SOUS-SECTION 3 AUTRES FRAIS PROFESSIONNELS DES SALARIÉS
SOUS-SECTION 3
Autres frais professionnels des salariés
A. FRAIS DE RÉCEPTION, DE REPRÉSENTATION OU DE GRATIFICATION
I. Principes
1Les dépenses telles que frais de restaurant et de café, gratifications, etc., que certaines personnes, notamment les voyageurs et représentants de commerce, sont tenues d'effectuer pour acquérir, conserver ou développer leur clientèle ont un caractère professionnel. Mais ces dépenses ne doivent être admises en déduction que dans la mesure où elles sont en rapport avec la nature et l'importance des opérations effectuées.
Les frais d'invitations destinées à créer ou à entretenir des relations personnelles ne constituent pas des dépenses professionnelles déductibles. Tel est le cas d'une réception donnée à l'occasion d'une nomination dans l'ordre de la Légion d'honneur, encore que le récipiendaire serait en relation par sa profession avec la plupart des invités (Conseil d'État, arrêt du 5 octobre 1973, n°83211 n° III, p. 137).
Le caractère déductible des frais de réception doit être examiné au cas par cas.
II. Dépenses de relations avec la clientèle des V.R.P.
2 Dans l'hypothèse où les voyageurs et représentants de commerce renoncent à toute déduction forfaitaire et demandent la prise en compte de leurs frais professionnels pour leur montant réel, il est admis que les dépenses occasionnées par les relations avec la clientèle (par exemple, frais de correspondance, invitations, cadeaux, etc.), pour lesquelles il est difficile de fournir des justifications, soient évaluées forfaitairement à 2 % du montant des commissions, la déduction effectuée à ce titre étant limitée à 3 500 F.
Bien entendu, les intéressés ne peuvent inclure dans les dépenses déduites pour leur montant exact et justifié des frais de même nature que ceux couverts par la déduction de 2 %.
B. ENGAGEMENTS DE CAUTION
I. Principes
3Conformément à la doctrine et à la jurisprudence, la déduction des sommes versées en exécution d'engagements de caution est autorisée lorsque le salarié a en vue la conservation de son salaire et non la préservation de son capital.
Ainsi, la déduction des sommes versées en exécution d'engagement de caution par les dirigeants salariés se justifie en droit par l'application combinée des articles 13 et 83-3° du CGI. Elle s'effectue donc dans la catégorie des traitements et salaires et implique pour le salarié une option pour le régime de déduction des frais professionnels selon leur montant réel, c'est-à-dire qu'il n'est pas possible de cumuler l'imputation de sommes versées en exécution d'un engagement de caution avec les déductions forfaitaires pour frais professionnels (cf. Cour administrative d'appel de Nancy, arrêt du 11 mars 1993, n° 91-458 et Conseil d'État, arrêt du 5 avril 1993, n° 89 140).
Elle est toutefois subordonnée au respect de l'ensemble des conditions suivantes :
- l'engagement doit avoir été souscrit dans l'intérêt de l'exploitation, soit pour la maintenir, soit pour la développer ;
- la souscription de l'engagement doit relever de l'accomplissement normal de la fonction de dirigeant, ce qui implique que l'engagement ait été pris par le titulaire de la rémunération et que l'exécution de l'engagement ne se rattache pas à la gestion du patrimoine privé du souscripteur ou ne corresponde pas à une prise en charge spontanée des dettes de la société ;
- le versement de la caution ne doit pas être le résultat d'une gestion anormale de la société (abus de biens sociaux, détournement d'actes, dépenses étrangères à l'intérêt de l'entreprise) ;
- le montant de l'engagement ne doit pas être hors de proportion avec les rémunérations perçues par l'intéressé au moment où il l'a contracté. À cet égard et conformément à la jurisprudence, les sommes versées en exécution d'un engagement de caution ne sont déductibles que dans la mesure où cet engagement n'excède pas le triple de la rémunération allouée à l'intéressé ou celle qu'il pouvait escompter au moment où il a contracté cet engagement. Toutefois, lorsque le montant de l'engagement est supérieur au triple des salaires, les sommes versées sont déductibles à hauteur de la fraction de l'engagement qui n'excède pas cette limite (Conseil d'État arrêt du 12 décembre 1990, n° 113038, X... et Conseil d'État, Assemblée plénière, arrêt du 6 janvier 1993, n° 78729, X... ).
Au-delà de ce plafond, le dirigeant est regardé comme ayant pour préoccupation la sauvegarde du patrimoine qu'il a investi dans la société et la fraction de l'engagement correspondante constitue une dépense en capital non déductible.
La rémunération de référence qui est retenue pour apprécier la condition de proportionnalité avec l'engagement de caution contracté (rapport de 1 à 3 ou « règle du triple »), est celle que le dirigeant perçoit, ou peut raisonnablement escompter percevoir à court terme, l'année même de la souscription de cet engagement (Conseil d'État, arrêt du 6 janvier 1993, n° 78729, précité).
Toutefois, lorsque le délai entre la souscription de l'engagement et son exécution est particulièrement long, la jurisprudence admet qu'il soit tenu compte, pour apprécier la proportion entre l'engagement souscrit et les rémunérations perçues, de l'évolution de celles-ci que le dirigeant pouvait raisonnablement espérer au moment où il a pris l'engagement de caution concerné (Conseil d'État, arrêt du 28 avril 1993, n° 89734 et arrêts de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, arrêts des 30 juillet 1993 et 7 mars 1995, n°s 92-1212 et 94-133). En revanche, il n'y a pas lieu d'actualiser au jour de l'appel de la caution les rémunérations perçues l'année de la souscription de l'engagement pour tenir compte de l'érosion monétaire (Cour administrative d'appel de Bordeaux, arrêt du 30 juillet 1993, n° 92-1212, précité, et Cour administrative d'appel de Nantes, arrêt du 24 novembre 1994, n° 93-572).
Enfin, les conditions générales de déduction des frais professionnels réels doivent être respectées :
le contribuable doit renoncer aux déductions forfaitaires pour frais (cf. ci-dessus, 2ème alinéa) ;
il doit justifier de la dépense : la nature, le montant de l'engagement doivent être justifiés par la production des documents originaux faisant foi de sa souscription. Le paiement correspondant auprès de l'organisme de crédit doit également être justifié.
II. Cas particuliers
1. Engagements illimités.
4Le Conseil d'État a jugé que le caractère illimité d'un engagement de caution ne fait pas obstacle à la déduction éventuelle des sommes versées par le dirigeant appelé en garantie dès lors que l'intéressé est en mesure, eu égard à la position qu'il occupe dans la société, d'apprécier avec une approximation suffisante la portée des engagements qu'il prend ; dans cette hypothèse, les sommes déductibles sont plafonnées au triple de la rémunération que le dirigeant percevait, ou pouvait raisonnablement escompter percevoir, l'année de la souscription de l'engagement considéré (en ce sens, Conseil d'État, arrêts des 4 décembre 1989 et 28 avril 1993, n os 89712 et 89734).
Il est précisé qu'aussi longtemps qu'un engagement illimité est en vigueur, aucune déduction à raison d'engagements de caution souscrits postérieurement n'est autorisée. En effet, ces engagements s'ajoutent, aux dates respectives de leur souscription, à un premier engagement dont le montant illimité a, par lui-même, pour effet de porter le total des engagements contractés par le dirigeant à un montant hors de proportion avec les rémunérations perçues au cours des années où ces engagements ultérieurs sont contractés (Conseil d'État, arrêt du 19 janvier 1998, n° 159885, X... ).
2. Engagements multiples successivement souscrits sur plusieurs années.
5En présence de versements effectués en exécution d'engagements multiples souscrits successivement sur plusieurs années, le caractère déductible des sommes payées doit être apprécié par référence au montant total des engagements pris et est subordonné à la condition que l'engagement au titre duquel les paiements ont été effectués n'ait pas eu pour effet, à la date à laquelle il a été pris, de porter le montant cumulé des cautions consenties par le contribuable à des sommes hors de proportion avec la rémunération annuelle qu'il percevait ou pouvait escompter au titre de l'année en cause. Lorsque l'engagement souscrit ne respecte pas cette condition, les sommes versées à ce titre sont néanmoins déductibles dans la limite du triple de la rémunération annuelle de l'intéressé, diminuée de la différence entre le total des engagements contractés antérieurement à l'année en cause et les remboursements effectués jusqu'au terme de la même année (Conseil d'État, arrêt du 19 janvier 1998, n° 159885, déjà cité).
C. IMPÔTS, TAXES ET AMENDES
6Les impôts et taxes payés par un salarié sont admis en déduction lorsqu'ils se rapportent directement à l'activité professionnelle.
Il en va ainsi des taxes afférentes à un local exclusivement utilisé pour les besoins de la profession ou de la quote-part de ces taxes correspondant à la partie de l'habitation réservée à un usage professionnel.
En revanche, les impôts à caractère personnel tels que l'impôt sur le revenu ou les impôts locaux dus à raison de l'habitation principale dont aucune partie n'est à usage professionnel ou de résidences secondaires ne sont pas admis en déduction.
Sur les impôts et taxes relatifs aux locaux professionnels, cf. également 5 F 2542, n°s 47 et suivants.
Les amendes pénales constituent des peines à caractère personnel. Elles ne peuvent donc être déduites.
D. FRAIS MÉDICAUX
I. Principes
7Les dépenses de santé qui demeurent à la charge des salariés sont considérées comme des dépenses personnelles. Elles ne sont pas susceptibles d'être admises en déduction du montant brut des traitements et salaires.
Tel est le cas notamment :
- des frais exposés par le contribuable à l'occasion de la maladie des membres de sa famille ;
- des frais de séjour dans une ville d'eaux nécessités par l'état de santé du contribuable ou d'un membre de sa famille.
Toutefois, les personnes handicapées qui supportent, du fait de leur état, des frais spéciaux dans l'exercice de leur profession peuvent déduire les charges correspondantes, dans la mesure où elles ne sont pas remboursées par la Sécurité sociale, une mutuelle ou tout autre organisme de prévoyance.
II. Cas particulier des frais de prothèse
8Les dépenses d'appareillage et de prothèse ont, normalement, le caractère de dépenses personnelles. Elles ne peuvent donc, en principe, être admises en déduction des revenus taxables.
Toutefois, lorsque le port d'un appareil ou d'une prothèse est indispensable pour remédier à un grave handicap qui, non corrigé, interdirait à la personne qui en est atteinte l'exercice normal d'une activité professionnelle, il est admis que la fraction des dépenses d'acquisition et d'entretien qui reste définitivement à la charge du contribuable après remboursement par la sécurité sociale, par une mutuelle ou par tout autre organisme de prévoyance soit considérée comme une dépense professionnelle à concurrence de la moitié de son montant (cette partie des dépenses est normalement couverte par la déduction forfaitaire de 10 % pour frais professionnels).
Les prothèses dentaires n'ont pas pour objet de suppléer une déficience physique entraînant une incapacité, totale ou partielle, de travail. Ce n'est donc que dans des situations très exceptionnelles, pour tenir compte des conditions d'emploi imposées au salarié dont les fonctions exigent un contact direct et permanent avec le public, que les frais de prothèse dentaire peuvent, dans la limite définie ci-dessus, être regardés comme ayant un caractère professionnel. L'exercice des fonctions doit être effectif. Toutes justifications à cet égard doivent être apportées. Il appartient au service des impôts d'apprécier ces situations, sous le contrôle du juge de l'impôt.
E. FRAIS DE PERSONNEL
Les salaires payés à des personnes qui sont au service personnel du salarié (gens de maison, gardienne d'enfants) ne sont pas déductibles.
I. Sommes versées à des collaborateurs
9Les sommes versées à des collaborateurs salariés ou non auxquels le salarié a recours pour le seconder dans l'exercice de sa profession (dactylo, secrétaire, imprésario ...) ont le caractère de dépenses professionnelles déductibles. Ainsi, les sommes qu'un représentant salarié a versées à des « sous-agents » ont le caractère de frais professionnels et non de sommes à retrancher de son revenu brut, dès lors que l'intéressé, qui soutient s'être borné à en assurer le service pour le compte de son employeur, n'établit pas que ces dépenses ne lui incombaient pas personnellement (Conseil d'État, arrêt du 8 février 1978, n° 2212, RJ n° III, p. 29).
II. Sommes versées à un remplaçant
10Les sommes versées par un salarié à un tiers qu'il a chargé, pour des motifs de convenance personnelle, d'accomplir à sa place le travail qui lui a été confié ne constituent pas des frais professionnels.
C'est ainsi que ne sont pas admises en déduction :
- les sommes que l'administrateur-directeur d'une société anonyme verse à titre de rémunération à un tiers sur lequel il s'est déchargé, pour convenances personnelles, d'un travail qui lui incombait (Conseil d'État, arrêt du 31 mai 1944, n° 72199, RO, p. 123) ;
- les sommes reversées aux internes par les médecins hospitaliers chargés de la garde de nuit dès lors que les indemnités perçues par ces derniers rémunèrent un service qu'ils sont tenus d'assurer personnellement et qu'ils se déchargent volontairement de leur tâche pour des raisons de pure convenance personnelle.
F. FRAIS DIVERS
I. Frais exposés dans l'exercice de l'activité de représentation du personnel
11Les dépenses exposées par les salariés pour les besoins de l'exercice du mandat de représentation du personnel dont ils peuvent être investis dans l'entreprise, ont le caractère de frais professionnels. En conséquence, un délégué syndical ou un délégué du personnel, par exemple, qui a opté pour la déduction des frais réels peut déduire ces dépenses pour leur montant exact, sous réserve d'en justifier. Bien entendu, l'ensemble des allocations pour frais ou remboursements de frais éventuellement perçus de l'employeur ou du syndicat doit alors être rapporté par les intéressés à leur rémunération imposable.
En revanche, les frais exposés dans l'exercice d'une activité syndicale non rémunérée comme temps de travail, par exemple par un salarié dans le cadre de son activité militante, ne constituent pas des dépenses professionnelles. D'une manière plus générale, les frais exposés dans l'exercice d'une activité bénévole ne sont pas susceptibles d'être déduits du montant des traitements et salaires imposables (cf. arrêts cités 5 F 2541, n° 1).
Remarque :
12Lorsque le salarié n'opte pas pour la déduction de ses frais professionnels pour leur montant réel, les allocations spéciales destinées à couvrir les dépenses entraînées par l'activité de représentation du personnel et utilisées conformément à leur objet sont exonérées d'impôt sur le revenu en vertu des dispositions de l'article 81-1° du CGI.