SOUS-SECTION 3 QUALITÉ ET MANDAT
e. Enfants du contribuable.
35Les réclamations présentées sans mandat régulier au nom des contribuables par leurs enfants sont irrecevables
Ainsi, la haute juridiction a estimé irrecevable une réclamation qui n'a pas été signée par le contribuable porté au rôle mais par un tiers qui ne justifie pas d'un mandat, ce tiers fût-il :
- son fils (CE, 20 février 1957, n° 30698) ;
- sa fille (CE, 17 janvier 1962, n° 49546) ; [Voir toutefois, ci-dessus n° 7 ].
f. Entreprises.
* Sociétés anonymes.
36Le directeur général adjoint de société anonyme n'est pas au nombre des personnes qui, par application des dispositions de l'article 117 de la loi du 24 juillet 1966, ont, comme le président, le pouvoir d'engager une réclamation contentieuse au nom de la société (CE, 27 mai 1983, n° 30443).
Le directeur des services administratifs et financiers d'une société anonyme ne peut réclamer que s'il justifie d'un mandat régulier (CE, 11 mai 1977, n° 3134).
Une société mère qui n'a pas été assujettie elle-même à l'imposition contestée, n'a pas qualité pour agir au nom de sa filiale, même si celle-ci entre dans le champ d'application du régime du bénéfice intégré en application de l'article 209 sexies du CGI (CE, arrêts du 26 juillet 1985, n°s 40066 et 40067).
* Sociétés à responsabilité limitée.
37N'ont pas qualité, dans une société à responsabilité limitée, pour réclamer sans mandat au nom de la société :
- un associé, autre que l'associé-gérant (CE, 20 mars 1939, n° 63575 RO, p 149) ;
- un associé titulaire seulement d'une procuration bancaire (CE, 17 avril 1961, n° 47109) ;
- un associé qui s'est démis de ses fonctions de gérant même si, en fait, il a supporté une partie de l'impôt contesté, dès lors qu'aucune poursuite n'a été dirigée contre lui (CE, 19 juin 1957, n° 37788, RO, p. 370) ;
- l'ancien gérant, nonobstant la circonstance qu'il aurait représenté la société devant la Commission départementale des impôts directs et reçu tant les propositions de rehaussement de l'Administration que les avertissements correspondants, même s'il a été invité à les acquitter en qualité de tiers détenteur de deniers affectés au privilège du Trésor et si le paiement lui en incombait en vertu d'une convention intervenue avec la société (CE, 22 octobre 1958, n° 36304, RO, p. 211) ;
- l'ancien gérant d'une société à responsabilité limitée qui s'est transformée en société anonyme alors même que le litige portait sur les bénéfices d'exercices antérieurs à la transformation de la société à responsabilité limitée en société anonyme (CE, 11 décembre 1964, n° 61797, RO, p. 216) ;
- l'ancien gérant d'une société à responsabilité limitée alors même :
. que les impositions litigieuses se rapportent à la période de sa gestion et que certaines d'entre elles ont été mises en recouvrement avant qu'il n'ait abandonné ses fonctions,
. que son nom figurait sur certains des avertissements adressés à la société et qu'il a acquitté les impositions en cause en vertu de conventions passées avec les cessionnaires des parts sociales, sans avoir été personnellement mis en demeure d'acquitter lesdites impositions (CE, 16 octobre 1968, n° 73364, RJCD, p. 212)
* Sociétés de personnes.
38En application de l'article 8 du CGI, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part des bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société 1 .
C'est pourquoi l'associé d'une société de personnes ne peut réclamer sans mandat régulier contre l'imposition établie au nom d'un coassocié à raison de sa part dans les bénéfices sociaux (CE, 19 mars 1971, n° 79624).
De même, dans une société de personnes, si les associés sont recevables à contester, par une requête commune, les cotisations de taxe proportionnelle qui leur sont assignées et qui constituent des dettes sociales, ils ne sont pas admis, par la même demande, à réclamer contre la surtaxe progressive à leur charge, en raison notamment des règles du secret professionnel (CE, 21 décembre 1962, n° 56890).
* Association.
39Est irrecevable, une réclamation présentée sans mandat par le dirigeant d'une association pour le compte d'un adhérent. Cette fin de non-recevoir est d'ordre public et peut être invoquée par l'Administration à tout moment de la procédure (CE, arrêt du 22 décembre 1982, n° 37051).
Le directeur d'une association chargé, de par les statuts, d'assurer, sous la responsabilité du président de cette association, l'administration des affaires courantes, doit justifier d'un mandat régulier dans la mesure où l'introduction d'une réclamation, qui constitue la première phase d'une procédure contentieuse, ne présente pas, comme telle, le caractère d'une affaire courante (CE, 14 février 1983, n° 28477).
* Association en participation.
40La société gérante d'une société en participation existant entre elle-même et une autre société anonyme ne tient pas de sa fonction ou de sa qualité le droit de réclamer contre une imposition mise à la charge personnelle de la société coparticipante à raison de la part de bénéfices lui revenant dans la société en participation (CE, 3 mars 1976, n° 98681, RJ, IV, p. 12).
* Entreprise individuelle.
41Le fils d'un contribuable ne peut être regardé comme ayant le droit de réclamer, sans mandat régulier, au nom de son père dès lors qu'aucun acte n'a précisé l'étendue de ses fonctions, alors même qu'il assure en fait la direction de l'entreprise appartenant à son auteur, signe tous les actes relatifs à l'administration de l'affaire et dispose d'une procuration bancaire (CE, 11 octobre 1965, n° 54772, RO, p. 397).
* Société de fait.
42Il incombe à chaque membre d'une société de fait de contester les impositions établies à son nom.
Par conséquent, un associé d'une société de fait ne peut valablement réclamer contre l'impôt établi au nom d'un coassocié sans justifier d'un mandat régulièrement enregistré.
Ainsi, la haute juridiction administrative a décidé que les membres d'une société de fait ne pouvaient, eu égard à la règle du secret des impôts sur le revenu, contester, par une même requête, leurs cotisations de surtaxe progressive ; ces dernières constituent, contrairement aux cotisations de taxe proportionnelle, non pas des dettes sociales mais des dettes personnelles à chacun des associés. Il s'ensuit que la requête présentée collectivement par les intéressés est irrecevable tant à l'égard de l'associé qui y est nommé le premier que des autres (CE, 7 décembre 1966, n° 54065, RO, p. 297).
De même, une société de fait n'a pas été considérée comme recevable à contester les cotisations d'impôt sur le revenu mises à la charge de ses associés (CE, arrêt du 6 janvier 1986, n° 42779).
* Société absorbante.
43Le gérant d'une société à responsabilité limitée qui a absorbé une société en commandite simple, n'a pas qualité pour présenter sans mandat régulier du liquidateur de la société absorbée, une réclamation au nom de cette dernière : ceci dès lors qu'il n'en a jamais été membre commandité, que ladite société n'était pas encore définitivement liquidée à l'époque de l'introduction de la demande et qu'aucun acte de poursuite n'a été dirigé contre la société absorbante pour le paiement des impositions litigieuses (CE, 25 avril 1955, n° 32097, RO, p. 299).
* Employés salariés ou tiers.
44Le comptable d'une société anonyme ne tient de ses fonctions aucun pouvoir l'habilitant à réclamer au nom de la société sans justifier d'un mandat régulier. Ne saurait tenir lieu d'un tel mandat la procuration, d'ailleurs non enregistrée, que l'intéressé avait reçue pour effectuer les seules opérations bancaires et postales de la société et qui, donnée pour un an seulement sans clause de renouvellement par tacite reconduction, n'était plus valable lors de l'introduction de la réclamation (CE, 10 octobre 1960, n° 46763, RO, p. 154).
L'employé d'une société ayant seulement reçu de celle-ci mission de diriger ses services comptables et de signer les correspondances ou accomplir les formalités courantes à l'égard des Services fiscaux et qui ne justifie ni d'une procuration spéciale dûment enregistrée, ni d'un mandat lui donnant délégation permanente pour réclamer ou ester en justice, n'a pas qualité pour présenter une réclamation (CE, 27 juin 1973, n° 79958, RJ, IV, p. 77).
Un « fondé de pouvoir » qui n'est pas habilité, ni par les statuts, ni par une délibération du Conseil d'administration, à ester en justice pour le compte d'une société, doit justifier d'un mandat régulier (CE, 21 janvier 1976, n° 98709).
Un tiers qui est seulement habilité à utiliser les comptes courants postaux et bancaires d'un syndicat agricole n'a pas qualité pour présenter, sans mandat spécial, une réclamation au nom de ce dernier, même s'il est, en outre, directeur de deux services créés et gérés par le syndicat (CE, 14 octobre 1960, n° 37948, RO, p. 167).
g. Époux.
45Il est rappelé que chaque conjoint a qualité pour réclamer contre les impôts établis personnellement à son nom et afférents aux biens et revenus dont l'administration lui incombe (cf. n° 8 ).
De ce fait, le Conseil d'État a jugé que le mari :
- n'a pas qualité pour réclamer sans mandat contre une imposition établie au nom de sa femme pour une année antérieure au mariage (CE, 7 juillet 1971, n° 73030, RJ, IV, p. 115) ;
- n'est pas fondé à présenter sans mandat régulier une réclamation dirigée contre une imposition en matière de taxes sur le chiffre d'affaires établie au nom de son épouse, dès lors qu'il ne tient pas de sa seule qualité d'époux le droit d'agir au nom de sa femme (CE, 9 novembre 1979, n° 11000, X... Jean-Pierre).
La même jurisprudence s'applique vis-à-vis de la femme (CE, 6 mars 1981, n° 13206, madame X... ).
En matière de taxe sur la valeur ajoutée, une jurisprudence constante du Conseil d'État estime que le conjoint ne tient, ni de ses fonctions, ni de sa qualité, le droit d'agir au nom du redevable lorsqu'il ne dispose pas d'un mandat régulier ou n'a pas été mis en demeure d'acquitter l'imposition litigieuse (par exemple, arrêt du 7 octobre 1987, n° 73166).
Toutefois, l'époux d'une exploitante individuelle mentionné au registre du commerce comme « fondé de pouvoir ayant procuration générale » a été considéré comme habilité à réclamer sans mandat en matière de taxe sur la valeur ajoutée (CE, arrêt du 18 novembre 1987, n° 55414, déjà cité au n° 18 ).
Cela étant, le principe énoncé par la décision du 18 novembre 1987 trouve son fondement dans l'existence d'une procuration générale, enregistrée au registre du commerce, qui habilite son possesseur à introduire une réclamation et à ester en justice pour le compte du redevable légal.
Dès lors, lorsque l'époux signataire présente une réclamation concernant des impositions dont son conjoint est seul redevable et qu'il n'a pas justifié de sa qualité pour agir, le service doit, avant même d'instruire la demande, l'inviter à produire :
- soit, une procuration générale l'habilitant à agir sans mandat ;
- soit, la justification qu'il tire de ses fonctions, la qualité pour représenter son époux dans les mêmes conditions ;
- soit, le mandat spécial prévu par l'article R* 197-4 du LPF.
Il est précisé que le mandat que confère la loi n° 82-596 du 10 juillet 1982 au conjoint collaborateur qui est mentionné au registre du commerce ou au répertoire des métiers ne permet d'accomplir au nom du commerçant ou de l'artisan que les actes de gestion courante de l'entreprise et ne s'étend pas aux actes de la procédure contentieuse 2 .
Par suite, à l'instar du conjoint associé ou salarié le conjoint collaborateur ne peut valablement réclamer pour l'exploitant que s'il dispose d'un mandat régulier ou s'il a été expressément mentionné au registre du commerce ou au répertoire des métiers comme ayant procuration générale.
Enfin, en cas de doute sur la recevabilité de la réclamation présentée par le conjoint de l'exploitant, le service conserve la possibilité de demander au redevable de l'impôt de présenter lui-même une réclamation régulière.
h. Huissiers.
46À l'exception du cas prévu par l'article R* 197-4 (3e al.) du LPF (cf. n° 3 ), un huissier ne peut, en règle générale, réclamer contre des impositions établies au nom d'un tiers que s'il est muni d'un mandat, même dans l'hypothèse où la réclamation est introduite sous forme d'exploit.
En ce sens, (CE, arrêt du 8 février 1967, n° 62740, RJ, 2ème partie, p. 40 ; CE, arrêt du 10 février 1967, n° 67308, RJ, 2ème partie, p 44)
i. Notaires.
47Dans le cas où ils établissent ou déposent une déclaration de succession, les notaires n'agissent pas en tant qu'officiers ministériels (cf. n° 3 ) mais en qualité de simples représentants des héritiers, donataires ou légataires, débiteurs de droit en vertu de l'article 1709 du CGI. Ils ne sont pas alors habilités à formuler sans mandat une réclamation en matière de droits de mutation par décès.
Dès lors, lorsque les ayants droit entendent les charger :
- de contester devant le Tribunal de grande instance une décision de l'Administration ne les satisfaisant pas,
- d'assigner directement l'Administration à défaut de décision notifiée par le directeur dans le délai de six mois à compter du dépôt de la réclamation, les notaires doivent être munis d'un mandat régulier.
1 Sauf si ces sociétés ont opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux.
2 La loi n° 82-596 du 10 juillet 1982 relative aux conjoints d'artisans et de commerçants travaillant dans l'entreprise familiale n'entraîne pas, a priori, de modifications en la matière. Le conjoint salarié et le conjoint associé se trouvent dans la même situation qu'un autre salarié ou un autre associé de l'entreprise familiale. Ils doivent donc posséder soit un mandat spécial, soit une procuration générale pour agir en justice, ou encore avoir été habilités par le Conseil d'administration. À cet égard, d'ailleurs, si la société ne comprend que les deux époux, celui qui a qualité pour agir ne peut pas se faire représenter par l'autre. Le conjoint collaborateur, « lorsqu'il est mentionné au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers ou au registre des entreprises tenu par les chambres de métiers d'Alsace et de la Moselle est reputé avoir reçu du chef d'entreprise le mandat d'accomplir au nom de ce dernier les actes d'administration concernant les besoins de l'entreprise ». Il ne s'agit là que des actes habituels liés à la gestion de l'entreprise, ce qui n'est pas le cas de la présentation et de la défense d'une réclamation qui constitue la première phase d'une procédure contentieuse. Le conjoint collaborateur doit donc justifier d'un mandat spécial ou d'une procuration générale pour agir en justice.