les lois et règlements français s'appliquent aux installations et dispositifs utilisés pour l'exercice d'une activité sur le plateau continental comme s'ils se trouvaient en territoire français métropolitain.

Selon l'article 6, la recherche, l'exploitation et le transport par canalisations de l'ensemble des substances minérales ou fossiles contenues dans les sous-sol du plateau continental ou existant à sa surface, sont soumis au régime applicable sur le territoire métropolitain aux gisements appartenant à la catégorie des mines.

12L'article 15 de la loi précise, par ailleurs, que les produits extraits du plateau continental doivent, pour l'application de la législation fiscale, être considérés comme extraits du territoire français métropolitain. Il en résulte que les opérations entrant dans le champ d'application de la TVA au sens de l'article 256-I du CGI et qui sont réalisées dans les limites du plateau continental sont passibles de la TVA dans les conditions de droit commun.

Tel est le cas pour :

- les ventes réalisées aux conditions de livraison de la marchandise sur le plateau continental ;

- les services dont le lieu d'imposition au sens des articles 259 à 259 C du CGI y est situé. En ce qui concerne l'acquisition en franchise des produits, matériels et services nécessaires à l'exécution des travaux d'exploration et d'exploitation du plateau continental, cf. DB 3 D 225 .

Opérations réalisées avec les diplomates étrangers et les organismes internationaux

13Si les agents diplomatiques des puissances étrangères bénéficient de certaines immunités, au nombre desquelles figure notamment l'inviolabilité de l'hôtel de l'ambassade, ces immunités ne sauraient avoir, ni pour objet, ni pour effet de faire regarder les locaux des ambassades, mêmes appartenant aux puissances étrangères, comme ne faisant plus partie intégrante du territoire français. D'où il suit qu'un entrepreneur n'est pas fondé à soutenir que les travaux exécutés par lui, en vertu d'une convention passée avec un gouvernement étranger, pour la construction en France de l'hôtel de son ambassade, constituent, au regard de la loi fiscale, une affaire réalisée hors de France et échappant, à ce titre, à la taxe sur le chiffre d'affaires (CE, arrêt du 22 juillet 1942, n° 60485, Société anonyme Hegeman, Harris et Cie, TJ 6040).

Les ventes faites aux consuls et ambassadeurs étrangers sont également passibles de la TVA dés lors que la livraison des marchandises est faite en France.

Des exceptions ont cependant été consenties à ce principe en faveur de certaines ventes : automobiles, articles de bijouterie (cf. DB 3 A 3311, n°s 5 et 37 ).

Par ailleurs, une remise de la taxe peut être consentie lorsqu'une ambassade ou un consulat effectue des achats importants d'équipement mobilier ou se fait rendre des services pour ses besoins administratifs et diplomatiques officiels. Les fournisseurs n'ont pas à intervenir dans la mise en oeuvre de cette mesure de faveur ; en effet la remise intervient sous forme de remboursement. La demande de remboursement doit être présentée par les chefs de missions diplomatiques et par l'intermédiaire du protocole à la Direction des Services Généraux et de l'Informatique, 92 Bd Ney, 75878 Paris cedex 18

Les mêmes facilités sont accordées aux organismes internationaux (organisations internationales ou unions intergouvernementales) pour lesquels une clause de franchise est expressément prévue dans un accord international ou bilatéral dont le gouvernement français est signataire (instr. n° 132 du 28 décembre 1964).

 

1   Toutefois, il est rappelé que depuis le 1er janvier 1988, les assujettis établis au Portugal bénéficient du remboursement prévu par les articles 242 OM à 242 OT de l'annexe II au CGI dans les mêmes conditions que les assujettis communautaires