Date de début de publication du BOI : 26/11/1996
Identifiant juridique : 4E2352
Références du document :  4E2352
Annotations :  Lié au BOI 4A-13-05
Lié au BOI 4E-3-98

SOUS-SECTION 2 PROVISIONS POUR TRAVAUX D'ENTRETIEN ET DE RÉPARATIONS


SOUS-SECTION 2  

Provisions pour travaux d'entretien et de réparations


1Les travaux d'entretien et de réparations des locaux professionnels, du matériel et du mobilier constituent en règle générale des charges annuelles et normales de l'entreprise.

2 Par suite, les dépenses correspondant à ces travaux doivent être déduites des résultats (comptable et fiscal) de l'exercice au cours duquel elles sont engagées et ne peuvent, en principe, justifier la constitution de provisions en franchise d'impôt.

3Toutefois, les entreprises peuvent valablement constituer des provisions à raison de travaux de réparations, d'entretien ou de remise en état :

- qui revêtent une importance telle que les dépenses correspondantes ne peuvent normalement être imputées sur les résultats (comptable et fiscal) d'un seul exercice et doivent, en bonne administration, être réparties sur plusieurs exercices ;

- ou lorsque les circonstances ont fait obstacle de façon insurmontable à l'exécution des travaux.


  A. CHARGES ANNUELLES ET NORMALES


4Les dépenses résultant de l'exécution de travaux courants d'entretien ou de réparations constituent une charge normale de l'exercice au cours duquel elles sont engagées. D'une manière générale, elles ne peuvent dès lors donner lieu, à la clôture d'un exercice antérieur, à la constitution d'une provision déductible du résultat fiscal. Il est rappelé, (cf. 4 E 1141 ) que les dispositions de l'article 39-1-5° du CGI ne peuvent avoir pour effet d'autoriser les entreprises à anticiper la déduction de leurs charges annuelles et qu'une provision ne peut être admise en déduction si elle porte sur des charges incombant normalement aux exercices suivants.

5Le Conseil d'État a fait de nombreuses applications de ces principes.

Il a jugé, en effet, que les dépenses correspondant aux travaux courants de réparations et d'entretien constituent normalement une charge de l'exercice au cours duquel ces travaux sont exposés et, par suite, ne peuvent faire l'objet de provisions constituées en franchise d'impôt (en ce sens : CE, arrêts du 23 juillet 1951, n° 4155, RO, p. 217 ; 12 mars 1969, n° 75615 ; 24 juillet 1981 n° 17 972, 7e et 8e s.-s. ; 8 juin 1983 n° 29 494, 7e et 8e s.-s. ; 8 juillet 1987, n°s 72 701 et 72 702, 9e et 8e s.-s.).

6 La Haute Assemblée a apporté toutefois une dérogation à cette règle en considération des difficultés exceptionnelles qui peuvent avoir fait obstacle de façon insurmontable à l'exécution des travaux au cours de l'exercice pendant lequel ces travaux auraient dû être effectués.

7Elle a considéré, par exemple, que lorsqu'il est établi que des difficultés résultant de l'état de guerre ont fait obstacle, d'une manière insurmontable, à ce que des travaux d'entretien et de réparations courants soient exécutés au cours de l'exercice pendant lequel ils auraient dû normalement être effectués, les entreprises ont le droit d'obtenir que leur bénéfice net soit calculé sous déduction des provisions qu'elles ont été obligées de constituer pour faire face aux charges différées des travaux d'entretien ou de réparations (CE, arrêt du 16 juin 1955, n° 32336, RO, p. 341).

De même, il a été fait application de ces principes dans une espèce où il a été jugé qu'une société n'est pas fondée à constituer des provisions pour faire face à des travaux d'entretien et de réparations qu'elle aurait différés, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que cette société ait été contrainte, par suite de troubles survenus au cours de la période litigieuse, de différer, en tout ou en partie, les travaux d'entretien et de réparations courants de ses installations industrielles 1 (CE, arrêt du 28 juin 1961, n° 33758, 7e et 8e s.-s. réunies, RO, p. 393. Dans le même sens : CE, arrêt du 13 juillet 1965, n° 64364, RO, p. 388).

8Pour l'application de cette dérogation, le Conseil d'État a jugé qu'un manque de main-d'oeuvre ne constitue pas une difficulté exceptionnelle faisant obstacle de manière insurmontable à l'exécution des travaux (CE, arrêt du 12 mars 1969, n° 75615).


  B. CHARGES À RÉPARTIR SUR PLUSIEURS EXERCICES PROVISIONS POUR GROSSES RÉPARATIONS D'ENTRETIEN OU GROS ENTRETIEN


9Il est admis que des provisions puissent être constituées en franchise d'impôt pour faire face à des dépenses correspondant à des charges normales, lorsque l'importance et le caractère de ces charges sont tels qu'elles doivent, en bonne administration, être réparties sur un certain nombre d'exercices. Il en est ainsi, par exemple, pour les dépenses nécessitées par les grosses réparations qu'exigent périodiquement, mais non annuellement, certains matériels -notamment le matériel naval et ferroviaire- et dont le montant constituerait une charge excessive pour les résultats d'un seul exercice.

10Dans la mesure où elles constituent des charges déductibles, les dépenses répondant à la définition donnée ci-dessus ne peuvent, bien entendu, donner lieu à la constitution d'une provision que si elles satisfont aux conditions de fond et de forme prévues à l'article 39-1-5° du CGI et si, notamment, elles sont nettement précisées à la clôture de l'exercice dont elles affectent les résultats. En matière de grosses réparations, cette dernière condition ne peut être regardée comme remplie que si elle s'appuie sur une programmation détaillée des travaux à entreprendre assortie d'une estimation précise de leur coût (en ce sens, CE, arrêt du 1er juillet 1985 n° 49 711, 7e et 8e s.-s.).

11 Le point de savoir si cette condition est réalisée est une question de fait qui doit être résolue par le service au vu des circonstances propres à chaque cas particulier.

12La jurisprudence a confirmé pour sa part que si les frais d'entretien et de réparations constituent normalement une charge de l'exercice au cours duquel ils sont exposés et, par suite, ne peuvent en principe faire l'objet de provisions constituées en franchise d'impôt, il peut en être autrement si les travaux en cause excédent, par leur nature et par leur importance, les dépenses d'entretien ou de réparations entrant dans les charges normales de l'entreprise (CE, arrêt du 12 mars 1969, n° 75615).

13La Haute Assemblée a également jugé qu'une société avait pu valablement constituer des provisions, en fonction de l'importance et de l'urgence des travaux appréciées par catégories de matériel, en vue de faire face à d'importantes réparations de ses installations correspondant à des travaux de gros entretien qui ne se répètent pas annuellement, dès lors que lesdites dépenses n'ont pas pour effet d'accroître la consistance de l'actif ou de prolonger de manière notable la durée d'utilisation des éléments de cet actif (CE, arrêt du 27 octobre 1965, n° 61815 ; dans le même sens, CE, arrêt du 24 juillet 1981 n° 17 974).

14Eu égard aux obligations imposées par la S.N.C.F. de révision triennale de ses wagons affectés au transport de matières corrosives, une société peut constituer en franchise d'impôt une provision pour travaux de grosses réparations dès lors que les dépenses concernées excédent en importance les travaux d'entretien courant (CE, arrêt du 8 juillet 1987 n° 49 158, 9e et 8e s.-s.).

15Peut être constituée en franchise d'impôt une provision destinée à couvrir des travaux de réfection de surfaces importantes de toitures évalués selon des devis et décidés par tranches successives par le Conseil d'administration (CE, arrêt du 6 juillet 1990, n° 73 078, 9e et 8e s.-s.).

16Bien entendu, dans l'hypothèse où les dépenses exposées pour la réparation d'un bien acheté d'occasion sont la condition de la mise en état d'utilisation de ce bien et sont, pour ce motif, considérées comme un élément constitutif du coût de revient du bien réparé, elles ne sauraient justifier la constitution d'une provision.


  C. CAS PARTICULIERS



  I. Entreprises concessionnaires ou locataires


17  Les sociétés concessionnaires qui sont tenues, en vertu de leur cahier des charges, de restituer le matériel concédé en bon état à l'autorité concédante à l'expiration de la concession peuvent constituer, en franchise d'impôt, des provisions en vue de faire face ultérieurement aux frais de remise en état qu'elles auront à supporter de ce chef, dès l'instant où les dépenses dont il s'agit peuvent être regardées comme prévisibles à la clôture de l'exercice.

18  Il en est de même des entreprises qui ont pris en location des matériels et qui, suivant les stipulations du contrat passé avec le propriétaire de ces matériels, doivent les restituer en bon état à l'expiration de la location.

19  Il a été jugé qu'une entreprise concessionnaire ne peut constituer en franchise d'impôt des provisions pour grosses réparations et pour renouvellement du matériel dès lors qu'elle n'a établi au cours de l'exercice aucun plan de renouvellement du matériel et ne justifie pas avoir entrepris depuis les travaux de grosses réparations ou de renouvellement des installations. Par suite, les dépenses correspondant à de tels travaux ne pouvaient être regardées comme prévisibles à la clôture de l'exercice (CE, arrêt du 18 mai 1949, n° 77191, RO, p. 179).

Jugé également que la condition relative au caractère prévisible de la charge n'était pas remplie dans le cas d'une entreprise ayant fait subir diverses transformations à un immeuble dont elle était locataire et à qui son bail imposait l'obligation de rétablir, à sa sortie des lieux, les locaux dans l'état où ils se trouvaient au début de la location, dès l'instant qu'aucun fait précis ne permettait, à la clôture de l'exercice, de considérer comme probable la résiliation ou la non-reconduction du bail en cours (CE, arrêt du 22 octobre 1956, n°s 32617 et 33009, RO, p. 181).

20  Le montant de la provision doit être calculé de façon à répartir la charge sur toute la durée (ou, le cas échéant, sur la durée restant à courir) du contrat de location ou de concession.


  II. Reconstitution du sol des carrières épuisées


1. Frais de remise en état.

21Le Conseil d'État a admis qu'un contribuable, tenu, en exécution d'engagements contractuels, de remblayer une carrière en fin d'exploitation, puisse constituer à cet effet une provision en franchise d'impôt (CE, arrêt du 18 décembre 1974, n° 84875).

Toutefois une telle provision n'est admise en franchise d'impôt qu'à la condition que son montant soit calculé de manière aussi précise que possible. Tel n'est pas le cas d'une provision déterminée selon une évaluation globale sans tenir compte de la superficie et de la profondeur de chacune des parcelles exploitées (CE, arrêt du 18 novembre 1987, n° 72 127, 7e et 9e s.-s.).

22Par ailleurs, l'Administration a précisé (cf. ci-avant 4 E 1131, n° 5 ) que les dépenses rendues nécessaires par la réhabilitation des sites exploités revêtent la caractère de charges déductibles du résultat fiscal dès lors qu'elles ne confèrent pas aux terrains ainsi réhabilités une valeur supérieure à celle qui aurait été la leur si la carrière n'avait pas été ouverte.

Les dépenses ayant le caractère de charges peuvent faire l'objet d'une déduction anticipée sous la forme d'une provision en application de l'article 39-1-5° (1er al.) du CGI, lorsqu'elles apparaissent comme nettement précisées et rendues probables par des événements en cours.

Pour établir que la première des deux conditions est remplie, les exploitants doivent être en mesure d'évaluer les frais correspondant aux travaux de remise en état avec une approximation suffisante et avoir dressé un plan d'étalement si l'exécution de ces travaux doit être effectuée sur plus d'un exercice.

En ce qui concerne la condition touchant à la probabilité, cf. ci-avant 4 E 1131, n° 5 .

2. Carrière appartenant au patrimoine personnel de l'exploitant.

23Il a été jugé que, dans la situation d'un contribuable imposé sous le régime du bénéfice réel, qui exploite en carrière un terrain dont il est propriétaire et qu'il met à la disposition de son entreprise sans l'avoir inscrit à l'actif du bilan de cette dernière et sans avoir prévu de contrepartie sous forme de loyer ou de redevance, la charge correspondant à l'obligation pour l'entreprise de compenser la dépréciation, du fait de l'exploitation, du terrain appartenant au patrimoine personnel de l'exploitant, constitue une charge déductible par nature, justifiant, au regard de l'article 39-1-5° du CGI, la constitution de provisions proportionnelles à l'ampleur de la dépréciation subie du fait même des extractions pratiquées au cours de l'exercice (CE, arrêt du 21 novembre 1975, n° 91268, RJ II, p. 157).

 

1   La décision concernait une entreprise exerçant son activité en France et à Madagascar -considéré alors comme un territoire étranger du point de vue fiscal- et dont le bénéfice ainsi réalisé hors de France avait été regardé, en raison des modalités d'exploitation, comme réalisé en partie dans notre pays.