Date de début de publication du BOI : 30/04/1996
Identifiant juridique : 13O1511
Références du document :  13O151
13O1511
Annotations :  Lié au BOI 13O-1-09

SECTION 1 INTÉRÊTS MORATOIRES AU PROFIT DES CONTRIBUABLES

SECTION 1  

Intérêts moratoires au profit des contribuables

SOUS-SECTION 1

Décisions ouvrant droit au paiement d'intérêts moratoires

Les contribuables sont en droit d'obtenir le paiement d'intérêts moratoires :

- d'une part, sur les remboursements consécutifs à un dégrèvement ;

- et d'autre part, sur les restitutions de consignations ou fractions de consignations à un compte d'attente du Trésor.

  A. REMBOURSEMENTS 1 CONSÉCUTIFS À UN DÉGRÈVEMENT

1Lorsqu'une juridiction ou l'Administration prononce au profit du contribuable un dégrèvement d'impôt entraînant le remboursement de sommes déjà versées au Trésor, les sommes ainsi remboursées sont augmentées des intérêts moratoires, si certaines conditions sont remplies.

  I. Dégrèvements prononcés par une juridiction

2Si le dégrèvement consécutif une condamnation de l'État devant la juridiction compétente (tribunal administratif, tribunal de grande instance, tribunal correctionnel, cour administrative d'appel, Conseil d'État, Cour de Cassation), entraîne un remboursement, il ouvre droit au paiement des intérêts à raison de l'impôt remboursé ayant fait l'objet de la requête.

3Il en est de même lorsque, à défaut de condamnation explicite de l'État, le dégrèvement est prononcé d'office par l'Administration pendant l'instruction des demandes soumises auxdites juridictions.

4Par ailleurs, dès lors qu'ils n'ont pas d'effet suspensif, les recours du ministre devant le Conseil d'État et la cour administrative d'appel (depuis le 1er janvier 1989) contre des jugements prononçant un dégrèvement ne mettent obstacle ni au remboursement éventuel des impôts dégrevés, ni au paiement des intérêts dus à raison de ce remboursement.

Si par suite la Haute Assemblée annule une décision du tribunal administratif et rétablit l'impôt, le contribuable est invité à reverser les intérêts perçus à tort (CE, arrêt du 7 décembre 1964, n° 60757, Ministre des Finances contre société des grands magasins de vêtements Thiery Ainé).

5La même règle s'applique pour l'exécution des décisions des tribunaux de grande instance favorables aux contribuables et contre lesquelles l'Administration s'est pourvue en cassation.

  II. Dégrèvements prononcés par l'Administration

1. Réclamation préalable adressée au service des impôts.

a. Principe.

6Le terme de réclamation préalable doit être entendu dans le sens le plus large.

Par suite, doivent donner lieu au paiement d'intérêts moratoires, non seulement les dégrèvements prononcés à la suite du dépôt d'une réclamation au sens des articles R* 190-1 et suivants du Livre des procédures fiscales (cf. ci-après 13 O 21 ), mais aussi ceux consécutifs à une simple démarche verbale du contribuable (cf. ci-après n° 7 ).

b. Demande présentée verbalement.

7Le décret n° 86-331 du 5 mars 1986 a introduit dans l'article R* 208-1 du Livre des procédures fiscales un alinéa ainsi rédigé :

« Art. R* 208-1. - Les intérêts moratoires prévus à l'article L 208 sont dus lorsqu'un dégrèvement est prononcé à la suite d'une demande présentée verbalement lors d'une visite au service des impôts à la condition que le contribuable ait daté et signé le document établi par ce service pour prendre note de sa réclamation ».

Il résulte de ce texte que, pour l'application des dispositions de l'article L 208 du Livre des procédures fiscales, une demande présentée verbalement lors d'une visite au service est assimilée à une réclamation dès lors qu'elle aura donné lieu à la rédaction d'un document comportant l'indication de l'objet et des motifs de la demande et que ce document aura été daté et signé par le redevable.

Les intérêts moratoires visés à l'article L 208 du Livre des procédures fiscales doivent être calculés sur la totalité des sommes remboursées au contribuable au titre de l'impôt, objet du règlement.

Ils sont payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts.

Ce texte n'apporte pas de modification à l'économie générale des intérêts moratoires et à la pratique administrative.

c. Pétition adressée au service du recouvrement.

8Constitue une réclamation régulière, toute pétition concernant l'assiette d'une imposition directe, adressée au service du recouvrement et transmise par celui-ci au service des impôts, en application des dispositions de l'article R* 190-2 du Livre des procédures fiscales. Dans ce cas, la date d'enregistrement de la réclamation est celle de la réception par le service du recouvrement.

d. Dégrèvements d'office.

9Par contre, le paiement d'intérêts moratoires doit être exclu lorsque les dégrèvements interviennent à la seule initiative du service en application des articles R* 211-1 et R* 211-2 du Livre des procédures fiscales.

Ainsi, une décision de dégrèvement prise d'office en matière de taxe sur la valeur ajoutée et motivée par un jugement prononçant la décharge de l'impôt sur les sociétés n'ouvre pas droit à intérêts moratoires (CE, arrêt du 23 mars 1984, n° 43520).

Il convient toutefois d'assortir d'intérêts moratoires les remboursements faisant suite aux dégrèvements prononcés d'office en reconduction d'une précédente décision de dégrèvement prise sur réclamation ou sur instance du contribuable (même impôt ou impôts établis d'après la même base, même cause, même contribuable ou ayant droit du contribuable).

e. Réclamations irrecevables.

10Le paiement d'intérêts moratoires est exclu à la suite de réclamations entachées de déchéance ou d'un vice de forme les rendant irrecevables (sur la définition du dégrèvement d'office, cf. 13 Q).

En effet, dans cette dernière hypothèse, le contribuable n'aurait pu obtenir satisfaction en cas de litige porté devant la juridiction compétente et la procédure de dégrèvement d'office revêt de toute manière un caractère facultatif pour le service.

2. Réclamation contentieuse.

11Pour ouvrir droit au paiement d'intérêts moratoires, la réclamation qui est à l'origine du dégrèvement accordé doit s'inscrire dans le cadre de la juridiction contentieuse, ce qui exclut nécessairemment les demandes gracieuses fondées sur l'article L 247 du Livre des procédures fiscales.

Dans ces conditions, les dégrèvements consécutifs à la présentation d'une demande tendant à obtenir une mesure de bienveillance portant abandon ou atténuation des impositions ou pénalités (remise, modération, transaction), ne sont assortis d'aucun intérêt moratoire.

3. Réclamation donnant lieu à un dégrèvement.

12Tous les remboursements d'impôts ne donnent pas lieu nécessairement à paiement d'intérêts moratoires et, a fortiori, les remboursements d'acomptes ou de versements provisionnels excédentaires (notamment en matière de TVA, sous le régime du forfait, le régime simplifié d'imposition et le régime simplifié de l'agriculture ; acomptes en matière de droits de succession ; acomptes provisionnels d'impôt sur le revenu, d'impôt sur les sociétés et d'impôts locaux).

Il faut qu'ils soient la conséquence d'un véritable dégrèvement, c'est-à-dire qu'ils correspondent à la décharge totale ou partielle de l'imposition contestée et à la restitution des sommes perçues à ce titre.

La notion de dégrèvement est liée à celle de la réformation - ou de l'annulation - d'une imposition antérieure en principal ou en pénalités, qu'elle ait été établie par l'Administration ou versée spontanément par le contribuable.

4. Réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions.

13Conformément aux dispositions de l'article L 208 (1er al.) du Livre des procédures fiscales, la réclamation doit tendre à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, ce qui exclut l'erreur commise lors du recouvrement.

Cette notion recouvre toutes les réclamations des contribuables qui, pour un motif quelconque, estiment avoir été imposés à tort ou surtaxés ou prétendent avoir effectué des versements indus lorsque ces derniers se rapportent à des impositions n'ayant donné lieu ni à l'établissement d'un rôle, ni à la notification d'un avis de mise en recouvrement.

L'erreur invoquée peut d'ailleurs être imputable aussi bien au contribuable qu'à l'Administration.

Dès lors, les demandes qui tendent à obtenir le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire et visant des impositions, qui régulièrement établies ou perçues, sont susceptibles d'être remises en cause par suite d'une situation ou d'un événement postérieur, ne peuvent (même si elles donnent lieu à dégrèvement) conduire au paiement d'intérêts moratoires.

14De ce qui précède, il résulte que ne sont pas assortis d'intérêts moratoires les remboursements intervenus dans les conditions ci-après :

a. En matière de contributions directes :

- les remboursements consécutifs à des demandes en dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour cause de vacance de maison ou d'inexploitation d'immeuble à usage commercial ou industriel ;

- les remboursements consécutifs à des demandes en dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties pour disparition d'un immeuble par suite d'un événement extraordinaire, pour pertes de récoltes sur pied, ou pour pertes de bétail par suite d'épizootie 2  ;

- les remboursements consécutifs à des demandes en réduction de taxe professionnelle pour cessation d'activité ;

- les remboursements effectués en application des dispositions relatives au plafonnement de la taxe professionnelle (CGI, art. 1647 A et suiv.) 3  ;

- les remboursements d'avoir fiscal (impôt sur le revenu) 4 .

b. En matière de taxes sur le chiffre d'affaires :

- les remboursements forfaitaires de TVA aux agriculteurs ;

- les restitutions de taxes perçues à l'occasion de ventes ou de services résiliés, annulés ou impayés par la suite 5  ;

- les restitutions de crédits de TVA non imputables (régime général et exportateurs) 5  ;

- les remboursements aux assujettis établis à l'étranger ne réalisant pas d'opérations imposables en France, de la TVA afférente aux biens et services acquis dans ce pays 5 .

c. En matière de droits d'enregistrement et de droits et taxes assimilés :

- les restitutions des droits perçus sur un acte produit en justice ;

- les restitutions des droits perçus sur un acte ou un contrat annulé, résolu, rescindé ;

- les restitutions des droits perçus sur des cessions amiables en matière d'expropriation, d'alignement et d'énergie hydraulique ;

- les restitutions des droits perçus sur une transmission d'office ministériel non suivie d'effet ou dont le prix a été réduit ;

- les restitutions des droits de mutation par décès en cas de retour de l'absent ;

- les restitutions de droits de mutation par décès à la suite d'une liquidation de biens, d'un règlement judiciaire (pour les procédures ouvertes avant le 1er janvier 1986), d'un redressement judiciaire ou d'un règlement définitif d'une distribution par contribution postérieure ;

- les restitutions des droits de mutation par décès en cas de paiement des majorations légales d'une rente viagère par les héritiers du débirentier ;

- les restitutions des droits perçus sur la mutation d'une nue-propriété, en cas d'usufruits successifs ;

- les restitutions des droits perçus sur la valeur la plus élevée de l'usufruit ou de la nue-propriété à défaut d'indication ou de justification de la date et du lieu de naissance de l'usufruitier ;

- les restitutions de la taxe spéciale sur les conventions d'assurances dans les conditions prévues à l'article 1965 E-2 du CGI ;

- les restitutions de la taxe sur le défrichement des bois et forêts dans le cas de boisement de terrains nus.

d. En toutes matières fiscales :

- les remboursements consécutifs à des demandes ayant pour objet d'obtenir le bénéfice de dispositions nouvelles qui comportent un effet rétroactif.

5. Paiement des intérêts moratoires, quelle que soit l'autorité qui prend la décision.

15Les intérêts moratoires sont dus quelle que soit l'autorité qui prend la décision (service de base ou direction) 6 .

1   L'article 43 de la loi de finances n° 92-1376 du 30 décembre 1992 publiée au Journal officiel du 31 décembre 1992, prévoit, qu'à compter du 1er janvier 1993, les dégrèvements ou restitutions de toutes impositions ou créances fiscales d'un montant inférieur à 50 francs ne sont pas effectués. Ce montant s'apprécie par cote, exercice ou affaire.

2   Le dégrèvement pour pertes de bétail par suite d'épizootie est d'ailleurs de caractère gracieux (cf. 13 O 2211, n° 47 ).

3   Le plafonnement de la taxe professionnelle ne vise nullement à réparer une erreur commise dans l'assiette ou le calcul de cette taxe. En effet, les impositions de taxe professionnelle donnant lieu à l'application de cette mesure ont été régulièrement calculées et perçues.

4   Lorsque la restitution ou le remboursement intervient en dehors d'un litige avec l'administration. En revanche, si le remboursement est accordé, soit après une première décision de rejet, soit à la suite d'une instance contentieuse devant les tribunaux, que le remboursement ait été accordé par la juridiction saisie ou en cours d'instance par l'administration, les intérêts moratoires sont applicables (CE, arrêt du 17 février 1988, n° 58538).

5   Lorsque la restitution ou le remboursement intervient en dehors d'un litige avec l'administration. En revanche, si le remboursement est accordé, soit après une première décision de rejet, soit à la suite d'une instance contentieuse devant les tribunaux, que le remboursement ait été accordé par la juridiction saisie ou en cours d'instance par l'administration, les intérêts moratoires sont applicables (CE, arrêt du 17 février 1988, n° 58538).

6   Sous réserve, bien entendu, que la réclamation ne soit pas entachée de déchéance ou d'un vice de forme la rendant irrecevable (voir ci-dessus n°s 6 et suiv. ).