Date de début de publication du BOI : 01/11/1995
Identifiant juridique : 4I1241
Références du document :  4I124
4I1241

SECTION 4 RÉGIME FISCAL DES FUSIONS

SECTION 4

Régime fiscal des fusions

Les développements suivants sont consacrés exclusivement au régime fiscal, au regard de l'impôt sur les sociétés, des sociétés participant à une opération de fusion.

Il convient de se reporter :

- à la série 7 E, division H, chapitre 7, en ce qui concerne la taxation des apports en matière de droits d'enregistrement ;

- à la série 4 FE, division J , pour ce qui est de l'imposition des revenus distribués.

SOUS-SECTION 1

Situation de la société absorbée

  A. PLUS-VALUES ET PROFITS DE FUSION

  I. Détermination de la plus-value de fusion

Une distinction doit être opérée, à cet égard, selon que la fusion entraîne la création d'une société nouvelle ou s'effectue par voie d'apport à une société préexistante.

1. Création d'une société nouvelle.

1Dans cette situation, chacune des sociétés absorbées reçoit en rémunération de son apport des actions ou des parts sociales de la société nouvelle.

En outre, il est de règle que la société nouvelle prenne à sa charge le passif dû aux tiers par la société absorbée.

Le montant de la plus-value ou de la moins-value de fusion est obtenu en ajoutant, à la valeur réelle des actions ou des parts remises en contrepartie de l'apport, le montant du passif pris en charge par la société nouvelle, puis en retranchant du total ainsi obtenu, la valeur comptable nette de l'actif apporté (prix de revient de cet actif diminué des amortissements).

2Dans ce calcul, on retient d'une manière générale, comme expression de la valeur réelle des titres remis à la société absorbée, l'estimation nette attribuée, dans le bilan de la société nouvelle, aux biens apportés. Cette estimation est obtenue, le cas échéant, en retranchant de la valeur pour laquelle ces biens sont portés à l'actif du bilan de la société nouvelle, le montant des charges grevant les mêmes biens et reprises au passif de ladite société.

Ainsi, le Conseil d'État a jugé que la plus-value réalisée par la société absorbée dans le cadre d'une fusion est représentée par la différence entre le prix de cession des éléments apportés et leur prix de revient tel qu'il figure au bilan de la société absorbée, diminuée des amortissements effectivement pratiqués (CE, arrêt du 17 décembre 1955, req. n° 73075, RO p. 449).

2. Apport à une société préexistante.

3 a. Lorsque la fusion est opérée par voie d'apport à une société préexistante propriétaire d'actions ou de parts de la société absorbée, il est sans intérêt pour elle d'émettre des actions nouvelles en représentation de la partie du fonds social de la société absorbée qui correspond à ses droits dans cette société.

En fait, elle s'abstient donc d'émettre d'autres actions que celles nécessaires pour remplir de leurs droits les associés de la société absorbée autres qu'elle même et se borne à constater à son passif une réserve corrélative (« prime de fusion »).

La valeur réelle des actions émises ne représenté dès lors, en règle générale, qu'une fraction de celle du patrimoine apporté.

4Pour déterminer la plus-value réalisée par la société absorbée, il ne suffit pas de tenir compte -comme dans le cas d'une société nouvelle- de la valeur réelle des actions ou des parts sociales remises à la société absorbée en rémunération de ses apports par la société absorbante. Il faut ajouter à cette valeur celle qui -calculée sur la même base- doit être attribuée à la partie des apports qui n'est pas effectivement rémunérée parce qu'elle se compense avec les droits que possédait déjà la société absorbante dans la société absorbée. Par exemple, si la participation de la société absorbante était d'un tiers du capital de la société absorbée, la valeur réelle des actions délivrées à cette dernière doit être multipliée par 3/2, c'est-à-dire majorée de moitié pour déterminer la valeur totale de l'actif net apporté, qui doit servir de base au calcul de la plus-value.

Ainsi le Conseil d'État a jugé que dans l'hypothèse où la société absorbante étant déjà détentrice d'un certain nombre d'actions de la société absorbée, se borne à émettre les actions nouvelles nécessaires seulement à remplir de leurs droits les autres actionnaires de la société absorbée, le prix de cession effectif doit être calculé en ajoutant à la valeur des actions nouvelles réellement émises -qui, en pareil cas, ne représente en effet qu'une fraction de la valeur du patrimoine apporté- la valeur, calculée sur la même base, de la partie des apports correspondant aux droits sociaux que possédait déjà la société absorbante dans la société absorbée, c'est-à-dire aux actions de cette dernière société déjà détenues par la société absorbante (CE, arrêt du 17 décembre 1955, req. n° 73075, RO p. 449).

5 b. Lorsque la fusion est opérée par voie d'apport à une société préexistante qui ne détient pas d'actions de la société absorbée, les règles sont identiques à celles prévues en cas de création d'une société nouvelle (cf. ci-dessus n°s 1 et suiv. ).

Ainsi, lorsqu'à l'occasion d'une fusion de sociétés, la société absorbée reçoit en contrepartie de son apport des actions nouvelles de la société absorbante, émises sous forme d'augmentation de capital, la valeur de ces actions, représente le prix de cession des éléments apportés. Cette valeur doit être déterminée d'après la valeur réelle, à la date de la fusion, de l'actif social correspondant et non d'après la seule valeur nominale attribuée aux actions dans l'acte de fusion (CE, arrêt du 31 juillet 1953, req. n° 73789, RO p. 323).

6 Remarque. - La valeur des actions nouvelles doit être déterminée d'après leur valeur réelle à la date de la fusion.

D'une manière générale, on retient comme expression de la valeur réelle des titres remis à la société absorbée, l'estimation nette attribuée, dans le bilan de la société absorbante, aux biens apportés. Cette estimation est obtenue, le cas échéant en retranchant de la valeur pour laquelle ces biens sont portés à l'actif du bilan de la société bénéficiaire des apports, le montant des charges grevant les mêmes biens et reprises au passif de ladite société.

Toutefois, dans cette évaluation, l'Administration n'est pas liée par l'estimation des parties fondée sur la valeur nominale attribuée aux actions dans l'acte de fusion. Cette valeur peut être déterminée d'après le cours unitaire résultant de la première cotation ayant suivi la réalisation de l'apport (CE, arrêts des 31 juillet 1953, req. n° 73789, RO p. 323 et 17 décembre 1955, req. n° 73075, RO p. 449).

  II. Régime fiscal des plus-values et profits de fusion

1. Principe : exonération.

7L'article 210 A-1 du CGI dispose que les plus-values nettes et les profits dégagés sur l'ensemble des éléments d'actif compris dans un apport-fusion ne sont pas soumis à l'impôt sur les sociétés 1 .

a. Plus-values nettes sur éléments d'actif immobilisé apportés.

8L'exonération couvre l'intégralité de la plus-value nette afférente aux éléments apportés même pour la fraction qui, par suite de la prise en charge du passif de la société absorbée, ne donne pas lieu en fait à l'attribution gratuite d'actions ou de parts sociales.

Cette exonération s'applique de plein droit dès lors que les conditions d'application du régime spécial sont remplies, à moins que les sociétés n'aient :

- soit renoncé à l'application de ce régime ;

- soit opté pour l'imposition immédiate prévue à l'article 210 A-4 du CGI (cf. ci-dessous n° 21 ).

9 Remarque. - La société absorbée n'est affranchie de l'impôt sur les sociétés sur les plus-values réalisées à l'occasion de l'apport de ses éléments d'actif à la société absorbante que si cette dernière a pris, dans l'acte de fusion, tous les engagements énumérés à l'article 210 A-3 du CGI (cf. ci-après 4 1 1242, n°s 4 et suiv. ) [dans ce sens, voir CE, arrêt du 6 mars 1981, req. n° 15085, RJ n° II, p. 24].

On rappelle que le sort fiscal de cette plus-value est différent selon qu'elle est afférente aux éléments amortissables ou aux éléments non amortissables :

- l'imposition de la plus-value nette dégagée par l'apport des éléments non amortissables se trouve reportée au moment de la cession ultérieure de ces biens, par la société absorbante (cf. ci-après 4 1 1242, n°s 62 et suiv.) ;

- la plus-value nette afférente aux éléments amortissables est réintégrée dans les résultats imposables de la société absorbante (cf. 4 1 1242, n°s 41 à 61) [sur les modalités de cette intégration voir ci-après 4 1 1242, n°s 40 et suiv.].

b. Profits sur éléments d'actif circulant apportés.

10La neutralisation des profits réalisés sur les éléments de l'actif circulant est subordonnée à la condition que la société absorbante inscrive à son bilan les éléments autres que les immobilisations pour la valeur qu'ils avaient, du point de vue fiscal, dans les écritures de la société absorbée. Dans le cas contraire, la société bénéficiaire des apports doit comprendre dans ses résultats de l'exercice au cours duquel intervient l'opération d'apport, le profit correspondant à la différence entre la nouvelle valeur de ces éléments et la valeur qu'ils avaient, du point du vue fiscal, dans les écritures de la société absorbée (cf. ci-après 4 1 1242, n°s 8 et suiv. ).

11 Précision :

En cas de fusions ou d'opérations assimilées placées sous le régime prévu aux articles 210 A à 210 C du code général des impôts, le bois sur pied transféré est soumis au régime prévu pour les éléments de l'actif circulant.

c. Apport de titres détenus en portefeuille.

1° Champ d'application de la nouvelle mesure.

12Le paragraphe 6 de l'article 210 A du code général des impôts, tel qu'il résulte de l'article 41 de la loi de finances rectificative pour 1994 vise les titres du portefeuille dont le résultat de cession est exclu du régime des plus-values ou moins-values à long terme conformément à l'article 219 du même code.

Cette mesure est susceptible de concerner l'ensemble des titres du portefeuille à l'exception des titres de participation, des parts de fonds commun de placement à risque remplissant les conditions prévues à l'article 163 quinquies B-II-1° bis du code général des impôts et qui sont détenues depuis au moins cinq ans, ainsi que les parts de sociétés de capital risque remplissant les conditions prévues à l'article 1er de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985, également détenues depuis au moins cinq ans (cf. BOI 4 B-3-95).

13L'assimilation des titres exclus du régime des plus ou moins-values à long terme à des immobilisations ne concerne que les opérations placées sous le régime de faveur prévu à l'article 210 A du code général des impôts (fusions, scissions ou apports partiels d'actif).

2° Portée de la mesure.

• La mesure confirme la doctrine applicable en matière de titres du portefeuille détenus par les sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés.

14S'agissant des titres du portefeuille, la doctrine administrative considérait traditionnellement comme des éléments de l'actif immobilisé les titres détenus en portefeuille depuis plus de deux ans et les titres détenus depuis moins de deux ans lorsque le portefeuille comprend des titres de même nature détenus depuis plus de deux ans.

Cette règle a été rapportée par une instruction du 11 août 1993 (cf. BOI 4 1-1-93, n° 4).

L'article 41 déjà cité, en assimilant, pour l'application de l'article 210 A du code général des impôts, les titres du portefeuille dont le résultat de cession est exclu du régime des plus ou moins-values à long terme à des éléments de l'actif immobilisé, confirme donc la dernière doctrine pour les titres du portefeuille détenus par les sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés.

Dès lors, les titres exclus du régime des plus ou moins-values à long terme constituent des éléments de l'actif circulant. Toutefois, par exception, ces titres sont assimilés à des éléments de l'actif immobilisé pour l'application du régime de faveur des fusions quelle que soit leur durée de détention par l'entreprise.

• L'apport des titres de placement pour leur valeur réelle n'entraîne plus l'imposition immédiate, par la société bénéficiaire des apports, des profits ainsi dégagés.

15L'assimilation des titres du portefeuille entrant dans le champ d'application de l'article 41 de la loi de finances pour 1994 à des éléments de l'actif immobilisé supprime l'obligation d'apporter les titres en cause à leur valeur fiscale, pour que l'opération ne génère aucune imposition immédiate chez la société bénéficiaire de l'apport.

16Ainsi, l'apport à la valeur réelle de ces titres n'entraîne plus l'imposition immédiate des profits réalisés à cette occasion par la société apporteuse lorsque les conditions mentionnées à l'article 210 A sont respectées. Cette imposition est reportée chez la société bénéficiaire de l'apport dans les conditions prévues au c du 3 de ce même texte pour les immobilisations non amortissables. De même, lorsque l'opération d'apport génère une perte pour les titres de placement considérés, la déduction de la perte est reportée dans les mêmes conditions chez la société bénéficiaire de l'apport.

1   En ce qui concerne le cas où la société absorbée est une société en commandite simple, cf. ci-après 4 I 1242 n° 76 .