SOUS-SECTION 6 DÉFAUT DE DÉCLARATION SPÉCIALE ÉVALUATION D'OFFICE
SOUS-SECTION 6
Défaut de déclaration spéciale
Évaluation d'office
1L'évaluation d'office est une procédure unilatérale utilisée par l'administration en cas, essentiellement, de non-production ou de souscription tardive de certaines déclarations spéciales, notamment celle du bénéfice industriel ou commercial prévue à l'article 53 A du CGI. Elle peut également être employée en cas d'opposition individuelle ou collective au contrôle fiscal (LPF, art. L 74 ; cf. 13 L 154).
Le droit accordé à l'administration d'évaluer d'office les bases d'imposition ne lui conférant pas un pouvoir discrétionnaire, il lui appartient d'établir la validité de la mise en oeuvre de cette procédure. Par ailleurs, elle doit être en mesure de faire connaître au contribuable et au juge de l'impôt la méthode qu'elle a suivi pour déterminer les bases d'imposition.
2Seule sera exposée ici la mise en oeuvre de l'évaluation d'office pour absence ou production tardive de la déclaration. Les développements correspondants concernent tant les contribuables placés sous le régime du bénéfice réel que ceux bénéficiant du regime simplifié d'imposition. En effet, les contribuables relevant du régime simplifié d'imposition sont soumis, en ce qui concerne les règles autres que celles propres à ce régime, aux mêmes dispositions que les entreprises imposées d'après leur chiffre d'affaires réel (CGI, annexe II, art. 267 septies).
Les dispositions relatives à la procédure d'évaluation d'office font l'objet de commentaires détaillés dans la série 13 L 154 à laquelle il convient de se reporter en tant que de besoin.
A CAS DANS LESQUELS IL Y A LIEU D'ÉVALUER D'OFFICE
3Comme déjà indiqué, les bénéfices industriels et commerciaux peuvent être évalués d'office en cas, notamment, de non-production ou de production tardive de la déclaration spéciale prévue à l'article 53 A du CGI.
4Depuis le 1er janvier 1987 (loi n°86 1317 du 30 décembre 1986), et à l'exception des situations particulières exposées ci-après n° 15 , la procédure d'évaluation d'office n'est applicable, en vertu de l'article L 73 du LPF, que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure.
I. Retard dans la production de la déclaration
5L'existence de ce retard est appréciée dans les conditions définies ci-avant G 3324, n°s 3 et suivants.
Jusqu'au 31 décembre 1986, l'administration était en droit d'évaluer d'office le résultat de l'entreprise dès lors uniquement qu'un retard était constaté.
Toutefois, l'administration avait recommandé au service, avant toute évaluation d'office. d'adressee au moins une mise en demeure dans tous les cas où le contribuable avait tardé à déclarer ses résultats.
L'article 81-II de la loi de finances pour 1987 a rendu obligatoire ce dispositif.
6Depuis le 1er janvier 1987, la possibilité d'utiliser la procédure d'évaluation d'office est subordonnée à la réalisation de deux conditions cumulatives :
- le service a adressé au contnbuable défaillant au moins une mise en demeure, effectuée par pli postal recommandé avec accusé de réception, d'avoir à déposer une déclaration de résultats ;
- et le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification de cette mise en demeure.
À défaut de mise en demeure, les contribuables qu n'ont pas souscrit de déclaration ne peuvent plus faire l'objet d'une évaluation d'office. Il est donc plus que jamais nécessaire de surveiller le dépôt des déclarations et d'envoyer systématiquement des mises en demeure aux contribuables défaillants.
7 Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que les résultats des entreprises retardataires qui régularisent leur situation, soit spontanément, soit dans le mois de la mise en demeure, ne peuvent être évalués d'office.
* Recommandation particulière.
8Compte tenu du délai de 30 jours ouvert au contribuable pour régulariser sa situation, la prescription serait susceptible de faire échec à la procédure d'évaluation d'office, en cas d'envoi tardif de la mise en demeure.
Dans ce seul, cas il convient de mettre en oeuvre la procédure de redressement contradictoire, qui permet de notifier les redressements, sans envoi préalable d'une mise en demeure.
* Cas particulier : contribuables s'étant indûment maintenus sous un régime forfaitaire.
9Lorsque le service démontre, à l'occasion d'un contrôle sur pièces ou d'une vérification de comptabilité, que le contribuable s'est maintenu indûment sous le régime du forfait en matière de bénéfices industriels et commerciaux, une mise en demeure doit être adressée au contribuable afin que celui-ci dépose la déclaration relative au régime réel dont il relève.
Bien entendu, le service doit préalablement à l'envoi d'une mise en demeure établir que le contribuable a dépassé les limites du régime forfaitaire, ce qui implique que les motifs de dépassement soient notifiés préalablement à la mise en demeure.
Une deuxième notification est alors nécessaire à l'expiration du délai de trente jours suivant la réception de la mise en demeure pour faire connaître les redressements envisagés : la procédure de redressement contradictoire ou d'évaluation d'office est utilisée selon que le contribuable a ou non déposé sa déclaration suite à la mise en demeure.
10C'est pourquoi, pour des motifs de simplicité, le service utilisera d'emblée la procédure de redressement contradictoire.
À cet effet, le service adresse au contribuable une notification de redressements mentionnant :
- les éléments de dépassement du régime forfaitaire ;
- les conséquences sur le régime d'imposition applicable ;
- les redressements proposés.
II. Défaut de production
11Le défaut de déclaration est constitué dès lors que le délai de dépôt de la déclaration spéciale étant écoulé, celle-ci n'a pas été souscrite.
L'article L 73-1° du LPF dispose que le bénéfice imposable d'un contribuable soumis au régime du bénéfice réel est évalué d'office lorsque la déclaration annuelle des résultats n'a pas été déposée dans le délai légal.
12Le montant imposable des bénéfices industriels et commerciaux réalisé par un contribuable qui n'a pas souscrit la déclaration spéciale peut être évalué d'office alors même que l'intéressé aurait déclaré en temps utile les résultats de son activité professionnelle selon les règles applicables à l'imposition des bénéfices non commerciaux (CE, arrêt du 23 janvier 1974, req. n°s 84802 et 84803, RJ n° IV, p. 14).
13Par ailleurs, la circonstance qu'un contribuable soumis à la déclaration de son bénéfice réel ait cru, au vu d'une comptabilité erronée, que son exploitation était déficitaire ne le dispensait pas de déclarer, dans le délai légal, le déficit ainsi constaté, faute de quoi il s'exposait à ce que ses bases imposables fussent arrêtées d'office en application de l'article L. 73-1° du LPF (décision rendue sous l'empire de l'ancien article 59 du CGI dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 73-1° du LPF), [CE, arrêt du 18 décembre 1963, req. n° 39009, R0, p. 460 et dans le même sens, arrêt du 19 décembre 1962, req. n°s 49610 et 49612, RO, p. 221].
14Depuis le 1er janvier 1987, le service doit, lorsqu'il constate un défaut de déclaration, mettre en demeure l'entreprise de souscrire sa déclaration.
La procédure d'évaluation d'office n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure.
III. Cas dans lesquels il n'y a pas lieu de procéder à l'envoi d'une mise en demeure
15L'obligation faite au service depuis le 1er janvier 1987 d'adresser, avant toute évaluation d'office, une mise en demeure ne s'applique pas :
- si le contribuable change fréquemment son lieu de résidence ou de principal établissement ;
- si le contribuable a transféré son activité à l'étranger sans déposer la déclaration de ses résultats ;
- si un contrôle fiscal n'a pu avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers ;
- si le contribuable ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du tribunal de commerce.
B. MODALITÉS DE FIXATION DE LA BASE D'IMPOSITION
I. Déroulement de la procédure
16Le bénéfice est fixé unilatéralement par l'administration.
Par ailleurs, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'est pas appelée à intervenir.
Le service doit, au moyen d'une notification 1 informer le contribuable des motifs de la procédure retenue ainsi que des bases ou des éléments servant au calcul du bénéfice arrêté d'office, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions.
Compte tenu des termes de l'article L. 76 du LPF, la notification doit, par ailleurs, impérativement préciser les modalites de la détermination des bases ou des éléments servant au calcul des impositions d'office. Á cet égard, il est rappelé que la reconstitution des bases imposables doit être effectuée en tenant compte des conditions concrètes de fonctionnement de l'entreprise.
La mention « pour information », sans aucune valeur juridique, ne doit en aucun cas être portée sur la notification.
17La notification doit être effectuée par pli postal recommandé avec accusé de réception.
Par ailleurs, elle doit, à peine de nullité, inviter le redevable à faire parvenir ses éventuelles observations écrites dans un délai de trente jours.
L'intéressé doit également être entendu s'il en fait la demande.
Toutefois, s'agissant d'une procédure non contradictoire, l'administration n'est pas tenue de répondre aux observations écrites du contribuable ni de donner suite aux demandes d'audition répétitives ou abusives.
18La notification des redressements arrêtés d'office interrompt la prescription.
19Le service doit ensuite respecter le délai de trente jours avant de procéder à la mise en recouvrement des impositions. Le contribuable conserve la possibilité de demander, par voie contentieuse, la réduction ou la décharge de l'imposition arrêtée d'office (LPF, art. L. 76 A ). Mais dans cette hypothèse, la charge de la preuve lui incombant, il doit démontrer le caractère exagéré de l'imposition mise ainsi à sa charge (cf. LPF, art. L. 193 et R* 193-1 ).
20Lorsque les conditions d'une évaluation d'office se trouvent réunies, l'administration peut néanmoins décider d'effectuer, soit préalablement, soit postérieurement à sa mise en oeuvre, une vérification de comptabilité. Si l'administration a procédé à une vérification de la comptabilité du contribuable, comme elle en avait le droit, avant d'évaluer d'office le bénéfice et si elle a ensuite soumis le litige à la commission départementale des impôts, les irrégularités qui, selon l'intéressé, auraient affecté tant la vérification de comptabilité que la procédure suivie devant la commission ne sauraient, en tout état de cause, avoir d'influence sur la validité de la procédure d'imposition (CE, arrêt du 7 février 1973, req n°s 81883, 82923 et 82924, RJ n° IV, p. 15 ; voir dans le même sens, arrêt du 13 novembre 1970, req. n° 70708, RJ n° II, p. 209 et RJ n° IV, p. 143).
Cas où la déclaration d'ensemble des revenus a été souscrite.
21Sous réserve de l'obligation faite au service, depuis le 1er janvier 1987, d'adresser une mise en demeure à l'intéressé, le bénéfice industriel et commercial réalisé par un contribuable qui n'a pas souscrit la déclaration spéciale visée à l'article 53 A du CGI doit être évalué d'office. Mais la notification des bases ou des éléments de calcul des impositions d'office et de leur mode de détermination prévue par l'article L. 76 du LPF produit ses effets sur le revenu global du contribuable. Il n'y a donc pas lieu, dans cette hypothèse, de procéder à une notification distincte censée viser le revenu global, quelle que soit la situation à ce stade, sauf bien entendu, si d'autres redressements concourant à la détermination de ce revenu sont envisagés (dans ce sens, cf. CE, arrêts du 18 novembre 1983, n°s 32167 et 32169).
II. Détermination de la base d'imposition
22L'évaluation d'office doit rester dans des limites raisonnables. Il s'agit de tendre à une évaluation aussi exacte que possible.
À cet effet, l'administration est fondée à arrêter les bases d'imposition au moyen de tous les éléments dont elle dispose.
III. Preuve par le contribuable de l'exagération de sa base d'imposition
1. Charge de la preuve.
23Le contribuable dont le bénéfice a été évalué d'office est en droit de contester son imposition après établissement du rôle, par voie de réclamation.
Mais il ne peut obtenir la réduction de ladite imposition devant la juridiction contentieuse que s'il apporte la preuve de son exageration
II a été jugé, à cet égard, qu'un contribuable régulièrement taxé d'office pour n'avoir pas souscrit dans le délai légal la déclaration de son bénéfice réel peut, bien que sa comptabilité soit mal tenue - certains achats, notamment, n'étant pas justifiés par des factures- obtenir une réduction de l'imposition mise à sa charge, s'il apparaît que le bénéfice imposable retenu par l'administration est manifestement exagéré (CE, arrêt du 18 décembre 1963, req. n° 57032, RO, p. 462).
24L'administration doit donc être en mesure d'établir que le bénéfice imposable n'a pas été fixé à un chiffre exagéré et que, quelle que soit la gravité des infractions ou des anomalies constatées , les bases retenues sont demeurées dans la limite des présomptions susceptibles d'être tirées des renseignements en possession du service, de manière à éviter l'établissement d'impositions excessives.
Il est rappelé que le service doit notifier au contribuable la méthode adoptée et les calculs qu'il a effectués pour déterminer la base d'imposition afin de lui permettre de les discuter utilement et d'en établir, le cas échéant, l'exagération (cf. ci-avant n° 17 ).
1 À l'exception des cas prévus au deuxième alinéa de l'article L 67 du LPF.