Date de début de publication du BOI : 01/07/2002
Identifiant juridique : 13L1214
Références du document :  13L1214
Annotations :  Lié au BOI 13L-7-08

SOUS-SECTION 4 DÉLAIS DE REPRISE EN MATIÈRE D'ENREGISTREMENT, DE PUBLICITÉ FONCIÈRE, D'IMPÔT DE SOLIDARITÉ SUR LA FORTUNE, DE TIMBRE ET DE TAXES ASSIMILÉES

5. Condition suspensive affectant la convention elle-même ou l'exigibilité de l'impôt.

34  La condition suspensive qui affecte une convention suspend la perception des droits proportionnels et progressifs. Ce n'est que l'accomplissement de la condition qui fait naître l'exigibilité des droits afférents à la convention.

Par suite, l'enregistrement ou la publication au droit fixe de l'acte sous condition suspensive ne peut faire courir la prescription abrégée.

Il en est de même de la formalité donnée à un acte ou à une déclaration lorsque c'est l'exigibilité de l'impôt elle-même qui se trouve frappée d'une condition suspensive.

Tel est le cas, par exemple, des acquisitions de terrains à bâtir. En effet, l'impôt de mutation, dans ce cas, ne devient exigible que s'il n'est pas régulièrement justifié de la construction dans le délai légal. L'administration ne pouvant avoir connaissance de cet événement futur et incertain que par des recherches ultérieures, les conditions prévues pour l'application de la prescription abrégée ne se trouvent donc pas réunies du seul fait de l'enregistrement ou de la publication de l'acte d'acquisition du terrain à bâtir.

La situation est identique, notamment pour les acquisitions de biens ruraux effectuées par les fermiers (CGI, art. 1594 F quinquies-D 1 ), les mutations de bois et forêts (CGI, art. 793-1-3° et 4° et 2-2°), les biens donnés à bail dans les conditions prévues aux articles L. 416-1 à L. 416-6, L. 416-8 et L. 416-9 du code rural (CGI, art. 793-2-3°) ainsi que les opérations agréées visées à l'article 721 du CGI 2 .

Dans tous ces cas, seule la prescription décennale est opposable à l'action en reprise du Trésor dans les conditions précisées aux n os36 et suivants.

Bien entendu, si un acte présenté à la formalité révèle la réalisation de la condition, l'action en reprise des droits dont l'exigibilité parvient ainsi à la connaissance de l'administration tombe sous l'application de la prescription abrégée.

6. Mesures à prendre pour l'interruption de la prescription abrégée.

35En raison des risques que fait courir au Trésor la prescription de courte durée visée à l'article L. 180 du LPF, les agents devront surveiller attentivement la remise de tout document révélant l'existence d'un fait juridique imposable. Pour prévenir toute difficulté sur le point de savoir si la prescription abrégée est ou non applicable, les diligences nécessaires devront être faites pour que, dans une telle hypothèse, les droits exigibles soient acquittés dans le délai de la prescription susvisée ou, qu'à défaut, cette prescription soit régulièrement interrompue.

  Il. Prescription décennale (LPF, art. L. 186 )

36La prescription de dix ans s'applique dans tous les cas où les conditions requises pour l'application de la prescription abrégée ne sont pas remplies.

37La prescription décennale a remplacé l'ancienne prescription trentenaire de droit commun (code civil, art. 2262) qui, à défaut de disposition spéciale édictant une prescription plus courte, s'appliquait, notamment :

- aux droits de timbre ;

- à l'action tendant à établir une dissimulation de prix ou la dissimulation du véritable caractère d'un contrat ;

- au recouvrement des droits afférents à un acte non enregistré ou à une mutation verbale non déclarée ;

- au recouvrement de droits dont l'exigibilité était subordonnée à l'accomplissement d'une condition ou dont le montant dépendait de la réalisation d'événements ultérieurs.

38Elle s'est également substituée à la prescription de vingt ans qui était précédemment prévue en matière :

- de successions non déclarées ;

- d'omissions de biens dans une déclaration de succession ;

- de recouvrement des droits exigibles par suite d'indication inexacte dans une donation entre vifs ou dans une déclaration de succession :

* du degré de parenté entre le donateur ou le défunt et les donataires, héritiers et légataires,

* du nombre d'enfants, soit du défunt, soit des successibles,

* de la date et du lieu de naissance de chacun des héritiers légataires ou donataires et de leurs enfants vivants.

39L'ancien délai de dix ans doit être considéré comme maintenu en matière de droits de mutation par décès exigibles du fait de l'inexactitude d'une déclaration ou d'une attestation de dette.

Enfin la prescription décennale s'applique en matière :

- de non-déclaration d'impôt de solidarité sur la fortune ;

- d'omission de biens, droits ou valeurs dans la déclaration d'ISF.

40 Remarque : Il convient toutefois de signaler que, lorsque l'exigibilité des droits a été consacrée par une disposition judiciaire, cette dernière est constitutive, conformément au droit commun, d'une créance qui ne peut dès lors se prescrire que par trente ans.

1. Point de départ de la prescription décennale.

Le délai de reprise de dix ans a pour point de départ le fait générateur de l'impôt.

a. Droits de mutation par décès.

1° Principes.

41La prescription décennale applicable à l'action de l'administration à l'égard des droits de mutation par décès court à compter du décès.

La date du décès constitue le point de départ du délai imparti à l'administration pour agir, quelle que soit la nature de l'infraction qui motive son action : absence de déclaration, omission, inexacte indication du lien de parenté entre le défunt et les héritiers, etc.

Les héritiers sont donc en droit de se prévaloir de l'article L. 186 du LPF pour se considérer comme étant à l'abri de tout redressement dès l'expiration du délai de dix ans qui a suivi le décès, même si la déclaration de succession a été souscrite quelques jours seulement avant l'expiration de ce délai.

2° Instance judiciaire en contestation de la dévolution successorale.

42La prescription du droit de reprise concernant des droits de mutations par décès exigibles sur une succession non encore déclarée à l'administration ne court pas durant l'instance judiciaire en contestation de la dévolution successorale (Cass. com., arrêts des 21 juin 1994, n° 1502 D et 4 juillet 1995, n° 1472 D ; cf. respectivement annexes IV et VI).

Lorsque la dévolution successorale est contestée en justice, l'administration admet, dans les conditions fixées par la jurisprudence (rappr. Cass. com., 5 mars 1991 ; cf. DB 7 G 255, n os8 et 9 ), que le point de départ du délai de l'article 641 du CGI, imparti aux héritiers et légataires pour souscrire la déclaration leur incombant, soit reporté à la date de la décision de justice tranchant la contestation de manière définitive.

Les arrêts de la Cour de cassation mentionnés ci-dessus précisent les effets d'un tel litige sur la prescription du droit de reprise de l'administration.

Confirmant la doctrine administrative (cf. DB 7 G 255, n os8 et 9 précités), la Cour énonce qu'en l'absence de souscription de déclaration, le cours de la prescription (en l'occurrence, prescription décennale prévue à l'article L. 186 du LPF) est suspendu (article 2251 du code civil) jusqu'à la date de la décision, passée en force de chose jugée (au sens de l'article 500 du NCPC), ayant statué sur la contestation.

L'arrêt du 4 juillet 1995 indique en outre, implicitement, que l'administration, ne pouvant agir valablement durant cette période de suspension, n'est pas tenue de prendre des mesures conservatoires pour préserver ses droits.

3° Biens rentrés dans l'hérédité postérieurement au décès.

43La prescription décennale applicable aux droits de mutation par décès afférents à des biens rentrés dans l'hérédité postérieurement au décès ne court que du jour de l'événement qui opère la mutation (Trib. civ. Verdun, 8 février 1887) et qui constitue le fait générateur de l'impôt.

44De même, constitue le fait générateur des droits de mutation par décès exigibles sur des biens rentrés dans l'hérédité postérieurement au décès l'événement qui opère leur retour (Cass. com., arrêt du 18 novembre 1997, n° 2283 D ; cf. annexe XII).

Dès lors, le délai décennal de prescription de l'action de l'administration court, non à compter de la date du décès, mais de celle de la réalisation de cet événement.

Ainsi, la Cour de cassation confirme que c'est le fait juridique qui consacre le retour de ce bien dans l'hérédité postérieurement au décès qui constitue le fait générateur de l'impôt.

Par voie de conséquence, la prescription décennale de droit commun ne peut commencer à courir avant la réalisation d'un tel fait.

En l'espèce, celui-ci était constitué par le prononcé, plusieurs années après le décès, d'une décision judiciaire définitive portant résolution d'une vente immobilière.

Toutefois, dès lors que cette décision, d'une part, révélait suffisamment par elle-même l'exigibilité des droits de succession sur les biens ayant ainsi fait retour à l'hérédité et, d'autre part, avait été publiée à la conservation des hypothèques, la prescription abrégée, décomptée à partir de la date de cette publication, trouvait à s'appliquer.

b. Autres droits d'enregistrement

45Pour les droits d'enregistrement autres que les droits de mutation par décès, c'est également le jour du fait générateur, c'est-à-dire, en règle générale, la date de la mutation ou celle de l'acte qui constitue le point de départ de la prescription.

Toutefois, il résulte de l'article L. 183 du LPF que les parties ne sont pas autorisées, pour établir la date du fait générateur, à se prévaloir d'actes n'ayant pas acquis date certaine.

c. Condition suspensive affectant la convention elle-même ou l'exigibilité de l'impôt.

46  Les effets juridiques de la convention et, par suite, le fait générateur de l'impôt proportionnel ou progressif étant subordonnés à la réalisation de la condition, la prescription de dix ans court seulement du jour de cet événement.

Il en est ainsi, notamment, en matière de legs conditionnels (notamment de legs de eo quod supererit), de cessions conditionnelles de droits sociaux, de donations ou de ventes conditionnelles.

47  Par ailleurs, lorsque la créance d'impôt est elle-même affectée d'une condition suspensive, l'action du Trésor n'est susceptible de prendre cours qu'à la date de réalisation de cette condition.

Ainsi, le délai de reprise dont dispose l'administration en cas de non-respect de l'engagement de construire prévu à l'article 691 3 du CGI commence à courir à compter du premier jour suivant l'expiration du délai imparti à l'acquéreur pour justifier de l'achèvement des constructions (Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, arrêt du 23 octobre 1990, n° 1200 P, affaire SCI Domaine du Bois Dieu).

48  Le même principe s'applique aux acquisitions de biens ruraux effectuées par le fermier (CGI, art. 1594 F quinquies-D 4 ), aux opérations agréées visées à l'article 721 du CGI, aux biens donnés à bail dans les conditions prévues aux articles L. 416-1 à L. 416-6, L. 416-8 et L. 416-9 du code rural (CGI, art. 793-2-3°) ainsi qu'aux situations prévues aux articles 793-1 3°, 4° et 2-2° du code précité 5 .

49  Il est souligné, toutefois, que, dans tous les cas visés aux n os41 à 48 ci-dessus, si la réalisation de la condition suspensive est révélée par un acte ou un document présenté à la formalité dans les conditions prévues par l'article L. 180 du LPF, cette formalité sert de point de départ à la prescription abrégée et non plus à la prescription décennale.

d. Point de départ du délai de reprise en ce qui concerne l'impôt de solidarité sur la fortune.

50Le délai de reprise a pour point de départ le 1er janvier de l'année d'imposition.

1   Codifié auparavant sous l'article 705 du CGI.

2   Il en était de même pour les opérations visées aux anciens articles 697, 703 et 710 du CGI. Ces dispositions ont été abrogées par la loi de finances pour 1999 qui a profondément modifié le régime des droits de mutation.

3   Transféré sous l'article 1594-0 G-A du CGI par l'article 39 de la loi de finances pour 1999.

4   Codifié auparavant sous l'article 705 du CGI.

5   Il en était de même pour les opérations visées aux anciens articles 697, 703 et 710 du CGI. Ces dispositions ont été abrogées par la loi de finances pour 1999 qui a profondément modifié le régime des droits de mutation.