SECTION 1 CONDITIONS D'OCTROI DE L'EXONÉRATION
SECTION 1
Conditions d'octroi de l'exonération
1L'article 238 bis C-I du CGI autorise la distribution en franchise d'impôt des indemnités allouées aux sociétés atteintes par une mesure de nationalisation, d'expropriation ou toute autre mesure restrictive similaire prise par un gouvernement étranger, sous réserve que soient remplies certaines conditions.
Ces conditions sont relatives :
- à la société distributrice ;
- aux bénéficiaires de la distribution ;
- au délai imparti pour la distribution ;
- aux modalités d'imputation de la distribution.
A. SOCIÉTÉ DISTRIBUTRICE
I. Principes
2En principe, seule est fondée à opérer la distribution en franchise, la société qui exploitait directement à l'étranger des établissements ayant fait l'objet des mesures de nationalisation, d'expropriation ou des autres mesures restrictives visées au premier alinéa de l'article 238 bis C-I du CGI.
3Par ailleurs, le bénéfice de ce texte ne peut être invoqué que par les sociétés françaises, c'est-à-dire par les sociétés constituées selon la loi française et ayant leur siège social réel dans la métropole ou dans un département d'outre-mer.
II. Mesures de tempérament : sociétés françaises exploitant à l'étranger par l'intermédiaire de filiales de droit local
4L'interprétation stricte de l'article 238 bis C-I du CGI conduirait à exclure du bénéfice du régime de faveur les sociétés françaises exploitant à l'étranger par l'intermédiaire de filiales de droit local, dès l'instant où ces dernières sont dotées d'une personnalité juridique distincte de celle des sociétés mères.
5Toutefois, les sociétés françaises sont autorisées à invoquer le bénéfice des dispositions de l'article 238 bis C-I du CGI, lorsqu'elles répartissent, dans les conditions et délais prévus par ce texte, les indemnités qu'elles ont reçues à la suite de la nationalisation ou de l'expropriation de filiales étrangères dont elle détiennent la totalité du capital.
6En outre, il a été admis que le même régime pourrait être appliqué -toutes autres conditions légales étant supposées remplies- en cas de nationalisation ou expropriation de filiales étrangères dont la société mère française détiendrait non la totalité, mais seulement la quasi-totalité (plus de 90 %) du capital.
7Dans l'hypothèse où le capital d'une filiale étrangère expropriée ou nationalisée serait détenu non par une seule société mais par plusieurs sociétés françaises, il y aurait lieu de soumettre le cas au Service de la Législation Fiscale (sous-direction B, bureau B 2).
III. Absorption par voie de fusion ou de scission de la société fondée à se prévaloir du régime de faveur
8En cas d'absorption par voie de fusion ou de scission réalisée dans les conditions prévues aux articles 210 A, 210 B et 210 C du CGI, d'une société remplissant les conditions requises pour se prévaloir des dispositions de l'article 238 bis C-I précité, le bénéfice de ces dispositions peut, en principe, être invoqué par la société absorbante ou nouvelle, sous réserve que celle-ci se conforme aux exigences du texte, en ce qui concerne le délai de répartition et les modalités d'imputation.
B. BÉNÉFICIAIRES DE LA DISTRIBUTION
9La distribution doit être effectuée au profit des actionnaires, porteurs de parts et personnes ayant des droits similaires. Cette formule vise, d'une manière générale, outre les actionnaires :
- les membres de sociétés soumises au régime des sociétés de capitaux ou ayant opté pour ce régime ;
- les porteurs de parts bénéficiaires ou de fondateur ;
- les administrateurs de sociétés anonymes ou autres dirigeants de sociétés dans la mesure de leurs droits statutaires à la répartition des bénéfices nets sociaux ou, le cas échéant, de leurs droits aux répartitions de réserves.
C. DÉLAI IMPARTI POUR LA DISTRIBUTION
10La répartition doit intervenir dans un délai maximum d'un an, à compter de l'encaissement effectif des sommes reçues au titre de l'indemnité.
La société ne peut donc distribuer en franchise que les sommes effectivement encaissées par elle.
11Lorsque l'indemnité est versée par acomptes ou selon un plan de paiement échelonné sur une durée de temps déterminée, le droit au bénéfice de l'exonération ne prend naissance qu'au moment de chaque encaissement.
12Toutefois, lorsque l'encaissement d'une fraction d'indemnité a lieu au début d'un exercice et porte sur des sommes relativement faibles, l'observation stricte du délai d'un an peut avoir pour résultat d'obliger la société à procéder séparément à des répartitions d'un montant minime, sans qu'elle ait la possibilité de les ajouter au dividende normal de l'exercice, de manière que la totalité des sommes distribuées soit représentée par un seul coupon.
13Afin d'éviter les complications de ce genre et la multiplication des assemblées d'actionnaires qui en serait le corollaire, il est admis que la déchéance résultant de l'expiration du délai d'un an ne serait pas opposée aux sociétés, lorsque la répartition des indemnités aurait été décidée par l'assemblée générale ordinaire appelée, dans les délais statutaires, à se prononcer sur les comptes de l'exercice au cours duquel ces indemnités ont été effectivement encaissées, ou encore par une assemblée extraordinaire convoquée le même jour que l'assemblée ordinaire, dans l'hypothèse où l'imputation de la distribution sur les postes du passif excéderait les pouvoirs de cette dernière (imputation sur le poste « capital », par exemple).
D. MODALITÉS D'IMPUTATION DE LA DISTRIBUTION
14Conformément à l'article 238 bis C-I du CGI, la distribution doit être imputée sur les postes du passif correspondant le plus étroitement aux éléments transférés, ceci, afin d'éviter que les sociétés n'imputent, par priorité, la répartition de l'indemnité sur les postes de réserves ordinaires de manière à retirer le maximum d'avantages des dispositions combinées :
- de l'article susvisé ;
- de l'article 112-1° du même code, qui autorise la reprise des apports en franchise, dans la mesure où tous les bénéfices et les réserves, autres que la réserve légale, ont été auparavant répartis.
15En pratique, les modalités d'imputation de la répartition ne soulèvent des difficultés que si la société a procédé à la réévaluation de son bilan, notamment à celle des biens nationalisés ou expropriés à l'étranger. C'est pourquoi la condition d'imputation doit être appréciée concurremment avec les incidences de la réévaluation.
Deux situations sont à envisager.
1. Le montant de l'indemnité excède la valeur comptable des biens transférés.
16L'attribution de l'indemnité a nécessité, de ce fait, la création au passif d'un poste spécial (réserve de nationalisation ou d'expropriation) qui enregistre l'excédent de l'indemnité sur la valeur comptable des biens transférés.
La répartition de l'indemnité doit être imputée par priorité sur cette réserve, sans distinguer selon que la société a ou non révisé son bilan.
Si la société a révisé son bilan, la répartition de l'indemnité doit, ensuite, être imputée sur la fraction de la réserve de la réévaluation correspondant aux éléments ayant donné lieu à l'attribution de l'indemnité.
Si les postes indiqués ci-dessus ne sont pas suffisants, le surplus de la répartition doit, en principe, être imputé sur le poste « capital ». Mais la société a la faculté de limiter la réduction de capital résultant de cette imputation à une fraction proportionnelle au montant des indemnités perçues ou à percevoir, par rapport à la valeur totale de l'actif social, y compris lesdites indemnités.
Si, du fait de cette limitation, il subsiste un solde d'indemnité à imputer, l'imputation peut être effectuée librement.
17Dans le cas où le poste « capital » comprendrait non seulement des apports réels effectués par les associés lors de la constitution de la société ou d'une augmentation de capital ultérieure, mais des bénéfices ou des réserves incorporés audit poste, la réduction de capital serait considérée, pour l'application des dispositions de l'article 238 bis C-I du CGI, comme s'imputant :
- d'abord sur la fraction de la réserve de réévaluation correspondant aux éléments nationalisés ou expropriés, qui aurait été incorporée au capital ;
- ensuite sur les apports réels ou sur les réserves incorporées au capital avant le 1er janvier 1949, c'est-à-dire sur les sommes dont le remboursement pourrait être effectué en franchise en vertu de l'article 112 dudit code.
18S'il existait dans les écritures de la société d'autres postes également susceptibles d'être remboursés en franchise -tels que des postes « prime d'émission » ou « prime de fusion » (dans la mesure où la fusion a été réalisée, sous certaines conditions, avant le 1er janvier1949 ; cf. 4 J 1225, n°s 16 et suiv. )-, la société aurait la faculté d'utiliser ces postes pour compenser la distribution de l'indemnité et de diminuer d'autant le montant de la réduction de capital à laquelle elle est tenue de procéder conformément à la règle énoncée ci-dessus.
2. Le montant de l'indemnité attribuée est inférieur à la valeur comptable des biens nationalisés ou expropriés.
19La perte ainsi supportée par l'entreprise doit être imputée, par priorité sur la fraction de la réserve de réévaluation (incorporée ou non au capital) correspondant aux éléments ayant donné lieu à l'attribution de l'indemnité, le surplus pouvant, le cas échéant être imputé librement par les sociétés.
C'est seulement après avoir diminué les postes du bilan appropriés, du montant de la perte, qu'il y a lieu d'effectuer l'imputation de la répartition comme il est indiqué plus haut.
20Lorsque la société a encaissé la totalité de l'indemnité et qu'elle en répartit le montant en une seule fois, les modalités de l'imputation peuvent être déterminées dans leur ensemble, selon les règles mentionnées ci-dessus aux n°s 14 et suivants. Si l'indemnité est encaissée et distribuée par fractions la société peut, à son choix, ou bien respecter l'ordre d'imputation indiqué ci-dessus ou procéder immédiatement à la réduction proportionnelle de son capital si elle préfère utiliser cette méthode.