SOUS-SECTION 5 DURÉE, PÉREMPTION ET RENOUVELLEMENT DES HYPOTHÈQUES
SOUS-SECTION 5
Durée, péremption et renouvellement des hypothèques
Dans le régime actuel de publicité foncière, les effets de l'inscription sont limités dans le temps. Après un certain délai l'inscription perd sa validité à moins d'avoir été renouvelée en temps opportun.
A. DURÉE DE VALIDITÉ DE L'INSCRIPTION D'HYPOTHÈQUE
Sous le régime antérieur au 1 er janvier 1968, les incriptions hypothécaires conservaient l'hypothèque pendant dix années à compter de leur date.
1Actuellement, aux termes de l'article 2154 nouveau du Code civil résultant de l'ordonnance n° 67.839 du 28 septembre 1967, la date extrême d'effet de l'inscription hypothécaire est fixée par le créancier (ou son représentant).
2Toutefois, selon le même article, ce dernier doit se conformer à certaines dispositions qui prévoient un cas général et des cas particuliers.
I. Cas général
3Dans le cas le plus fréquent où l'obligation garantie doit être acquittée à une ou plusieurs dates déterminées et dans la mesure où l'inscription est prise avant l'échéance ou la dernière échéance 1 , la date d'effet de cette inscription ne peut être postérieure de plus de deux années à l'échéance ou à la dernière échéance sans toutefois que la durée de l'inscription puisse excéder trente-cinq années (Code civ., art. 2154, al. 2).
II. Cas particuliers
4L'article 2154 prévoit deux cas particuliers dans lesquels la durée de l'inscription hypothécaire diffère de celle du cas général ci-dessus.
51. Si l'échéance ou la dernière échéance est indéterminée ou si elle est antérieure ou concomitante à l'inscription, (c'est le cas pour les sommes dues par les redevables aux comptables des impôts) la date extrême d'effet de cette inscription ne peut être postérieure à plus de dix années au jour de la formalité (3 e al.).
62. Lorsque l'obligation est telle qu'il puisse être fait application du cas général (cf. supra n° 3 ) et du cas particulier ci-dessus (n° 5 ), le créancier peut requérir :
- soit une inscription unique en garantie de la totalité de l'obligation jusqu'à la date la plus éloignée ;
- soit une inscription distincte en garantie de chacun des objets de cette obligation jusqu'à une date déterminée conformément aux dispositions des alinéas 2 et 3 de l'article 2154 (respectivement n os3 et 5 ci-dessus).
7Il en est de même lorsque, le deuxième alinéa dudit article (cf. supra n° 3 ) étant seul applicable, les différents objets de l'obligation ne comportent pas les mêmes échéances ou dernières échéances (Code civ., art. 2154, al. 4).
III. Exceptions
8Contrairement aux dispositions qui précèdent, les inscriptions provisoires de l'hypothèque légale des époux (Code civ., art. 2137) ou de l'hypothèque judiciaire (Code de proc. civ., art. 54, al. 1) ne comportent pas de date extrême d'effet. Elles sont valables trois ans et renouvelables pour une même durée.
IV. Mesures tendant à assurer le respect des délais de deux ans, dix ans et trente-cinq ans de durée de l'inscription
9Les mesures de l'espèce découlent des articles 67 à 67-2 du décret du 14 octobre 1965 modifié par le décret n° 67-1252 du 22 décembre 1967.
En vertu de l'article 67 alinéa 1, pour l'application des dispositions relatives à la durée de l'effet des inscriptions (cf. supra n os3 à 6 ), le conservateur n'a, en aucun cas, à rechercher si les caractères de l'échéance ou de la dernière échéance ont été exactement déclarés ni à vérifier que le délai de deux ans qui court à compter de l'échéance ou de la dernière échéance déterminée et future a été respecté.
Cela étant une distinction doit être faite, quant à son rôle, suivant que l'inscription - originaire ou en renouvellement - vient d'être requise ou qu'elle a déjà été opérée.
1. Dépassement des délais de dix ans ou trente-cinq ans constaté avant l'exécution de la formalité.
10Si la date extrême d'effet de l'inscription, fixée par le créancier, est postérieure à celle de l'expiration, suivant le cas, du délai de dix ans ou de celui de trente-cinq visés aux articles 2154 et 2154-1 du Code civil, la formalité est rejetée à moins que le requérant ne régularise le bordereau d'inscription ou de renouvellement
11Le conservateur engage la procédure de régularisation préalable au rejet de la formalité en notifiant le dépassement au signataire du certificat d'identité ou, à défaut de certificat, à la personne désignée pour recevoir éventuellement cette notification.
La rectification doit être opérée dans le délai d'un mois :
- soit par l'apposition d'une mention datée et signée au pied du bordereau irrégulier ;
- soit par le dépôt d'un acte rectificatif.
La non-rectification dans ce délai entraîne le rejet de la formalité.
2. Dépassement du délai de deux ans, dix ans ou trente-cinq ans entachant des inscriptions opérées.
a. Dépassement du délai de deux ans.
12Lorsqu'il y a eu un dépassement du délai de deux ans, une nouvelle date extrême d'effet de l'inscription, prise à l'intérieur de ce délai, peut être volontairement constatée, à l'initiative des parties, dans un acte authentique (ou par une ordonnance rendue par le président du Tribunal de grande instance) pour être mentionnée en marge de ladite inscription.
b. Dépassement du délai de dix ou trente-cinq ans.
Le dépassement du délai de dix ans ou de celui de trente-cinq ans peut être réparé à l'initiative des parties dans les mêmes conditions.
Dès qu'il constate ce dépassement le conservateur, éventuellement, substitue d'office la date d'expiration du délai non respecté à celle fixée par le créancier auquel il notifie cette substitution par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
3. Observations.
Il est à noter :
13- qu'en cas de dépassement de l'un des délais de deux ans, dix ans ou trente-cinq ans, l'inscription opérée est périmée le lendemain à zéro heure de la date d'expiration du délai non respecté, si elle n'a pas été préalablement renouvelée ;
- que les mesures de contrôle évoquées ci-dessus s'appliquent aussi bien aux inscriptions originaires qu'à celles prises en renouvellement
Toutes ces dispositions ont pour objet d'éviter que des biens immeubles demeurent grevés d'inscriptions devenues inutiles par suite du paiement des créances mais subsistant en raison du coût de la radiation. Aussi le service doit-il s'efforcer lui-même de limiter la durée de ses inscriptions à leurs besoins prévisibles étant rappelé, que le renouvellement effectué en temps utile peut toujours, s'il y a lieu, permettre de prolonger la validité de la garantie.
B. PÉREMPTION DE L'INSCRIPTION D'HYPOTHÈQUE
14Selon les dispositions de l'article 2154-1 du Code civil, l'inscription est périmée à l'expiration du délai prévu au 1 er alinéa de l'article 2154 (cf. supra , n os1 à 6 ).
A l'expiration de ce délai, l'inscription qui n'a pas été renouvelée tombe automatiquement Il est à noter que l'hypothèque n'est pas éteinte par la péremption de l'inscription ; le créancier conserve son caractère de créancier hypothécaire, mais il perd le bénéfice du rang que lui assurait l'inscription périmée.
Il s'ensuit que le défaut de renouvellement de l'inscription a les mêmes conséquences que le défaut d'inscription.
Dès lors, le créancier qui a laissé périmer l'inscription de son hypothèque, bien que pouvant participer à l'ordre faisant suite à une saisie immobilière (cf. C-251), risque de ne pas parvenir au recouvrement de sa créance si le prix de vente de l'immeuble saisi est insuffisant pour désintéresser l'ensemble des créanciers privilégiés et hypothécaires.
C. RENOUVELLEMENT DE L'INSCRIPTION D'HYPOTHÈQUE
15Le moyen normal d'éviter la péremption de l'inscription est d'en requérir le renouvellement avant l'expiration du délai après lequel elle cesse de produire ses effets.
L'inscription prise en renouvellement n'est pas considérée comme une nouvelle inscription attributive d'un nouveau rang. Elle conserve à l'hypothèque le rang attribué par l'inscription initiale, laquelle n'est en fait que consolidée par le renouvellement.
Cette dernière, par le jeu des renouvellements successifs requis avant l'expiration du délai de péremption, peut être validée indéfiniment.
16Il est, par ailleurs, rappelé que les inscriptions en renouvellement, n'ont qu'un effet conservatoire ; elles ne sont pas affectées par les événements qui arrêtent le cours des inscriptions utiles ou pleinement efficaces.
17Le renouvellement des inscriptions originaires opéré avant l'échéance de péremption est réglé par les dispositions du décret du 14 octobre 1955, modifié par celui du 22 décembre 1967 n° 67-1252, qui prévoit :
- les modalités selon lesquelles les inscriptions sont renouvelées par le dépôt de bordereaux (art. 61-1) ;
- les énonciations que doivent contenir les bordereaux de renouvellement (art. 61 à 63) ;
- les causes de refus du dépôt ou du rejet de la formalité (art. 64) ;
- les mesures prises en vue d'assurer le respect des délais (art. 67 à 67-2) et qui ont été examinées ci-dessus (cf. supra n os9 à 13 ).
I. Forme des renouvellements d'inscription
18Le renouvellement de l'inscription d'hypothèque prévu à l'article 2154-1 du Code civil est requis par le créancier lui-même ou par un tiers en déposant à la conservation des hypothèques de la situation des immeubles deux bordereaux signés et certifiés exactement collationnés.
Ces bordereaux sont établis dans les mêmes conditions que ceux afférents à une inscription originaire (cf. supra C 5214 n os7 à 10 ).
Le bordereau destiné à être conservé au bureau des hypothèques doit, sous peine de rejet, être rédigé sur une formule spéciale normalisée fournie par l'Administration qui peut être, soit une formule réservée au renouvellement d'inscription, soit une formule utilisée pour les inscriptions originaires.
II. Énonciations des bordereaux de renouvellement
19Depuis le 1 er janvier 1956, date d'application du décret portant réforme de la publicité foncière, la rédaction des bordereaux de renouvellement a été simplifiée du fait que l'inscription originaire contient tous les éléments nécessaires pour l'annotation du fichier immobilier. Cette simplification résulte de l'article 61 du décret du 14 octobre 1955 modifié.
Chaque bordereau doit obligatoirement commencer par la réquisition suivante, portée en lettres majuscules d'imprimerie :
INSCRIPTION AYANT EFFET JUSQU'AU... EST REQUISE EN RENOUVELLEMENT DE ... 2 .
Il indique, en outre, dans un cadre spécial, si le principal de l'obligation garantie doit ou non être acquitté à une ou plusieurs dates déterminées postérieures à celle de la formalité.
Indépendamment de ces réquisitions et indications, les énonciations que le bordereau doit contenir varient suivant la nature des immeubles grevés et l'état du cadastre.
1. Immeuble urbain et immeuble rural situé dans une commune à cadastre rénové.
20Le bordereau doit contenir exclusivement :
a. A titre obligatoire.
- la mention de l'inscription à renouveler ;
- le rappel du titre et des noms et prénoms des propriétaires grevés et créancier originaire ;
- le certificat de collationnement
b. Éventuellement (et sauf si les modifications ci-dessous ont déjà été publiées sous forme de mention en marge).
- les énonciations complémentaires concernant le créancier, le capital de la créance ou l'époque d'exigibilité, en cas de changement dans la personne ou l'état civil du créancier, en cas de réduction de la créance ou de ses accessoires, de modification dans l'époque d'exigibilité ;
- la description des immeubles grevés lorsque l'étendue du gage se trouve diminuée par l'inscription en renouvellement (main-levée partielle - renouvellement partiel).
Exception faite du cas où le cadastre a été rénové entre l'inscription et la date du renouvellement, le bordereau n'a pas à contenir :
- la désignation actuelle du propriétaire des immeubles grevés, ni la certification d'identité ;
- la désignation de ces immeubles (sauf en cas de réduction de gage).
2. Immeuble rural situé dans une commune à ancien cadastre.
21L'article 62-2, 1 er alinéa du décret du 14 octobre 1955 prévoit qu'en plus des énonciations prescrites par les § 1 et 2 de l'article 61, les bordereaux de renouvellement doivent, pour permettre l'annotation du fichier immobilier, désigner le propriétaire des immeubles grevés à la date de chaque renouvellement
Cette désignation est obligatoire et donne lieu à certification d'identité :
- lorsque les immeubles sont ruraux au sens du décret du 14 octobre 1955 ;
- et que le cadastre de la commune n'est pas encore rénové, ou qu'il s'agit du premier renouvellement depuis la rénovation du cadastre. '
1 Il est rappelé qu'aucun délai n'est prescrit pour prendre inscription (cf. supra 5214-16).
2 Cette réquisition n'a pas à indiquer la nature de la sûreté qui, par hypothèse, est déjà connue.