Date de début de publication du BOI : 01/03/1995
Identifiant juridique : 4H1312
Références du document :  4H1312
Annotations :  Lié au BOI 4H-5-01

SOUS-SECTION 2 SOCIÉTÉS COOPÉRATIVES AGRICOLES ET LEURS UNIONS

DEUXIÈME PARTIE

 Régime fiscal des sociétés coopératives agricoles.

40Les sociétés coopératives agricoles et leurs unions entrent dans le champ d'application de l'impôt sur les sociétés conformément aux dispositions de l'article 206-1 du CGI.

Ces organismes sont, toutefois, exonérés de cet impôt, sous certaines conditions, par l'article 207-1-2° et du même code, étant observé que l'exonération ne s'étend pas à certaines opérations.

En outre, lorsque les sociétés coopératives agricoles et leurs unions ne fonctionnent pas conformément aux dispositions qui les régissent, leur régime fiscal de faveur se trouve remis en cause.

Seront étudiées successivement :

- les opérations exonérées ;

- les opérations ne bénéficiant pas de l'exonération d'impôt sur les sociétés ;

- les cas particuliers : opérations exonérées ou imposables selon le cas ;

- les relations entre les coopératives agricoles ou leurs unions et les SICA.

  A. LE PRINCIPE : L'EXONÉRATION D'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS

  I. Conditions générales de l'exonération

41Le bénéfice des exonérations fiscales prévues en faveur des sociétés coopératives agricoles par les dispositions de l'article 207-1-2° et du CGI est subordonné à l'observation, par ces sociétés, des dispositions légales et réglementaires qui les régissent. À défaut, la coopérative est soumise à l'impôt sur les sociétés sur l'ensemble des résultats dégagés, dans les conditions de droit commun. Le respect du statut juridique est donc primordial en la matière.

42Il est précisé à cet égard que les sociétés coopératives agricoles sont tenues de produire, à toute réquisition des agents de l'administration, leur comptabilité et les justifications nécessaires pour prouver qu'elles fonctionnent conformément aux dispositions légales et réglementaires qui les régissent (code rural, art. R*. 525-13). Il suffit, en principe, qu'une seule des opérations réalisées se situe en dehors des prévisions du statut de la coopération agricole pour que l'exonération d'impôt sur les sociétés prévue à l'article 207-1-2° et du CGI soit remise en cause.

43Lorsqu'un agent constate que le fonctionnement d'une société coopérative agricole n'est pas conforme aux dispositions légales ou réglementaires régissant la coopération agricole, il doit adresser au directeur des services fiscaux dont il dépend un rapport relatant avec précision les faits constatés. Ce rapport est transmis par le directeur avec son avis personnel à la Direction générale sous le timbre du bureau IV B 1 qui, après avoir pris l'attache du service de la législation fiscale (bureau B 2), décide de la suite à donner.

La fonction de la coopération agricole, définie par l'article L. 521-1 du code rural, est l'utilisation en commun par des agriculteurs de tous moyens propres à faciliter ou à développer leur activité économique, à améliorer ou à accroître les résultats de cette activité. Les sociétés coopératives agricoles sont autorisées, par conséquent, à pratiquer dans le cadre de leur objet agricole des opérations de toute nature, dès l'instant où ces opérations sont traitées avec leurs sociétaires ou au profit de ceux-ci et réalisées en vue des objectifs qui leur ont été ainsi assignés.

  II. Nature des opérations exonérées

1. Opérations réalisées par les sociétés coopératives agricoles d'approvisionnement et d'achat et leurs unions.

44Conformément aux dispositions de l'article 207-1-2° du CGI, les sociétés coopératives agricoles d'approvisionnement et d'achat et leurs unions sont exonérées de l'impôt sur les sociétés, sauf pour les opérations effectuées avec des non-sociétaires et à condition qu'elles fonctionnent conformément aux dispositions qui les régissent.

Les coopératives agricoles d'approvisionnement ont notamment pour objet d'assurer l'approvisionnement de leurs seuls associés coopérateurs en leur procurant les produits, les équipements, les instruments et les animaux nécessaires à leurs exploitations.

45Bien que ces sociétés se trouvent dans l'impossibilité pratique de vérifier cas par cas la destination finale des produits fournis à leurs associés, elles ne peuvent pas bénéficier de l'exonération de l'impôt sur les sociétés à raison des ventes de produits ou de matériels faites à leurs sociétaires lorsque, à la date de ces ventes, elles ne peuvent manifestement pas ignorer que ces opérations portent sur du matériel qui n'est pas nécessaire à l'exploitation agricole de l'acheteur (CE, arrêt du 2 juin 1986, n° 56720).

2. Opérations réalisées par les sociétés coopératives de production, de transformation, conservation et ventes de produits agricoles et leurs unions.

46À condition qu'elles fonctionnent conformément aux dispositions qui les régissent, les sociétés coopératives de production, de transformation, conservation et ventes de produits agricoles et leurs unions sont exonérées de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 207-1-3° du CGI, sauf pour les opérations désignées ci-après :

- ventes effectuées dans un magasin de détail distinct de leur établissement principal ;

-opérations de transformation portant sur les produits ou sous-produits autres que ceux destinés à l'alimentation de l'homme et des animaux ou pouvant être utilisés à titre de matières premières dans l'agriculture ou l'industrie ;

-opérations effectuées par les sociétés coopératives ou unions susvisées avec des non-sociétaires.

3. Opérations réalisées par les coopératives de services et leurs unions.

47  Bien qu'aucune disposition du CGI ne vise explicitement les coopératives agricoles de prestations de services dont l'objet est défini à l'article R*. 521-1 du code rural (cf. ci-dessus n° 17 ), celles-ci bénéficient par assimilation du même régime fiscal que les sociétés coopératives de production ou de transformation de produits agricoles (cf. ci-dessus n° 46 ). Tel est le cas notamment des coopératives d'insémination artificielle et des coopératives d'utilisation en commun de matériel agricole (CUMA) dès lors que leur objet est exclusivement agricole (cf. n°s 12 et 13 ).

Il en est de même des unions mixtes formées entre des coopératives agricoles et des coopératives de consommation qui fonctionnent conformément aux dispositions qui les régissent.

4. Opérations réalisées avec l'Office national interprofessionnel des céréales.

48Aux termes de l'article 207-1-3° du CGI, l'exonération de l'impôt sur les sociétés est applicable aux opérations effectuées par les coopératives de céréales et leurs unions avec l'Office national interprofessionnel des céréales relativement à l'achat, la vente, la transformation ou le transport des céréales. Il en est de même pour les opérations effectuées par des coopératives de céréales avec d'autres coopératives de céréales dans le cadre de programmes élaborés par l'Office ou avec l'autorisation de cet établissement.

  B. EXCEPTIONS AU PRINCIPE D'EXONÉRATION

49Les sociétés coopératives agricoles qui ne fonctionnent plus conformément aux dispositions qui les régissent perdent le bénéfice de l'exonération d'impôt sur les sociétés attachée au respect de leurs statuts et deviennent taxables sur la totalité des résultats dégagés, y compris ceux provenant des affaires réalisées avec les adhérents.

En outre, certaines opérations sont formellement exclues de l'exonération de l'article 207-1-2° ou du CGI, même si les coopératives respectent leurs statuts.

  I. Remise en cause totale de l'exonération

50Comme il a déjà été dit (n° 42 ), il suffit qu'une seule disposition du statut de la coopération ne soit pas respectée par la coopérative pour que celle-ci perde le bénéfice des exonérations fiscales.

À titre d'exemple, la remise en cause de l'exonération peut intervenir dans les cas suivants :

- non-respect des conditions de constitution et de fonctionnement ;

- non-respect de la règle de l'exclusivisme.

1. Non-respect des conditions de constitution et de fonctionnement.

51Les conséquences d'une remise en cause du fonctionnement régulier d'une coopérative étant particulièrement importantes, tant au niveau de l'impôt sur les sociétés que de l'ensemble des taxes auxquelles elle est assujettie, il convient d'attacher un soin particulier à la motivation de cette remise en cause qui doit réunir les éléments permettant de révéler que la coopérative ne respecte pas les clauses de son statut.

52Il convient donc d'examiner les principales clauses du statut de la coopérative concernant notamment :

- les limites de l'objet social agricole (il est précisé, à cet égard, que si la dérogation à l'exclusivisme permet de réaliser avec des tiers les mêmes opérations que celles qui sont normalement effectuées avec les associés coopérateurs, elle ne permet pas d'étendre le champ d'activité de la coopérative) ;

- les modalités d'affectation des résultats ; il convient de vérifier, en ce domaine, que l'assemblée générale respecte les règles spécifiques du statut, à savoir :

• limitation de l'intérêt versé au capital souscrit par les associés coopérateurs à un taux au plus égal au taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées publié par le Ministre de l'Économie, étant précisé que l'intérêt servi aux parts des associés non coopérateurs peut être de deux points supérieur à celui des parts des associés coopérateurs ;

• ristourne des seuls excédents réalisés sur les opérations faites avec les coopérateurs au prorata des opérations de l'exercice ;

• non-répartition des réserves entre les associés ;

• dotation aux réserves indisponibles des bénéfices nets réalisés sur les opérations faites avec les tiers (et, le cas échéant, des subventions d'équipement reçues de l'État ou des collectivités publiques locales) ;

• le respect de l'engagement des coopérateurs en ce qui concerne l'obligation d'utiliser les services de la coopérative et l'obligation de souscrire au capital social.

2. Non-respect de l'objet social.

53Une société coopérative agricole ne peut accomplir que des opérations autorisées par le statut de la coopération ou par ses propres statuts. La violation de cette disposition entraîne la déchéance du régime fiscal de faveur prévu par l'article 207-1-2° et du CGI.

54Une société coopérative agricole qui achète ou construit des immeubles en vue de la vente effectue des opérations étrangères à son objet réglementaire et doit être considérée comme ne fonctionnant pas conformément aux dispositions qui la régissent. Elle se trouve déchue, de ce fait, du bénéfice de l'exonération d'impôt sur les sociétés pour l'ensemble de ses activités.

Il en est ainsi, par exemple, d'une société coopérative agricole qui construit, sur un terrain lui appartenant, un bâtiment destiné en partie à être utilisé pour ses bureaux ou le logement de son personnel et en partie à la vente. Toutefois, si la coopérative se borne à la construction des locaux qui lui sont nécessaires et vend le droit de surélévation à des tiers, cette cession pourra bénéficier de l'exonération d'impôt sur les sociétés.

3. Non-respect de l'exclusivisme coopératif.

Deux situations peuvent se présenter :

55a. La coopérative n'a pas opté pour la dérogation à la règle de l'exclusivisme et n'a pas bénéficié d'une dérogation interministérielle prévue à l'article R*. 521-2 du code rural (circonstances économiques exceptionnelles) [cf. ci-dessus n° 15 ].

Dans ce cas, il lui est interdit de traiter des opérations avec des non-sociétaires, sous peine de perdre, en principe, le bénéfice de son régime fiscal privilégié.

56b. Elle a opté pour la dérogation à la règle de l'exclusivisme dans la limite légale de 20 % de son chiffre d'affaires.

Il convient alors de s'assurer que la coopérative a bien satisfait à l'ensemble des obligations légales qui en découle :

- comptabilité distincte des opérations effectuées avec des tiers ;

- révision périodique de sa gestion par un organisme agréé ;

- souscription des déclarations annuelles de résultats.

Bien entendu, la limite de 20 % d'opérations réalisées avec les tiers ne doit pas avoir été dépassée.

À cet égard, il est rappelé qu'une coopérative traitant plus de 20 % de son chiffre d'affaires avec des non-associés devient imposable à l'impôt sur les sociétés à raison de la totalité de son bénéfice.

  II. Opérations ne bénéficiant pas de l'exonération d'impôt sur les sociétés

57Les coopératives agricoles d'approvisionnement et d'achat doivent, le cas échéant, être assujetties à l'impôt sur les sociétés à raison des excédents d'exploitation provenant des opérations traitées avec des non-sociétaires dans le cadre des dérogations ou autorisations accordées en application des dispositions réglementaires qui les régissent.

58De même, les coopératives de production, de transformation, conservation et ventes de produits agricoles ainsi que les coopératives de prestations de services qui doivent y être assimilées, admises au bénéfice de l'exonération prévue à l'article 207-1-3° du CGI, doivent, le cas échéant, être assujetties à l'impôt sur les sociétés à raison des excédents de recettes provenant des opérations ci-après désignées :

1° Ventes effectuées dans un magasin de détail distinct de leur établissement principal (les coopératives qui réalisent de telles opérations doivent les enregistrer dans une comptabilité spéciale).

2° Opérations de transformation portant sur des produits ou sous-produits autres que ceux destinés à l'alimentation de l'homme et des animaux ou pouvant être utilisés à titre de matières premières dans l'agriculture ou l'industrie.

3° Opérations effectuées avec des non-sociétaires. Les opérations ainsi visées sont, bien entendu, celles réalisées dans le cadre de dérogations ou autorisations accordées en application de la réglementation en vigueur.

1. Opérations réalisées avec les tiers.

59  Les sociétés coopératives agricoles peuvent réaliser avec les tiers deux catégories principales d'opérations :

- des opérations, prévues par les statuts, mentionnées ci-dessus que la coopérative peut aussi réaliser avec des tiers non associés. Le volume de ces seules opérations est limité par la loi à 20 % du chiffre d'affaires annuel ;

- d'autres opérations qui, découlant de la capacité juridique de la coopérative, n'ont pas à être prévues par les statuts, mais sont, cependant, réalisées avec des tiers, par exemple : prises de participations, locations. Ces opérations, qui ne sont pas identiques à celles réalisées avec les associés coopérateurs, ne sont pas soumises à la limitation de 20 %.

a. Opérations soumises à la limite de 20 %.

60  Sont imposables les opérations conformes à l'objet social statutaire et identiques à celles qui sont effectuées avec les sociétaires que les coopératives sont autorisées à faire avec des tiers non associés dans la limite de 20 % de leur chiffre d'affaires annuel, lorsqu'elles ont levé, dans leurs statuts, l'option correspondante.

Les opérations ainsi effectuées avec les tiers doivent faire l'objet d'une comptabilité spéciale (cf. ci-dessus n° 32 ).

La limite de 20 % du chiffre d'affaires réalisé avec les tiers est appréciée hors taxes (cf. ci-avant n° 29 ).

61  Dans le cas d'une coopérative polyvalente, le montant des opérations faites avec les tiers est apprécié dans le cadre de chacune des trois branches principales définies par les statuts types. Ainsi :

- les approvisionnements vendus à des tiers ne doivent pas dépasser 20 % du chiffre d'affaires de la branche « Approvisionnement » ;

- les produits agricoles achetés à des tiers ne doivent pas dépasser 20 % du chiffre d'affaires de la branche « Collecte, vente » ;

- les services rendus à des tiers ne doivent pas dépasser 20 % du chiffre d'affaires de la branche « Services ».

62  Les excédents provenant des opérations ainsi réalisées avec les tiers sont passibles de l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun. Ils ne subissent pas de prélèvement pour l'alimentation de la réserve légale, mais doivent être portés, sous déduction de l'impôt, dans un compte de réserve indisponible. Ils ne peuvent être ni distribués ni incorporés au capital ni répartis entre les associés en cas de dissolution.

Il est précisé que si une coopérative traite plus de 20 % de son chiffre d'affaires avec des tiers non associés elle devient imposable à l'impôt sur les sociétés à raison de la totalité de son bénéfice.