SOUS-SECTION 1 IMPOSITION OBLIGATOIRE À LA TVA EN RAISON DE L'IMPORTANCE DU CHIFFRE D'AFFAIRES RÉALISÉ
2. Notion d'exploitation.
a. Principe.
23Il convient de totaliser les recettes réalisées par l'exploitant, dans le cadre d'une ou de plusieurs exploitations relevant d'une même entité juridique.
À cet égard, il n'y a pas lieu de distinguer selon :
- la situation géographique des exploitations ;
- la nature des cultures ou de l'élevage pratiqués.
Dans le cas d'une exploitation familiale, compte tenu de l'étroite communauté d'intérêt qui unit l'exploitant et les membres de sa famille, il convient de considérer, d'une manière générale, qu'on se trouve en présence d'une exploitation unique.
Il doit donc être fait masse, en principe, des recettes de toutes les exploitations gérées par des conjoints pour l'appréciation de la limite de 300 000 F et ce, quel que soit le régime matrimonial.
Ce n'est que dans le cas, à vrai dire exceptionnel, où le conjoint de l'exploitant gérerait de manière autonome un domaine dont tous les éléments d'actif lui appartiennent en propre qu'il pourrait être admis que cette propriété constitue une exploitation distincte du chef de famille.
Enfin, lorsqu'un exploitant exerce des activités agricoles concurremment sous le couvert d'une société ou groupement agricole régulièrement, constitué 1 et en tant qu'exploitant individuel, il existe, au regard de la TVA, deux exploitations juridiquement distinctes et les critères d'assujettissement obligatoire doivent être appréciés pour chacune de ces exploitations.
b. Cas particuliers.
1° Métayage, cf. ci dessous n°s 50 et suiv .
2° Groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC), cf. ci-dessous n°s 59 et suiv .
3. Notion d'encaissement.
24Pour l'appréciation de la limite de 300 000 F, les recettes à retenir s'entendent de toutes les sommes encaissées au cours de l'année civile augmentées de la valeur des produits prélevés dans l'exploitation et alloués, soit à des tiers en rémunération d'une prestation de services ou d'une livraison de biens, soit au personnel à titre d'avantages en nature sous réserve de la mesure de tempérament prévue ci-avant au n° 15 .
Une recette est considérée comme encaissée à la date où le bénéficiaire en a la libre disposition.
25Il en est ainsi :
- lorsqu'elle donne lieu à un paiement effectif :
- en espèces ou par chèques : au moment de la remise des espèces ou du chèque ;
- par virement bancaire ou postal : au moment de l'inscription au crédit du compte bancaire ou postal du bénéficiaire (en pratique la date de l'opération mentionnée sur l'extrait de compte bancaire ou postal) ;
- par effet de commerce (traite, billet à ordre) : à la date de l'échéance ;
- lorsqu'elle résulte de l'extinction d'une dette de l'exploitant :
- lorsqu'un fermier paye ses loyers en nature, ou qu'un exploitant règle en nature des dépenses professionnelles ou personnelles ou des salaires à son personnel : au moment de la remise de denrées au bailleur, aux fournisseurs ou au personnel considérés. Il est souligné à cet égard que la valeur des produits remis par un fermier à son bailleur en paiement du fermage est une recette à prendre en considération chez le fermier pour l'appréciation de la limite de 300 000 F ;
- pour les opérations d'échange qui ne donnent lieu qu'au règlement du solde de l'opération (exemple : échanges céréales, aliments du bétail), à la date de la réception par l'exploitant du décompte décrivant le règlement financier de l'opération.
26Enfin, s'agissant du montant des encaissements à retenir, il doit être fait application des règles suivantes :
a. Les recettes doivent être retenues pour leur montant réel.
Il ne doit pas être tenu compte des règles particulières prévues pour le calcul du remboursement forfaitaire :
• bases minimales ou forfaitaires pour les ventes de vins donnant lieu à achats taxables ;
• bases forfaitaires prévues pour les animaux dont le prix de cession excède leur valeur normale en poids de viande (CGI, art. 298 quinquies et annexe II, art. 267 bis ).
b. Toutefois les indemnités et subventions ainsi que le produit de la vente des animaux perçus par un éleveur victime d'épizootie (par exemple : éleveur de bovins atteints de leucose bovine enzootique) peuvent n'être retenus qu'à concurrence d'un tiers s'il s'agit d'animaux à cycle long (vaches laitières, taureaux, ovins, caprins et porcins adultes exclusivement) dont l'abattage a été imposé en vertu de la réglementation statutaire.
Cette mesure s'applique, sous les mêmes conditions, aux indemnités d'assurances destinées à compenser une perte d'animaux à cycle long à la suite d'un incendie.
Les recettes retirées de la vente des vaches laitières abattues par les producteurs de lait qui s'engagent définitivement à abandonner la production laitière (cf. ci-dessus n° 13 ) peuvent n'être retenues qu'à concurrence du tiers de leur montant pour les producteurs ayant perçu l'une des primes prévues par le décret n° 84-481 du 21 juin 1984 (cf. DB 3 I 1321, n° 13 ) :
De même, il est aussi admis que les recettes exceptionnelles provenant des ventes de coupes de bois sinistrés à la suite d'un incendie, d'une maladie ou d'une catastrophe naturelle soient retenues pour le tiers de leur montant (cf. n° 71 ci-après).
B. RÉGIME D'IMPOSITION
I. Modalités d'assujettissement
27Les exploitants agricoles dont le montant moyen des recettes de l'ensemble de leurs exploitations, calculé sur deux années civiles consécutives selon les modalités exposées ci-avant, dépasse 300 000 F, sont soumis à la TVA, selon le RSA, à compter du 1er janvier de l'année suivante.
Ils devront donc observer les règles qui sont propres à ce régime d'imposition, telles qu'elles sont fixées par les articles 298 bis , 1693 bis et 1785 D-II et III du CGI.
Ainsi, en début d'assujettissement, il y aura lieu d'appliquer les solutions suivantes :
1. Exigibilité de la taxe.
28Lorsqu'ils n'étaient pas déjà redevables de la TVA au titre de leurs opérations agricoles, les exploitants peuvent bénéficier des solutions particulières prévues pour les optants à la DB 3 I 133 ci-après, en ce qui concerne les encaissements perçus après la date du début de l'imposition à la TVA et se rapportant à des livraisons effectuées antérieurement.
29Ces exploitants sont dispensés d'acquitter la taxe sur les encaissements réalisés au cours des trois premiers mois de l'assujettissement selon le RSA lorsque ces encaissements :
- se rapportent à des ventes faites à des personnes non assujetties au moment du règlement ;
- et que ces ventes ont été conclues, et les livraisons correspondantes effectuées, alors que l'exploitant n'était pas encore redevable de la TVA.
30Cette dispense d'imposition est étendue, sans limitation de temps, à tous les encaissements relatifs à des ventes de boissons dont la livraison a été effectuée avant la date de l'assujettissement.
Il n'y a pas lieu de tenir compte de ces encaissements exonérés pour la détermination du pourcentage de déduction.
31Les encaissements perçus avant la date de l'assujettissement selon le RSA ne sont pas soumis à la TVA, quelle que soit la date de la livraison des produits à laquelle ils se rapportent.
32Ce régime s'applique aux boissons.
Mais lorsque la vente des boissons n'est pas soumise à la taxe chez le vendeur, la TVA est néanmoins exigible à l'achat dans les conditions et modalités prévues à l'article 257-10° b du CGI.
Il en est ainsi même si l'enlèvement des boissons intervient à une date où le viticulteur est devenu redevable, puisqu'au moment de la conclusion de la transaction, ce viticulteur n'avait pas cette qualité.
33Les dispositions prévues aux n°s 29 et 31 ne s'appliquent pas aux encaissements perçus par des exploitants, déjà assujettis selon le RSA au titre de l'ensemble de leurs opérations agricoles, qui se trouveraient placés dans le champ d'application des dispositions de l'article 298 bis-II-5° du CGI.
Tel est le cas des exploitants :
- ayant exercé une option globale ;
- assujettis obligatoirement selon le RSA en vertu des dispositions des articles 298 bis-II-2° et 3° du CGI (éleveurs importants et agriculteurs ayant une activité de professionnels de la viande) ;
- assujettis réalisant exclusivement des opérations imposées obligatoirement selon le RSA en vertu des dispositions de l'article 298 bis-II-1° (activités qui, par leur nature ou leur importance, sont assimilables à celles exercées par les industriels ou les commerçants).
34Par contre, les dispositions prévues aux n°s 29 et 31 concernent les ventes effectuées par des agriculteurs assujettis partiellement selon le RSA lorsqu'elles se rapportent aux seules opérations agricoles :
- qui n'étaient pas couvertes par une option restreinte ;
- qui n'étaient pas soumises obligatoirement à la taxe en vertu de l'article 298 bis II-1° déjà cité.
2. Calcul des droits à déduction.
35Au regard dû droit à déduction, la situation des exploitants agricoles qui deviennent obligatoirement imposables selon le RSA, diffère selon qu'avant la date de leur assujettissement, ils réalisaient déjà ou non des opérations imposables selon ce régime.
a. Exploitants déjà intégralement soumis de plein droit ou sur option au RSA.
36Rien n'est changé en matière de droits à déduction dans la situation de ces exploitants qui doivent par conséquent continuer d'appliquer les règles propres au régime simplifié de l'agriculture.
b. Exploitants partiellement assujettis selon le RSA.
37Si les exploitants agricoles sont déjà partiellement assujettis à la TVA selon le RSA (cas des agriculteurs ayant exercé une option restreinte ou des exploitants exerçant leur activité en faire-valoir direct -ou en fermage- et en métayage, sans tenir de comptabilité distincte pour le métayage), l'extension du champ d'application de la TVA selon le RSA à l'ensemble de leurs activités agricoles ne doit pas, en principe, les conduire à calculer un crédit de départ sur leurs immobilisations.
38Cette extension n'a d'autre conséquence que :
- d'entraîner une modification des pourcentages de déduction à venir et, donc, des déductions complémentaires en application des dispositions de l'article 215 de l'annexe II au CGI relatives aux biens constituant des immobilisations acquis avant le 1er janvier de l'année de l'assujettissement obligatoire, sous réserve d'une augmentation de ces pourcentages de plus de dix points par rapport au pourcentage initial ;
- de permettre à l'exploitant d'utiliser, au cours de l'année du changement, un pourcentage de déduction déterminé d'après les prévisions d'exploitation (CGI, annexe II, art. 214) ;
- d'autoriser les exploitants agricoles à déduire la TVA grevant les biens en stocks n'ayant pas ouvert droit, en tout ou partie, à déduction puisque ceux-ci sont affectés désormais à la réalisation d'opérations taxées.
39Toutefois, certains agriculteurs peuvent être assujettis au RSA au titre d'un seul secteur de leur activité. Tel est le cas notamment des exploitants qui procèdent à des ventes de produits agricoles, en l'état ou après transformation, lorsqu'elles sont réalisées dans certaines conditions ou lorsque les produits sur lesquels elles portent ont été transformés ou mis en conserve dans des installations ou avec des matériels importants de la nature de ceux qui sont utilisés par des commerçants.
40S'ils deviennent assujettis en vertu des dispositions de l'article 298 bis-II-5°, les exploitants bénéficient du régime applicable aux nouveaux redevables (CGI, ann. Il, art. 226), exposé au n° 41 ci-après, pour les biens en stock et les immobilisations qui n'etaient pas exclusivement affectés au secteur taxé selon le RSA et qui n'avaient pu de ce fait donner lieu à une déduction en application des principes définis à l'article 260 B de l'annexe II au CGI.
Dans cette hypothèse, ils calculent un crédit de départ pour le secteur qui n'était pas taxé selon le RSA et peuvent l'imputer dans les conditions de droit commun sur la taxe due.
c. Exploitants non assujettis selon le RSA.
41Ils se trouvent placés dans la situation des nouveaux redevables de la taxe et appliquent les règles prévues à l'article 226 de l'annexe II au CGI.
En vertu de cet article, ils peuvent, sous réserve des exclusions ou restrictions de droit commun, opérer la déduction de la taxe afférente aux marchandises en stock et de celle qui se rapporte aux immobilisations en cours d'utilisation à cette date, diminuée d'un cinquième ou d'un vingtième 2 par année d'utilisation antérieure, selon qu'il s'agit de biens meubles ou d'immeubles.
Ils doivent être en mesure de justifier de la taxe déductible par la présentation éventuelle au service des impôts de factures régulières d'achat correspondantes.
II. Durée de l'assujettissement selon le RSA
42Aux termes du second paragraphe de l'article 298 bis-II-5° du CGI « lorsque la moyenne des recettes, non comprise la TVA, calculée sur trois années civiles consécutives d'assujettissement, devient inférieure à 300 000 F, les exploitants agricoles peuvent cesser d'être soumis au régime simplifié à compter du 1er janvier suivant, à condition qu'ils le signalent au service des Impôts avant le 1er février et qu'ils n'aient pas bénéficié, au cours de cette période de trois ans, de remboursement de crédit de taxe ».
431° Il résulte de ce texte que l'assujettissement selon le RSA porte obligatoirement sur une première période de trois ans, quel que soit le montant des recettes agricoles réalisées au cours de cette période.
Ainsi un exploitant qui a réalisé au titre des années 1995 et 1996 un montant moyen de recettes supérieur à 300 000 F est assujetti obligatoirement au titre de la période 1997, 1998 et 1999, quel que soit le montant annuel de ses recettes de cette dernière période.
442° L'assujettissement est ensuite obligatoirement reconduit, par période d'un an, lorsque le montant moyen des recettes des trois dernières années d'assujettissement n'est pas inférieur à 300 000 F 3 .
Exemple : Un agriculteur a réalisé au titre des années 1995 et 1996 une moyenne de recettes supérieure à 300 000 F.
Il a ensuite réalisé au titre des années 1997, 1998, 1999 un montant de recettes de 200 000 F, 250 000 F, 450 000 F.
L'assujettissement selon le RSA porte d'abord sur la période du 1 er janvier 1997 au 31 décembre 1999. Il est reconduit obligatoirement pour l'année2000, dans la mesure où la moyenne des recettes des trois années d'assujettissement selon le RSA ressort à 300 000 F.
En2001, il conviendra de déterminer la moyenne des recettes afférentes à la période 1998, 1999, 2000, pour apprécier si l'assujettissement est obligatoirement reconduit pour l'année2001.
453° Dans le cas où la moyenne des recettes de trois années consécutives d'assujettissement selon le RSA devient inférieure à 300 000 F, l'assujettissement est cependant reconduit :
- obligatoirement, si l'exploitant a obtenu, au cours des trois dernières années d'assujettissement, un remboursement de crédit de taxe non imputable. Ainsi un exploitant, assujetti obligatoirement au titre de la période 1997, 1998, 1999 ne peut pas, en tout état de cause, sortir du régime d'assujettissement selon le RSA :
- avant le 1er janvier 2001, s'il a obtenu un remboursement de crédit de taxe non imputable en 1997 ;
- avant le 1er janvier 2002 si ce remboursement a été obtenu en 1998 ;
- avant le 1er janvier 2003 en cas de remboursement en 1999 et ainsi de suite ;
- tacitement, pour une durée d'un an, si l'exploitant s'abstient de signaler au service des Impôts qu'il ne remplit plus les conditions d'assujettissement selon le RSA (conditions de moyenne de recettes et absence de remboursement de crédit).
Ainsi, pour éviter la reconduction tacite du régime d'imposition, l'exploitant doit, par une lettre recommandée adressée avant le 1er février au service réceptionnaire des déclarations de chiffre d'affaires, indiquer qu'il ne remplit plus les conditions d'assujettissement obligatoire selon le RSA et qu'il souhaite ne pas demeurer placé sous ce régime.
1 Sociétés civiles, sociétés en nom collectif, groupement d'intérêt économique... Les sociétés de fait sont assimilées à des groupements agricoles régulièrement constitués, à condition bien entendu que les activités agricoles exercées respectivement à titre individuel et en société de fait relèvent d'exploitations distinctes et indépendantes, au plan économique et financier.
2 D'un dixième jusqu'au 31 décembre 1995 (décret n° 95-1328 du 28 décembre 1995).
3 Pour la détermination du seuil de 300 000 F dans le cas particulier des GAEC, cf. n°s 59 et suiv.